Profession Libertine

"Dialogues Interdits" : une série de mini-nouvelles sans narration, uniquement faite de dialogues. Confessions crues, drôles et surprenantes entre amis...

Profession libertine

— On me prend toujours pour une catin quand je dis que j’ai couché pour réussir…
— Peut-être que tu ne devrais pas le dire.
— Pas mon genre. Je n’ai rien à cacher.
— Tu devrais surtout expliquer ce que tu entends exactement par là. Expliquer que c’est sans rapport avec ce qu’on imagine… les gens peuvent pas deviner.
— C’est ce que je fais, qu’est-ce que tu crois ! Seulement, on est dans une société où on te juge à la première phrase, si ce n’est au premier mot, sans prendre le temps d’écouter la suite.
— Dès que la phrase est prononcée on ne te laisse pas continuer ?
— Des fois oui, des fois non. Ce qui ne change rien : même si on me laisse poursuivre, la personne ne parvient plus à écouter. Elle n’a plus qu’en tête « coucher pour réussir, coucher pour réussir ». Comme si ces mots hypnotisaient.
— On croit que tu t’es faite tirer par des patrons et gens d’influence pour être promue !
— Alors que ce n’est pas ça du tout… mais vraiment pas. Ce que je veux dire, c’est que le sexe m’apporte tant de bien-être qu’au lendemain d’un très, très bon coup et d’un orgasme fabuleux, je suis dans la disposition idéale pour prendre les bonnes décisions, bien travailler et créer des merveilles.
— Dis de cette façon je comprends parfaitement.
— Toi ce n’est pas pareil, on se connaît.
— Tu devrais ajouter que c’est donc bien ton talent qui t’a permis de te hisser.
— Bien sûr ! Mon talent lié au sexe. C’est à partir de là que les gens ne comprennent plus.
— Avoir de beaux orgasmes est aussi un talent.
— Un talent partagé alors, rien ne se fait sans la complicité et le tact de l’homme.
— À chaque fois que tu as pris une décision déterminante c’était lié à un orgasme ?
— Oui ! Le jour où j’ai proposé d’investir davantage au Danemark… celui où j’ai débloqué du capital pour le R&D… celui où j’ai fait l’entrée en bourse… Chacune de mes initiatives qui a fait grimper la boîte s’est lancée au lendemain d’une fantastique nuit de baise.

Voilà pourquoi j’ai couché pour réussir. Alors qu’en général, je n’ai pourtant couché qu’avec des stagiaires ! Que je pouvais éventuellement faire grimper, mais…
— Et qui te grimpaient, mais ne pouvaient pas te faire grimper toi…. Évidemment.
— Eux ont couché pour réussir… cette fois de la façon dont on l’entend couramment.
— Tu crois ?
— Je suppose. J’aimerais me dire que tout vient de mon charme ! Seulement je sais qu’on n’est pas au pays des Bisounours. Et qu’il pourrait y avoir d’autres raisons….
— Si c’est le cas, ils ont bien tort. Perso, me faire l’amour c’est gratuit et sans conséquence : je ne promeus jamais personne en fonction de cela. Dans ton cas remarque, vu qu’ils sont à l’origine de tes réussites ils le mériteraient bien.
— Je préfère qu’ils se hissent par leurs propres initiatives.
— Eh ! Justement c’est le cas !
— Leurs propres initiatives professionnelles, je veux dire. Si on drague au boulot et qu’on couche avec une collègue, une stagiaire ou une patronne, du moment que c’est juste pour le plaisir, pas de souci. Si c’est pour monter en grade, là non !
— Est-ce qu’ils te draguent moins depuis qu’ils ont remarqué que le gain professionnel était nul ?
— Non. Je crois que la patronne reste le fantasme absolu pour le stagiaire, avec ou sans promotion.
— En fait, tu devrais trouver une autre formule que « j’ai couché pour réussir ». Plutôt… je ne sais pas moi… « mes orgasmes m’ont donné des idées gagnantes ».
— On dirait presque un titre de livre !
— Franchement, il y a de quoi lancer une méthode tellement c’est efficace.

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