Nu Trop Loin 8/17
Je suis devenu sa chose
Il me fixe, lui retourné totalement comme sil se dévissait la tête, moi avachi comme une serpillière à larrière, groggy par lémotion qui ma submergé et que je nai pas su gérer. Il ne dit rien et reste longtemps à mobserver comme sil fomentait encore un trip à venir, comme sil profitait de la loque que jétais devenu.
- Descend !
Il a jeté cet ordre très calmement mais avec une détermination suprême. Il sort de sa bagnole et vient ouvrir la porte à mon niveau. Il va au coffre et louvre pour revenir vers moi. Il mextirpe avec force et me voilà à nouveau dehors. Je me retrouve devant lantre faiblement éclairé et je comprends que je dois y monter. Une jambe et puis lautre, je bascule dans lespace réduit et cherche une position convenable. Il appuie sur ma tête, sur mes fesses. « écrase-toi plus ». Il commence à fermer le coffre mais rencontre une résistance à cause des fesses. « Retourne-toi » mais ce coup-ci ce sont les genoux qui bloquent. « écarte tes genoux bordel ». Il ferme le coffre. Obscurité.
La voiture démarre. Il y a des objets dans le coffre, des boites, des chiffons, des outils, une bouteille deau. Ils me gênent pour trouver une position acceptable. Nuit total dans ce réduit inconfortable. Les virages sont pénibles ; je dois changer souvent de positions car aucune nest vraiment suffisamment reposante. Jessaye de me retourner et de bouger les objets mais ils reviennent toujours au même endroit en me cognant dans les virages. Je perds les repères de lespace à force de tremblements du véhicule, dobscurité étanche et de positions pénibles. Des nausées ne tardent pas à menvahir.
Combien de temps va-t-on rouler ? Comme je suis concentré sur la pénibilité de chaque moment jen perds pratiquement la notion du temps. Pourtant il est long, très long. Pour réprimer les nausées jessaye de me coucher le plus possible mais cest encore pire, jessaye de me mettre à genoux mais cest encore plus pénible, jessaye de me mettre sur le côté mais cest encore plus désagréable.
Il met de la musique. Il y a une enceinte pas loin de ma tête. Ça hurle de la techno. Je lentends rire très franchement, il essaye de suivre lair du morceau en chantant à tue-tête. Lair du coffre devient froid.
La voiture ralentit. Des rais de lumières traversent lespace clos du coffre. Plusieurs ronds-points très pénibles. Des manuvres. Je suis totalement nauséeux et de la salive me vient à la bouche, je pleure de malaise, mon nez rejette de la morve. Je me sens comme un gosse malade en voiture. On sarrête.
Il descend et vient ouvrir le capot du coffre. Lair froid pénètre immédiatement, presque plus vite que la lueur blafarde de la loupiotte du coffre ne remplit à nouveau le volume où jai fini par me lover. Il écarte mes jambes pour atteindre le pénis qui désormais est le sien mais que je continue à porter sur moi.
- Lui : tes mou mec !
- Moi :
..
- Touche-toi pour le réveiller !
- Moi :
ça va pas
suis pas bien
- Quest-ce que tas connard ?
- Vais gerber
- Sors de là immédiatement !
Je mextrais du réduit et chancelle une fois les pieds à terre.
- Lui : On va lui faire prendre lair à ce connard !
.. Redresse-toi bordel !
On est sur un parking dans une zone commerciale. Je suis nu à côté de sa voiture, debout en train de reprendre mes esprits. Cest le parking dun hypermarché, un espace immense au bord duquel il sest garé près de buissons. Il y a plein de papiers par terre, des cannettes vides, des sacs plastiques ; je vois un préservatif usagé non loin de moi. De grands sémaphores éclairent mal la zone où lon se tient
. De vieux caddys sont entassés au milieu de buissons et constituent une forme inquiétante, brillante et lacérée.
- Moi : taurais pas de mouchoir en papier sil te plait ?
- Lui : eh mecton, tu me prends pour le Père Noël ?
. Tu vas sécher tout seul
.
Il se marre
- Tu vas marcher jusque là-bas, ça te fera du bien et, tiens, tu reviendras en courant !
. Et tu ne reviens que quand tu rebanderas, là tu ne mintéresses pas mec !
- Il montre un endroit au milieu du parking à côté dun rangement de caddies
- Là ? de suite ?
- Dépêche-toi !
.. DEPECHE-TOI !
Je commence à marcher et le quitte pour me diriger vers le point indiqué. Plus javance et plus lespace se découvre et sélargit. Il devient totalement découvert et ouvert, lhorizon recule au fur et à mesure que mes pas me rapprochent des caddys visés. Mon ombre se découpe sur le sol car je déambule sous les grands éclairages du parking. Tout est calme
. Il reste quelques voitures stationnées ici et là. Je me retourne et le vois appuyé contre sa bagnole en train de cloper et il me regarde avancer lentement.
Cest une sensation de plénitude mêlée dinquiétude qui désormais me saisit. La nausée passant (il avait eu raison de me faire marcher), je retrouvais la volonté de lui plaire coûte que coûte et je pouvais reconnecter tous les fils du désir qui mavait amené jusquà cette minute et à cet endroit. Son désir méprisant et omnipotent, le mien de lui donner ce quil méritait, tant sa science du regard et de la déchéance était grande. Je commençais à ressentir de ladmiration pour lui, une sorte de vénération sacrée
.. il avait su me mener là où personne ne mavait encore mené et là où je nimaginais pas pouvoir aller. Plus je marchais et plus mon désir de correspondre à ce quil voulait voir me motivait et je renouais avec tous les épisodes vécus depuis notre rencontre qui datait de quelques heures à peine. Je reliais tous les fils qui se tissaient depuis quil mavait fait descendre le short et quil avait observé la relique vivante et tiède entre mes jambes.
Quelle heure pouvait-il bien être ? Je me souvins que le rendez-vous sur le parking de lautoroute avait eu lieu vers 21h30
. Ce moment me paraissait déjà très lointain à tel point que certains épisodes des journées précédentes me revenaient à lesprit avec limpression quils étaient plus récents que le début de ma relation desclavage avec ce mec qui me regardait toujours marché selon ses vux. Ma vie depuis quelques heures était devenue plus pleine, plus dense, plus riche que la vie courante. Le temps avait gagné en intensité
je navais quà suivre celui qui samusait de moi
Enfin, jarrivais aux caddies et je me souvins que javais pour mission de ranimer lardeur du flambeau.
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