Le Corbeau Ou Le Renard ? 5

René, resté debout à côté de Chantal semble hésiter. Pierre réitère discrètement son message. Moi je comprends que les deux ont décidé de passer à l’attaque. Chantal n’a rien vu, occupée à feuilleter l’ouvrage. Pierre insiste. Apparemment il dirige les débats. René semble toujours sous le charme de mon épouse et n’ose pas le geste qui peut le condamner.
Puis, tout va très vite, mais au ralenti !
René se décide et vient se placer derrière Chantal. Elle ne semble pas s’apercevoir de sa présence, toute à feuilleter l’ouvrage sur ses genoux.
Soudain, ce que je vois me glace le sang. Timidement et avec précautions, il avance les mains, entoure le cou et les fait glisser- comme une caresse- sous le col pour écarter délicatement le chemisier et découvrir les épaules laissées nues par la robe. La peau blanche de ma jeune femme apparaît lentement à la lumière. Son geste est tout empreint d’hésitation.
Chantal se fige et se raidit et semble s’interroger sur ce qui se passe. Brusquement, René enlève ses mains et rajuste le chemisier sur les épaules, il a compris qu’il était peut-être allé trop loin.
Il revient s’asseoir avec une mine de petit garçon puni. Chantal le regarde incrédule, le fixant droit dans les yeux. J’y lis de la déception. Quelques secondes s’écoulent.
Chantal a bien sûr saisi toute la charge émotionnelle et sensuelle de ce geste. Mais curieusement, elle ne manifeste aucune réprobation ni révolte. Surprenant ! Juste de l’amertume.
Je comprends son embarras. Innocemment et après ces visites, le champagne, les manifestations de sympathie, elle ne s’attendait à une telle initiative.
Je pense qu’elle ne va se laisser faire facilement. D’un côté, je devrais le regretter, déjà tout excité. Mais ce qui compte à cet instant, c’est préserver ma chérie et notre amour.
Pierre intervient, alléché par ce qu’il vient de voir, dans une tentative de calmer la tension.
- Vous n’êtes pas bien avec nous Chantal ? Regardez ces plantes, ces lumières.

Vous ne vous sentez pas l’envie de vous laisser aller ? Je vous en prie…
Elle le foudroie du regard voulant sans doutes le tenir pour responsable et affranchir René ?
Le ton de Pierre est cauteleux, mielleux, à la limite du ridicule. Elle ne peut pas se laisser prendre par une telle mièvrerie ! J’ai peur pourtant, elle paraît si fragile, innocente alors que ces prédateurs diaboliques ont décidé de sonner l’hallali.
Elle garde le silence quelques secondes encore, les yeux fixés devant elle, nulle part.
Ce regard vide, je lui connais bien, elle l’affiche quand un dilemme s’impose à elle. En ces secondes, elle prend la mesure de sa déconvenue tout en réalisant que la situation a évolué. Et elle sait que ces secondes sont dramatiquement importantes pour la suite des événements.
Le seuil critique est-il atteint ? Celui de l’explosion, du « sans retour possible » ? Elle même ne le sait peut-être pas.
Reposant le livre, elle prend sur la table devant elle, son verre de champagne et le vide d’un trait. Immédiatement c’est Pierre qui se précipite. Quand le verre est plein, elle lui sourit, polie, et en boit une gorgée.
- Merci Pierre.
On peut lire dans ces mots toutes les interrogations qui la déchirent. Puis après quelques nouvelles secondes, elle se penche sur le livre et confie voulant ignorer l’incident :
- René, votre ouvrage est remarquable.
C’est sans aucun doutes une pirouette, pour reprendre contenance. Mais elle est sincère. Puis son regard se porte sur le verre, silencieuse. Un silence épais s’installe à nouveau, suspendu à sa réaction.
Elle se retourne, les yeux brillants vers René. Elle lui adresse un message de déception, de reproches, d’incompréhension. « Pourquoi ? » Ce regard, il est différent de celui qu’elle a porté sur Pierre, plus dur plus censeur. Je constate que Pierre n’a pas la cote.
Puis tout à coup, elle lui sourit, d’un sourire franc et sincère, et ajoute, en se levant du fauteuil, aussitôt suivie des deux hommes :
- Je voudrais rentrer maintenant.

Aucune allusion au motif de sa décision. Elle est vraiment maîtresse de ses sentiments. Elle ne souhaite pas faire part de son désaccord, minimisant l’incident. Pour ménager ou bien éviter de briser ce qu’elle a vécu tout le long de cette journée ?
Un nouveau silence s’installe dans la pièce juste devant moi, derrière le miroir. Pas d’éclats de voix, pas de colère, mais simplement voir le doute s’installer et roder.
Moi je comprends. Et je jubile. Elle se rebiffe !
Chantal n’est pas femme à se laisser dominer sauf par gentillesse, sans être particulièrement faible. Il faut reconnaître que pour en arriver là, ils n’ont pas ménagé leur peine et réussi à la dompter avec élégance sans qu’elle s’en rende compte. Je pensais cela impossible car je la croyais difficile à manipuler. A-t-elle toujours toutes ses facultés de discernement après cette cour hors du commun ? Peut-être se croit-elle obligée de se soumettre après ce qu’on lui a offert. Non, je ne la connais ni calculatrice ni cupide. Mais aussi une idée me traverse qui me fait mal. Toute simple, mon « vieux » ! Regarde une vérité en face. Et si elle avait simplement envie de plaire, envie de se laisser aller, jusqu’à s’abandonner aux mains de ces salauds, se sentant bien et en confiance parmi eux, comme l’a suggéré Pierre. Un instant, un instant seulement.
Je n’ai pas en vouloir à René. Il est sous le charme de Chantal. Si elle devait succomber, ces serait pour des raisons plus nobles que celles de Pierre dont le seul but libertin est de s’offrir cette femme qu’il convoite. Je pense que c’est de René dont je dois me méfier. A cet instant je voudrais lui parler, la prévenir… mais je ne fais rien ! Impuissant pour intervenir ? Pas si sûr. Pour le moment j’assiste en espérant que notre couple tiendra.
De mon poste de voyeur humilié, j’assiste avec des détails effarants à cette étrange joute entre les trois protagonistes. Et si j’en suis là, c’est d’une part d’avoir été sensible à la flatterie de Pierre, du doute qu’il a su introduire dans ma confiance en Chantal et ce fantasme, si longtemps refoulé, de candaulisme.

C’est René qui se manifeste le premier.
- Pardonnez-moi ce moment d’égarement, Chantal. Je vous trouve si belle et si désirable. Il se découvre.
Elle lui sourit avant d’ajouter comme pour s’excuser :
- Ce n’est pas grave ! Mais il vaut mieux en rester là !
Cette fois c’est clair, qu’on se le dise.
- Je comprends. Peut-être pouvons-nous vous garder encore quelques minutes ?
Ils sont debout devant elle, la fixant. Elle reste immobile quelques secondes encore, hésitante, sa détermination petit à petit semble se fissurer. Visiblement elle est ébranlée.
René tente de pousser cet avantage.
- Je serai ravi que vous choisissiez une plante parmi ma collection.
- Non, René. C’est trop. Vous m’avez suffisamment comblée. Mais pour vous être agréable, je veux bien rester.
Puis, elle garde le silence, touchée par les mots de René.
Pierre prend la parole, malin. Il a compris la faiblesse de son ami et celle de la jeune femme.
- Vous savez, René s’est entiché de vous, ma belle.
Il se place devant elle, son ton est trop condescendant, pas du goût de Chantal je pense. Ils se fixent et lui sourit. Il avance une main vers son visage, sans doutes pour une caresse convenable, amicale mais chargée de sous entendus. Chantal recule, s’échappe gentiment, mais lui rend son sourire.
- Asseyez-vous et reprenez un peu de champagne qui fait rosir les joues des jolies femmes.
Après encore quelques secondes de réflexion, elle s’exécute. Ils savent tous les trois que la partie est engagée. Les verres sont remplis. Chantal est vite détendue, débarrassée de ses scrupules et séduite par les deux hommes. Elle les regarde tour à tour avec cet air de défi si charmant. Adossée au fond du fauteuil, le verre de champagne dans une main, elle semble méditer les yeux fermés. Je crois qu’en cet instant elle accepte la situation. Et les deux autres l’ont bien compris.
René se lève, dépose son verre sur la table, Puis lentement il passe derrière le fauteuil reprendre la place du pécheur.

- Je peux ?
Sans hésiter cette fois, sans attendre une réponse, ses mains se posent sur les épaules. Chantal émet un léger frissonnement mais s’abandonne. Et moi je sais qu’une fois acceptée la situation, plus rien ne la fera reculer. Mais concernant le sexe ? Je n’en sais rien.
Pierre s’est installé dans son fauteuil et contemple. Son expression ne laisse aucun doute sur le désir qui l’habite.
Je bande ! Mais la honte qui m’envahit m’empêche de me branler.
- Vous êtes une femme splendide Chantal. Malheureusement, mon âge m’interdit de m’abandonner à une passion.
Dans un presque soupir, elle lui répond, les yeux clos :
- Ne dites pas ça, René le charme autorise d’oublier de compter les années. Chaque étape de la vie d’un homme ou d’une femme a son charme. C’est l’âme qui comble les différences physiques.
Ces mots sont dits avec affection, admiration.
L’évidence me saute aux yeux. C’est bien ce que j’ai toujours pensé sans en considérer l’importance. Chantal n’est pas une gourgandine facile à baiser. Chantal est une femme fidèle. Je réalise enfin les véritables enjeux de ce qui se passe devant moi, imbécile qui mérite ce qui se prépare devant ses yeux.
En fait, c’est l’histoire d’une jeune femme ordinaire mais jolie et surtout insensible aux beaux ténébreux musclés, passant leur temps dans les salles de gymnastique, exhibant pectoraux et biscoteaux avec une peau teintée-rayons, sans le moindre poil. Ceux qui sont les héros dans bien des histoires.
Non, elle est nature, simple, sans pommades ni paillettes.
Chantal a bâti sa vie sur un socle de valeurs toutes différentes : honneur, respect, fidélité. Et moi qui en ait douté !
Aujourd’hui, un homme, qui a deux fois son âge, se met en tête de la séduire avec ses propres arguments. Et elle se retrouve là, entre deux individus aux objectifs identiques mais aux motivations différentes.
L’un est perfide, qui élabore cette mise en scène diabolique, l’autre, est séduit par une jolie femme dont il a découvert pour le partager, la même passion pour la nature.
Et moi, j’ai merdé, d’avoir douté de son intégrité, en ne faisant pas beaucoup d’effort pour partager ses passions. J’étais bien heureux avant que l’on me glisse ce ver dans ma conscience.
Et je suis là, en train de mater la fin annoncée de notre couple.
Conforté par cette réponse René se sent investi d’une mission : recouvrer chez la femme la confiance perdue ! Avec courtoisie.
Les deux mains de l’homme s’emparent du cou délicat devant lui, se glissent sous le menton pour tirer la tête vers lui. Il se penche et dépose un chaste baiser sur le front féminin. Chantal sourit très légèrement.
Puis, les mains remontent, passent sous le fin chemisier de soie dont elles écartent les pans pour découvrir entièrement les épaules nues de la jeune femme.
Le vêtement est encore maintenu par des manches, serrées aux poignets. Alors, les yeux toujours clos, ma femme, oui ma femme, entreprend de détacher les boutons aux poignets puis lentement en dégage ses bras pour enfin l’enlever. Dans un bruissement léger le fin vêtement échoue à ses côtés.
Ce geste très simple est d’une haute valeur symbolique. Il signe l’acceptation de la situation par la jeune femme. Je panique, jusqu’où ira-t-elle ?
Les mains de René tremblent, ce qui arrache un sourire à Pierre qui mate avachi dans son fauteuil qu’il vient de rejoindre.
Le bustier de la robe, débarrassé du vêtement de protection, met en valeur le décolleté de la jeune femme. René avec délicatesse poursuit son action et détache la fibule entre les deux seins. Puis il délie le cordon qui maintien la bustier fermé. Libérée, la robe glisse sur sa peau et découvre une partie de ses seins. Des seins superbes ! Pierre garde le regard fixé sur cette poitrine convoitée.
Cela devient chaud ! J’attends dans cette seconde une réaction de Chantal qui ne vient pas. Au contraire, elle semble à l’aise poitrine presque nue. C’est vrai que sans être exhibitionniste, elle ne répugne pas à se mettre nue quand elle se sent en confiance. Je constate que c’est le cas, ce qui aggrave mon pronostic de mari cocu.
Toujours doucement, les deux mains de René descendent lentement vers la poitrine dénudée. Arrivées sur les globes, elles les caressent jouant avec les tétons qui roulent entre ses doigts. Je la sais sensible à cette caresse. Le diable, il est habile !
Puis tout à coup, ouvrant les yeux, tendant sa tête en arrière vers lui, elle lui sourit, d’un sourire franc et sincère, et avoue, comme pour l’absoudre et lui pardonner :
- Vous êtes un cochon René !
Ce qui provoque un rire général qui détend l’atmosphère, et augmente la charge en érotisme. Je pense alors : tout ceci est très soft. On est sur un terrain de flirts. Pas de partouze. Je ne pense pas qu’elle va se laisser entraîner plus loin.
Encouragé d’un regard sournois par Pierre, et par le commentaire dédramatisant de Chantal, René continue la conquête du corps féminin qui s’abandonne langoureusement. Sous la robe on peut suivre la progression des mains qui glissent lentement vers le ventre.
Chantal ferme les yeux et laisse échapper des petits gémissements de plaisir.
Pense-t-elle à moi ? A-t-elle des scrupules ou bien comme je le redoute, a-t-elle décidé de s’offrir aux deux hommes ?
En cet instant le doute réapparaît. J’en ai la confirmation quand elle dit, sans aucune conviction :
- Je pense qu’il serait plus sage de nous arrêter là, non ?
Ces mots pourraient être ceux du renoncement. Je pardonnerai. Mais, au contraire le ton utilisé indique que c’est une invitation à poursuivre ! On est dans un contexte de sensualité douce, presque bon ! Rien de vulgaire si ce n’est le regard de Pierre.
- S’il vous plait. Encore un peu, la supplie René
- C’est quoi un peu dit-elle, avec un ton canaille ?
Il se penche sur elle et l’embrasse dans le cou. Chantal redresse la tête pour lui faciliter la tâche. On l’entend murmurer :
- Non, René, s’il vous plait. Vous allez trop loin ! dit-elle avec sourire gracieux de réprimande bien douce et feinte.
- Mais c’est çà, un peu !
Elle émet un petit rire complice. En tous cas, elle le laisse faire. De son plein gré.
Moi, toujours caché je me contente de regarder ma femme s’abandonner lentement dans une galipette dont je ne connais pas l’issue. J’ai envie de lui crier : « attention, ce sont des pervers… »
Pierre resté passif jusqu’alors, a envie de devenir acteur. René qui s’en rend compte lui adresse un clin d’œil subtil pour l’inviter à les rejoindre, ce qui signifie qu’il est rattrapé par ses penchants libertins ou tenu par des engagements avec son ami.
Pierre de toute évidence est impatient de consommer la belle avec avidité. Je redoute que ce soit le début de la descente aux enfers pour mon amour de femme.
Mais cependant je reste encore confiant ? Chantal saura se sauver.
Il se lève et s’approche du corps dénudé jusqu’à la taille. René la saisit sous les bras et la fait se lever face à son complice alors que son ami lui a pris les deux mains et l’attire vers lui. Sans attendre, ce dernier s’empare de la poitrine offerte par le bustier providentiellement abaissé dessous les seins. Les mains d’abord puis la bouche et la langue. Rapidement, il emprisonne les tétons entre ses lèvres avides. Chantal se laisser aller à cette caresse qu’elle apprécie particulièrement. Elle passe même une main sur sa nuque et l’attire contre son sein.
Les couples sont de profil (volonté de Pierre à mon attention ?) si bien que rien ne m’échappe.
Une nouvelle étape est franchie. Elle s’abandonne à celui pour lequel elle n’a manifesté aucune sympathie, victime de son plaisir.
René rejoint le couple. Pour ne pas laisser échapper celle qu’il considère comme sienne, il la fait se retourner vers lui. Elle lui sourit, touchée et amusée par son geste. Elle semble aimer ce rôle de jouet qu’ils lui prêtent.
Quand il lui prend la tête entre ses deux mains pour lui voler un baiser, j’espère encore qu’elle va refuser. Elle n’aime pas trop les baisers qui échangent les langues et la salive. Elle lui sourit lui prend à son tour la tête de la même manière, mais quand visiblement il tente de l’attirer à lui, elle hoche la tête en signe de refus.
- Pas si vite René.
D’abord surpris, il s’incline.
Pierre, lui, est pris d’une frénésie sexuelle. Il s’est saisi des fesses de la jeune femme qu’il pétrit sans délicatesse. Ses yeux injectés de sang fixent le cul, bien décidé à se l’approprier, à en r. Si Chantal pouvait voir son regard, je crois qu’elle prendrait la fuite. Comme un dément, il lui embrasse le cou tout en revenant par moments à la poitrine nue. Lentement il relève le bas de la robe, découvre ses cuisses, sa petite culotte noire…
Là sous mes yeux à quelques centimètres de moi je deviens fou. Je ne sais plus quoi penser et quoi faire. Ils vont la baiser, c’est garanti maintenant. Et Chantal sourit toujours, amusée et manifestement heureuse.
(à suivre)

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