Grands Moments De Solitude (8)
Ana, la cousine de Chloé, nous a accueillis à bras ouverts.
Ça mettra un peu danimation dans la maison. Et ça me changera les idées.
Son mari lavait quittée.
Ça fait pas loin dun an. Mais jarrive toujours pas à men remettre. Je suis conne, hein ?
Chloé sest inquiétée.
Cest pas à cause de la nuit où on nous avait piqué nos vêtements au moins ? (*)
Oh, non ! Non ! Il en a jamais rien su. Non, cest le cas de figure classique. Il en a rencontré une autre. Qui a su y faire. Bon, mais allez ! On nen parle plus. On parle dautre chose.
On a effectivement parlé dautre chose. Sur la terrasse, au soleil. On a raconté à Ana notre semaine tous ensemble. Elle a évoqué, avec Chloé, toutes sortes de souvenirs quelles avaient en commun. On a eu, à plusieurs reprises, dinterminables fous rires. Et puis, la nuit à peine tombée, Julien a suggéré
Et si vous nous emmeniez voir à quoi elle ressemble, cette plage mythique ?
Aussitôt, aussitôt fait. On y est descendus.
Cétait là.
Un peu à lécart. Dans la semi-obscurité des lampadaires de lavenue, éloignés dune bonne centaine de mètres. Au moins. Des conditions idéales pour subtiliser des vêtements.
Surtout quand on se méfie pas.
Des gens sont passés. Dautres.
Parce quil est tôt. Mais dans deux heures, trois maximum, il y aura plus personne
On a refait avec elles le chemin quelles avaient emprunté alors, dans le plus simple appareil, pour rentrer.
Cétait là, lépicier qui déchargeait sa camionnette.
Ce détour que ça nous avait obligées à faire, nempêche ! De près de deux cents mètres ça nous avait rallongées.
Et on la refait avec elles, ce détour.
Et là, tenez, regardez, cest la porte cochère sous laquelle on a attendu que le vieux ait fini de faire pisser son chien.
Et ça durait. Ça durait ! À croire quil le faisait exprès !
Un peu plus loin il y avait eu les fêtards ! Non, mais ces poussées dadrénaline que ça lui avait envoyées à Chloé !
Ana la attrapée par le cou.
Ce que tas pas trouvé si désagréable que ça au fond, non ?
Elles se sont murmuré quelque chose à loreille. Et elles ont ri.
La soirée était dune exceptionnelle douceur et on la indéfiniment prolongée, sur la terrasse. Jusquà ce que Chloé nous fasse signe, à Pauline et à moi, nous entraîne à lécart.
Ils se plaisent bien, Ana et Julien. On les laisse un peu ? On va faire un tour ?
Pauline nétait pas trop chaude.
On risque de rater quelque chose dintéressant.
Qui naura probablement pas lieu si on reste là. Elle est pas aussi libérée que nous, Ana.
Et on a tout naturellement repris, toutes les trois, la direction de la plage.
Pauline a proposé.
On se baigne ?
Allez !
Mais reste là à surveiller les vêtements, Chloé, si tu préfères.
Oh, non ! Non ! Je viens avec vous. Faut pas être parano non plus ! Ça va pas être à chaque fois
Et puis nimporte comment
Nimporte comment ?
Non. Rien.
Et on est entrées dans leau. En jetant, au début, de temps à autre un petit coup dil sur nos vêtements. Au début ! Parce quon a fini par ny plus penser, tout occupées quon était à nager et à faire les folles. Tant et si bien que, quand on sest enfin décidées à sortir
Non, mais cest pas vrai ! Me dites pas que ça a recommencé !
Eh bien si, si ! Nos vêtements avaient disparu.
On sest concertées un petit moment. Pas bien longtemps. La seule solution
On la connaissait, la solution. Il y en avait pas trente six mille.
Allez !
Et on sest bravement engagées sur le chemin du retour.
La situation mettait Pauline dans tous ses états.
Comment cest trop, finalement ! Même si ça fout quand même un peu les boules. De pas savoir. De se demander. De se dire quà tout moment
Vous trouvez pas, vous ?
Elle aussi, elle trouvait ça grisant, Chloé, de jouer avec le feu.
À condition de pas se brûler.
Oh, mais il y a personne.
Pour le moment
Il ny avait effectivement pas âme qui vive par les rues. La plupart des fenêtres étaient éteintes, mais déventuels observateurs insomniaques pouvaient être postés derrière lune ou lautre dentre elles et cette perspective me troublait. Énormément. Comme me troublait lidée de déambuler nue là où, quelques heures auparavant, se pressait une foule nombreuse. Et, du coup, cétait de plus en plus humide entre mes cuisses.
Attention ! Une voiture !
On sest réfugiées contre la vitrine dun magasin. On sest dissimulées, tant bien que mal, de nos bras ramenés précipitamment sur nos seins, de nos mains plaquées contre nos chattes. Les phares nous ont aveuglées, projetées en pleine lumière. Ça a ralenti à notre hauteur. Cest reparti. Ça sest éloigné.
On la échappé belle !
Ils étaient deux, on aurait dit
Qui ont bien dû se régaler en tout cas !
On sest remises en marche. À peine le temps de faire cinquante mètres et on la à nouveau entendue, la voiture. Derrière nous. Elle a remonté la rue en trombe. On sest jetées en catastrophe sur le trottoir. Elle a pilé à nos côtés. La glace sest baissée.
Cétait Julien et Ana.
Ce que vous pouvez être cons, tous les deux !
Oh, vous croyez ?
Non ! On est sûres.
On vous ramène ?
On sest consultées toutes les trois du regard.
Non, merci. Ça ira. On préfère marcher.
Cest vous qui voyez ! Vos vêtements sont sur le siège arrière. Si vous voulez les récupérer
Pas la peine, non ! Il fait bon. On na pas froid.
Ben, à tout-à-lheure alors !
Cest ça ! À tout-à-lheure.
La voiture a hésité. Sest éloignée. On a éclaté de rire. Le plus silencieusement possible.
Cest pas à ça quils sattendaient.
Non, mais on nallait quand même pas leur laisser le dernier mot !
Il nous le paiera, Julien. Il perd rien pour attendre, alors là !
On a poursuivi notre chemin, bifurqué à droite.
Oh, putain ! Vise-moi ça ! Elles sont à poil, les filles.
Den-dessous ça venait. En espagnol. Dun soupirail. Le boulanger, sans doute, en plein travail avec ses commis. Il y a eu des rires. Des sifflets. On a pressé le pas. Tourné à gauche. Et on sest trouvées nez à nez avec un vieux monsieur qui nous a considérées, des pieds à la tête, dun air éberlué et qui sest enfui à toutes jambes. Dans le bas de la rue quhabitait Ana, une femme est sortie sur le pas de sa porte, a donné quelques coups de balai sur le trottoir, a levé les yeux vers nous, fait mine de ne pas nous avoir vues. À lhorizon, le jour commençait à poindre. Il était plus que temps darriver.
De la terrasse, on les entendait. Ou, plutôt, on lentendait, elle. Elle gémissait et feulait tout ce quelle savait.
Non, mais écoutez-moi ça ! Ça les a mis en appétit, on dirait, leur petite plaisanterie.
On est entrées. Et Chloé a, dautorité, allumé le plafonnier.
À chacun son tour dêtre en pleine lumière
Ils ne se sont pas interrompus pour autant. Ana était nouée autour de Julien. Des jambes et des bras, la tête renversée en arrière. On les a regardés se ruer à qui mieux mieux lun contre lautre. Le ryrhme sest accéléré. Éperdu. Effréné. Et elle a joui. À longues plaintes rauques furieusement déployées.
Chloé a constaté.
Eh ben, dis donc, faut pas ten promettre à toi !
On sest assises. Ils se sont lentement dénoués. Ana sest ébrouée.
Hou là là ! Comment ça fait du bien !
Julien sest redressé.
Et vous ? Comment ça sest passé, vous ?
Cest Pauline qui a répondu.
Nous ? On a croisé la route dune troupe de militaires en exercice. Une quarantaine, ils étaient. Qui nous sont tous passés dessus, les uns après les autres. Cétait génial !
Non.
Sérieux ? On est tombés sur deux enfoirés. Qui nous ont piqué nos vêtements. Et qui nous ont pourchassées pleins phares. En faisant un raffût de tous les diables. Histoire dameuter les populations. Ah, il devait y en avoir du monde discrètement aux fenêtres ! Sinon, ben à part ça, il y a eu un boulanger avec ses commis. Ils ont apparemment beaucoup apprécié. Un petit vieux quon a traumatisé. Et une bonne femme qua fait semblant de rien voir, mais quen na pas perdu une miette.
Jai murmuré
Ce que je me demande, moi, cest combien il y en a qui nous ont vues au final.
Elle sest penchée vers moi.
Ah, ça te plaît, ça, hein, comme idée quil y en ait eu plein.
Elle ma attirée contre elle. A passé ses mains entre mes cuisses.
Et pas quun peu, dis donc !
Pauline
Chut ! Dis rien ! Laisse-moi faire
Elle ma écartée. Feuilletée. À petits bouts de pouce très doux. Je me suis blottie contre son épaule. Elle a cherché mes lèvres. On sest passionnément embrassées. Elle est descendue. Ma fait dresser, au passage, la pointe des seins. À petits coups de langue impatients. Est encore descendue. A enfoui sa tête entre mes jambes. Dans mes replis secrets. Ma dégustée. Savourée. Experte. Si savante. Mon plaisir ma submergée. Je lai hurlé.
Quand je suis enfin revenue à moi, Chloé, son gode préféré entre les cuisses, ne quittait pas des yeux Ana et Julien qui sétaient lancés, une nouvelle fois, dans une chevauchée à perdre haleine.
(*) voir le chapitre un.
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