Le Retour Du Collègue Amoureux 2

Arrivés chez nous, fort de mes doutes, je les laisse quelques instants seuls prétextant d’aller chercher les boissons. Mais j’espionne, dissimulé. C’est trop fort, je ne peux m’en empêcher. Bien m’en a pris. Assis sur le grand divan, David la contraint à s’asseoir à ses côtés. Il l’attire à lui pour l’embrasser. Elle tente de le repousser mais il la maintient d’une main dans ses cheveux, derrière la nuque. Elle finit par lui abandonner un baiser furtif et rapide sur les lèvres. Je crois entendre alors dans un murmure :
- Pas maintenant, pas ici. Il peut nous surprendre !
Maintenant, ici, surprendre ? Trois mots qui résonnent dans ma tête. Désormais, il est clair pour moi que ces deux là ont quelque chose à me cacher. A moins d’avoir mal entendu. Elle finit par se libérer de son étreinte et file à la cuisine, le rouge aux joues, au moment où j’entre dans le salon. Mais au lieu de m’inquiéter sur leur réelle relation, aveuglé par la perspective de renouveler l’expérience d’il y a dix ans, je souris à David. Un sourire de connivence.
Car enfin, je suis en plein dans mon fantasme ; excité, le sexe en érection, à l’étroit dans mon pantalon, j’en oublie tout discernement. Ce détail n’échappe pas à David et lui soutire un sourire ironique. Dix ans que j’espère ce moment ! Je vais les voir baiser. Toute jalousie, tout ressentiment devant leurs comportements, tout soupçon, tout s’est envolé devant l’optique de la soirée de débauche qui s’augure. Et pour cause…
Chantal nous annonce depuis la cuisine qu’elle va se changer et prendre une douche. Tous les deux assis dans le salon on se regarde lui, conquérant, moi, impatient.
Nous attendons son retour en silence. David s’est assis d’autorité sur le canapé me laissant un des fauteuils. Je suis détendu assuré que je vais encore, maître de la situation, conduire le couple dans des égarements sensuels et sexuels pour assouvir mon fantasme. Je décide d’engager l’action avec une confiance sereine.

Je parle d’une voix enjouée, agréable, convaincu de l’intérêt que je vais déclencher chez notre invité.
- Je crois qu’elle est dans de bonnes dispositions, non ? Le même état d’esprit qu’il y a dix ans ? Tu la trouves toujours aussi désirable ?
J’accompagne cette phrase d’un rire mielleux pour signer notre collaboration. Mais soudain, tout bascule. Silencieux il sort de son portefeuille ce qui m’apparaît immédiatement comme une photographie. Il la contemple un instant avant de me la proposer à voir.
- Regarde comme cette photo de Chantal est magnifique !
Alors tout se brouille dans ma tête. Mon cœur se met à battre en surrégime. Une photo de Chantal ? Mes mains tremblent quand je me saisis de l’image. Je ne vois rien d’abord, tout est trouble. Puis progressivement la photo me livre son contenu, et ce que j’y vois me glace le sang.
Une piste de danse. Une boite de nuit certainement. Un seul couple se tient au milieu des lumières crues de la salle. Une femme est dans les bras d’un homme tout petit et rondouillard et ce que je vois de son visage me fait penser à un maghrébin. Elle a passé ses bras autour du cou de son cavalier, une main sur la nuque lui maintient sa tête plaquée contre son oreille. Il semble lui murmurer des paroles ou l’embrasser. Les deux mains de son cavalier sont ostensiblement plaquées sur ses reins. Mais ce qu’on remarque immédiatement, c’est que ces mains ont relevé la robe de la danseuse pour offrir à la vue des témoins dans la boite, des fesses nues de tout sous-vêtement. La blancheur éclatante de la peau de la femme exhibée occupe l’essentiel de la scène érotique. En arrière plan David, assis à une table, entouré de trois autres hommes âgés en apparence, semble se réjouir du spectacle des rondeurs de la danseuse et de la réaction de ses compagnons qui manifestement apprécient la beauté du cul exhibé. La tête penchée en arrière, les yeux fermés, la femme semble se réjouir de la situation et/ou du baiser de son cavalier.
Pas la moindre contestation. Elle participe, c’est évident.
Je reste scotché sur cette image. Mon cerveau ne répond plus. Je suis bloqué sans pouvoir détacher mes yeux de cette scène diabolique. Je ne comprends pas ce que vient de me dire David. Quand ? Où ? Comment ? Autant de questions qui se bousculent dans ma tête. La gorge serrée, je m’entends lui demander sans conviction et un brin de ridicule car je sais, je l’ai reconnue :
- C’est qui ?
En fait d’abord je refuse d’y croire. Je doute même qu’il s’agisse de Chantal. C’est un montage. Ma femme est incapable de se vautrer ainsi dans la débauche. Je la connais si bien avec ses retenues concernant les choses du sexe. Mais alors, pourquoi ce salaud m’inflige-t-il cette image ? Pour se venger du passé ?
- A n’en pas douter Arsène, il s’agit bien de Chantal. Chantal coupable d’adultère et ma maîtresse depuis deux ans maintenant. Tu es cocu. Tu as mis le feu à nos sens et ni moi ni elle et ni toi ne pouvons plus éteindre cette passion. Demain je vais repartir avec elle.
Son ton assuré, péremptoire ne m’échappe pas. Je ne trouve pas la force de réagir. Ses mots ne veulent rien dire, je vis un cauchemar. Ils se moquent de moi. Quand enfin Chantal entre dans le salon en peignoir de bain en soie, je parviens à détacher mon regard de cette image.
Son visage paraît soudainement se vider de son sang et se fige quand elle comprend la situation. Livide, elle titube. David lui prend la main pour la soutenir et la fait s’asseoir près de lui. Tout près ! Il lui caresse les cheveux avec tendresse. Elle se le laisse faire, le regard vide, fixé nulle part. Nous sommes tous les trois silencieux. Moi je me sens incapable de la moindre réaction tant le choc est brutal. Pire, je débande !
C’est alors que toutes les incohérences que j’ai constatées depuis ce retour, sans en comprendre sur le moment le sens réel, révèlent toute leur acuité : la remarque sur la coupe de cheveux, les tutoiements, les réactions de Chantal puis de David, la mutation professionnelle supposée lointaine…
Je regarde tour à tour ma femme puis celui qui apparaît au grand jour comme son amant.
Ce dernier la contemple, plein de sollicitude, serein, maître de lui. Elle, je la sens toujours absente, comme étrangère à la scène, également sous le choc, les genoux serrés, assise timidement sur le bord du canapé. Comme moi, elle semble ne rien attendre ni comprendre. Pourquoi cette comédie depuis ce matin ? Ces allusions, sa panique puis son assurance ? Le refus de le rencontrer puis son empressement à l’emmener ici. Le test de l’apéro ? Tout s’embrouille dans mon cerveau en ébullition.
J’ai envie de crier, hurler pour fuir ce cauchemar. Les tous les deux pour leur faire payer leur infamie. Mais je reste immobile, simple spectateur de ma déchéance, de notre déchéance.
Dans un silence sordide, lentement avec un geste d’une infinie tendresse, David lui prend le visage entre ses deux mains et l’attire à lui. Chantal n’oppose aucune résistance mais sans vraiment participer. Lentement il pose ses lèvres sur les siennes. Une caresse plus qu’un baiser. Les bras posés sur ses cuisses, immobile, elle se laisse embrasser, passive, sans vraiment manifester un quelconque plaisir. J’assiste incrédule à la scène d’amour sans bouger, la photo toujours dans ma main. Je me mets à espérer une réaction violente de rejet de sa part. Ils restent ainsi quelques longues secondes avant que Chantal, contre toute attente, ne s’empare à son tour des joues de son amant pour appuyer et lui rendre son baiser. Je comprends alors qu’elle l’aime toujours, après tout ce temps ! Je n’existe plus. Je suis mort, effondré. Le commentaire d’une lectrice sur ce texte, il y a dix ans, me revient en mémoire : « les hommes baisent mais ne s attaches pas. les femmes baisent et s attaches et c est comme cela que l on devient un cocu lambda » (sic). Je constate aujourd’hui combien elle avait raison. Pendant ce long baiser, ni l’un ni l’autre n’a le moindre égard pour le cocu.
Puis, toujours lentement, David se tourne vers moi, me fixe droit dans les yeux pour me provoquer, défait la ceinture du peignoir de bain qui s’ouvre naturellement, en écarte bien les pans et dénude le corps de mon épouse.
Il s’empare d’un sein qu’il caresse d’abord, puis dans un geste d’offrande et de provocation, il me dit, soutenant mon regard :
- Ils sont beaux non ? Elle a des seins magnifiques.
Ces mots accompagnés de ce geste sans équivoque signifie qu’il m’offre ce qui devrait être mien, et me donne une envie de vomir. Le regard fuyant, Chantal ne réagit toujours pas.
- Tu vois Arsène, poursuit-il, tu voulais être cocu, soit content. Je vais tout t’expliquer. Chantal m’appartient désormais. Ce matin nous nous sommes parlés. Je lui ai avoué que ma visite était destinée à t’affranchir de notre relation qui a pris naissance il y a deux ans maintenant. J’avais essayé de l’oublier mais en vain. Alors j’ai entrepris de la reconquérir. Il ne m’a pas été difficile de la convaincre de venir me retrouver une fois à Paris. Ni de la séduire à nouveau. Elle non plus n’avait pas oublié. Puis elle est revenue, soumise, amoureuse. Alors, je lui ai fait découvrir les plaisirs du sexe, ensemble, comme ceux que tu avais initiés dix ans auparavant. Puis, tu ne me croiras pas, j’ai eu envie d’aller plus loin et de faire profiter des charmes de ta femme à des amis. Tu connais ça, hein ? Moi aussi j’avais des fantasmes pareils aux tiens. Si elle te les refusait, elle m’offrait de les réaliser avec une complicité qui te surprendrait. Elle s’est révélée une « affaire » comme disent mes amis. Tu ne t’imagines pas ce qu’elle est capable de faire. J’ai alors envisagé de la garder, de la marier. Seulement elle ne se décidait toujours pas à te quitter. C’est une femme prisonnière de ses convictions et du respect de ses engagements. Aussi, au téléphone ce matin, je lui ai promis de renoncer à tout te dire, et si elle n’avait pas manifesté le désir de se retrouver ici tous les trois, je crois que j’aurais respecté ma parole. Mais voilà, j’ai compris qu’elle voulait te faire plaisir une dernière fois en abondant dans ton sens et rééditer notre aventure d’il y a dix ans. Je ne supportais pas cette éventualité. Elle ne devait être qu’à moi. J’ai été conforté dans mon appréhension quand elle nous a annoncé qu’elle allait se doucher. Pour toi, c’était devenu une évidence comme en témoignait tes propos et la bosse au niveau de ton pantalon. Mais moi cela ne me convenait pas du tout. Je voulais la ramener avec moi. Pour toujours. Ta méprise sur mes intentions réelles m’a fait sourire. Tu n’avais rien compris, aveuglé par ton fantasme candauliste. Alors je suis passé à l’action. J’ai donc décidé de forcer sa volonté et accepter de t’affronter.
Je suis assommé ! Pendant toute cette tirade, Chantal ne m’a pas une seule fois adressé le moindre regard. Elle est restée les seins nus, caressés par David, la tête posée langoureusement sur l’épaule de son amant. Lui, toujours calme et maître de lui me regardait en souriant, triomphant.
Je vais pour réagir quand je le vois qui dégage le peignoir des épaules de sa maîtresse et la dénude entièrement. Par ce geste, toujours avec ce sourire de vainqueur, il tient à me signifier que ma femme est sienne. Il lui caresse le dos de sa main libre tandis que de l’autre il lui excite la pointe des seins.
C’en est trop ! Je viens de réaliser l’importance du drame qui se noue et qui va avoir pour conséquence la fin de notre couple. Dans un réflexe de survie je m’adresse à la femme de ma vie.
- Chantal, dis moi que tout cela est faux. Que c’est une simple comédie que vous avez imaginée pour revivre tous les trois l’aventure d’avant.
Minable, c’est tout ce que j’ai trouvé pour sortir de ce cauchemar.
- Dis-moi que tu ne veux pas me quitter, que tu m’aimes toujours.
De mieux en mieux, il ne manque plus que les larmes ! Ma voix tremble, j’ai peine à contenir mes sanglots. Je vois bien que mes paroles sont ridicules, qu’elles sont banales. Je dois lui faire pitié, le pire des sentiments quand il s’agit d’amour. David sourit toujours, impassible. Un sourire méprisant pour le mari cocu face à l’amant vainqueur. Mais Chantal reste silencieuse dans un silence accablant.
Puis ma détresse se transforme en colère, en haine. Je commence à comprendre que tout est fini. Mais je ne soumets pas et j’imagine spontanément une autre stratégie pour récupérer dans un ultime effort, une situation qui semble perdue.
- Tu sais mon amour, cette photo sur cette piste de danse est très excitante. J’imagine que tu as dû te faire défoncer par cet homme. Et même les mecs à la table avec David, qui te regardent avec envie, ont dû bien profiter de toi, de ton cul, de ta chatte, de ta bouche.
Je fais exprès d’être vulgaire. Je sais qu’elle n’aime pas.
- J’imagine qu’ils t’ont partouzée, non ? Tu t’es sans doutes laissée enculer pendant que tu en suçais un autre. David est aussi obsédé que moi. C’est super, on va pourvoir vivre ensemble des moments de débauches que j’appelle de mes vœux depuis toujours. Enfin ! David tu me fais découvrir la petite salope, la petite pute que j’abritais sous mon toit. Tu seras notre chienne, notre garage à bites…
A cet instant, Chantal relève la tête et me regarde.
- Tais-toi !
Ce cri, il sort de son ventre, je le sais, je le connais.
Silencieuse, elle semble réfléchir. David ne sourit plus. Surpris par mes propos. Elle se lève, enfile et se couvre du peignoir de bain et se dirige pour monter à l’étage vers notre chambre, sans un mot. Ma tentative de créer un choc a semble-t-il réussi.
Les deux mâles se font face, prêts à bondir. Il prend l’initiative de parler. Je constate, satisfait, que le ton de sa voix est moins assuré, peut-être dans une tentative de se convaincre ou de me convaincre.
- Désolé Arsène mais c’est moi le maître désormais. J’ai fait de ta femme une bête de sexe, même si au début elle était réticente. Je l’ai exhibée, faite baiser avec des collègues, des amis, des hommes mais aussi, écoutes bien, des femmes ! J’en ai fait une salope soumise aux plaisirs du sexe. Elle venait me rejoindre en te disant qu’elle allait en séminaire ou visiter sa famille. Ne te doutant de rien tu n’éprouvais pas le besoin de vérifier ses alibis.
J’écoute ses propos, sans vraiment comprendre ce qui le pousse à me vomir ces paroles, si ce n’est pour m’exciter ou m’accabler. Je devrais me révolter et lui mettre ma main sur la gueule. Mais je reste à écouter ses révélations, tétanisé mais aussi curieux. J’apprends qu’un de ses amis est même venu nous rendre visite chez nous, en ma présence, à son instigation. Il lui aurait demandé de forcer Chantal à flirter avec lui, en se dissimulant de son cocu, sous la menace de tout me dévoiler. La soumettre pour l’humilier. La blesser dans son orgueil de femme libre, vaincre ses dernières barrières de bourgeoise. Je me souviens très bien de cet homme. Il s’était présenté comme un ami d’un collègue du Québec en transit en France. Chantal à ma surprise l’avait invité à dîner et j’avais trouvé cela bizarre. Je ne saisissais pas le bien fondé de cette invitation car nous ne le connaissions pas. David poursuit sa litanie pour son salut. Je l’écoute impassible car maintenant j’en suis maintenant convaincu, c’est ma femme qui détient le mot de la fin.
- Une humiliation qui ne l’avait pas refroidie poursuit-il. Elle était allée jusqu’à accepter d’ôter sa culotte discrètement pour lui faciliter l’accès à son intimité pendant le repas, alors que tu allais à la cave chercher une bonne bouteille pour lui faire honneur. Tu ne te doutais pas que laisser Chantal se soumettre à cet individu était un gage d’honneur bien plus fort que ta bouteille pour cet homme. Elle était à deux doigts de lui faire une pipe si tu n’étais pas reparu trop tôt.
- Tu es un salaud David, mais je ne te laisserai pas me voler Chantal. Tu as sali notre ménage en souillant ma femme.
David se met alors à rire très fort.
- Salie ? Mais tu as raison ! Ecoute ça ! Souvent je l’ai faite prendre par des inconnus sans protection. Elle ne voulait pas, de peur de contamination. Mais sous la pression, elle a fini par céder. A la fin, elle acceptait sans sourciller. Je t’avoue que je demandais discrètement aux mecs de me fournir un certificat de bonne santé avant de les laisser sauter Chantal qui n’en savait rien ! J’y tiens à ta femme et je tiens aussi à ma santé. Elle était presque décidée à arrêter la pilule. Tu te rends comptes ! Mais c’est toi qui l’arrêtait ! Tu vois, elle m’aime au point de me donner un bébé.
Je n’y crois pas ! C’est impossible ! Il ment. C’est un crime de laisser une femme se soumettre à ce point. Chantal réduite à un objet sexuel et David comme un protecteur. Ce mec me met à l’épreuve. Tout cela n’est que pure invention.
La porte de la chambre s’ouvre et Chantal descend nous rejoindre au salon. Elle est toujours livide, mais semble vouloir reprendre la maîtrise de la situation.
Elle vient s’asseoir auprès de David mais laisse un espace entre eux. Il tente de l’attirer à elle, mais elle le repousse. Elle reste silencieuse quelques secondes. De longues secondes pour moi. David a quitté son sourire triomphant pour une mine d’inquiétude.
- Ecoutez-moi tous les deux. Ne m’interrompez pas ! Arsène, tout ce que vient de t’avouer David est exact. Tout ! Enfin presque.
Mon dernier espoir de nous sauver s’effondre.
- Il m’avait promis de ne rien te dire et il a trahi sa parole. Je t’en veux David. Tu as aussi oublié de dire que je voulais arrêter notre liaison.
Il y a de la colère dans sa voix. Mais contre toute attente, c’est moi qui explose à mon tour.
- Incroyable ! Tout cela est donc vrai et tu te présentes devant moi comme une victime ? Et tu m’imposes de ne pas t’interrompre. Mais je rêve. Tu es une salope. Tu as baisé avec l’arabe avec qui tu danses sur la photo ? Dis-moi. Et les copains qui te matent ? Avec eux aussi ? Dis-moi ! En même temps ?
- S’il te plait, écoutes moi…
- Non ! Toi, écoutes moi. Tu les as sucés, et tu as avalé leur foutre ? Et ils t’ont baisée sans protection. Tu as aimé sentir leur sperme envahir ton ventre, hein, dis moi.
- Je t’en conjure Arsène cesse de me tourmenter, je t’aime.
- Ben voilà la cerise sur le gâteau ! Madame aime son cocu de mari. Tu vas me répondre à la fin ? Tout ça est vrai ? Comme te laisser mettre enceinte ?
Son silence fait office d’acquiescement. Je la regarde, elle semble vraiment accablée, choquée par tous ces mots. Insensible, je poursuis.
-Et le type qui est venu, ce soit disant collègue canadien, jusqu’où es-tu allée avec lui dans notre maison ? Tu l’as sucé ? En tous cas il s’en est vanté auprès de David.
Cracher ces mots me soulageait. J’en éprouvais une certaine justification dans le mal qui me dévorait.
- Non, c’est faux.
- Tu ne l’as pas sucé ? Tient donc…
Elle semble soudain avoir retrouvé la parole.
- Non… Je l’ai juste branlé.
- Où ? Dans quelle pièce ? Et j’étais où ?
Je suis fou de rage. J’ai envie de la gifler mais ce n’est pas dans mes principes.
- Tu étais allé, je crois, chercher du vin à la cave. Il était venu me rejoindre dans la cuisine.
- Il a éjaculé ?
- S’il te plait, Arsène…
- Il a éjaculé, répète-je en haussant la voix ?
- Oui. Il a voulu jouir dans ma culotte. Il l’a emportée.
- Tu vois que je ne t’ai pas menti, souffle David, timidement, étonné par la violence de ma réaction.
Chantal reste figée, livide et tremblante. Petit à petit ma colère tombe. Elle me touche, si fragile, si belle. Je suis terriblement amoureux d’elle et j’ai vraiment peur de la perdre.
- Et maintenant, tu ne regrettes pas de m’avoir trahi ? D’avoir menti à notre amour pour de prélasser dans le stupre et la fornication ? Car bien entendu tu prenais du plaisir non ?
- Oui, finit elle par répondre dans un souffle à peine audible. C’est vrai. Oui je regrette mais laisse moi t’expliquer, s’il te plait.
- Ok ! Explique… lui dis-je dans un ton peu avenant, vaincu.
- Il n’y a rien à expliquer éructe David qui s’est levé. Chantal est heureuse avec moi et s’emmerde avec toi. Elle n’arrête pas de me le dire. C’est aussi simple que ça. Alors laisse nous partir. Allez viens ma chérie, on se tire.
- Non, assieds toi et écoute moi. Et toi aussi Arsène.
Cette fois, elle a retrouvé sa force pour lutter et a réussi à nous clouer le bec à tous les deux.
- Arsène, crois moi, je t’en prie. Je me suis bien laissée entraîner dans cette débauche. Ne me demande pas pourquoi, je ne le sais pas moi-même. Par contre, je sais qu’après chaque événement avec lui, ou voulu par lui, ma mémoire s’est chargée de tout effacer. Crois moi. Le noir, tout est effacé. C’est le même phénomène avec toi, quand je cédais à tes fantasmes. Rentrée chez nous je n’avais pas de mal à redevenir ton épouse. Je t’aime. Je suis fidèle à mes amours.
- Un peu facile non ? je lui dis.
- S’il te plait laisse moi terminer.
- Je doute de ta sincérité, Mais vas-y !
- Je suis sincère écoute. Après notre aventure que tu as initiée sans en considérer les risques et conséquences, je suis restée longtemps dans la nostalgie de ce jeune garçon qui m’avait séduite alors. Quand il m’a contactée, j’ai hésité puis j’ai cédé mais c’est pour retrouver notre complicité d’il y a dix ans que je suis allée voir. Tu sais tout le reste. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’arrivais pas à résister à ces pulsions inavouées que David me réclamait. Au début par amour, j’ai accédé à tous ses fantasmes, tous ses caprices, jusqu’à me laisser prendre sans protection au risque pour ta santé et la mienne. C’était pour lui un moyen de me soumettre à son pouvoir. Mais une fois près de toi, crois moi je t’en supplie, tout s’effaçait, je redevenais ton épouse, ton amour. Pas de regrets ni de remords, car je redevenais ta femme avec l’oubli de ma débauche. Ce matin il m’a annoncé son dessein de tout t’avouer et me ramener avec lui. Je croyais l’en avoir dissuader. Mais ce soir il a trahi sa parole. L’ingrat. Arsène, je n’ai pas l’intention de le suivre, ni de t’abandonner. Je t’aime, je te l’ai déjà dit. Tout ce que David m’a fait faire, je le rejette. J’ai agi sans réaliser le mal que je pouvais te faire. Maintenant, tu sais. Maintenant tu dois avoir mal, mais sache, mon amour, que je te reste fidèle de cœur, même si les apparences semblent dire le contraire et me condamnent.
Un long silence pesant s’installe dans le salon. En écoutant son plaidoyer, je sens faiblir ma colère, ma révolte. L’espoir de la récupérer m’apparaît accessible, possible.
- Chantal, tu n’espères pas que je vais croire ce que tu viens de dire, s’écrie alors David. Tu m’as souvent avoué que tu m’aimais, rappelle-toi. Et moi tu sais combien je t’aime. Tu as toujours accepté de me suivre dans mes débordements libertins avec consentement et plaisir. Dis à Arsène que c’est moi l’homme de ta vie. Que tu veux un de moi.
Sa voix est mal assurée, il accuse le coup.
- Oui David, je te l’ai dit et je t’ai suivi. Et j’étais sincère sur le moment. Je pense qu’en fait ce que j’aimais, c’était le souvenir de notre première aventure avec Arsène. Du sexe oui mais accompagné de tendresse, d’émotion. Tout ce que je t’ai consenti alors, c’est au nom de ce souvenir, tout comme j’ai suivi Arsène dans certains de ses fantasmes, par amour. Quant au bébé, je n’étais pas prête et tu le sais.
Elle se tourne vers moi et poursuit en me fixant de ses yeux rougis par des larmes :
- Je ne souhaite qu’une seule chose maintenant : que tu me pardonnes et que nous reconstruisions notre foyer. Je comprendrais que tu me rejettes, si tu es convaincu que j’ai agi par vice et que ne suis plus la femme que tu as épousée.
Des larmes glissent lentement sur ses joues. Je veux rester de glace pour cacher ma douleur, mais je ne peux pas. David est devenu livide à son tour. Il se rend compte qu’il a peut-être perdu la partie. Je la regarde droit dans les yeux et je m’entends lui dire à peine lucide :
- Chantal, je veux te faire l’amour. J’ai envie.
Elle m’adresse un sourire plein de lassitude et de tendresse.
- Pas ce soir. Je suis trop choquée.
Après un court silence de réflexion, elle ajoute d’une voix bien assurée.
- Pas avec toi, mais avec David, celui d’il y a dix ans. Je veux lui dire adieu, en passant la nuit avec lui.
Encore un nouveau revirement de sa part ! Ils me prennent pour un imbécile, ce n’est pas possible. Je préfère ne pas l’interrompre pour boire le poison jusqu’à la lie.
- Mais c’est aussi pour te faire plaisir, poursuit-elle, et assouvir ce fantasme qui te poursuit et auquel tu penses depuis hier soir. Je le ferai avec toi et pour toi. Je me sens libre désormais. Libre de laisser s’exprimer mes pulsions et de les assumer. Je veux par cette nuit effacer les derniers mois qui m’ont certes permis de voir en moi. David, ce sera un adieu sans retour. Je me donnerai à toi sans retenue comme Arsène l’a souhaité il y a dix ans, et comme je veux que tu le ressentes pour te convaincre de ma sincérité dans ma décision et conviction de rompre avec toi.
Sur ces mots, elle se lève du canapé, défait la ceinture de son peignoir et nous apparaît nue. Belle, éblouissante, divine ! Elle s’approche de moi et me tend la main. Je n’hésite pas un instant tant son regard me subjugue et me fait fondre.
- Emmène moi dans la chambre d’amis, dit-elle. Offre moi à ton fantasme et permet moi de tourner définitivement la page de cette aventure sordide. Je t’aime, je ne serai jamais la femme objet que David a voulu façonner, mais une épouse fidèle attentive à tes envies et désirs.
Ce geste est fort. Elle m’est revenue. Je n’ai plus du tout envie de croire le contraire. Ma reconquête est totale. Pire, c’est moi qui vais l’offrir à nouveau à cet homme, pour le perdre définitivement. C’est aussi notre couple, c’est notre amour qui a ce pouvoir. Pas David !
Je l’accompagne à l’étage, dans la chambre d’amis, voisine de la notre. Nue, elle s’allonge sur le lit, hôtel de l’offrande. Jambes serrées, les mains le long du corps, elle se prépare pour la catharsis.
Je retrouve David au salon. Il est décomposé, mais en même temps je sens qu’il espère trouver dans cette nuit, le moyen de récupérer son jouet. Mais moi je sais, j’ai compris la leçon. J’ai retrouvé toute la confiance en cette femme avec laquelle j’ai déjà partagé tant de moments de bonheur. Plus jamais je ne laisserai mes fantasmes jouer avec notre amour, cet amour qui est bien plus fort que nous. Seulement cette nuit…
Serein, d’un ton plein de condescendance, de dédain même, je m’adresse à lui, triomphant :
- Vient, suis moi, je t’emmène.
(à suivre)

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