Gâterie
Toute dabord, excellentes année 2021 à tous.
Je vous propose pour débuter cette année un texte court que jai appelé :
GATERIE
Cest mon amie Audrey, qui la première men a parlé.
Elle y mit tant de conviction, que ma curiosité a été aussitôt éveillée. Elle y mis presque de la passion. Jentendais bien le très léger trémolo dans sa voix, quand elle évoquait sa première expérience de la chose.
Oh, elle na pas jeté le sujet comme ça sur la table, directement. Cela aurait été beaucoup trop cavalier, légèrement indécent même. Ca méritait plus de finesse, plus de retenue.
Non, elle la abordé par petite touche. Quand on parle de ça, on y va doucement, on choisit ses mots, des métaphores presque. Ça, je le découvrirai plus tard. Après avoir moi-même essayé.
Car Audrey, elle, lavait fait. Plusieurs fois même. Avant son premier essai, elle avait longuement hésité. Elle avait tourné dans sa tête des arguments, des contre-arguments, des pours, des contres.
Elle ma dit que telle une petite fille devant la devanture dun marchand de jouet, elle sétait demandé si tout cela en valait bien le prix.
Peut-être fallait-il attendre encore. Nétait-ce pas trop tôt ?
Elle avait balayé dun revers de sa main toutes ses foutaises et lavait fait, sétait laissée aller. Elle sest complètement lâchée, même.
Elle navait jamais regretté cette première fois, et à chaque fois quelle y retournait, le plaisir était tout aussi intense.
On ne sen laisse pas, me dit-elle. Le truc, cest que cest toujours un peu pareil, mais cest ça qui est bon. Toujours un peu pareil, mais souvent différent. Le plaisir, par contre est intense, toujours intense.
Mon seul regret, dit toujours Audrey, avoir attendu davoir eu 18 ans pour essayer. Jaurais dû le faire bien avant.
Je me suis lancée un après-midi de novembre.
Comme Audrey, jai longtemps hésité. Ne sachant que faire, narrivant pas à me décider. Jentendais dans ma tête la petite voix dAudrey aligner les arguments. Comme elle, hésitante, repoussant à plus tard, faisant marche-arrière. Puis forte de lexpérience de mon amie, en qui javais toute confiance, enfin, jy suis allée. Je me suis libérée des dernières hésitations, des dernières gênes et contraintes.
- Au diable, la bien-pensance ambiante, le politiquement correct. Vas-y, fais toi plaisir pour une fois. Me suis-je dis. Et puis, cest un tout petit péché, qui ne prête pas à conséquence, enfin pas tant que ça ! Que tous les censeurs aillent bien se faire foutre !
Ecoutant les conseils de mon amie, je métais préparée à ça. On ny va pas tête baissée. Il faut être dans les meilleures dispositions. Ça se passe aussi dans la tête. Cest une étape dans une vie. Il faut que ça reste une expérience inoubliable. Ne bruler aucune étape surtout.
Jétais avec Paul, un ami de confiance. Je savais quavec lui, ça se passerait bien. Il nallait pas tirer la couverture à lui. Il serait attentif à mon plaisir, il saurait partager. Jusquau dernier moment, jai hésité. Jallais le faire ? Ne pas le faire ? Faire machine arrière ? Encore reporter ? La présence de Paul ma beaucoup aidée. Son soutien surtout. Jai croisé son regard juste avant. Jai lu dans ses yeux le « Vas-y lâche toi », qui ma finalement libérée.
Jai pris une position confortable sur le canapé. Je me suis calé le dos avec un coussin, jai appuyé ma tête sur un autre.
Je lai pris en main. Tout commence par la prise en main. Jai caressé doucement le dessus arrondi, passé délicatement le bout de mon doigt sur le côté. Je me suis aventurée sur le dessous. Je voulais tout connaitre, tout découvrir, dès ma première fois. Vivre complétement le truc.
Je sentais bien la tension ambiante. Paul était silencieux, concentré lui aussi.
Après ces caresses aériennes, dont le but était de bien sentir les formes de la chose, de lappréhender, de lapprivoiser même, je lai doucement portée à mes lèvres.
Hésitante encore.
Son odeur dense, son parfum puissant me sont montés aux narines. Mes lèvres ont doucement frôlé la chose, puis se sont entrouvertes, pour laisser sortir le bout de ma langue.
Enfin, jy étais. Je ne pouvais plus reculer maintenant. Plus question de tergiverser. Le goût intense, mais finalement tout en finesse de la chose a envahi ma bouche. Je lavais à peine titillé de bout de la langue et déjà ses effluves étaient en train de conquérir, de coloniser ma bouche. Ça me submergeait. Par vagues.
Je compris à ce moment-là ce quAudrey avait tenté de me dire. Ses paroles me sont revenues en mémoire « Quand on y goute on y revient toujours ».
Ça tient un peu de laddiction, cest certain. Les mots avaient manqué à Audrey pour décrire tout ça, elle avait tenté de me transmettre des sensations, des images. Je comprenais pourquoi maintenant. Comment dépeindre cette sensation ? Peut-on vraiment détailler dailleurs ? Est-ce que ça sexplique, ça ? Les tentatives brouillonnes dAudrey pour mexpliquer devenaient compréhensibles.
Et jai autant de mal quelle à vous lexpliquer aujourdhui.
Ça se ressent seulement. Et puis, il y a aussi cette dimension de première fois. On est fière, contente dy être finalement, davoir osé. Enfin.
Je lai pris en bouche, cest létape suivante, mavait dit Audrey. Mais pas tout de suite, tout de même. Jai fait un peu durer le plaisir encore. Savourer linstant présent, surtout la première fois. Cest comme un rite de passage, un cérémonial. La plénitude cérébrale qui menvahissait me faisait saliver. Je déglutis Audrey ma bien dit de saliver de manière régulière. Ça nen serait que meilleur. Plus facile a-t-elle ajouté même. Ainsi, le goût allait bien envahir ma gorge.
Jétais sur une autre planète, je me laissais déborder, inonder, dévorer, emporter. Avant de lengloutir, jen ai embrassé le dessus, je crois
ça, je nen suis plus sure du tout.
Enfin, jy suis allée, ça je men souviens bien. Avant, jai recouvert mes incisives avec mes lèvres, afin de ne pas abimer, même blesser la petite chose. Cest assez fragile malgré tout. Je lai calée entre ma langue et mon palais, jai modulé le rythme de mes succions, veillant à ne rien brusquer. Je voulais que ça dure longtemps encore. Bien ressentir tous les effets de la chose.
Au tout début, jai faillis être gloutonne, tout avaler, dun coup. Puis, je me suis raisonnée et me suis faite plus douce. Ne pas brusquer les choses disais-je, pas tout de suite du moins.
Audrey mavait prévenue. Il ne faut pas mordre. Ça serait sacrilège. Juste laisser la chose se fondre dans ma bouche, jouer avec ma langue, la passer dessus, autour. Tout le sel de la chose est là, mavait-elle dit. Javais presque envie de la ressortir de ma bouche, pour ly remettre. Mais à ça ne se fait pas. En attendant, je laissais la chose dans ma bouche, profitant de chaque seconde du plaisir procuré. Le goût, le piquant, la douceur, lodeur, presque le fumet envahissait ma bouche jusquau fond de ma gorge.
Je mesurais la générosité, le bienfait, la délectation que me procurait mon acte. Jalternais les pressions de ma langue, passait autour, y revenait sans cesse.
Jétais fière de moi. Je lavais fait, javais vaincu mes appréhensions. Et mon dieu que cétait bon.
Surtout, je men sortais plutôt bien Une bonne dose de fierté menvahit.
Quel plaisir. Jouvris les yeux rapidement, pour constater que Paul, que javais un peu oublié pour le coup, était aussi dans un état second.
Langoureuse, profonde, passionnée, profondément passionnée même, telles furent les quelques mots, impressions ou idées que mon esprit tenta de donner sur le vif, dans le feu de laction, à ma petite gâterie.
Maintenant, Je voulais être prise par surprise, ne rien anticiper, que ça parte sans que je my attende. Bon certes, cest difficilement réalisable, compte tenu de létat dalerte sensorielle dans laquelle je métais mise.
Une question sest posée dun seul coup. Avaler ou pas ? Tout de suite ? Laisser encore les parfums envahir et coloniser ma bouche?
Déjà, je lai amené au fond de ma gorge à la limite de la glotte. Jai même faillis m et avoir la haut de cur. Puis les effluves ont conquis, emplis, inondés, remplis ma gorge.
Enfin, jai repris le contrôle. Je lai ramené vers le milieu de mon palais et
Ny tenant plus, je croquais à pleines dents dedans.
Voilà comme cest passé ma première visite chez Ladurée
Et comme Audrey, jy retourne dès que je peux :
- Mademoiselle, me dit la serveuse marrachant de mes pensées frivoles! Pour votre boîte de 8, vous avez Chocolat Earl Grey, Orange Campari & Pamplemousse Confit, Vanille Eclats de Caramel, Pistache Compote de Framboise, Caramel Beurre Salé, Noix de Coco & Compote de Mangue, Myrtilles & Violette. Je vous mets quoi pour le dernier ?
- Euh
Anis, mettez moi Anis !
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