Lucille (Suite 4)
Lucille avait salué la jeune dame de la réception, puis gagné son bureau. Christophe, son tout jeune collègue, était déjà présent ce matin-là.
-Lucille, je ne sais pas de quoi tu es coupable, mais lAdministrateur a déjà téléphoné et il a demandé que tu le rappelle dès ton arrivée ! Ça pue cette « convoque » de grand matin, tu ne trouves pas ?
Lucille ne répondit pas. LAdministrateur était un personnage austère et autoritaire. Agé dune cinquantaine dannée, il était toujours habillé avec soin. Mais le raffinement de ses manières ne lempêchait nullement de faire régner dans la société une discipline particulièrement rigide. Lucille naimait pas du tout cet homme dur et froid. Et il lui semblait quen retour, lAdministrateur ne lui témoignait, au mieux, quun froid dédain.
Sans hâte, elle décrocha le combiné du téléphone. Christophe la contemplait, anxieux.
-Allo ? Monsieur Stranheim ? Cétait la secrétaire. Vous pouvez me passer Monsieur Stranheim, sil vous plaît ?
un petit silence, puis
Monsieur Stranheim, bonjour, vous avez demandé que je vous appelle ?
Bien, jarrive, Monsieur !
Lucille sortit en faisant la moue à lendroit de Christophe.
- Christophe, je suis convoquée chez lAdministrateur en personne, tu te rends compte !
-Bonne chance !
Lucille sortit. Elle gagna le bureau de lAdministrateur situé à lautre extrémité du plateau, à létage supérieur. Elle frappa. La lumière verte salluma aussitôt. Lucille entra.
Lucille ne craignait pas lAdministrateur. Lautoritarisme de ce dernier ne la dérangeait nullement. Elle nen souffrait guère.
-Bonjour Monsieur, fit-elle avec un petit sourire poli.
-Bonjour, Lucille. Assied-toi. Nous avons à parler. Sa mine nétait pas plus sévère que dhabitude, observa Lucille. Elle prit place dans le fauteuil en face du bureau.
Comme à son habitude, lAdministrateur regarda son interlocutrice droit dans les yeux.
-Lucille, jai une affaire étrange sur les bras. Connais-tu un certain Christian Latour ?
Lucille rougit malgré elle. Elle ne sattendait pas à cette question. Elle marqua une seconde dhésitation avant de répondre.
-Oui, en effet, cest le nouvel employeur de mon mari.
Il y eut encore un petit silence.
-Ah, je vois, fit enfin lAdministrateur. Je suis sûr que tu te demandes pourquoi je tai posé cette question ?
Depuis la fameuse soirée, Christian lui téléphonait tous les jours. Parfois même, plusieurs fois par jour. Des conversations très amoureuses. De plus en plus amoureuses. Lucille avait-elle été indiscrètement écoutée ? LAdministrateur allait-il lui parler de ces communications « très privées » ?
-Cest que jai eu ce Christian Latour, hier, au téléphone, continua lAdministrateur. Il semblait ne pas avoir remarqué le trouble qui sétait emparé de Lucille, depuis lévocation de ce personnage. Il poursuivit donc : - Je connais très bien la famille, mais je fus très surpris de la teneur de la communication. Il ne voulait rien de moins que nous passer dimportantes commandes pour létranger. De surcroît, il avait lintention de racheter des parts dans notre société.
Lucille se demandait où lAdministrateur voulait en venir et pourquoi lui parlait-il de tout ça, à elle ?
Comme sil avait entendu la question, lAdministrateur poursuivit :
-Il a particulièrement insisté, pour ne pas dire plus, pour que tu sois son interlocuteur privilégié au sein de notre société. Jétais surpris, je dois bien lavouer. Je ne tavais jamais vue tenant un rôle commercial. Mais il y tient absolument. Jespère que tu ne vois pas dinconvénient à tenir ce nouveau rôle. Un peu à limproviste, je le reconnais. Quen penses-tu ?
Lucille avait du mal à rester concentrée. Elle ne pensait plus quà cet homme. Il occupait toutes ses pensées depuis la fameuse soirée. Elle lui appartenait tout entière déjà, depuis lors. Elle lui avait même avoué, abandonnant toute sa pudeur habituelle.
-Je suis à votre service, Monsieur.
-Bien, Lucille. Je prends rendez-vous avec lui. Nous irons déjeuner ensemble. Il semble particulièrement impatient. Lucille nen revenait pas. Le sévère Administrateur allait la conduire à son bourreau. La Vertu livrait la Victime au Vice irrésistible et à tous ses caprices.
Elle sentit alors monter en elle une émotion confuse, trouble, prenante de plus en plus.
Une émotion équivoque surtout.
Elle pensait à cet étranger qui lavait embrassée, lautre soir
Et comme elle avait changé depuis lors
Cétait beaucoup pour Lucille. Que lui arrivait-il donc là ? La tornade de LAmour apparue soudain avec passion, lautre soir, dans sa vie lui revenait à lesprit avec obsession. Elle nosait se lavouer, mais elle narrivait pas à écarter lopportunité de le rencontrer à nouveau. Et le vaincre
ou sabandonner à lui. Elle en était sûre. Il était le Diable. Et son âme à elle arrivait au point de fusion. Une fusion torride et sans retour. Elle lui appartenait déjà.
Lucille écoutait à peine. Un torrent de sentiments multiples la traversait. Elle regardait lAdministrateur presque sans vraiment lécouter. Elle éprouvait du mal à suivre lentretien. Elle se remit vite du choc. Elle voulait se montrer à la hauteur. La préparation de cette réunion la mit en transe. Elle était primordiale, mais pour quantité de raisons différentes. Et dont plusieurs faisaient en ce moment même, chavirer le cur de Lucille. Là-bas, au rendez-vous, se trouverait lHomme, le Chasseur et elle, Lucille, la Victime, ô combien consentante, ira volontairement se faire immoler et subir un sort quelle appelait de toutes ses forces. Le sacrifice de son âme sur lautel de lAmour et du Désir. En compagnie du Grand-Prêtre, lAdministrateur auquel elle était dévouée et à qui elle vouait maintenant une admiration sans borne.
-La partie que nous allons jouer avec Christian Latour sera serrée et lenjeu quelle constitue pour notre société, capital !
Sa voix avait pris un ton bizarre, absent. Lucille le regarda furtivement de côté. Le trouble de la jeune grandit de plusieurs crans.
Elle en ressentait une violente excitation. La sage petite Lucille, timide et embarrassée, était bien loin. Elle ne pouvait plus sempêcher de séduire. Et elle était prête à assumer. Christian Latour la rendait folle, littéralement. Sur la route qui les conduisait vers le rendez-vous infernal, Lucille voyait à peine les maisons en bord de route. Elle ne pensait quà lui et à la menace de cyclone sentimental qui allait sans nul doute la submerger.
-La partie que nous allons jouer avec Christian Latour sera serrée et lenjeu quelle constitue pour notre société, capital !
Sa voix avait pris un ton bizarre, absent. Lucille le regarda furtivement de côté. Le trouble de la jeune grandit de plusieurs crans. Il lorgnait régulièrement, et sans aucun scrupule apparent, vers les jambes de Lucille. Cette dernière se serait rebiffée il ny a guère. Mais maintenant au contraire, elle saffichait. Si elle avait découvert cette attirance imparable et violente quelle exerçait sur les hommes, elle-même ne pouvait sempêcher de se soumettre servilement et totalement à lexercice de la séduction. Son mari avait tenu à ce quelle porte cette jupe ultra-courte. Il ignorait bien sûr quelle effecait ce trajet dans la Porsche de lAdministrateur. Et que, comme passagère, elle allait donc arborer ses jolies jambes à peu près jusquau haut des cuisses. Ainsi donc, lAdministrateur était un homme comme les autres. Aujourdhui, il débordait daffection et de tendresse à légard de Lucille. Et elle, elle en ressentait une violente excitation.
- Ton mari te doit une fière chandelle, mon cur !
- Pourquoi ? demanda ingénument Lucille.
- Et bien, jimagine quaprès tavoir
disons, vue comme il ta vue, Christian sest certainement senti obligé dengager ton mari, mon cur
Secrètement flattée par cette remarque flatteuse, Lucille se força à protester.
- Pas du tout, il a été engagé sur son seul mérite !
- Ton mari a beaucoup de mérite, je nen doute pas, mais franchement qui pourrait résister à ton charme, ne fut-ce quun instant, mon petit lapin ?
Joignant le geste à la parole, il posa la main sur le genou de Lucille. Il y a peu de temps encore, elle en aurait sans doute suffoqué. Elle posa la main sur celle de lAdministrateur, comme pour la retirer. Mais sa main ne fit aucun mouvement. Elle resta posée sur celle de lAdministrateur. Sans bouger.
- Tu oserais prétendre que ton charme a laissé Christian indifférent ?
Lucille pressa très légèrement la main de lAdministrateur. « Il est séduisant et je ne suis pas sûre quil puisse sintéresser à une petite bourgeoise mère de famille comme moi ! »
- Et de très bonne réputation, de surcroît ! renchérit lAdministrateur.
Il ajouta, intéressé
- Tu ne tromperais pas ton mari avec cet homme, nest-ce pas ?
Le ton était très naturel, complice et enjôleur. Lucille eut envie de se confier. Pour des raisons troubles, confuses, qui la dépassaient. Elle ressentit comme un feu naître en elle, contre lequel elle ne pouvait lutter. Elle répondit. Secrètement heureuse de lindiscrétion de la question.
- Si !
Elle avait violemment rougi.
- Cest vrai ? Toi, tu tromperais ton mari ?
- Oui.
La main de lAdministrateur caressa plus tendrement encore la cuisse de Lucille. Sa mini-jupe était maintenant relevée jusque tout en haut des cuisses. Lucille ne fit pas un geste pour la baisser.
- Peut-être as-tu déjà
fait lamour avec cet homme ? fit-il en riant.
Lucille aurait dû être choquée par la question, si brutalement posée. Elle ne le fut pas. Au contraire, elle se sentit très excitée par lindiscrétion de son interlocuteur.
- Non ! répondit-elle, toute rouge. Une bouffée de chaleur lenvahit.
- Ah ! Vous vous êtes rencontrés souvent ?
- Une seule fois.
- Cétait quand ?
- Et bien, cétait à cette fameuse soirée. Quand mon mari a été engagé.
- Vous ne vous êtes plus revus depuis lors ?
- Non.
La main de lAdministrateur caressait le haut de la cuisse de Lucille, à lintérieur.
- Comment sest passée votre première rencontre ?
- Nous avons beaucoup dansé ensemble. Je le trouvais très beau.
- Cest tout ?
- Non. Il a commencé à me draguer. A membrasser aussi. Jétais folle de lui. Nous avons flirté le reste de la soirée. Vous êtes jaloux ?
- Bien sûr, mon cur, comme pour tout ce que tu peux offrir à quelquun dautre, y compris ton mari. Mais je dois bien my faire. Mais, dis-moi, cétait comment ?
- Cétait délicieux, vilain indiscret !
- Les gens vous ont vus ?
- Je ne sais pas. Peut-être que oui, mais cela métais égal. Je navais peur que dune seule chose : que ce merveilleux moment cesse.
- Tu ne crains pas les racontars ?
- Non, ce qui sest passé à ce moment-là était plus important que tout ce qui se passait sur le reste de la planète.
- Je vois. Donc, maintenant, tu accepterais de coucher avec lui et cela test égal que les gens le sachent ?
- Oui, si ça lui est égal à lui aussi.
Il y eut un petit silence.
Puis, ce fut plus fort quelle, Lucille ne put sempêcher dajouter : « En fait, il peut maintenant faire de moi ce quil veut ! »
Lucille était possédée par un sentiment impulsif si puissant irrationnel quelle en devenait son esclave. Il y eut encore un petit silence. Puis, lAdministrateur se remit à poser ses questions. Lucille était troublée, mais ne semblait pas vouloir se soustraire à cette confession toujours plus impudique et à cette curiosité de plus en plus équivoque sur sa vie intime. Faisait-elle souvent lamour avec son mari ? La faisait-il jouir ? Avait-il des phantasmes particuliers ? Et elle ? Avait-elle parfois envie de « fantaisies » quand elle faisait lamour avec son mari? Lucille ressentait un plaisir trouble et exaltant en se confiant ainsi à lAdministrateur, si sévère, si impressionnant jusque là. Mais ce qui la rendait vraiment folle, cétait de le sentir de plus en plus troublé, lui aussi. Inquisiteur mystérieux et dominateur. Pervers prédateur prêt au passage à lacte. Elle se sentait soumise. Prête à faire toutes les avances. Aspirée par un tyrannique désir. Elle répondit dun air faussement ingénu, mais dune voix un peu rauque, à toutes les questions, sans en éluder une seule. Elle dévoila sans aucune retenue tous les détails qui semblaient particulièrement intéresser son confesseur. Ce dernier saccordait, pendant ces révélations, la licence de lui caresser la cuisse, tout en conduisant. Docilement, Lucille écarta les jambes, abandonnant toute défense à son conquérant. Le Maître du moment posa la main sur lentrejambe de la jeune femme émue. Des doigts habiles frôlèrent savamment le fin tissu soyeux du minuscule sous-vêtement. Des doigts qui commencèrent à tâter les renflements des chairs de Lucille au travers du tissu.
La Porsche descendait vers le Lac, en traversant de très larges avenues bordées de propriétés immenses. Au milieu de certaines dentre elles, Lucille apercevait, de temps à autre, quand elles étaient visibles de la route, des villas somptueuses flanquées de piscines immenses. Certaines ressemblaient à des châteaux quon imaginait dans les contes de fée.
Ce luxueux spectacle acheva de plonger Lucille dans un abîme de ravissement.
La voiture ralentit. On arrivait. Lucille reconnut lendroit. Cétait, au fond dun grand parc, face au lac et à une splendide vue panoramique, le château où elle sétait serrée dans les bras de lHomme au charme ravageur. Elle sourit. Est-ce Lui qui avait pensé à organiser cette nouvelle rencontre sur le lieu de leurs premiers baisers enflammés ?
Soudain, sur le parking, elle reconnut la voiture de son mari.
Loin de salarmer, ce fut pour Lucille lannonce dun moment de plénitude amoureuse. Laccomplissement de phantasmes surgis des profondeurs du Désir.
LAdministrateur et Lucille restèrent quelque temps dans la voiture. Ils contemplaient le château.
Elle se laissa encore embrasser, puis elle referma les boutons du dessous de son chemisier et ils sortirent de la voiture.
Lucille et lAdministrateur entrèrent dans la salle. Il ny avait que du beau monde. LAdministrateur tenait Lucille enlacée amoureusement par la taille. Lucille était triomphante. Avançant avec un déhanchement extraordinairement sexy, elle feignit ne pas remarquer les regards, surtout des hommes, dans sa direction. Elle et lAdministrateur se dirigèrent vers la table, installée dans une discrète alcôve, et où trônaient le séduisant Christian Latour et à ses côtés, Marc, le mari de Lucille. Nullement embarrassée de marcher ainsi tenue par la taille par son patron, Lucille sourit malicieusement.
Elle regarda tour à tour son mari et Christian.
Et lexpression de leurs yeux enchanta Lucille. Ils étaient excités, chacun à leur manière. Lun, complice et lautre, conquérant. Elle ne pensa donc plus quà les satisfaire, ces jeunes mâles excités. Au besoin en les domptant dabord, pour mieux exacerber hors de toute limite leurs irrépressibles instincts ensuite. Elle assumerait tout.
Lucille sapprocha dabord de son mari. Elle posa un bras sur les épaules de son mari et se pencha pour lembrasser. Se penchant, son chemisier ouvert offrit un délicieux spectacle.
- Cochon ! dit-elle à voix basse à son mari, mais suffisamment haut pour être entendue par les deux autres mâles.
- Et moi ? dit le beau Christian.
- Dîtes, vous nêtes pas mon mari ! répondit Lucille, jouant la comédie.
Elle fit le tour de la table et, avec une nonchalance diaboliquement calculée, elle offrit au Séducteur le même spectacle affriolant quà son mari. Embrassant lentement le beau Christian sur la joue, Lucille prit le temps de regarder son mari dans les yeux. Elle put facilement y lire une entière approbation, sinon un encouragement impérieux. Elle garda donc la pose.
- Vous êtes content ?
Il se contenta de lui saisir le bras et de le passer autour du cou, comme elle lavait fait pour son mari. La maintenant fermement, il lembrassa à différentes reprises sur la joue, tout en jouissant du spectacle de la poitrine idéalement galbée de Lucille. Elle fit un peu semblant de se débattre.
- Vous me lâchez ? supplia-t-elle sans conviction.
- Non, fit-il, inflexible, parce que je veux dabord un petit gage
- Quel gage ? souffla-t-elle.
- Un petit bisou sur la bouche, ma beauté, répondit-il, dune voix mielleuse.
Il la maintenait toujours fermement. Mais en faisant semblant de se débattre, sa mini-jupe remontait et elle offrait à lAdministrateur, de lautre côté de la table, le spectacle de ses cuisses bien fermes et de ses fesses rebondies quelle balançait dune manière fort suggestive.
- Allons, mon trésor, insista dune voix toute douce, Marc, son mari, sois gentille et embrasse-le comme il te demande, ce nest pas grave, mon petit trésor.
Lucille embrassa Christian dun rapide baiser sur la bouche.
-Non, mon trésor en sucre, fit alors son mari dune voix plus ferme, pas comme ça. Sois plus gentille, plus compréhensive, plus tendre
Comme tu sais lêtre !
-Vous êtes des vicieux
dit-elle sasseyant sur les genoux du divin Christian. Et, lui passant les bras autour du cou, elle lembrassa à pleine bouche, enfournant sa langue avec fougue dans la bouche du Séducteur.
-Bon, maintenant, jai faim, mes petits loups
dit-elle en se dégageant vivement des bras de son Tourmenteur.
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