Histoire Des Libertines (56) : Karen Blixen, La Flamboyante

Dans cette rubrique sur l’histoire des grandes libertines, nous avons donné beaucoup de place aux femmes de pouvoir. Nous avons eu l’occasion de constater que les femmes de lettres, surtout depuis la Révolution française, ont-elles aussi connue de nombreuses libertines. J’ai eu l’occasion d’évoquer successivement Germaine de Staël, George Sand, Colette, Renée Vivien.

Karen Blixen (1885-1962) méritait de figurer dans cette série de textes, même si celle qui inspira le film « Out of Africa » ne fut pas une « vraie » libertine, mais plutôt une femme libre.

La baronne Karen von Blixen-Finecke, née Karen Christentze Dinesen est une femme de lettres danoise. Elle est célèbre pour avoir écrit « La Ferme africaine » dont est tiré le film Out of Africa. Elle a également publié sous les noms de plume Osceola et Pierre Andrézel.

Elle perd son père à 9 ans. Elle fait ses études à l'Académie royale des beaux-arts du Danemark de Copenhague, puis des études d'art à Paris et à Rome. Riche, elle rejette le mode de vie bourgeois et se tourne vers la peinture et l'écriture.

PASSION DE L’AFRIQUE

En 1909, elle éprouve une grande passion non partagée pour son cousin germain, Hans von Blixen-Finecke, suivie d'une longue période de désespoir.

Faute d’un mariage d’amour, elle fera un mariage de raison.

En décembre 1912, elle se fiance avec le Bror, le frère jumeau de son ancien amour. L'année suivante, les fiancés projettent l'achat d’une plantation de café au Kénya, qu'ils réalisent grâce à un important investissement financier de la famille de Karen. Bror Blixen est nommé directeur des Cafés Karen, choix qui se révèle malheureux, en raison de ses faibles talents pour la gestion et l'agriculture. Le 14 janvier 1914, Karen Blixen débarque à Mombasa et se marie le jour même avec Bror. Peu après son mariage, elle apprend que son mari lui a transmis la syphilis !

En raison de la difficulté d'un traitement sur place, Karen Blixen repart se faire soigner au Danemark en 1915.

Son frère et confident, Thomas Dinesen, la rejoint pour l'aider à la plantation de 1918 à 1923.

Le couple est mal assorti. Karen est élégante et cultivée, Bror est sanguin et inculte. Les deux époux s'éloignent de plus en plus, notamment en raison de la gestion calamiteuse de Bror, et de ses infidélités (d'ailleurs tolérées). Ils divorcent en 1925, mais restent en bons termes.

GRAND AMOUR ET L’ECHEC

Dans son malheur, Karen a au moins une chance : celle d’avoir droit une sexualité tout à fait normale. Les risques de contagion ont été enrayés. Son avenir sentimental n’est pas terminé. Encore l’espoir de tomber amoureuse. Le 5 avril 1918, Karen fait la connaissance de celui qui va changer sa vie. C’est son mari qui lui présente l'aventurier Denys Finch Hatton (1887-1931), pilote de l'armée de l'air britannique et guide de safari. Il s’installe à la ferme et devient le grand amour de sa vie, même si leurs relations sont parfois orageuses. Charismatique et érudit, il l'encourage à écrire.

Finch Hatton la quitte en 1931 pour l'aviatrice britannique Beryl Markham. Il meurt dans l'accident de son avion personnel le 14 mai 1931, à 44 ans. La situation financière de l'exploitation se dégrade d'année en année. La ferme est finalement vendue, et Karen Blixen doit quitter définitivement l'Afrique en juillet 1931.

RECONSTRUCTION

Karin accoste à Marseille en août 1931 puis rejoint le domaine familial au Danemark. Elle est alors financièrement ruinée, sentimentalement désespérée, sans avenir, après avoir dû quitter sa ferme et l'Afrique, elle voit son échec comme total. Pour combler le vide de sa vie, elle se met à écrire.

Elle va devenir une figure de premier plan de la vie artistique et littéraire. Pourtant nommée deux fois, n'a jamais reçu le prix Nobel de littérature tant espéré.

UN POUVOIR MAGNETIQUE SUR LES HOMMES

Sa maigreur effrayante et son visage outrageusement fardé exerçaient un pouvoir magnétique sur les hommes. Certains ne s'en sont jamais relevés.

Ils sont nombreux à avoir succombé au charme de la baronne Blixen : Truman Capote, Gloria Vanderbilt et Sidney Lumet, Marilyn Monroe et Carson McCullers à New York en 1959, mais aussi Cecil Beaton ou Richard Avedon.

Karen fut aussi une « cougar », avec cette amitié particulière vécue avec un jeune poète danois, Thorkild Bjornvig, de trente ans son cadet. Une histoire terrifiante, humiliante parfois, pour le jeune homme dont Karen avait fait sa chose.

Comment cette femme malade, si frêle, si maigre, courbée, cassée, jamais rompue, a-t-elle pu vivre jusqu'à l'âge de 76 ans en déployant une telle énergie, d'abord à la tête d'une plantation de café, puis, revenue au Danemark après la faillite, comme écrivain à succès? Qui peut expliquer le « charme magnétique » qu'elle n'a cessé d'exercer sur les hommes ?

Sophistiquée, raffinée, pointilleuse sur les usages, Karen Blixen avait en même temps l'orgueil des ambitieuses que rien n'effraie et ne décourage, ni les mauvaises récoltes, ni les attaques des fauves, ni les colères du ciel et des indigènes. De ceux-ci elle savait se faire à la fois respecter et aimer. Elle ne quittera l'Afrique qu'après avoir obtenu des terres pour les familles qui vivaient sur sa plantation.

PRINCIPALES SOURCES (outre l’article Wikipédia) :

• http://womanns-world.com/karen-blixen-portrait/

• THURMAN (Judith), Karen Blixen, Robert Laffont, 2000.

• DE SAINT PERN Dominique, Baronne Blixen, Stock, 2015.

• http://www.journal-d-une-lectrice.net/article-4217507.html

• http://agora.qc.ca/dossiers/Karen_Blixen

• http://interligne.over-blog.com/2015/05/baronne-karen-blixen-de-dominique-de-saint-pern.html