0233 Sous Le Ciel De Paris (Partie 3 De 3).

Jérém et moi sommes en boîte de nuit à Paris avec ses coéquipiers lorsqu’une nana traverse la salle et attire l’attention de toute la tablée.
« Alors, tu vas pas lui dire bonjour ? » j’entends l’un des gars lancer à mon Jérém, un gars que j’ai entendu appeler Léo à plusieurs reprises pendant la soirée.
Jérém ne lui répond pas, préférant lancer un sourire gêné, boire une gorgée de bière et allumer une nouvelle cigarette.
Mais Léo revient à la charge et, avec son plus beau sourire, il balance un truc que je reçois comme un coup de poing en plein ventre :
« T’as du bien t’amuser le week-end dernier avec elle ».

Stop ! Arrêt sur image. Qu’est-ce qu’il vient de dire Léo ? Que mon bobrun s’est tapé une pintade quelques jours plus tôt ? Que ses câlins, ses bisous, ses « tu m’as manqué » ne sont là que pour me rassurer et mieux cacher ses escapades ? Comment peut-il me faire ça, après Campan et ses promesses ? Comment peut-il coucher avec des nanas ?
En fait, nous n’avons jamais parlé de cette éventualité. Certes, il m’a dit qu’il n’avait pas couché avec des mecs, mais il ne m’a jamais dit qu’il n’avait pas couché avec des nanas. Est-ce que son besoin de faire et d’être comme ses potes, pour mieux s’intégrer à son nouveau monde, couplé à ses besoins de mec, est plus fort que ce truc qu’il y a entre nous et sur lequel il est toujours incapable de mettre des mots ? Ou est-ce que tout simplement il se fiche de ma gueule ?
Soudain, j’ai l’impression que le monde s’effondre autour de moi. Mes illusions quant à la fidélité de Jérém se fracassent sur l’écueil de la dure réalité. J’ai choisi de lui faire confiance et voilà que je tombe de haut, de haut, de haut. Et ça fait mal, putain que ça fait mal !
Pendant un court instant, je croise son regard, mais il le détourne très vite.
Je me sens comme si on m’avait assené un coup de poing en plein ventre par traîtrise. J’ai la tête qui tourne. Je sens la bière tanguer dans mon ventre.

J’ai envie de vomir, j’ai envie de me casser d’ici.
Lorsque j’arrive enfin à décrocher mes yeux de Jérém, happé par le besoin de regarder ailleurs pour reprendre mon souffle et mes esprits, je croise celui d’Ulysse. Et j’ai comme l’impression que ses yeux se baladent sans cesse de Jérém à moi et de moi à Jérém, et qu’ils semblent lire dans ma jalousie, dans le malaise de Jérém, et nous mettre complètement à nu.
« Au risque de te décevoir, Léo, il ne s’est rien passé avec elle » j’entends mon bobrun se défendre.
« A d’autres… ».
« J’ai une copine ».
« L’un n’empêche pas l’autre ».
« Je ne suis pas comme ça ».
« T’es sérieux, mec ? ».
« Je te dis que oui ».
« Je ne te crois pas ».
« Casse pas les couilles » finit par lâcher Jérém sèchement.
« Eh, ne me cherche pas » fait Léo, visiblement à moitié ivre, en se levant d’un air menaçant.
« Change de disque, Léo, tu as trop bu, tu es relou » j’entends Ulysse lâcher, sur un ton tout aussi taquin que ferme, tout en posant un regard bienveillant sur Jérém. Ulysse qui vient d’attr l’avant-bras de Léo, l’obligeant à se rasseoir.
Ce dernier se mure dans un silence énervé et la conversation de la tablée repart illico sur un autre sujet.
Quant à Jérém, lui aussi visiblement chauffé, il n’a plus du tout l’air à faire la fête.
« Allez, les gars, on vous abandonne. Le métro va bientôt fermer » je l’entends lancer de but en blanc au bout d’une poignée de minutes seulement, en se levant.
« Tu te couches avec les poules » se moque un autre jeune joueur.
« C’est pour ça qu’il a une meilleure progression que la tienne » lui lance Ulysse.
Quelques instants plus tard, nous nous retrouvons dans l’air frais de la nuit parisienne. Mille questions se bousculent dans ma tête. Ce sont des questions qui peuvent fâcher, qui peuvent tout faire basculer entre Jérém et moi. Ce sont des questions dont les réponses me font peur, c’est pourquoi je n’arrive pas à les poser et que je me mure dans un silence qui devient vite oppressant.

« Tu fais la tête ? » finit par m’interroger Jérém.
« Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? ».
« Ce qui te tracasse ».
« Dans ce cas, allons y. Tu as couché avec cette nana ? ».
« Non ».
« Et pourtant Léo semblait bien sûr de son coup ! ».
« Ecoute-moi, Nico » fait Jérém en s’arrêtant subitement de marcher et en saisissant mes avant-bras pour m’arrêter « je n’ai pas couché avec cette nana, ni avec aucune autre ».
« Et pourquoi il a sorti ça, alors ? ».
« Parce qu’il m’a vu partir avec elle, c’est tout. Samedi dernier, cette nana m’a collé toute la soirée. Oui, on est parti de la boîte ensemble. Mais on n’a jamais couché ensemble. Elle voulait venir chez moi. Je lui ai dit que j’avais une copine à Bordeaux, mais elle voulait quand-même. Je lui ai dit que j’étais un gars fidèle. Elle s’est foutue de ma gueule et on s’est quittés. Mais je n’ai rien dit aux gars avant ce soir. Ils ont imaginé ce qu’ils ont voulu. Le seul qui m’a demandé c’est Ulysse ».
« Pourtant, Léo avait l’air très sûr de lui… ».
« Mais il se trompe. Nico… je… ».
« Eh, ça va les gars ? » j’entends une voix nous interpeller.
Je me retourne en même temps que mon Jérém. Guérin, le préparateur sportif est juste derrière nous.
« Je prends le métro avec vous, je vais dans la même direction » il nous explique.
Le métro est presque vide, la rame pratiquement déserte. Je m’assois à côté de Jérém, Guérin s’assoit en face de nous. Nous restons en silence pendant tout le voyage, jusqu’à ce que le préparateur sportif nous annonce :
« Je descends à la prochaine gare ».
« Ça va, Jérém ? » je tente d’engager la conversation dès que nous sommes seuls.
« Ouais » il lâche.
Dès que nous quittons la rame, Jérém allume une cigarette qu’il fume nerveusement.
A l’appart, la fougue qui avait aimanté nos corps jusqu’à il y a quelques heures plus tôt a laissé la place à un silence pesant. Collé à la petite fenêtre, mon bobrun fume cigarette sur cigarette, le regard perdu dans la nuit parisienne.

« Tu viens pas te coucher, Jérém ? ».
« Je n’ai pas sommeil ».
« Jérém ».
« Quoi ? ».
« Tout à l’heure, avant que Guérin nous rejoigne, tu allais me dire quelque chose ».
« Je sais plus ».
« Quand tu me disais que tu n’avais pas couché avec cette nana ».
« Je n’ai pas couché avec cette nana ! » il me lance avec emportement.
« Je te crois ».
« Mais j’ai failli ».
C’est dur d’entendre ça.
« Et qu’est-ce qui se passera la prochaine fois qu’une nana voudra coucher avec toi ? ».
« Je ne sais pas, je n’en sais rien. Je vais continuer avec l’histoire de la copine tant que je pourrais. Mais je ne pourrai pas leur faire gober ça éternellement ».
Je sais que c’est le bon moment pour lui parler de ce sujet qui me tracasse depuis bien longtemps. Mais les mots restent bloqués au fond de ma gorge, retenus par la peur. J’ai l’impression d’être au bord d’un précipice et de devoir accomplir un numéro d’équilibriste extrêmement périlleux.
« Jérém, je ne veux pas t’obliger à me mentir » je finis pourtant par lancer.
« Je ne te mens pas ».
« Ce que je veux dire c’est… que… si un jour tu craques… je voudrais juste être sûr que tu te protèges… ».
« Mais je ne veux pas craquer ».
« Je ne veux pas non plus que tu craques… je ne veux surtout pas que tu craques ».
« C’est dur de te dire ça » je me force à continuer, alors que j’ai l’impression que ma gorge se sèche et se paralyse « mais si un jour ça devait arriver, je veux que les choses soient claires. Entre nous, on fait sans capote. Mais si on va voir ailleurs, on se protège ».
« Tu veux aller voir ailleurs ? ».
La petite note d’inquiétude que je crois déceler dans la précipitation de sa question me touche et me rassure d’une certaine façon.
« Mais non, pas du tout, pas du tout. C’est toi que j’aime et je n’ai aucune envie de coucher avec un autre gars. Je le répète, je n’ai pas du tout envie d’aller voir ailleurs et non je n’ai pas envie que tu ailles voir ailleurs non plus.
Mais si ça devait arriver, je ne veux pas qu’on prenne le moindre risque. Les MST ça peut être grave. Aussi, si ça devait arriver, je te demande trois choses. D’abord, protège-toi, protège-nous. Ensuite, je ne veux pas savoir. Ne laisse rien traîner, protège-moi de ce côté-là aussi. Et enfin, Jérém… surtout, surtout, surtout, ne tombe pas amoureux ».
« Nico… » fait le bobrun, en me rejoignant enfin au lit, en me serrant fort dans ses bras musclés et en plongeant son visage dans le creux de mon épaule.
« Promets-moi, Jérém ».
« Je te le promets ».
« Moi aussi je te le promets ».
« Tu es tellement important pour moi, Jérém. Je suis tellement heureux avec toi, surtout depuis Campan » je lui chuchote, tout en caressant doucement ses cheveux.
« Moi aussi je suis bien avec toi ».
Ses mots me rassurent. Sa tendresse me rassure. Son besoin de câlins me rassure.
On peut fantasmer sur tous les bogoss du monde, et c’est même inévitable. Mais il n’est rien de plus précieux que d’avoir quelqu’un dans sa vie qui compte pour nous et pour qui on compte.
Nous restons ainsi, enlacés, mon bobrun blotti dans mes bras, jusqu’à ce que le sommeil nous happe, alors que la pluie a recommencé à tomber dehors.

Dimanche 14 octobre 2001.

Lorsque je me réveille, Jérém dort encore. Le petit réveil sur la table de nuit indique 10h17. Ce n’est pas tôt, mais j’en avais besoin. De toute façon, rien ne presse. Bien sûr, c’est ma première fois à Paris et une partie de moi trouve dommage de ne pas en profiter pour visiter un peu plus. Mais, une fois encore, je me dis que le plus important pour l’instant est de passer du temps avec mon bobrun et que pour visiter Paris j’aurais d’autres occasions.
Les souvenirs de la veille remontent peu à peu à mon esprit. Les mots de Léo. Le regard d’Ulysse. Notre départ de la boîte de nuit. Jérém qui me dit qu’il ne s’est rien passé. Ses mots : « mais je ne veux pas craquer ». Oui, j’ai envie de le croire. C’est beaucoup plus rassurant de le croire.
Est-ce que ma trique du matin me pousse à être trop confiant ? La proximité de mon beau mâle brun me met dans tous mes états. Comme chaque fois au réveil, j’ai horriblement envie de lui.
Une fois n’est pas coutume, mon bobrun ne dort pas sur un flanc ou sur le dos, mais il est à plat ventre, l’oreiller coincé en travers entre le matelas, son épaule et son visage. Le drap descendu à hauteur de ses reins me permet d’admirer la beauté sculpturale de son dos, de ses épaules, de son cou, ainsi que la sexytude insoutenable de ses tatouages de mec.
Soudain, je me rappelle qu’il va avoir 20 ans dans deux jours. Et je constate une fois de plus à quel point il est beau comme un dieu.
Pour assouvir mon envie, qui va devenir aussi son envie, je dois d’abord le réveiller. Je vais m’y prendre tout en douceur.
Je commence par poser quelques bisous légers à la base de sa nuque. Le bobrun frémit dans son sommeil. Je laisse glisser mes lèvres le long de son cou à la peau mate. Il pousse un petit grognement de plaisir qui m’encourage à continuer mon petit programme de réveil sensuel.
Je passe lentement la langue dans le creux de ses omoplates, je descends délicatement le long de sa colonne vertébrale, jusqu'au creux de ses reins. Le bogoss se remue un peu, s’étire, mais ne change pas de position. Les profondes inspirations que je l’entends prendre me disent qu’il semble apprécier le traitement.
J’arrive ainsi à la limite de sa nudité. Pour aller plus loin, je dois d’abord tirer ce drap qui recouvre ses fesses bombées, ses cuisses musclées. Là aussi, j’y vais lentement. Le glissement du drap sur la peau de ses fesses provoque en lui une sorte de frisson intense que j’ai l’impression de ressentir également en moi. Je sens que l’excitation est en train de gagner son corps et son esprit.
Je m’enhardis, je me faufile entre ses jambes. J’envoie ma langue exciter une nouvelle fois le creux de ses reins, ce qui provoque un nouveau frisson. Puis, je la laisse descendre lentement, jusqu’au délicat début de sa raie. Et là, alors que mes mains écartent ses globes, je la laisse glisser doucement dans le sillon de ses fesses. Le bogoss se cambre légèrement, il écarte un peu plus ses cuisses. Je vais directement au but, j’excite son trou avec entrain, animé par l’envie de lui faire plaisir comme jamais.
Très vite, le bogoss plie ses genoux, relève le bassin pour offrir totalement et impudiquement sa rondelle à la caresse gourmande et insatiable de ma langue qui cherche à le fouiller de plus en plus profondément, tout en lui arrachant gémissements et soupirs de plaisir.
Jérém se branle en même temps. Je ne serais pas contre le faire jouir de cette façon. Mais le bobrun a d’autres projets. Après un bon petit moment et de nombreux frissons, il se retourne, me fait basculer sur le matelas, sur le dos, il s’allonge sur moi, torse contre torse, il m’embrasse. Puis, il lèche longuement mes tétons, tout en saisissant nos deux queues dans sa main et en les branlant, gland contre gland. Les va-et-vient de sa main sont lents, doux, et c’est divinement bon.
Tellement bon que je sens très vite mon orgasme arriver.
« Je vais jouir » je lui annonce.
« Moi aussi » il me répond, tout en m’embrassant.
Une pluie de giclées chaudes atterrit sur mon torse, nos semences se mélangent sur ma peau, jusqu’à mes pecs, jusqu’à mon menton.
Après m’être essuyé, je retrouve les bras puissants et chauds de mon mec. Et une nouvelle fois, bercé par ce bonheur mâle, je me sens glisser dans le sommeil.

Lorsque j’émerge à nouveau, il est presque midi. Jérém n’est plus au lit mais je retrouve facilement sa trace en percevant le bruit de l’eau dans la douche. Lorsqu’il sort de la salle de bain habillé uniquement d’un boxer blanc à la bosse on ne peut plus tentante, ainsi que d’un t-shirt bleu ciel moulant ses pecs et ses épaules, j’ai envie de lui sauter dessus.
« Bonjour toi » je lui lance « t’as bien dormi ? ».
« Ça va, et toi ? ».
« Pas mal du tout ».
« Tu passes à la douche, j’ai faim ! ».
Je prends ma douche, mais pas avant m’être shooté pendant quelques instants au bouquet viril et oh combien érotique qui se dégage à la simple ouverture de son sac de sport. Je prends ma douche comme dans un état second, enivré par l’air chargé d’une humidité saturée par le mélange des fragrances de son gel douche et de son déo.
Dès que je suis prêt, nous quittons l’appart et nous prenons le métro direction le Champ de Mars. Le bogoss a remis son beau blouson d’étudiant et il est sexy à mort.
Nous déjeunons dans un bistrot non loin de la Tour Eiffel. Pendant que nous attendons le dessert, Jérém me propose de monter sur la Dame de fer après le déjeuner.
« Ça vaut le coup » il m’annonce.
« Tu y es déjà monté ? ».
« Oui, avec des potes ».
« Avec Ulysse ? ».
« Oui, il connaît cette ville par cœur ».
« Vous avez l’air de bien vous entendre ».
« Entre lui et moi le courant est passé depuis le premier jour. C’est le premier gars qui est venu me parler, c’est lui qui m’a présenté à tous les autres, c’est lui qui m’a invité aux soirées, et qui m’a fait me sentir bien. Ce gars est un type bien, il m’aide beaucoup à progresser. Il a beaucoup d’expérience et il sait en faire profiter ».
« Mais au fait, il a quel âge ? ».
« Je crois qu’il a 27 ans ».
Ah, oui, 27 ans. Je m’étais dit qu’il faisait plus âgé et plus mûr que mon Jérém.
« Il est arrivé au Racing il y a deux ans. Avant il jouait à La Rochelle ».
« D’où la copine là-bas ».
« Ulysse est quelqu’un qui a vraiment l’esprit d’équipe, du rugby » il continue « Il est généreux, c’est un véritable pote. Et en plus, il est marrant. Et puis, il sait toujours garder la tête froide, il sait motiver les troupes, c’est le genre de gars qui t’oblige à aller chercher le meilleur de toi-même pour mériter son amitié ».
« C’est drôle, quand je t’entends parler de lui, j’ai l’impression que tu parles de… ».
« Thib » il finit ma phrase.
« Et voilà, c’est bien ça. Dès que je l’ai vu, je me suis dit : voilà un « Thibault » en version blond » je confirme.
« Ce gars est mon garde-fou comme l’était Thib. Je sais qu’il sera toujours là pour moi et qu’il saura me rappeler à l’ordre si je déconne ».
Les mots de Jérém ne font que confirmer l’impression que j’avais eue dès le départ au sujet d’Ulysse, le fait que ce dernier a un véritable ascendant sur lui, qu’il l’a pris sous son aile, comme Thibault l’avait fait à une autre époque.
« Au fait, tu as des nouvelles de Thib ? » il me demande.
« Je l’ai eu au téléphone le week-end dernier. Nous n’avons pas pu beaucoup parler, parce qu’il était dans sa belle-famille dans le Gers. Mais il a l’air d’aller mieux. Apparemment, les médecins sont optimistes, il devrait pouvoir recommencer à jouer avant la fin de l’année ».
« Ça me fait plaisir ».
« Ce que tu as fait pour lui, les retrouvailles entre potes, je pense que ça lui a vraiment fait du bien ».
« J’espère ».
« C’est bien que vous ayez pu vous reparler ».
« Je me sens mieux depuis ».

A la tour Eiffel, il y a de l’attente. Jérém commence à s’impatienter mais nous finissons par pouvoir engager la montée au premier palier par les escaliers. Vue de près et de l’intérieur, la structure métallique de la Dame est impressionnante. Une prouesse architecturale et artistique. Au premier étage, la vue sur Paris est déjà intéressante. Mais nous savons pertinemment qu’il y a mieux.
Nous nous sentons motivés pour continuer la montée par les escaliers. Les muscles fatiguent mais la détermination ne faiblit pas. Au deuxième étage la vue est saisissante. Dans sa vue imprenable à 360 degrés, je peux admirer la perspective du Champ de Mars, de l'Ecole Militaire, de la tour Montparnasse et du dôme des Invalides. Mais aussi la Seine, ses ponts, ses péniches.
Je regrette de ne pas avoir pensé à prendre un appareil photo.
Nous empruntons l’ascenseur pour atteindre le dernier étage. Au troisième palier, la vue est impressionnante. Il y a du vent et le sommet de la tour oscille de façon perceptible donnant à la plateforme un léger mouvement de berceau.
Il est 16h00 lorsque nous redescendons.
« Il est à quelle heure ton train ? » me demande Jérém.
« 18h58 ».
« Tu veux encore te balader ? ».
« Non, je veux rentrer à l’appart pour te serrer contre moi ».
Le bogoss sourit. Ma réponse a l’air de lui plaire et d’aller dans le sens de sa question.
A l’appart, dès la porte d’entrée claquée derrière nous, nos mains respectives se glissent impatiemment sous le t-shirt de l’autre. Très vite, ces derniers remparts de tissu finissleent par sauter, permettant aux mains et aux bouches de se promener librement sur les pecs, les épaules, les cous.
Jérém me fait l’amour une dernière fois, puis me pompe jusqu’à me faire jouir à mon tour.
Nous venons de nous offrir du plaisir mutuellement. A cet instant précis, j’ai juste envie de m’endormir à côté de mon bobrun et de me réveiller le lendemain toujours à côté de lui.
Hélas, l’heure tourne et il est temps pour moi de bouger si je ne veux pas rater mon train pour Bordeaux.
Je n’ai tellement pas envie de partir. Surtout que dans deux jours c’est son anniversaire et que je voudrais bien le lui fêter avec lui comme il se doit.
Mais une nouvelle semaine arrive, une semaine de cours à la fac pour moi, une semaine d’entraînements et de cours aussi pour mon Jérém. Je sors de la douche, je m’habille et, avant de partir, je sors les deux petits paquets de mon sac et je les lui donne.
« C’est quoi ça ? ».
« C’est pour ton anniversaire ».
« Oh, Nico, il ne fallait pas » il me lance, l’air très touché « merci beaucoup ».
« Avant de me remercier, ouvre-les ! Peut-être que tu vas pas aimer ».
« Je suis sûr que si… ».
Le bogoss ouvre le premier paquet, contenant les photos de Campan.
« Bon anniversaire Jérém, avec un peu d’avance… ».
« Ah, des photos ! De nous deux… à cheval… à Campan… on a passé vraiment des beaux moments avec cette bande de fous. J’ai passé vraiment des bons moments avec toi » je l’entends dire, en feuilletant rapidement le petit paquet d’images.
« Moi aussi j’ai passé un moment génial là-haut, avec toi ».
« On est beaux tous les deux » je l’entends s’exclamer en recommençant un nouveau diaporama.
« Grave ! » je confirme.
« Ça se voit qu’on est bien ensemble » j’ajoute.
« Merci, merci beaucoup, Nico ».
Jérém a l’air vraiment touché. Emu.
« De rien, de rien » je lui réponds, en essayant de contenir mon émotion.
Jérém pose les photos sur la table, vient vers moi et il me serre très fort dans ses bras. Le contact avec son torse, ses bras, son visage est pour moi une source de bien-être absolu et de bonheur immense.
« Merci d’être là. J’ai de la chance de t’avoir rencontré… si je n’avais pas fait le con dans mon premier lycée, je ne t’aurais jamais croisé ».
« Ne m’oublie pas Jérém ».
« Ça ne risque pas » il réagit, tout en décollant son torse du mien, en me regardant droit dans les yeux et en me donnant un bisou.
« Il reste un petit cadeau » je lui lance, pour faire diversion et cacher mes larmes.
« T’es fou, Nico ! » fait-il, tout en ouvrant le deuxième paquet.
« Je ne sais pas si tu vas aimer, mais tu peux la changer à Toulouse si tu veux ».
Le bobrun ouvre la petite boîte et il en extrait la chaînette de mec que j’ai achetée quelques jours plus tôt.
« Mais-elle-est-magnifique ! » il s’exclame, en détachant bien les mots, comme pour mieux me montrer à quel point il apprécie mon cadeau.
« J’espère qu’elle est à ta taille ».
« Il n’y a qu’un moyen de le savoir » fait-il, en me tendant le petit bijou et en se retournant pour que je puisse la lui passer autour du cou.
Les doigts tremblants, je la fais glisser autour de son cou puissant, et je l’agrafe. Jérém m’att par la main et m’amène vers la petite salle de bain. Il s’arrête devant le miroir, il contemple sa nouvelle chaînette calée sur son t-shirt bleu ciel, à hauteur de ses pecs moulés par le coton doux.
Je ne suis pas peu satisfait de mon coup. Car je trouve que la longueur, la taille de la maille, sa forme, son éclat, tout est parfait. Je trouve que ça lui va comme un gant. Je trouve que ça ajoute encore de l’éclat à une sexytude déjà insupportable. Je l’imagine déjà, en train de me faire l’amour, cette chaînette ondulant autour de son cou au gré de ses va-et-vient. Je regrette de ne pas lui avoir donné plus tôt dans le week-end, pour pouvoir la voir en action pendant l’amour. J’ai encore envie de lui.
Cependant, j’attends son verdict avec un peu d’appréhension. Mais il ne se fait pas attendre.
« Elle est parfaite ».
« C’est vrai, tu l’aimes ? ».
« Elle est très belle… mais il ne fallait pas ».
« Si, il le fallait. Tu m’as donné la tienne, et ça manquait à ton cou ».
Pour toute réponse, le bobrun glisse ses doigts dans l’arrondi de mon t-shirt et il en extrait son ancienne chaînette.
« Elle est à toi maintenant. Comme ça, je suis toujours un peu avec toi » fait-il, en touchant ma chaînette.
« Et maintenant, tu es toujours un peu avec moi » il enchaîne, en touchant mon cadeau.
« A nouveau, merci beaucoup Nico » fait-il, en me serrant une nouvelle fois dans ses bras.
« Jérém… je suis désolé. Je voudrais ne jamais partir, mais l’heure approche ».
« Ah oui, tu as raison ».
« C’est maintenant qu’on se quitte » je lui lance.
« Non, parce que je vais t’accompagner à la gare » fait-il, en attrapant son blouson d’étudiant sexy et en le passant par-dessus son beau t-shirt bleu ciel agrémenté d’une nouvelle chaînette tout aussi sexy.
« Mais tu vas pas te taper plus d’une heure de métro juste pour m’accompagner ».
« Tu me connais mal » fait le bobrun, en s’avançant vers moi d’un pas rapide, et en me collant contre le mur comme s’il voulait me faire l’amour sauvagement. Mais au lieu de quoi, il att mon visage entre ses deux mains, et il m’embrasse fougueusement. Des baisers tellement chauds qui ont le pouvoir de me faire bander sur le champ.
« Allez, on y va » il lance, en se décollant de mes lèvres.
« T’as raison, maintenant que je bande comme un âne ».
Le bobrun revient vers moi, il presse sa bosse bien tendue contre la mienne, contact qui me procure un frisson intense qui me fait sursauter.
« Toi aussi tu bandes » je constate, dans un état second.
« Beau p’tit mec » il lance, l’air aussi excité que moi.
« C’est toi qui es beau comme un Dieu ».
« Si on avait le temps » il enchaîne en me chuchotant à l’oreille « je te boufferais bien le cul jusqu’à te rendre dingue, avant de te défoncer jusqu’à ce que tu demandes pitié ».
« Et tu me remplirais de ton jus chaud ? ».
« Oh, que oui, et tu partirais fourré comme jamais ».
En quelques baisers enflammés, en quelques mots allumeurs, le bobrun a réussi à provoquer en moi un incendie de désir. Un incendie qui s’est propagé d’un corps à l’autre et qui nous ravage désormais d’envies sensuelles. J’ai tellement envie de lui que je serais prêt à rater mon train.
Je regarde ma montre. Je me dis que j’ai bien dix minutes pour me faire défoncer une dernière fois par mon beau mâle, avant je ne sais pas combien de temps.
Je le regarde droit dans les yeux, et dans les siens je lis le même désir qui est le mien. Sans ciller, je défais sa ceinture et sa braguette.
Le bogoss me regarde faire, excité à mort.
« Nous n’avons que dix minutes » je lui lance.
« Ce sera largement suffisant pour te faire grimper au rideau ».
Et là, je le vois se débarrasser de son blouson d’étudiant en le jetant nonchalamment sur le lit, baisser son pantalon et son boxer avec des mouvements précipités, s’avancer vers moi, m’attr par les épaules avec un geste très ferme, me faire pivoter en me positionnant face au mur.
Et là, tout en squeezant le passage « je te boufferais bien le cul jusqu’à te rendre dingue » par manque de temps, j’entends le bogoss cracher dans sa main, se badigeonner rapidement la queue, puis mon trou.
Un instant plus tard, son gland se faufile dans le sillon de mes fesses, visant pile à l’entrée de mon trou de bonheur. Le bobrun s’enfonce en moi, glisse en moi, prend possession de moi. Il commence à me tringler, tout en envoyant ses doigts caresser habilement mes tétons.
« Vas-y, défonce-moi bien beau brun ! » je lui lance, fou de plaisir.
« Oh oui, je vais bien te défoncer » fait-il, en envoyant ses coups de reins avec une puissance décuplée.
« Fais-toi plaisir, mec » je le chauffe encore « n’aies pas peur de m’éclater le cul, je veux sentir tes coups de bite jusqu’à Bordeaux, je veux me souvenir de ta puissance de mec pendant des jours ».
Et là, je sens ses mains empoigner mes hanches si fort que j’en ai presque mal. Le jeune mâle fougueux, chauffé à bloc, me défonce en mode marteau piqueur. J’ai l’impression que son gland tape si fort et si loin comme jamais auparavant. Ses couilles frappent les miennes comme des coups de martinet. Au début, ça me fait même un peu mal. Mais avec la montée de l’excitation, ça en devient une partie du plaisir.
Ses va-et-vient sont si puissants et rapides, les glissements de son manche raide dans ma chair si nombreux que, peu à peu, je sens une brûlure s’installer à l’entrée de mon trou. Une brûlure qui n’est pas encore désagréable, et qui est exactement ce que je cherchais, une brûlure qui va me suivre pendant des jours, comme lors de nos premiers ébats dans l’appart de la rue de la Colombette à Toulouse, une brûlure qui va se réveiller à chaque fois que je vais marcher, rester assis pendant longtemps, ou simplement contracter mon trou. Une brûlure que je vais sentir pendant que je me branle, pendant que je jouis. Une brûlure qui va me rappeler la puissance de mon mâle, qui va me faire sentir bien à lui, et pendant longtemps.
« Ah putain Jérém, tu me baises tellement bien ! ».
« Tu la kiffes ma queue, hein ? ».
« Elle me rend fou, elle est tellement bonne ! ».
« Je t’éclate bien le cul, hein ? ».
« Tu me fais plaisir à un point que tu ne peux même pas imaginer ».
« Je vais te remplir, mec… » je l’entends souffler, la voix coupée par l’orgasme qui submerge déjà son esprit.
Et là, je sens ses coups de reins ralentir jusqu’à presque s’arrêter. Sa queue bien enfoncée en moi ne donne plus que des petits coups espacés, des petits coups synchros avec des soupirs profonds sortant de sa cage thoracique, chacun d’entre eux me notifiant une nouvelle bonne giclée de sperme de mâle brun fourrant bien profondément mes entrailles.
Je suis tellement excité que je peux m’empêcher, une fois que le bobrun se retire de moi, de me mettre à genoux devant lui, de prendre en bouche sa queue toujours raide, d’astiquer son gland jusqu’à retirer la moindre trace de cette boisson divine qui m’enivre comme une drogue.
Lorsque je me relève, aidé par ses mains qui se faufilent sous mes aisselles et m’aident à me mettre debout, je prends Jérém dans mes bras et je le serre très fort contre moi.
« C’était trop bon » je lui chuchote.
« C’était un truc de malade. Je t’ai pas fait mal ? ».
« Non, tu m’as fait trop de bien ».
Je lui fais plein de bisous dans le cou, insatiable d’effusions vis-à-vis de ce corps, de ce mec qui m’a offert tant de plaisir.
« Il faut y aller, Nico ».
« Pffff, j’ai pas envie ».
Le bogoss sourit.
Je commence à remonter mon boxer et mon jeans, lorsque je réalise quelque chose que je n’avais pas remarqué jusqu’à maintenant. L’un et l’autre sont souillés de taches humides. Je touche mon gland, il est humide aussi. Je réalise que j’ai joui sans même m’en rendre compte. Le plaisir provoqué par sa queue me limant avec une puissance de dingue, ainsi que le bonheur de le sentir jouir en moi a dû happer mon esprit jusqu’à m’empêcher de sentir mon propre orgasme.
Je suis obligé de rouvrir ma valise, de me changer, sous le regard amusé de mon bobrun qui a allumé une clope.
Je regarde la montre. Il n’y a plus une minute à perdre. Nous nous échangeons un dernier bisou et nous quittons l’appart. Dès la porte refermée derrière nous, cet appart me manque déjà. J’espère le revoir bientôt. Si j’avais les moyens, j’y reviendrais déjà le week-end prochain. Au pire, je reviendrai dans deux semaines. Je me dis qu’il faut que je revienne au moins toutes les deux semaines.
Nouveau métro, un peu plus peuplé en ce dimanche soir. Le Parisien revient au bercail avant le début de la nouvelle semaine.
Comme toujours, en quelques images furtives, un geste, un regard, un sourire, un jeans bien porté, un t-shirt ajusté, une barbe, une traînée de parfum, le métro me plonge dans cette multitude tourbillonnante, bouillonnante, enivrante et infinie de tout ce qu’une ville comme Paris peut compter de charmes masculins. Des sexytudes à la fois captivantes, ensorcelantes, incandescentes, allant du bogoss viril et ténébreux, mâle alpha, au choupinou à couvrir de câlins, une multitude multicolore se renouvelant à chaque minute, presque chaque seconde, à chaque couloir, à chaque station de métro.
Je ne peux pas ne pas ressentir une sorte de vertige en essayant vainement de saisir toutes ces nuances de bogossitudes, en essayant de prolonger par mon regard aimanté cet instant trop bref où j’ai été d’un coup percuté par la jeunesse, la bogossitude aveuglante d’un p’tit con ou d’un beau barbu.
C’est terriblement frustrant de ressentir ce sentiment paradoxal de se trouver au milieu de l’effervescence de tant de vies, mais d’en rester à l’extérieur. Et je ressens comme une envie de me diluer dans la foule, comme un fluide, comme un brouillard, pour pouvoir toucher, caresser, sentir toute cette jeunesse et ces bogosses dans leur entièreté, dans leur totalité, pour pouvoir tout savoir de tous.
Oui, dans une ville nommée Paris, il y a un endroit appelé métro, une ville sous la ville composée d’un complexe réseau de couloirs et de gares, mais aussi par un encore plus inextricable réseau de vies, de destins, d’émotions, de frustrations.
Parfois je me demande pourquoi je ressens tous ces frissons, et à quoi bon me poser toutes ces questions. D’autant plus en présence du garçon que j’aime.
Et puis l’instant d’après, je me dis que je ne pourrais pas renoncer à cet aspect de ma vie intérieure, à cette partie de moi. Même si je suis heureux dans ma vie sentimentale.
Je peux m’empêcher de coucher avec un beau mec. Ce qui est d’ailleurs très simple la plupart du temps, car l’immense majorité des beaux mecs que je croise m’est inaccessible. Mais je ne pourrais jamais s’empêcher d’éprouver un frisson, de fantasmer sur ces mêmes beaux mecs. Car la bogossitude fait appel à un instinct primaire qui échappe définitivement à mon contrôle. Alors, apprécier la bogossitude est un besoin primaire comme respirer, boire, manger, dormir.
A la Gare Montparnasse, Jérém m’accompagne jusqu’au quai. Au moment de nous quitter, j’ai l’impression qu’il est ému.
« Je voudrais tant être capable de te rendre heureux » je l’entends lâcher tristement.
« Mais tu me rends heureux ! Tu ne peux même pas imaginer à quel point ! ».
« Tu n’as pas à t’inquiéter pour ce dont on a parlé cette nuit. Je n’ai pas du tout envie d’aller voir ailleurs » il enchaîne, adorable.
« Moi non plus je n’en ai pas envie. Je t’aime Jérém ».
J’ai du mal à retenir mes larmes.
« Monte ! » je l’entends me lancer.
Sans savoir ce qu’il a en tête, je m’exécute. Et là, après avoir regardé autour de nous qu’il n’y ait personne dans les parages, il me claque un dernier bisou volé au temps et aux regards. Nos lèvres viennent tout juste de s’éloigner lorsqu’un type rentre dans le train derrière nous.
« Avant de te rencontrer, je ne savais pas ce que c’était d’être heureux. Et pour ça, tu es quelqu’un de très spécial pour moi » il me glisse discrètement « C’est ça que je voulais te dire hier soir quand Guérin nous a interrompus ».
Ah putain, qu’est-ce que j’aime ce Jérém !
« Moi aussi je suis tellement heureux de t’avoir rencontré ! Tu vas me manquer ! ».
« Toi aussi tu vas me manquer, ourson… ».
« Je viendrai te revoir bientôt, ptit loup ! ».
« Envoie-moi un message quand tu es arrivé à Bordeaux ».
« Ok, Jérém, on s’appelle. Et on se revoit bientôt ».
Le bogoss sourit et descend tout juste une poigné de secondes avant que les portes ne se referment. Je le regarde, il ne me quitte pas des yeux. Nos regards s’aimantent jusqu’à ce que l’avancement du train les arrache brutalement l’un de l’autre.
Quitter Jérém est une déchirure. J’ai tellement envie de pleurer. C’est horrible à quel point il me manque déjà. C’est comme si son corps était une partie du mien, comme si son âme était une partie de la mienne. La séparation, je la vis comme une violence extrême, comme une injustice, comme une mutilation de mon cœur, de mon âme.
Il me faut de longues minutes pour me décider à quitter le passage entre wagons pour aller chercher une place assise. Le train étant à moitié vide, je peux choisir une place sans personne autour.
Je ferme les yeux et je repense au week-end qui vient de se terminer. Je repense aux bons moments avec Jérém. A nos retrouvailles, à sa façon de me faire l’amour. Je repense à notre soirée à Montmartre et sur la Seine, magique. A quand nous avons fait l’amour au son de la pluie.
Et je ne peux m’empêcher de repenser à notre sortie au « Pousse au Crime ». Et aux mots de Léo quant à cette nana que Jérém aurait ramenée chez lui le week-end d’avant. J’ai choisi de croire Jérém quand il m’a assuré qu’il ne s’était rien passé. Et pourtant, en m’éloignant de lui, je recommence à douter. Et si Jérém m’avait menti pour me ménager ? Et s’il avait vraiment couché avec cette nana ? Et s’il l’avait fait pour faire ses preuves aux yeux de ses nouveaux potes ? Ou bien parce qu’il ne peut pas tenir trois semaines sans coucher ? Ou parce que son égo a besoin d’être rassuré ?
Je repense aussi aux mots de Julien et du sage Albert, quant au fait que je ne pourrai pas lui empêcher d’avoir des aventures. Ça me fait horriblement mal d’imaginer mon bobrun au lit avec une nana, même si c’est juste pour se soulager et pour montrer à ses potes qu’il est l’un des leurs. Et pourtant, je devrais peut-être l’accepter. Tant que je suis spécial à ses yeux, tant que je suis le seul à lui offrir son véritable plaisir, le seul avec qui il fait l’amour, le seul avec qui il couche sans se protéger, cela devrait me suffire. Cette histoire de nana, qu’elle soit vraie ou pas, a quand même un côté positif : elle nous a permis d’aborder le sujet de la protection et cela devrait me rassurer d’une certaine façon.
Même si, d’un autre côté, le fait d’avoir parlé prévention a un revers de la médaille qui me donne déjà des sueurs froides. Je ne veux pas que maintenant que nous avons parlé de cela, Jérém se sente libre d’aller voir ailleurs en se disant que, peut-être je vais voir ailleurs aussi. Je repense à sa réaction vive lorsque je lui ai dit que nous devons nous protéger en cas d’aventures. J’ai eu l’impression que l’idée que je puisse coucher avec un autre gars l’a fait tiquer.
Ce qui me pourrait vraiment me rassurer, c’est de l’avoir entendu dire « qu’il ne veut pas craquer ». Et ce serait le cas, si seulement dans ces mots je n’avais cru déceler un déchirement, le déchirement entre la volonté de rester fidèle à son engagement vis-à-vis de moi, de ne pas me faire du mal et la tentation à laquelle il est exposé et vers laquelle la pression sociale le pousse avec insistance.
Plus je m’éloigne de Paris, plus j’ai l’impression que le tableau s’assombrit. Peut-être bien que Jérém a tenu bon jusqu’à maintenant. Mais qu’en sera-t-il pour l’avenir ? Jusqu’à quand pourra-t-il résister à la tentation et à la pression de ses nouveaux potes ? Quand allons-nous nous revoir ?
Dans ce tableau, il y a un personnage qui vient de débouler au tout premier plan : Ulysse.
Ce gars a un ascendant fou sur Jérém, qui semble lui vouer une véritable admiration. Comme c’était le cas pour Thibault, mais d’une façon encore plus entière. C’est peut-être du fait de son âge, de son expérience, mais en présence de ce gars, mon Jérém d’ordinaire très sûr de lui, semble complètement subjugué, conquis, fasciné, captivé par sa personnalité. Jérém a besoin d’être rassuré et ce gars semble remplir ce rôle à merveille.
Ulysse semble vouloir « protéger » Jérém, le dernier arrivé, son nouveau pote, qu’il a pris sous son aile ou plutôt sous son biceps puissant. Il semble vouloir aider le jeune rugbyman débutant à exprimer son potentiel.
Pourvu que ce gars n’ait pas de vues sur mon Jérém ! Parce que si jamais Jérém tombe sous le charme d’un gars comme cet Ulysse, je ne pense pas que je ferais le poids. Les nanas, au fond, ne me font pas peur. Mais un gars comme Ulysse…
Arrête, Nico, tu te fais du mal.
Est-ce que Ulysse a vraiment compris pour Jérém et moi comme je l’ai cru pendant la soirée en boîte ou est-ce que je me suis fait des idées ? J’ai choisi de ne pas en parler avec Jérém. Est-ce que j’aurais dû ? Est-ce que je devrais ? Est-ce que si c’est vraiment le cas, Ulysse va en parler à Jérém ?
A force de me poser de questions sans réponse, j’ai l’impression que ma tête va exploser. Je ferme les yeux pendant quelques instants, j’essaie de me calmer. Lorsque je les rouvre, j’essaie de me distraire en lançant un scan de bogossitude dans ma rame.
La recherche n’ayant donné aucun match remarquable, j’en profite pour avancer dans mon bouquin d’Harry Potter. Les kilomètres s’enchaînent, les pages aussi. A Poudlard c’est déjà Noël lorsque le train s’arrête en gare de Poitiers. Un arrêt de quelques minutes, pendant lequel je suis distrait de ma lecture par les mouvements des passagers qui se préparent à descendre et par ceux qui s’installent. Le remue-ménage cesse enfin, le train repart vers la gare suivante.
Je me dis que je vais enfin pouvoir me replonger dans mon livre, lorsque quelque chose de remarquable attire mon attention.
Un mec vient de rentrer dans la rame. Il est assez grand, il a les cheveux châtain clair, des yeux clairs entourés par des lunettes fines qui lui donnent un regard un peu intello. Il doit avoir genre 25 ans, et il est habillé d’un jeans et d’une chemise à tout petits carreaux bleu et blanc. Et il n’est pas mal du tout. Il n’a pas de bagage, mais il se trimballe un sac en plastique du genre carré et assez costaud, comme ceux qui sont en vente aux caisses des supermarchés, Un sac qui m’intrigue, parce qu’il a l’air de… bouger tout seul.
Le mec avance dans ma direction et finit par s’installer trois rangées plus loin, de l’autre côté du couloir, pile dans mon champ de vision. Il est vraiment pas mal. Il est même plutôt sexy. Il a un regard pétillant qui attire la lumière et le désir. J’essaie de le mater discrètement pour ne pas me faire repérer.
Mais très vite, le gars accroche mon regard. Et une fois accroché, il le ferre avec un putain de sourire à me faire tomber de mon fauteuil.
C’est la première fois que cela m’arrive, qu’un gars inconnu me mate de cette façon, sans détours. Et c’est la première fois que j’ai la presque certitude que son regard dit ce que je pense bien qu'il dit. Le gars n’arrête pas de me mater et me lancer des petits sourires plutôt charmeurs. Dès que je lève le nez de mon bouquin, son regard est là, il semble m’attendre.
Je ne peux m’empêcher de chercher ce contact, flatteur, intriguant, excitant avec son regard. D’autant plus qu’un autre truc m’intrigue chez ce gars : c’est le fameux sac qu’il a posé sur le siège à côté du sien. Un sac qui ne cesse de bouger bizarrement.
Ma curiosité ne tarde pas à être satisfaite. Le « sac » émet un petit couinement. Le gars se penche sur son « bagage » et une boule de poil couleur sable pointe le bout de sa truffe par-dessus le bord. Il s’agit d’un chiot labrador, j’en suis presque certain.
Je suis touché par cette image, un bogoss transportant un petit chiot. Je ne peux les quitter des yeux, touché tout autant par l’homme que par l’animal. Ainsi, je croise à nouveau le regard du mec, illuminé par un beau sourire. Une fois de plus, je me refugie dans mon bouquin.
Je suis conscient de jouer avec le feu. Se sentir désiré est tellement flatteur, et a fortiori quand cela vient de quelqu’un par qui on est également attirés. Flatteur et excitant. Une excitation qui est comme une drogue, qui nous ôte le contrôle de nous-même et qui est tout à fait capable de nous pousser à faire des bêtises si on n’y prend pas garde suffisamment tôt.
Je décide de me ressaisir. Je reviens à ma lecture, et je me promets de ne plus la quitter jusqu’à ce que le gars quitte le train et disparaisse à nouveau dans sa vie.
Du coin de l’œil, je remarque que le gars lit lui aussi. Ce qui rend plus facile l’effort de tenir la tentation à distance. Un effort hélas en partie compromis par la présence du petit labrador. Car, de temps en temps, le chiot passe sa tête par-dessus le bord du sac et le gars le caresse, lui fait des papouilles. Un beau gars attendri par un animal sans défenses, c’est beau et touchant. Et ça attire mon attention d’une façon irrépressible. Nos regards se croisent à nouveau. Et dans le sien, je décèle un intérêt clair et non dissimulé. Ça m’attire et ça me fait terriblement peur.
De toute façon, le gars va descendre à un moment ou à un autre et ce petit jeu se terminera par la force des choses.
Mais le mec ne descend ni en gare d’Angoulême ni en gare de Libourne. Il va donc à Bordeaux lui aussi !
Dans quelques minutes, nous allons descendre à la même gare, et nous éloigner, sans savoir rien l’un de l’autre, à part le fait que nous nous sommes plus. Le fait est que cette fois-ci, pour la première fois de ma vie, ça ne tient qu’à moi que ça aille plus loin ou pas. Le gars m’a clairement montré que je lui plais, il n’y a pas photo, il a même insisté. C’est moi qui le fuis. Si j’étais célibataire, je foncerais…
Mais je ne le suis pas et je ne veux pas tromper le gars que j’aime, le gars adorable qui m’a dit qu’il ne veut pas me tromper et que je vais lui manquer, le gars qui a tant changé pour moi, qui sait désormais me prendre dans ses bras, me couvrir de bisous et de tendresse, le gars avec qui je me sens si bien que chaque instant passé loin de lui est une privation, une petite souffrance. Mais aussi le gars qui quelques heures plus tôt m’a défoncé comme un Dieu, dont le souvenir de sa queue puissante demeure bien vif entre mes cuisses, dont le sperme est encore en moi.
Et pourtant, ça fait quand même bien chier de devoir dire non à un gars qui me plaît.
Pourquoi ce genre d’occasion ne m’est pas arrivé un an plus tôt, quand j’étais encore célibataire ?
Peut-être pour ne pas dévier de ma trajectoire de vie qui m’a conduit vers Jérém.
Pourquoi cela m’arrive-t-il maintenant ?
Peut-être parce que quand on est amoureux, le bonheur de notre esprit irradie à l’extérieur de nous et nous rend plus attirants.
Peut-être que cela arrive pour me mettre à l’épreuve, pour tester la solidité de mon amour pour Jérém.
Il faut à tout prix que je tienne bon.
Lorsque le train s’arrête en Gare St Jean, je décide de rester le nez plongé dans mon bouquin jusqu’à ce que le gars quitte la rame, qu’il s’éloigne, rendant impossible tout contact ultérieur, toute tentation ultérieure.
Le wagon se vide peu à peu. Et alors que je m’attends à ce que l’inévitable se produise, le voir partir et disparaître dans sa vie inconnue comme chacun des gars sexy croisés au hasard du quotidien, quelque chose d’étonnant se produit.
Du coin de l’œil, j’arrive à voir qu’il ne semble pas pressé de descendre non plus. Je le regarde et je le vois noter quelque chose dans l’une des dernières pages de son livre.
Nos regards se croisent. Il me sourit à nouveau. Mon cœur tape à mille dans ma poitrine.
Le gars arrache la page du livre et la plie en deux, et encore en deux. Il referme son bouquin, le glisse dans la poche de son blouson, tout en gardant à la main la feuille arrachée. Puis, il att le sac à labrador, il se lève.
Et bien que la sortie de l’autre côté soit nettement plus proche pour lui et nettement plus dégagée, il choisit de s’engager dans le couloir dans ma direction.
Je le regarde approcher, sans arrêter de me mater. Arrivé à ma hauteur, il me balance un clin d’œil très sexy, tout en laissant glisser la fameuse feuille pliée dans l’ouverture de mon livre. Sa main libre enserre furtivement mon épaule. Ce simple contact me donne des frissons.
« A bientôt, espère » je l’entends me lancer, avant de quitter le wagon.
Mes battements cardiaques s’accélèrent encore, j’ai l’impression que mon cœur tape dans ma gorge et que mes tempes vont exploser. J’ai le souffle coupé, la tête qui tourne.
Et ce n’est qu’au bout de nombreuses, longues secondes que, les mains tremblantes, j’arrive enfin à déplier le petit papier et à en lire le contenu.
« Tu me plais beaucoup. Benjamin 06 19 65…. PS : le chiot s’appelle Simba ».

Lorsque le train s’arrête en Gare St Jean, je décide de rester le nez plongé dans mon bouquin jusqu’à ce que le gars quitte la rame, qu’il s’éloigne, rendant impossible tout contact ultérieur, toute tentation ultérieure.
Mais en partant, le gars me glisse un petit mot griffonné sur une page blanche arrachée au livre qu’il était en train de lire.
Et ce n’est qu’au bout de nombreuses, longues secondes que, les mains tremblantes, j’arrive enfin à déplier le petit papier et à en lire le contenu.
« Tu me plais beaucoup. Benjamin 06 19 65…. PS : le chiot s’appelle Simba ».

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