L'Annonce
Lannonce
Par-dessus les toits de Lyon et de Pierre Bénite, le soleil couchant de septembre
ensanglantait la façade ouest des immeubles de la rue des Troubadours à Saint-Fons. Lun
deux, imposante barre de HLM posée là dans les années soixante-dix, était en proie comme
tous les ans à cette époque à une activité particulièrement intense. La rentrée
universitaire seffectuant pour la plupart en octobre, les étudiants des facultés de Lyon
commençaient dès maintenant à sinstaller pour lannée. Un ballet incessant de voitures,
de bagages, dallées et venues ponctuées de cris en tous sens perturbait le voisinage
pendant une semaine entière. Cette année-là au deuxième étage de la porte D, rare entrée
à ne pas arborer de vitres cassées Judith, une jeune fille assise sur son lit senquit
auprès dune amie calée dans un fauteuil aux coussins avachis.
Dis-moi Viviane, tu restes encore dans ce foyer cette année ?
Bien obligée. À deux cent cinquante euros le mois, je ne trouverais pas mieux. Dautant
plus quon nest pas loin de la gare de Saint-Fons et la fac pas loin de Perrache.
Judith quitta le lit et secoua sa longue chevelure brune quelle attacha, dun geste
élégant, en queue de cheval à laide dun catogan. Ses bras levés pour loccasion
mettaient en valeur sa poitrine ferme et juvénile. Ses yeux bleu très clair et sa peau
blanche tranchaient sur la noirceur de ses cheveux et ses lèvres incarnates joliment
ourlées. Cétait une belle jeune femme à la silhouette élancée et au port altier.
Oui daccord, mais cest mal chauffé, bruyant et pas toujours très bien fréquenté.
Lannée dernière, ma porte a été e. Miraculeusement, on ne ma rien pris. Cest vrai
quà part mon portable, il ny a pas grand-chose à voler. Comme jétais en cours et que
je lavais avec moi...
Tu ne trouveras rien dautre pour ce prix-là, Judith.
inconvénients.
Deux cent cinquante euros ce nest peut-être pas beaucoup dans labsolu, mais pour moi
qui touche à peine trois cents euros de bourse et deux cents euros que ma mère
menvoie... Quand jai payé tout ce que jai à payer, jai souvent fini le mois avec le
ventre et le frigo vides.
Viviane quitta le fauteuil avec difficulté tant lassise était devenue molle. Plus petite
que Judith, elle nen était pas moins mince et jolie. Sa frimousse, encadrée de cheveux
bouclés et constellée de taches de rousseur, était éclairée par des yeux dun vert
tendre. Une très légère coquetterie dans le regard achevait de rendre cette jeune femme
plus que charmante. Elle se dirigea vers la porte.
Regarde donc les annonces sur le net. Tu verras bien que tu resteras là ! Bon, je te
laisse finir de ranger. Je retourne dans ma piaule me doucher, ce soir Seb minvite à
diner.
Fais attention, ce sont des lits à une place ! Et puis essaye dêtre discrète, les murs
cest du vrai papier à cigarettes. Tu sais quon na pas trop le droit...
Tes pas jalouse au moins ?
Non, penses-tu. Cela fait un an que je nai pas de mec, je ne men porte pas plus mal.
La main sur la poignée de la porte, Viviane répliqua :
Sinon, cest comme tu veux. Seb a des copains vachement sympa et pas mal en plus.
Jy penserai. Allez, va-ten, fit Judith en administrant une petite tape sur les fesses
de son amie.
Elles sembrassèrent et Judith ferma le verrou à double tour quand Viviane fut partie.
Sortant un ordinateur portable de sa valise, elle se brancha sur le WiFi du foyer. Après
avoir quitté son réseau social, où elle donna des nouvelles de son installation à ses
amis, elle se mit à chercher sans trop y croire des chambres à louer qui pourraient lui
aller ; mais les prix annoncés restaient décidément prohibitifs.
datée de la veille, attira son attention. Elle était rédigée en ces termes :
« Lyon 2e. Homme légèrement handicapé offre gratuitement grande chambre meublée avec
bureau et salle de bains privative, WiFi, dans maison calme au milieu dun parc. Proche
de la faculté de philosophie, conviendrait à étudiante contre travaux ménagers (ménage,
courses) et autres menus services. Hommes sabstenir. » Suivait un numéro de téléphone.
Il nétait que dix-neuf heures trente. Judith sortit son portable et après quelques
hésitations, composa le numéro affiché. Quatre, cinq sonneries puis une voix se fit
entendre :
Bonjour, vous êtes bien sur la messagerie dHubert de Leulandes, je suis indisponible
pour le moment. Veuillez laisser votre message et votre numéro si vous souhaitez que je
vous rappelle.
Judith séclaircit la gorge et, sans être tout à fait à laise comme le sont la plupart
des gens lorsquils ont affaire à un enregistreur, dit :
Bonjour... Je... Jappelle pour lannonce de la chambre... Je suis étudiante en philo.
Pouvez-vous me rappeler au 06... même si elle est déjà prise ? Merci.
Judith raccrocha. Sans trop se bercer dillusions, elle continua ses recherches, mais ne
trouva rien dautre qui eût pu lintéresser. Lassée de fureter sur la Toile pour rien,
elle arrêta son ordinateur et, comme elle navait rien acheté pour diner, décida daller
au restaurant du foyer situé au premier étage.
Tous les étudiants navaient pas encore investi leur chambre, certains narriveraient que
dans la deuxième quinzaine du mois. Aussi, il y avait peu de monde dans le réfectoire
habituellement bondé à cette heure-là. Judith sinstalla à une table vide après avoir
rempli son plateau avec parcimonie, toujours respectueuse du plus petit euro. Son
portable sonna :
Bonjour, Mademoiselle. Est-ce vous qui avez appelé pour lannonce ?
Oui, cest moi.
Non, pas encore. Vous êtes la première ; jai un deuxième message sur mon répondeur,
mais dix minutes après vous. Je vous donne donc la priorité. Quand pouvez-vous venir ?
Demain si vous voulez, à lheure quil vous conviendra.
Disons quatorze heures. Mademoiselle ?...
Estribal. Judith Estribal.
Je vous envoie ladresse par SMS. Alors à demain, mademoiselle Estribal.
À demain.
Judith raccrocha rêveuse. Elle se voyait avec cinq cents euros par mois. Une fortune !
Puis elle songea :
Jespère que lendroit va me plaire et quil ny a pas trop de boulot. Il faut tout de
même que jaie le temps détudier...
Ragaillardie par cette bonne nouvelle, Judith se pencha sur son plateau avec appétit. De
retour dans sa chambre, elle ne manqua pas dinformer Viviane de ses démarches par mail.
Enfin, elle ouvrit « Les mots » de Jean-Paul Sartre et se jeta sur son lit.
*
Le lendemain matin, la conversation allait bon train dans la chambre de Judith.
Tu nes pas sérieuse ? sexclama Viviane. Cest sûrement un malade, ce type. Et puis,
tu as bien lu lannonce ? Ménage et courses, daccord, mais « autres menus services », à
ton avis cest quoi ? Hein ?
Tu vois le mal partout... se défendit Judith.
Tu es vraiment innocente ou tu le fais exprès ? Tu ne crois pas quil va te demander
une petite pipe par mois ou plus ?
Tout le monde nest pas comme ça. Et puis quand bien même, je nai pas de mec à qui
rester fidèle ! Et puis dabord, il y a longtemps que je nai pas sucé une bite, conclut-
elle en riant.
Arrête ! Tu tournes tout en dérision ! Et si ce type-là est un sadique ?
Et si, et si, et si... Jy vais cet après-midi, je verrai bien.
Tu ne verras rien du tout, oui. Jespère pour toi que cest une blague ou que la
chambre sera déjà prise.
Écoute, jai rendez-vous à quatorze heures.
Promis.
À moitié satisfaite, Viviane embrassa Judith et sortit de la pièce en disant :
Fais attention à toi...
Judith réfléchissait allongée sur son lit. Bien sûr, les « autres menus services »
lavaient interpellée également, mais elle ne voulait pas croire à une explication comme
celle que venait de lui donner Viviane. Si toutefois elle avait raison ? Que ferait-elle
? Bon, ça dépendait déjà du propriétaire. Sil était affreux ou sale, la réponse était
toute trouvée, mais sil était regardable ? Elle connaissait des filles dans limmeuble
qui se prostituaient pendant leurs études. Elle les voyait parfois claquer un fric fou
pendant quelle-même tirait la langue en comptant le moindre euro. Elle les enviait sur
le moment, mais quand elle les rencontrait au bras dun vieil adipeux, elle ne les
jalousait plus du tout ! La situation ne serait pas comparable avec la sienne...
Quoique... Et que dirait sa mère ? Le rouge de la honte montait au front de Judith rien
quà évoquer le visage de cette sainte femme apprenant cela de son unique fille. Elle
sempressa de chasser de son esprit cette idée qui la mettait mal à laise.
Bon ! Assez tergiversé. Je verrai le quartier après le rendez-vous, peut-être que cela
me suffira pour refuser, dit-elle à voix haute.
Judith ne pensa plus à rien. La matinée passa rapidement et, après une collation vite
expédiée, vint le moment de partir. Judith jeta un coup dil par la fenêtre. Elle ny
décela pas de menace de pluie aussi, rangea-t-elle son parapluie et se contenta-t-elle
denfiler un chandail sur son jean moulant pour filer en direction de la gare de Saint-
Fons. Le train ne se fit pas attendre et quelques minutes plus tard, elle descendait à
Lyon Perrache.
De Leulandes habitait le deuxième arrondissement, celui de la presquile. Sortant de la
gare, Judith neut aucun mal à trouver la rue Victor Hugo, mais beaucoup plus pour
dénicher lallée des Fleurs. Elle la découvrit entre deux immeubles haussmanniens très
bien entretenus. Cette voie, débouchant sur la rue dAuvergne, ne desservait quun
portail imposant complètement fermé à la vue de lextérieur ; seule une sonnette à
interphone permettait un semblant de communication. Judith hésita une dernière fois, puis
approchant son doigt tremblant elle appuya sur un bouton. Au loin, une clochette retentit
et une voix nasillarde surgit du haut-parleur :
Oui ?
Bonjour. Je suis mademoiselle Estribal
Ah ! Très bien, entrez !
Au même moment, la gâche électrique entrouvrit le portail. Judith sengouffra dans
louverture et découvrit à son grand étonnement un parc magnifique au fond duquel trônait
une imposante maison bourgeoise toute de pierres meulières. Pour se rendre au perron
dentrée, il lui suffisait de suivre la grande allée de gravier devant elle. À gauche,
des peupliers gigantesques passablement dégarnis eu égard à lépoque de lannée et à
droite, des parterres de fleurs tardives au milieu dune pelouse digne dun château
anglais. Elle grimpa les quelques marches avec appréhension, la porte souvrit.
Bienvenue, Mademoiselle, si vous voulez bien vous donner la peine dentrer.
Lhomme qui venait de parler nétait pas très grand, mais mince et de belle prestance. La
quarantaine, il se déplaçait avec une canne à pommeau travaillé ; à lévidence, sa jambe
droite ne pliait plus au genou. Avec sa veste dintérieur mordorée, il avait tout lair
dun aristocrate.
Je vous montre vos appartements et si cela vous convient, je vous explique le
fonctionnement de la maison. Si vous voulez bien me suivre
Daccord, répondit Judith intimidée par lélégance de son hôte.
De Leulandes savança dans lentrée, longea une volée de larges marches de pierre
équipées dun fauteuil monte-escalier suspendu à la rampe et emprunta un corridor
desservant un grand salon sur la droite au fond duquel on distinguait une cheminée
ancienne. Il poursuivit jusquà un autre couloir perpendiculaire et plus petit, quil
prit à gauche. Il sarrêta devant une porte de chêne et louvrit. Galamment, il fit signe
à Judith de pénétrer la première. Elle sexécuta et ce quelle vit la ravit au plus haut
point. La chambre, superbement meublée, au décor somptueux et largement éclairée par une
fenêtre triple, était si luxueuse quelle nen croyait pas ses yeux. Rapidement, le
propriétaire des lieux ouvrit successivement deux portes sur le mur droit. Un petit
bureau, illuminé par une vitre simple, était équipé dun secrétaire et de deux
bibliothèques aux rayons presque vides.
Jai laissé ici quelques ouvrages de philosophie. Jai un faible pour Bergson, je ne
vous le cache pas. Vous pourrez y mettre les vôtres, mais avant den acheter un,
demandez-moi si je ne lai pas déjà. Venez voir la salle de bains maintenant.
Abasourdie, Judith sortit du bureau et alla jusquà la salle deau qui était à la hauteur
du reste. Carrelage et faïence gris sobre, douche italienne multijets, baignoire avec
jacuzzi, lavabo surmonté dun immense miroir éclairé par deux spots, toilettes dans un
recoin séparé et meuble de rangement suffisamment grand pour une famille de quatre
personnes.
Sûr de son fait, Hubert de Leulandes demanda :
Cela vous convient-il ?
Je serais bien difficile, admit Judith.
Alors, venez avec moi que je vous explique, fit de Leulandes en entrainant la jeune
étudiante dans le salon où ils prirent place chacun face à face dans un fauteuil anglais.
Comme vous le voyez, je suis un peu handicapé. Je nai plus de rotule à la jambe droite
et marcher est devenu pour moi une épreuve douloureuse. Une infirmière, Lucette que vous
croiserez souvent si vous acceptez, me fait régulièrement des injections dun antalgique
puissant. De même, elle prépare les repas avec les produits quelle trouve dans la
cuisine. Comme elle ne fait pas les courses ni le ménage, ces deux tâches vous seront
affectées. Si vous le souhaitez, nous pourrons prendre nos repas ensemble ou séparément
dans le cas contraire. Le salon ainsi que tout le premier étage me sont réservés, vous
aurez la jouissance des pièces que je vous ai montrées et de la cuisine qui est commune.
Est-ce clair jusquà présent ?
Oui, jai bien saisi.
Venons-en à la partie la plus délicate.
À ces mots, Judith ne put sempêcher de penser aux paroles de Viviane à propos des menus
services.
Il y a une chambre au premier dont les volets sont fermés en permanence. Cest la porte
qui fait face à lescalier. Tous les dimanches à une heure convenue, ou un autre jour
selon votre emploi du temps, je vous demanderai de vous y rendre et de refermer à clé
derrière vous. Accroché au dos de la porte, se trouve un masque noir. Vous le mettrez sur
vos yeux, il vous est interdit dallumer ou dapporter une lampe de poche. Vous vous
dirigerez à tâtons jusquau lit au milieu de la chambre et là vous vous déshabillerez en
totalité pour vous y allonger. Je continue ou nous arrêtons tout de suite ?
Judith réfléchissait à cent à lheure. Viviane avait raison, mais Hubert ne semblait pas
être « un malade », de plus il était bel homme, et distingué de surcroît.
Continuez, fit-elle, mais quoi quil en soit je vous réclamerai un temps de réflexion.
Cela va sans dire. Quand vous serez nue sur le lit, jentrerai par une autre porte. Il
est très important, jinsiste fortement sur ce point, il est très important que vous ne
cherchiez pas à voir mon visage. Je mapprocherai de vous et vous demanderai différents
services sexuels à ma convenance. Cela va de la simple masturbation, réciproque ou non,
au rapport vaginal complet en passant par la fellation et le rapport anal. En aucun cas,
je ne ferai de cunnilingus. Est-ce que je continue ?
Oui, oui, souffla Judith doucement, je crois que jai compris.
Encore une fois, vous ne chercherez pas à voir mon visage ni à le toucher. Je me
répète, mais cest capital. De plus, il est inutile de me parler, je ne vous répondrai
jamais. Quand nos ébats seront terminés, vous patienterez jusquà ce que je sois sorti
comme je suis venu puis vous pourrez quitter la pièce jusquau dimanche suivant. Vous
êtes naturellement libre de partir de cette maison comme bon vous semble, mais tant que
vous resterez là, je vous demanderai de, disons, « encaisser » le loyer hebdomadaire.
Sachez également que je nai aucun penchant pour le sadomasochisme ou autre pratique
bizarre. Avez-vous des questions ?
À combien de « services » par dimanche devrais-je mattendre ?
Un seul ; chacun deux a énormément deffet sur moi, mais comptez environ deux heures.
Dautres questions ?
Question ? Non ; seulement, je voudrais voir la chambre.
Hubert de Leulandes eut lair surpris puis se leva avec difficulté.
Venez avec moi.
Judith et son hôte retournèrent dans le couloir et se dirigèrent vers lescalier. Hubert
sinstalla dans le siège réservé à cet effet.
Je ne vous emmène pas
fit-il un sourire aux lèvres en appuyant sur le bouton dune
télécommande. Judith sourit également et posa le pied sur la première marche. Arrivée au
palier, elle sarrêta devant la porte qui lui faisait face.
Entrez, je vous prie, fit de Leulandes en descendant de son fauteuil.
Judith poussa le vantail ; la pièce obscure et calfeutrée ne sentait pas le renfermé,
juste un parfum floral agréable. Lhomme, qui lavait rejoint, actionna un interrupteur.
La chambre ne comportait aucun meuble à lexception dun très grand lit en son milieu.
Voyez ici le masque, dit Hubert en indiquant le dos de la porte, et là-bas la porte par
laquelle jarriverai, en désignant une autre issue au fond de la salle. Bien entendu,
vous ne devrez pas la franchir.
Judith laissa errer son regard une bonne minute puis déclara :
Jen ai assez vu. Je vous tiens informé.
Je vous rappelle que jai une demande en attente. Jai promis ma réponse pour demain
midi. Pourrais-je avoir la vôtre avant ?
Judith réfléchit un instant. Observant Hubert minutieusement, elle dit :
Je vous appelle demain matin. Au revoir, Monsieur de Leulandes ; ménagez-vous, il est
inutile de me raccompagner.
Elle lui tendit la main et descendit les marches rapidement. Il était quinze heures,
Judith croisa une femme dans le couloir qui posait son manteau. Ce devait être Lucette.
Elle lui accorda un petit signe de tête et sortit dans le parc.
La jeune étudiante alla directement à la faculté, saperçut que le chemin nétait pas
long et que le quartier paraissait calme et agréable. Assise sur un banc public, elle
réfléchissait et ne voyait aucune raison de refuser loffre dHubert de Leulandes, hormis
le « détail » du dimanche. Que pesait-il ce détail par rapport au confort dune telle
chambre ? Elle était logée, nourrie et pouvait utiliser toutes les commodités sans payer.
La fac était à cinq minutes et surtout, elle disposerait toute lannée de cinq cents
euros par mois. Pas seulement pour son plaisir personnel, mais combien de fois avait-elle
dû renoncer à une pièce de théâtre, un concert, un film « art et essai » ou un simple
livre ?... Ce nétait pas très moral tout ça, mais cétait tentant, dautant plus que de
Leulandes était bel homme. Judith se leva et marcha pensive, sur un rythme de promenade,
jusquà la gare de Perrache. Elle sengouffra dans le premier train pour Saint-Fons et
retourna au foyer. Parvenue dans sa chambre, qui lui parut dune laideur abominable, elle
se jeta sur le lit et se mit à nouveau à réfléchir en contemplant le plafond. Elle décida
de ne pas appeler son amie Viviane, elle connaissait davance son point de vue. Il
fallait quelle prenne une décision, une décision importante, mais qui finalement ne
regardait quelle. Même si on pouvait la comparer aux étudiantes qui se prostituaient,
elle-même naurait jamais à coucher avec de laids et vieux libidineux. Hubert était loin
dêtre laid et ce serait le seul avec qui elle ferait ça. De plus, elle vivrait dans un
confort que les autres filles ne connaitront pas
Lair décidé, Judith se saisit de son téléphone, chercha le numéro dHubert et appuya sur
la touche verte.
Allo ?
Cest Judith. Pas besoin dattendre demain, cest daccord.
*
Le lendemain matin, la valise de Judith qui nétait pas encore totalement défaite fut
vite remplie. Viviane, qui navait pas eu de nouvelles comme promis, était venue tôt dans
la chambre de son amie.
Tu ne sens pas que ce nest pas sain cette histoire ?
Judith avait raconté son entrevue avec Hubert de Leulandes, mais avait occulté les «
services » du dimanche.
Écoute. Jai rencontré le propriétaire. Cest un bel homme distingué, mais handicapé.
Sil magressait, je naurais quà le repousser pour quil tombe. Tu vois que je ne
risque rien. De plus, il y a une infirmière qui vient tous les jours. Je ne serai
pratiquement jamais seule avec lui.
Mais alors, pour quelle raison cette chambre gratuite ?
Judith, qui connaissait la réponse, se contenta de répondre :
Pour être moins seul, sans doute
Puisquil ny a pas moyen de te raisonner, promets-moi de menvoyer un mail tous les
jours, sauf si on se voit à la fac dans la journée.
Cest promis.
Tu y vas quand ?
En fin daprès-midi, le temps de donner mon congé. Nous sommes mercredi et laccueil
nest pas ouvert le matin.
Viviane tira la porte et, avant de partir, dit à son amie :
On se retrouve au self ?
Daccord, à midi.
*
Il était dix-huit heures, Judith attendait sur le perron à la porte de la maison, sa
valise à la main. Lucette lui ouvrit et laccompagna jusquà sa chambre.
Je vous laisse vous installer. Nous dinons ce soir à vingt heures dans le salon avec
monsieur de Leulandes si vous le voulez bien. Je rentre chez moi après cela et je reviens
demain matin. Je vous montrerai tout en détail.
Daccord, à tout à lheure.
Judith défit sa valise en totalité et rangea ses affaires dans des placards bien trop
spacieux pour le peu quelle possédait. Puis, avant de se rendre au salon, elle décida de
prendre un bain en savourant le plaisir du jacuzzi. Le diner fut plaisant, Hubert était
un homme desprit et très cultivé. Elle pouvait parler librement de philosophie, de
musique, dart, Hubert jouissait toujours dun avis éclairé. Revenue dans ses quartiers,
elle passa sa soirée à discuter sur le net avec Viviane et dautres amis communs, puis se
coucha dans le lit vaste et confortable de sa chambre. Cétait sa première nuit, avant de
sendormir Judith se persuada quelle avait fait le bon choix. Après tout, elle avait
déjà fait lamour avec des garçons pour qui elle navait pas vraiment de sentiments, par
conformisme, pour « faire plaisir » ou pour apaiser sa propre libido. Alors, quelle
différence cela ferait-il avec Hubert ?
Le lendemain matin, elle se rendit à la cuisine prendre son petit-déjeuner. Après le
court passage de Lucette qui lui donna ses instructions, elle prit connaissance des
tâches qui lui étaient confiées pour la journée et sen acquitta rapidement. Elle
retrouva Viviane le lendemain et le surlendemain et lui racontait ce quelle faisait.
Viviane, restée sceptique, était de plus en plus rassurée sur le sort de son amie. Vint
alors le premier dimanche.
Le matin dans la cuisine devant sa tasse de café, Judith lisait et relisait ce qui était
écrit sur un morceau de papier.
« Ce soir dix-huit heures »
Cétait laconique. Son cur semballa par le trac et son estomac se serra. Elle avait
décidé de se plonger dans ses livres toute la journée, mais eut parfois bien du mal à se
concentrer. Elle réussit toutefois à soccuper lesprit en lisant les ouvrages de la
bibliothèque quelle ne connaissait pas. Le midi, elle préféra déjeuner seule, nosant
pas rencontrer Hubert avant lheure fatidique. À dix-sept heures trente, elle prit un
bain puis se prépara.
Puisque je dois tout enlever, autant en porter le moins possible, fit-elle à voix
haute.
Elle ne passa en effet quune jupe sur un string et un chemisier blanc qui laissait
deviner sa poitrine nue. Elle attacha ses cheveux en queue de cheval et resta pieds nus
dans ses mules. À dix-huit heures, Judith se dirigea dun pas décidé vers la chambre
noire. En respirant fortement, elle poussa la porte quelle referma derrière elle. À
tâtons, elle prit le masque quelle mit sur ses yeux en se disant que cétait une
précaution bien inutile puisque même sans cela, on ny voyait goutte. Les bras tendus
devant elle, Judith marchait doucement vers le centre de la pièce jusquà ce quelle
touchât le matelas de ses genoux. Elle ôta rapidement ses vêtements et sallongea nue sur
le lit. Elle attendit en respirant comme une forge.
Nayez pas peur, dit une voix qui la fit sursauter. Je vais entrer et vous rejoindre.
Dès que jaurai franchi cette porte, je serai muet comme une tombe.
Judith entendit le bruit de la porte quon ouvre et quon referme, puis ce fut celui de
quelques pas et le lit bascula légèrement. Elle sentit que lhomme mettait un genou de
chaque côté de son corps au niveau de ses seins. Elle fut surprise dimaginer Hubert
agenouillé du fait de son handicap, mais ne chercha pas plus loin. Hubert prit la main
droite de Judith et lamena jusquà son scrotum pour lui faire enserrer ses testicules.
Judith poussa une exclamation de surprise. Âgée de vingt-quatre ans, elle avait connu
quelques garçons dont le sexe était plus ou moins gros, mais aucun deux ne se démarquait
réellement par la taille. Lorsquelle tâta les gonades de lhomme, elle ne put sempêcher
de dire à voix haute :
Mais elles sont énormes !
De lautre main elle caressa le corps de son compagnon de lit. Il était musclé, bien plus
que ne le laissait supposer la silhouette fragile de son hôte. Quelques minutes plus
tard, Hubert dirigea la main de Judith vers son membre à moitié en érection. Elle
sexécuta et ne fut quà peine étonnée denserrer une verge démesurée dont elle ne
faisait pas le tour de ses doigts et dune longueur quelle évalua à vingt-cinq
centimètres au minimum. Elle palpa le pénis du pouce et de deux doigts en pince depuis la
base jusquau gland. Elle en était sidérée et dit comme pour elle-même :
Je nen ai jamais touché daussi grosse.
Soudain, Hubert lui prit le poignet et entama un va-et-vient assez rapide. La jeune femme
comprit et continua la masturbation avec entrain. Elle ne voyait rien, aussi était elle
obligée dimaginer ce quelle faisait et ne fut pas étonnée de sentir couler de la
cyprine des lèvres de son sexe. Elle saisit le gland à pleine main ; son diamètre, encore
plus imposant que celui de la hampe, la stupéfiait et lémerveillait en même temps.
Reprenant le prépuce elle augmenta la vitesse de ses aller et retour. Hubert approcha son
pénis de la bouche de Judith qui se méprit et voulut le sucer. Il se retira vivement et
Judith, interloquée au premier abord, devina ensuite ce quil désirait. Au jugé, elle se
plaça face à la verge dHubert et maintint sa masturbation. Quelques minutes plus tard,
de Leulandes poussa un râle bestial et éjacula sur le visage de sa maîtresse. Une fois,
deux fois, trois fois
Judith compta treize jets de sperme chaud quelle reçut en pleine
figure. Le liquide séminal sinfiltrait partout, dans ses yeux, dans ses cheveux, sur ses
lèvres, dans son cou, dans son nez, sur ses joues et elle continuait malgré cette
tempête, à le branler en se demandant quand il lui ferait signe darrêter enfin. Cet
homme valait un véritable étalon. Quel dommage quil fût handicapé ! Encore que
Hubert se retira, posa sa main sur le visage de Judith et finit de lui barbouiller la
bouche, le menton, le cou et les seins en étalant sa semence. La jeune femme mouillait de
plus en plus. Deux minutes à peine sétaient écoulées que lhomme la prit fermement par
la taille et la retourna comme une crêpe. Lui soulevant le bassin, il linstalla à quatre
pattes et elle écarta les jambes, étonnée de la vigueur de son amant si peu de temps
après léjaculation. Doucement, Hubert approcha son phallus du sexe de Judith et,
saidant de la main, introduisit son gland entre les lèvres offertes. Judith soupira.
Jamais elle navait ressenti un tel écartement de son vagin. Il accentua sa pénétration
et fut stoppé par le col de lutérus. Judith émit une plainte. Lhomme amorça une série
daller et retour de grande amplitude. Sa maîtresse goûtait avec délectation la sensation
du membre glissant sur ses parois vaginales distendues, mais poussait toujours un petit
cri lorsquil allait trop loin, ce qui était fréquent, car Hubert, sentant son orgasme
proche, assenait parfois dénormes coups de boutoir. Judith jouit la première en criant.
Elle perdit la tête, les contractions de son vagin enserraient fortement le phallus
imposant de son amant ce qui augmentait lintensité de son propre spasme. Elle navait
jamais rien connu de tel. Relevant le bassin, elle se donna complètement à la jouissance
dHubert qui râla encore plus fort que la première fois. Judith ne put compter les jets
de sperme, mais quand il se retira une impressionnante quantité de liquide séminal
séchappa de sa vulve pour lui mouiller lintérieur des cuisses. Rompue, elle saffala
sur le ventre ; lhomme resta à genoux deux ou trois minutes de plus puis se leva après
avoir caressé les fesses de son amante. La jeune femme lentendit se diriger vers le fond
de la pièce. La porte souvrit et se referma. Soudain, une voix retentit comme au tout
début :
Cétait très bien Judith. Vous pouvez retourner dans votre chambre.
Vous aussi étiez très bien, répondit-elle.
Je
La phrase sinterrompit puis ce fut le silence.
Revenue dans ses quartiers, une idée fixe taraudait lesprit de Judith : celle de se
laver. Elle entra dans la douche et ouvrit le robinet à fond, le plus chaud quelle put
supporter. Elle essaya les différents jets de massage quand, au hasard de ses essais,
lun de ceux-ci vint frapper la région supérieure de sa vulve. Encore excitée de ses
ébats, Judith souleva délicatement le capuchon de son clitoris et présenta celui-ci à la
douce violence de leau qui jaillissait. Elle remua son bassin doucement davant en
arrière pour que le jet titille le petit bouton, mais aussi la partie sensible du vagin
entre les lèvres de son sexe. Elle ferma les yeux et se mit à émettre des plaintes à
peine audibles, tout en résistant à la tentation impérieuse de remplacer le jet par son
doigt. Si lorgasme débuta effectivement grâce à leau projetée, il se termina par une
vigoureuse caresse de son clitoris et de sa vulve par un médius qui faisait laller et
retour à une vitesse extrême. La poitrine et le visage écrasés contre le mur, les jambes
écartées légèrement repliées, son bras coincé devant elle, Judith jouit puissamment en
poussant un cri aigu.
Séchée et ragaillardie, Judith sortit de la douche, shabilla et se jeta sur son lit.
Il y a longtemps que ça ne métait pas arrivé, dit-elle à voix haute en souriant. Quel
pied ! murmura-t-elle.
Puis elle songea :
Mais il y a vraiment une chose que je ne comprends pas. Hubert parait mince et frêle ;
or il avait une musculature exceptionnelle. Et puis, il y a ce genou ! Il ne le plie pas
ici et il marche avec une canne, mais dans le lit il est aussi valide que moi. Quel est
ce mystère ?
Lucette frappa à sa porte :
Si vous voulez venir diner. Monsieur de Leulandes vous attend, si vous le souhaitez
bien sûr.
Jarrive.
Judith se leva en trombe, se désola devant la glace des cernes bleu foncé qui lui
enlaidissaient les yeux et sortit.
À la fin du repas, elle accepta le verre de cognac quHubert lui offrit. Assis lun en
face de lautre, elle avait une vue plongeante sur lentrejambe de son hôte. Elle ny
trouva pas, à son grand étonnement, une bosse suffisamment importante pouvant dissimuler
le membre hors norme quelle avait eu entre les mains. Cétait un mystère de plus. Elle
écoutait cet homme parler avec avidité, elle se remémorait leurs ébats avec envie, elle
se sentait de plus en plus soumise. Était-ce cela lamour ?
*
Le lendemain, Judith rencontra Viviane à la faculté de philosophie. Leurs emplois du
temps différaient, aussi elles ne se retrouvèrent quà treize heures au restaurant
universitaire. Judith sépancha et raconta toutes ses aventures, même les plus intimes, à
Viviane qui écoutait, passionnée.
Je nai pas connu beaucoup de garçons, mais je navais jamais vu un sexe comme le sien.
Tu mintéresses, plaisanta Viviane. Sébastien nest que dans une petite moyenne, sans
plus ! Puis elle pouffa.
Ça ne fait pas tout. Il est aussi distingué, érudit, galant, doux, attentionné
Il ny
a que cette phobie de ne pas montrer son visage pendant lamour, jai du mal, mais je
men passe.
Bref ! Tu es tombée amoureuse
Je crois que oui, conclut Judith.
Profites-en. Moi, mon Seb, je laime bien, il se comporte convenablement au lit, mais
il est continuellement jaloux et ça me saoule ! Jai souvent envie de lenvoyer balader,
un jour ça va lui faire tout drôle.
Bon, jy retourne, déclara Judith. Je dois faire un peu de ménage puis les courses.
Après, je vais bosser un peu. Dans deux mois, quand jaurai un peu dargent, je tinvite
au restaurant, celui que tu veux. Si tu savais ce que je me sens libérée du côté fric !
Je te le rappellerai le moment venu, ne ten fais pas
Judith et Viviane se levèrent, se firent la bise et se séparèrent dun petit signe de la
main.
*
Cétait avec une pointe dimpatience et de fébrilité que Judith vint prendre son petit-
déjeuner dans la cuisine le dimanche suivant. Lucette nétait pas là, son bol et ses
couverts étaient pourtant sortis. Sous le couteau, un petit papier, identique à celui de
la semaine précédente, indiquait :
« Ce matin onze heures »
Machinalement, Judith regarda la pendule de la cuisine. Elle marquait huit heures
quarante-cinq, elle pouvait prendre son café et se préparer tranquillement. Elle se
demandait bien pourquoi une heure si matinale, mais ne chercha pas plus loin
dexplications. Revenue dans sa chambre, elle décida de se faire couler un bain,
envisageant de sy plonger avec délice, mais sans savouer lidée qui lui trottait dans
la tête. Elle disposait dune heure et demie avant le rendez-vous dans la pièce noire ;
aussi, elle avait amplement le temps de se mettre en condition. Leau du bain était très
chaude, plusieurs minutes furent nécessaires à Judith pour y entrer en totalité. Se
saisissant alors de la douchette de la baignoire, elle en ôta la pomme et régla la
température sur « tiède » et la pression sur « moyen ». Hissant son bassin elle fit
émerger son mont de Vénus, au système pileux abondant, et approcha le tuyau de sa vulve.
Elle avança lextrémité de la buse si près que celle-ci pénétra entre ses deux lèvres.
Leau sinfiltra avec force dans son vagin puis dun geste elle dirigea le jet vers son
clitoris dont le capuchon fut aisément soulevé par la pression. De vagin en clitoris et
de clitoris en vagin, Judith soupirait et accélérait le mouvement tant et si bien quune
quinzaine de minutes plus tard, son râle dorgasme se mêlait au gargouillis de leau.
Quand ce fut terminé, elle stoppa la douche et seuls quelques nuages de cyprine
séchappaient encore de son sexe pour se perdre en petites trainées blanches dans leau
du bain. Ravie, elle acheva sa toilette en ignorant toutefois que son vagin ne lui
servirait aucunement ce jour-là.
Onze heures. Le cur de Judith battait moins vite que la fois précédente, mais elle avait
toujours lestomac serré. Elle pénétra dans la chambre, referma derrière elle, prit le
masque et le passa sur ses yeux. Les bras en avant elle se dirigea vers le lit. Quand
elle le trouva, elle quitta ses vêtements et sallongea à plat dos nue sur le drap. Elle
patienta.
Je suis prêt, dit une voix
Moi aussi, répondit-elle plus sûre delle que la première fois.
Bruit de porte, de pas, du lit qui craque un peu et Hubert se retrouva comme précédemment
un genou de chaque côté de sa maîtresse. Il approcha son pénis du visage de Judith qui
attendit un peu de savoir ce quil voulait. Il apposa son gland gonflé sur les lèvres de
la jeune femme qui ouvrit les mâchoires et engloutit profondément sa verge. Elle craignit
un instant dêtre étouffée. Sa bouche grande ouverte était à peine suffisante pour
laisser entrer un membre de ce diamètre et seule une spécialiste du « deep throat »
aurait été capable den absorber toute la longueur. Judith, la tête sur le lit et le
pénis de lhomme entre les dents, ne pouvait pas bouger. Hubert entama des va-et-vient de
sa verge, affirmant ainsi sa domination par une irrumation active. La jeune femme se
tenait les articulations des mâchoires tellement celles-ci étaient douloureuses. Une
envie irrésistible de serrer les dents la taraudait, mais elle se retenait en
sarrangeant au mieux pour que son amant éjacule le plus vite possible et que soit finie
cette épreuve quelle navait jamais affrontée. Lorgasme vint enfin. Judith sentit les
contractions musculaires des cuisses de son compagnon de lit et sa semence qui lui
emplissait la bouche, semence quelle ne pouvait pas encore déglutir. Hubert se retira
dun seul coup et ferma de la main la mâchoire de Judith. Ce fut un grand bonheur pour
ses articulations, mais elle se retrouva avec une quantité impressionnante de sperme dans
les joues. Devinant quHubert ne souhaitait pas quelle le recrache, il ne lui restait
plus quà lavaler. Elle prit sur elle, se concentra et déglutit une seule fois avec un
bruit de gorge exacerbé. Ses joues gonflées reprirent leur volume normal, Judith,
essoufflée, haletait bruyamment. Elle se saisit du sexe de son amant et passa la langue
sur tout le tour du gland et vers le méat où perlaient encore quelques gouttes. Un goût
un peu âpre lui restait sur la langue. Enfin, elle reposa la tête, ses doigts enserrant
le membre étonnant de son partenaire.
Quelques minutes sécoulèrent puis, comme la fois précédente, Hubert retourna sa
maîtresse et la fit mettre à quatre pattes.
Ça ira mieux comme ça, se dit Judith qui se souvenait de lorgasme magnifique quelle
avait connu de cette manière. Elle se trompait et elle le comprit lorsquelle sentit la
main dHubert appliquer entre ses fesses et sur son anus une gelée qui lui parut froide.
Oh non ! Pas ça ! Elle est trop grosse ! supplia-t-elle.
Lhomme neut que faire de ses lamentations. Il appuya sur les épaules de la jeune femme
pour que le bassin soit bien en évidence et approcha du sphincter son gland énorme. Il
tenta de pénétrer par cette porte étroite à trois reprises, sans succès.
Vous voyez bien que ça ne rentrera pas, articula douloureusement Judith espérant que
cela le ferait abandonner. Prenez ma chatte sil vous plait
Mais cétait sans compter sur la ténacité de son amant qui recommença et qui finit par
dilater légèrement le sphincter en poussant de son pénis. À peine celui-ci ouvert, Judith
émit un petit cri.
Vous me faites mal
se plaignit-elle.
Imperturbable, Hubert appuyait, le gland gonflé continuait à augmenter peu à peu le
diamètre de lanus, Judith se mit à pleurer.
Jai mal ! Sil vous plait ! Jai mal.
La verge parvint enfin à passer, une douleur fulgurante traversa le ventre de Judith puis
celle-ci sapaisa. Le pénis dHubert entra de moitié dun seul coup. La jeune femme hurla
puis pleurnicha doucement. Son partenaire profita de cette accalmie provisoire pour
pénétrer encore plus en avant et jusquà ce quil ne pût plus avancer. Judith était
égarée, elle paraissait ne plus rien ressentir. Elle imaginait, vaincue, ce cylindre de
chair de vingt-cinq centimètres de long et de six ou sept de diamètre lui fouillant les
entrailles. Ce fut à ce moment que son amant entama les aller et retour de sa verge dans
le rectum de sa maîtresse. La douleur quil avait provoquée semblait lexciter au plus
haut point, car il jouit rapidement et puissamment dun cri bestial en secouant davant
en arrière le bassin de Judith presque inanimée. Enfin, il se retira laissant couler son
sperme de lanus de Judith le long de ses fesses et de ses cuisses, sperme zébré de
quelques filets de sang, invisibles dans lobscurité.
Comme le dimanche précédent, il caressa la croupe de sa compagne et sortit. La porte
claqua et une voix retentit.
Cétait encore très bien Judith, très bien
En larmes, Judith répliqua :
Vous ne mavez rien pris, je vous ai tout donné ! Vous ne voyez pas que je vous aime !
La voix ne répondit pas et Judith cacha son visage dans les draps pour y pleurer
doucement.
*
Laprès-midi même, dans la chambre de Judith se déroulait un étrange spectacle. Judith, à
quatre pattes sur son lit, offrait ses fesses nues à Lucette qui, armée dune aiguille en
forme de demi-cercle, saffairait à recoudre lune des trois déchirures du sphincter de
la jeune étudiante. Cette dernière émettait de petites plaintes en serrant les dents de
douleur jusquà ce que les trois fils fussent posés.
Voilà, Mademoiselle ! dit Lucette. Mais vous feriez mieux dutiliser lautre entrée, au
moins elle est faite pour cela.
Judith rougit.
Je
Je vous remercie pour votre aide, jaurais eu trop honte daller chez un médecin.
Je vais faire la piqûre à Hubert, je lui dirai de faire autrement pendant deux ou trois
mois.
Vous saviez
, fit Judith interloquée.
Je connais cet homme mieux que personne et jai bien conscience de la taille de ses
attributs. Il ny a que lui pour faire des dégâts pareils.
Lucette sortit puis réapparut avec un plateau-repas quelle déposa sur le bureau de
Judith. Celle-ci ny toucha quà peine, mais le finit le soir même, sans avoir quitté sa
chambre de la journée.
Le lendemain midi, Judith retrouva Viviane au restaurant universitaire comme elles
avaient lhabitude de le faire lorsque leur emploi du temps respectif le leur permettait.
Viviane regardait son amie avec désolation :
Tu as lair crevée, ma pauvre, tu as des soucis ?
Des petits problèmes de santé, mais sans importance éluda Judith.
Tu laimes vraiment alors ?
Oh ! Oui, si tu savais
et je suis sûre quil maime aussi et quil nose pas me le
dire. Moi, je lui ai avoué mon amour et ça la troublé, il est si seul et pourtant, cest
un homme tellement sensible et attirant
Jai pris une décision.
Ah ? Et laquelle ? senquit Viviane.
Je veux le guérir de sa phobie. La prochaine fois que nous ferons lamour, japporterai
de la lumière. Comme je suis sûre quil maime, il me pardonnera et il verra que rien de
plus ou de moins ne se passe en nétant plus dans le noir. Au final, nous pourrons avoir
une relation normale et nous regarder mutuellement quand nous faisons lamour.
Doù peut lui venir cette phobie ?
Je nen sais rien, comme jignore lorigine de son handicap.
Alors jespère pour toi que vous serez heureux. Je taime beaucoup, tu sais
Judith prit la main de son amie et la fixa droit dans les yeux.
Merci, dit-elle.
*
Le dimanche suivant, lil à peine ouvert, Judith se leva et fila dans la cuisine
éclairée par un rayon de soleil timide pour découvrir ce qui lattendait sur la table.
Linfirmière était absente, mais comme à laccoutumée, un petit papier était posé en
évidence. Fiévreusement, elle le lit : « Ce matin dix heures ».
Juste le temps de prendre mon petit-déj et de faire ma toilette, songea-t-elle en
sinstallant à table.
Judith avala son café, ses deux croissants et passa sous une douche rapide. Peu avant dix
heures, à peine habillée, elle saisit son trousseau de clés et en enleva le porte-clés
quelle serra dans le creux de la main. Le cur battant, elle grimpa ensuite les marches
quatre à quatre et poussa la porte de la chambre pour la refermer nerveusement. Elle
avait maintenant bien en tête la distance qui la séparait du lit aussi, tout en mettant
son masque, elle parvint assez vite sur le lieu de sa rencontre galante avec Hubert.
Ôtant le peu de vêtements quelle avait revêtus, elle sallongea nue sur le matelas, le
poing gauche étrangement fermé. Dans lobscurité, de Leulandes pénétra dans la pièce. Il
navait pas pris la précaution de sannoncer cette fois-ci, cela devenait un peu
routinier pour eux deux, devait-il penser. Contrairement à son habitude, il sinstalla à
la droite de Judith et non par-dessus. Glissant sa main entre les cuisses de sa
maîtresse, il força un petit peu pour les séparer. Il neut pas beaucoup de peine à se
donner, Judith comprit tout de suite et écarta les jambes aussi largement que possible.
Hubert entama une caresse sur lintérieur de la cuisse droite de Judith, puis remontant
doucement, la termina sur la cuisse gauche en ayant eu soin deffleurer volontairement
les lèvres de la vulve de Judith qui se laissait faire en respirant calmement. Le jeu
dura plusieurs longues minutes, la jeune femme devinait que la main de son amant se
mouillait un peu plus à chaque passage devant son sexe, car elle avait conscience de
produire de la cyprine en quantité. La caresse dHubert lexcitait au plus haut point et
malgré labsence de lumière, elle ferma les yeux pour mieux apprécier. Soudain, elle
sentit un doigt, sans doute lindex, qui montait et descendait sur ses petites lèvres
puis qui pénétra innocemment dans son temple chaud. Après quelques aller et retour, le
doigt fut accompagné du médius tandis que le pouce appuya doucement sur le clitoris.
Judith poussa un soupir. Veillant bien à ce que tous ses doigts soient correctement
lubrifiés, Hubert allait et venait dans le vagin et caressait circulairement le bouton
rose et gonflé. Afin de mieux offrir ce dernier aux doux assauts de son amant, Judith
tira la peau du capuchon et laissa apparaître son clitoris en érection. Ses soupirs
devinrent de plus en plus bruyants et rapprochés. La main dHubert allait, venait,
appuyait, excitait, frôlait ou tout à la fois et Judith ne savait plus où donner de la
tête. Enivrée par lodeur de son propre lubrifiant et par le bruit mouillé que sa vulve
produisait au contact de la caresse de son partenaire, elle poussa soudain un râle
guttural et enserra violemment les doigts dans son vagin en les bloquant du puissant étau
de ses cuisses. Lorgasme lui fit retenir sa respiration un moment puis la tension se
relâcha subitement, libérant son souffle et la main dHubert. Judith masqua délicatement
son sexe de la main pour le protéger et le soustraire à la convoitise de son amant, la
jouissance lavait épuisée. Hubert, doucement, caressait les jambes de sa compagne en la
laissant récupérer. Il sécoula plusieurs minutes puis il reprit sa position favorite, à
cheval par-dessus sa maîtresse. Il se pencha légèrement en avant et mit en contact son
énorme phallus avec le thorax de sa partenaire, juste entre les deux seins quil enserra.
Il fit aller et venir son membre dans ce tunnel improvisé et, si lépaisse obscurité
sétait soudain évanouie, on aurait pu observer le gland apparaître et disparaître sur la
peau satinée de Judith qui se régalait doffrir sa poitrine à la jouissance de son amant.
Celle-ci ne tarda pas et Hubert, accélérant ses mouvements du bassin, poussa un soupir
profond et éjacula. Judith sentit le premier éjaculat de sperme se perdre entre ses seins
et le deuxième sur son cou. Relevant légèrement la tête, elle ouvrit la bouche pour
cueillir au jugé sur sa langue la troisième et la quatrième giclée. Reposant la tête,
elle déglutit avec un plaisir non feint la semence dHubert tandis que son visage
demeurait la cible des nombreux jets suivants. Totalement en extase, elle desserra la
main gauche quelle tenait fermée depuis le début et se saisit du porte-clés dont
lextrémité était pourvue dune petite lampe à LED. Judith fit glisser son masque sur
loreiller.
Je sais que tu ne me répondras pas, dit-elle, mais sache que je taime et que je sais
que tu maimes aussi. Je fais ça pour nous deux.
Sur ces paroles, elle appuya sur un bouton et un faisceau de lumière blanche et crue
jaillit de sa main gauche pour frapper les épaules dHubert. Judith dirigea le pinceau
lumineux plus haut et, glacée dhorreur, poussa un formidable cri deffroi.
Un hurlement lugubre lui répondit et lhomme, dun seul coup de poing dans la mâchoire,
lassomma.
*
Trois semaines plus tard.
Une voiture aux couleurs de la Gendarmerie quittait la propriété dHubert de Leulandes en
direction de Valence.
Cétait un collègue, tu dis ? questionna le passager en se grattant la tête sous son
képi.
Oui, je lai connu à Dijon, répondit le conducteur. Cest dans le secteur, lors dune
chasse à lhomme quil sest pris une balle dans le genou.
Ah ! Cest moche.
Oui, estropié à vie. Même avec une pension et la Légion dHonneur, ça ne fait pas
envie. Cest dommage, il navait pas son pareil pour pister les fuyards. Je ne sais pas
comment il faisait, on voyait ses ailes du nez palpiter, on aurait dit quil flairait
On fait quoi maintenant ?
On a récupéré les affaires de la petite, on va les rapporter à sa mère à Beauvallon. La
pauvre, elle a déjà perdu son mari il y a deux ans
Heureusement, il lui reste encore un
fils.
Quest-ce qui a bien pu arriver à cette fille, nom de Dieu ? Le visage et le cou
bouffés par un loup, tu y crois toi ? demanda le passager en écartant les bras autant
quil le pouvait.
Je nai pas à y croire ou non. Les faits sont là, dit le conducteur avec un geste
dimpuissance. Moi, les questions qui me taraudent cest « Où a-t-elle pu rencontrer un
loup ? » et surtout « Pourquoi un loup aurait pris la précaution de la balancer dans le
Rhône ? » Elle était défigurée, mais encore vivante avant de se retrouver dans la flotte.
Qui a pu faire une horreur pareille ?
Ouais
La police a du pain sur la planche.
Jaime autant pour eux que pour nous, conclut le conducteur en pénétrant sur la
bretelle daccès à lautoroute du sud.
Lucette regardait par la fenêtre du salon séloigner la voiture bleue des gendarmes.
Quand celle-ci eut passé le portail, elle laissa retomber le rideau et se tourna vers
Hubert :
Tu es fier de toi maintenant ?
Hubert ne répondit pas.
Ça devait bien se terminer comme ça. Tu sais bien que les piqûres que je te fais ne
réparent que ton corps quand tu es en rut, pas la tête.
Oui, je sais. Même que ça agit un peu trop pour moi là, entre les jambes
Ne te plains pas ! Tu es beaucoup mieux loti que tes aïeux terrés au fin fond des
Cévennes. Pourquoi sappelaient-ils de Leulandes à ton avis ? Hein ? Pourquoi ?
Elle ne devait pas regarder ! Il a fallu que cette petite sotte tombe amoureuse !
Changeant de conversation Lucette se calma et reprit :
Quas-tu fait du corps ?
Jai laissé le loup sen occuper puis je lai jeté dans le fleuve non loin de la
faculté, avoua Hubert.
Jespère que cela taura servi de leçon ?
Mutisme forcené dHubert.
Soudain, la sonnerie dun téléphone portable retentit. Lucette eut un geste
dimpuissance, abandonna la discussion et retourna dans la cuisine préparer le repas du
soir. Sappuyant sur sa canne, Hubert se déplaça jusquau portemanteau où son portable
était resté dans une poche de veste.
Allo ? fit-il
Viviane ? Ah oui ! Viviane, ça me revient. Vous étiez bien une amie de Judith ? Elle
ma souvent parlé de vous.
Oui, cest un grand malheur.
Oui, oui. La chambre a été vidée par les gendarmes aujourdhui, elle est de nouveau
disponible. Judith vous a informée des conditions particulières doccupation ?
Bien, je vois que vous étiez vraiment intimes. Je suis libre dès demain si vous voulez.
Disons quatorze heures ?
*
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