Clorinde, Ma Colocataire (8)
Il ma téléphoné. Ce matin. Aux aurores.
Il a pas perdu de temps, dites donc ! Et alors ?
Et alors je lui ai dit que je pouvais pas lui parler, que jétais surbooké. De rappeler à six heures.
Histoire que je sois rentrée. Que je puisse écouter. Vous êtes un amour.
Elle a jeté un coup dil à la pendule.
Moins cinq. Il va pas tarder.
Sest fait un nid de coussins au creux du canapé.
Nempêche
Vous vous êtes pas rendu compte, hein, hier soir !
Que quoi ? Que tu tes offerte à toi-même, après, dans ta chambre ? Si ! Bien sûr que si ! Tu étais même très expansive.
Oui. Non, mais pas ça. Avant. Quand il était là. Sous la table, je me le suis fait. Pendant quil me posait toutes ces questions, là.
Ça sest absolument pas vu.
Oui, oh, jai pas poussé le bouchon trop loin non plus. Juste quelques effleurements. En mode discrétion absolue. Cétait trop tentant, attendez, de voir leffet que je lui faisais. Je peux pas résister, moi, à ça. Et puis alors me dire que cétait devant lui, comme ça, en causant, et quil se doutait de rien
Mon portable a sonné.
Cest lui ?
Cétait lui.
Maxime ? Oui. Excuse-moi pour ce matin.
Oh, cest pas grave !
Ça va ?
Ça va, oui ! Sauf que je suis crevé. Jai pas fermé lil de la nuit. Me demande pas pourquoi.
Clorinde ?
Ben, oui, Clorinde, oui. Une fille comme ça, tu peux pas rester insensible, attends, cest pas possible.
Ah, elle a du charme, hein !
Du charme ! Elle est super canon, oui, tu veux dire
Sans compter quelle a tout plein de qualités par ailleurs.
Je me demande comment tu fais. Je me demande vraiment comment tu fais. Vivre, comme ça, avec une nana de rêve, sous le même toit, sans que
Non, mais je deviendrais fou, moi ! Complètement fou. Me dis pas que
Tas quand même bien tenté ta chance, non ?
Jai vingt ans de plus quelle.
Quest-ce tu ten fous de ça, tu parles !
Mais elle, elle sen fout peut-être pas.
Tas quà y croire ! Un type qua un peu de bornes, elles apprécient toujours, les filles, à cet âge-là. Il y a de lexpérience. Il y a du savoir-faire. Ça les rassure. Ça les valorise. Et ça rend les copines jalouses. Non, si ty vas pas, je monte au créneau, moi !
Tu fais bien comme tu veux !
Dautant que tas entendu. Elle la dit. Elle pense quà samuser en ce moment. Ah, non, jy vais, moi ! Jy vais ! Pas question de laisser passer une occasion pareille. Jen aurais du remords toute ma vie. Je peux compter sur toi ?
Pour ?
Me faciliter les choses. Minviter aussi souvent que possible. Me laisser éventuellement seul avec elle. Essayer de savoir ce quelle a dans le ventre. La faire parler. Lui faire dire ce quelle pense de moi. Enfin tout, quoi ! Tout ce quest possible.
Elle ma fait signe daccepter.
Tu peux compter sur moi.
Merci. Je te revaudrai ça.
* *
*
Elle a hoché la tête.
Il est bien sûr de lui, votre Martial, là.
Je lai toujours connu comme ça.
Oui, ben il me passera pas à la casserole. De ce côté-là, il y a pas le moindre risque. Par contre, quel pied je vais prendre à le regarder faire la roue devant moi, alors ça ! Bon, mais dites-moi ! On est quel jour ?
Le quinze. Non, le seize. Pourquoi ?
Le seize, oui. Et vous avez pas oublié quelque chose ?
Wouah ! Cest ton anniversaire.
Cest mon anniversaire, oui. Depuis ce matin. Et vous vous en fichez complètement.
Mais non, mais
Je suis désolé. Va vite te préparer, tiens ! Je temmène au restaurant.
Et un bon, hein ! Vous avez intérêt. Si vous voulez que je vous pardonne
Un bon. Étoilé. Avec des nappes blanches. Des chandeliers. Et des serveurs aux petits soins.
Elle sest penchée.
Quest-ce tu regardes ?
La nappe.
Tu es infernale.
De plus en plus. Et cest de votre faute.
Ben, voyons !
Enfin, grâce à vous, plutôt ! Cest vrai quil y a eu et quil y a encore Emma mais Emma, cest pas pareil. Cest une femme. Vous, vous êtes un homme et vous me jugez pas. Jamais. Du coup, je peux me laisser aller à être complètement ce que je suis. Comment ça fait du bien ! Je me sens au large. Et je me découvre. Si, cest vrai, hein ! Il y a tout un tas de pans de moi-même dont je me rends compte que je ne leur laissais pas vraiment les coudées franches. Que je les bridais. Ou que je les vivais en demi-teinte. On a beau se dire quon se fout du quen-dira-t-on comme de lan quarante quitte à faire quelquefois de la provoc ; et ça, je sais faire, quand il faut ! cest jamais tout à fait vrai. On a toujours le regard des autres qui nous traîne plus ou moins dessus. Sauf que le vôtre, de regard, il rend tout ce quil touche simple. Naturel. Tout va de soi. Jadore capter les regards des hommes ? Les retenir ? Cest bien. Cest même très bien. Les exciter mexcite ? Vous ny trouvez absolument rien à redire. Bien au contraire. Chaque fois que jen ai loccasion, je mate leurs queues avec délectation ? Et alors ? Vous voyez vraiment pas pourquoi ça devrait poser problème. Du moment que jy trouve mon compte. Mais le « pire », depuis que je vous connais, cest ça : me branler. Non, mais comment ça me tient ! Dix fois plus quavant. Et cest pas peu dire. Sans arrêt jy pense. Tous les jours je me le fais. Au moins une fois. Quand cest pas plus. Il y a toujours quelque chose, à un moment ou à un autre, qui me donne envie. Et vous savez ce qua changé ? Cest que maintenant jaccepte complètement lidée que je prends bien plus de plaisir toute seule quavec un mec. Avant, ça nempêchait rien, non, bien sûr, mais javais quand même toujours une petite voix en arrière-fond qui me disait que cétait pas normal.
Et quest-ce jai à voir, moi, dans cette métamorphose-là ?
Je sais pas. Tout ce que je sais, cest que cest lié à vous. Et ça, jen suis sûre. Dailleurs
Dailleurs ?
Elle na pas répondu. Ses yeux se sont perdus dans le lointain.
Dailleurs ?
Non, rien. Plus tard je vous dirai. Tout à lheure. À la maison.
Clorinde
Oui ?
Donne-moi ta main.
Elle ma tendu la gauche.
Non. Lautre
Celle quest sous la table.
Je lai portée à mes narines. Y ai posé les lèvres. En ai englouti un doigt.
Tu as bon goût. Très.
Comments:
No comments!
Please sign up or log in to post a comment!