Clorinde, Ma Colocataire (14)
Cest pas mal finalement ici, hein ?
On avait passé la matinée à faire des courses.
Faut bien
Si on veut y venir de temps en temps. Il manque plein de trucs. Et puis même, que ça ait lair un minimum habité. Parce quils vont vouloir venir voir, mes parents. Je sais bien que je suis majeure, que je fais ce que je veux, mais jai vraiment pas envie de me prendre le chou avec eux à propos de ça.
Et le début de laprès-midi à suspendre des photos à droite et à gauche. À arranger une porte qui coinçait. À nettoyer la douche.
Ils lont laissée dans un état, ces cochons !
Maintenant, assise sur le radiateur, près de la fenêtre, elle dressait la liste de tout ce quil manquait. Et quil fallait absolument se procurer.
La vlà !
Qui ça ?
La fille de lautre jour. Celle quon avait suivie. Elle y rentre à lhôtel. Elle y rentre encore. Bon, allez, cette fois on sen occupe. On descend, on attend quelle ressorte et on la piste. Quon sache où elle va quand elle sort de là-dedans.
Bon, alors, quest-ce quelle fout ?
Elle baise.
Ça, je sais bien. Mais faut quand même pas trois heures pour senvoyer en lair.
Des fois, si ! Tout dépend de la façon dont ça se passe.
Ah, ça y est ! Elle sort. Bon, allez, on y va. Mais pas trop près. Quelle se doute pas de quelque chose.
Ni trop loin. Quon risque pas de la perdre.
Et surtout que vous puissiez bien lui mater le cul. Non ? Cest pas ça ?
On la suivie tout au long du boulevard. Elle marchait dun bon pas, en regardant droit devant elle. Sans jamais tourner la tête. Ni à droite ni à gauche.
Vous savez ce que je me demande ? Cest si elle la gardée, la jute du mec. Si elle la encore dedans. Cest ce que je fais, moi, quand jai eu un type. Jadore ça, la sentir dégouliner. Et puis me dire que les gens, tout autour, ils savent pas. Ils se doutent pas. Tu te prends un de ces pieds.
Elle a tourné à droite, la fille.
Faudra quand même que jy remette le nez un de ces jours, moi, aux mecs. Parce que cest bien beau ce quon fait tous les deux, cest même super, mais je risque de perdre la main à force.
Puis à gauche.
Où cest quelle peut bien aller par là ?
Encore à gauche.
Ce quon aurait dû, cest se séparer, tiens ! Quil y en ait un de nous deux qui la suive et que lautre, il soccupe du bonhomme, sur lautre rue. Quon sache comment il est fichu. Et ce quil fait. Non, on a pas été vraiment bons sur ce coup-là.
Ils sont appelés à se revoir.
Ah, ça, sûrement !
Alors ce nest que partie remise.
La fille sest résolument engagée sur le parking du Super Marché. À lintérieur duquel elle sest engouffrée. Et où on la perdue. On a eu beau parcourir les allées en long, en large et en travers, elle nétait nulle part. Elle sétait évanouie.
Non, mais alors là, cest la meilleure !
On a refait un tour et puis Clorinde ma attrapé par le bras.
Regardez ! Regardez là-bas.
Revêtue de la tenue lie-de-vin du magasin, elle était en train douvrir sa caisse.
Ah, ben daccord !
Filez ! Filez ! Laissez-moi faire. On se retrouve là-bas
* *
*
Elle a jeté sur la table un filet doranges. Et deux avocats.
Là
Voilà. Jai posé un premier jalon. Jai échangé quelques mots, vite fait, à la caisse, avec elle. Jy retournerai. Demain. Après-demain. Et tous les jours suivants. Je vais sympathiser. En mode discret. Sur la pointe des pieds.
Et cest quoi, le plan ?
Quelle accepte quon se voie ailleurs. Je vais lui raconter une salade. Par exemple, que je fais un mémoire sur létat desprit des employées de grande surface. Leurs projets. La façon dont elles envisagent leur avenir. Tant professionnel que personnel. Tout ça. Alors si elle voulait bien répondre à un petit questionnaire
Elle sera flattée que jaie pensé à elle.
Et mon rôle, à moi, dans tout ça, ce sera quoi ?
Ce que vous pourriez, vous, cest faire la même chose, de votre côté, avec le type. Aller lattendre devant lentrée principale. Entrer en contact. Vous débrouiller pour lui tirer les vers du nez. On aurait les deux versions comme ça. Les tenants et les aboutissants. Sils se cachent dans cet hôtel, il y a ment des raisons. Dautres personnes concernées. Qui ? Son mec à elle ? Sa femme à lui ? Les deux ? Faudra aussi chercher dans ces directions-là. À moins que ce ne soit complètement autre chose. À quoi on pense pas du tout. Oh, non, je sais pas vous, mais moi, maintenant quon y a mis le nez, jai trop envie de savoir. De connaître le fin mot de lhistoire. Et même, éventuellement, si loccasion se présente, dy mettre mon grain de sel.
Et Martial ?
Elle était sous la douche.
Hein ? Et Martial ? Il appelle plus ?
Je sais pas. Jai laissé mon portable dans la voiture.
Ben, allez le chercher ! Quest-ce vous attendez ? Quon sache !
Il y avait sept appels en absence. Et quatre SMS.
Qui disent quoi ?
Toujours la même chose. Que tu lexcites que le diable. Que tes nibards le rendent fou. Quil en peut plus. Et quand est-ce que je lui montrerai dautres photos ? Et que je linvite ? Cest quand que je linvite ?
Elle est sortie de la douche. En se frictionnant vigoureusement avec sa grande serviette blanche.
Le pauvre ! Là, faut vraiment faire quelque chose. On peut pas le laisser dans cet état-là. Ce serait cruel. Allez, appelez-le !
Pour lui dire quoi ?
Ce quil a envie dentendre. Et même davantage.
Elle est venue sasseoir à mes côtés, flanc contre flanc.
Et mettez le haut-parleur, hein !
Allô
Martial ?
Ah, ben, cest pas trop tôt.
Jai des photos.
Delle ?
Évidemment, delle. De son cul.
Oh, putain !
Mais ça a été chaud. Dun peu plus, je me faisais gauler.
Envoie ! Tenvoies ?
Clorinde a glissé sa main entre ses cuisses.
Je les ai pas là. Je suis pas chez moi. Mais on se voit, si tu veux.
Quand ?
Demain. Demain soir. Six heures. Même endroit que dhabitude.
Ça marche.
On a raccroché.
Vous me raconterez, hein !
Tu sais bien que oui.
Sa main sest activée plus vite entre ses cuisses.
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