Aux Voleurs!!! (1)
L'homme nu marche de long en large, passant devant la table où le jeune, assis et également nu, écoute attentivement:
<< - Les vieux partent tous les vendredis soir voir leur fille. Ils quittent la maison vers six heures et d'mie pour rentrer vers minuit. Si on arrive aux environs d' 8h ça nous laisse assez d'temps pour travailler. On s'casse dès qu'on a empoché tout l'flouze. Comme ça, on a une bonne marge d'sécurité au cas où ils partiraient en r'tard ou rentreraient en avance. On connaît où ils planquent l'fric. On sait jamais, peut y'avoir des choses d'valeur à mettre dans l'sac. Alors autant en profiter. Mais attention, pas n'importe quelle babiole. Autant bien réfléchir. On a du temps de reste pour ramasser l'maximum sans trop d'risques... >>
Le monologue continue apportant de nombreuses précisions. L'homme, Yannick, 37 ans, au physique plutôt athlétique, s'exprime tout en gesticulant. Le visage dur, les yeux inquisiteurs, le cheveu noir dru, les lèvres ourlées, le nez droit, l'ensemble est agréable à regarder. La voix, grave mais douce, devient câline lorsqu'elle s'adresse au jeune. Ce dernier, Kévin, 19 ans à peine révolus, paraît bien frêle par rapport à l'autre. Sa face poupine, souriante, son regard rieur, ses fossettes, lui donnent un aspect primesautier, espiègle. Le corps gracile, élancé, présente une féminité certaine que démentit une voix grave. Une fois les explications achevées, Yannick se campe derrière Kévin, place ses bras autour de son cou, les mains effleurant la poitrine imberbe. Il dépose un petit baiser derrière une oreille qu'il taquine d'un coup de langue. Une main du jeune vient caresser la joue râpeuse de son mec. Il questionne:
<< - Quand on y va? >>
Yannick continue de bécoter le cou de son compagnon, murmure:
<< - Ce vendredi. Obligé, on n'a plus un rond! >>
L'autre approuve. La vie de ces deux-là n'est pas compliquée: on a de l'argent, on le dépense; on n'a plus d'argent, on va en chercher là où il se trouve.
<< - D'accord, mais c'est moi qui bosse. C'est mon tour, comme on a dit. Toi tu restes dans la voiture à faire le guet. >>
Nouveaux bécots, nouvelles caresses:
<< - Bon, comme tu veux! Mais gaffe! Ça paraît simple comme ça, mais faut faire attention quand même. On sait jamais c'qui peut arriver. >>
*****
Yannick présente un passé chargé par de multiples vols avec effraction, une trentaine en tout depuis le début de sa carrière à l'âge de 14 ans. Condamné à deux reprises à des peines légères, il passe pour un habile aigrefin. Dès son 16ème anniversaire, il se laissa entretenir par une femme à la poitrine opulente et au retour d'âge plus que certain. La délicieuse, comme il la nommait, possédait peu de fortune. Dame patronnesse, comme l'on disait jadis, elle s'évertuait à remettre dans le droit chemin ce galopin aux mains chapardeuses. En fait, elle mit plutôt ces mains-là dans son soutien-gorge. La patience de la dame épuisée, ses quelques rentes également, Yannick partit l'âme sereine pour un nouveau fric-frac qui devait lui rapporter quelques mois de tranquillité, à l'abri du besoin. Il chaparda les économies de la meilleure amie de son ex-protectrice. La réussite complète de l'affaire devait le confirmer dans ses intentions de vivre confortablement en jouissant du bien d'autrui. Pas méchant garçon, plutôt doux, même, il poursuivit son chemin aux crochets de veuves en mal de mâles. Dès que la pourvoyeuse de fonds le virait ou qu'il partait, lassé pour cause de mauvais caractère de la vieille, il assurait sa survie matérielle en s'appropriant le fric d'une amie ou d'amis de sa dernière conquête. À noter qu'il ne commit jamais d'agression sur des personnes, qu'il ne porta pas d'armes, minimes fussent-elles. Un petit pactole en poche, il se laissa vivre, le temps de retrouver une nouvelle source de revenus en la personne d'une esseulée de préférence d'un âge dépassant la maturité.
Kévin, 7ème d'une couvée de 8, issu d'une mère dépressive soumise à la dive bouteille et d'un père plus préoccupé par les jeux en tous genres, se vit, très tôt, laissé pour compte. Frères et surs, trop soucieux de se sauver de pareille famille, ne s'occupaient guère des cadets et encore moins des benjamins. On se nourrissait comme on pouvait car les seuls festins à la maison se composaient de café au lait avec pain nature, les jours d'abondance. Maman n'avait jamais le temps de cuisiner, de laver, de faire le ménage, de torcher les gosses, comme elle disait. Ses états d'âme importaient plus que les mômes et acquérir le seul médicament (vin rouge) qu'elle jugeait efficace lui prenait beaucoup de temps. Papa, pratiquement toujours absent, rentrait rarement. S'il était présent, c'était pour fouiller la baraque en quête de menue monnaie, jurant sur tous les dieux qu'un tuyau sans faille apporterait la fortune libératrice de tous soucis matériels. Bien entendu, les coups tombaient généreusement sur la marmaille jamais contente, comme le gémissaient journellement madame et monsieur. Donc, la nourriture provenait souvent d'un étalage quelconque que les s avaient appris à alléger dès leur plus tendre jeunesse. Nul ne leur montrait comment faire: ils agissaient quasiment d'instinct.
Plus tard, quelques autres besoins se faisant sentir, Kévin suivit l'exemple de la fratrie aînée en piquant les portefeuilles des imprudents qui le plaçaient dans leur poche arrière ou des femmes qui omettaient de fermer hermétiquement leur sac à main. Un jour, la frimousse du gamin attira un vieux monsieur à l'allure de gentleman sur la fin mais au service trois pièces fort décati pour avoir trop servi ou peut-être pas assez, allez savoir: à 81 ans on ne peut espérer maintenir gaillard une queue plus que décadente. Prudent, le personnage antique demanda à Kévin son âge, preuve à l'appui. Il prisait fort la chair fraîche, mais pas au point de se retrouver derrière les barreaux. Le jeune venait de fêter ses 16 ans, donc majeur sexuellement, comme l'attestait une carte d'identité (vraie). L'ancêtre ne draguait pas le petit. C'est l'autre qui l'abordait, persuasif en parlant de récompense! Certes, il n'était pas ignare en la matière. Ses amours débutantes de jeune homme concernaient exclusivement des garçons, mais toujours de sa génération. On se branlait, on se tâtait bien un peu le cul après quelques attouchements sur le ventre ou le dos, mais ça n'allait pas plus loin. Pas de quoi véritablement former un futur gigolo. Toutefois, la rue donnant des leçons très explicites, il connaissait la théorie. Le papy, tout guilleret de sa bonne fortune, se fit une joie de passer de longues heures en compagnie de sa trouvaille. Les ébats cessèrent, faute de combattant, en l'occurrence l'ancêtre dont la queue ne bandait pas et qui, fatigue aidant, s'endormit après quelques tentatives polissonnes. Disons, pour rapporter les faits dans leur vérité, que Kévin avait pris soin de jeter quelque poudre endormeuse dans le verre du barbon afin de perquisitionner en paix l'appartement. Une heure plus tard, il quitta les lieux, emportant plusieurs billets de 500 euros.
Yannick, tout requinqué financièrement suite à une opération juteuse, rentrait chez lui lorsque des gémissements l'intriguèrent. Il trouva Kévin, sérieusement amoché. La fragilité du gamin émut l'homme un peu frustre. La corde sensible d'une personne en quête d'affectivité autre que celle fournie par des péronnelles sur le retour, vibra très fort. Ce gosse aurait pu être un fils ou un petit frère. Voleur, certes, mais tendre. Deux heures plus tard, Kévin souffrit en recevant les soins d'un médecin appelé par un Yannick tout chose. Dès le départ du médicastre, le blessé fut ébloui par le mâle. Il ne put s'empêcher de l'imaginer le serrant fort contre lui, lèvres contre lèvres, langues enchaînées. Cela l'aida à supporter la douleur. Un peu de nourriture avalé, il s'endormit sans plus de façon. L'homme porta le toujours gamin dans son lit, après l'avoir dévêtu. Un élan étrange le poussa à observer ce corps si frêle d'un encore adolescent: pas un seul poil, la peau blanche presque laiteuse, les doigts fins, les pieds menus, tout ceci pourrait appartenir à une jeune fille. Sa main effleura la peau du dormeur. Quelle douceur! Il ne se souvenait pas d'en avoir touché une aussi douce, aussi belle. Ses clientes n'avaient pas, beaucoup s'en faut, un pareil épiderme. Probablement que, pour la première fois de sa vie, il caressait une peau juvénile. Se reprenant (après tout c'était un mec dans son lit et non une femme), il s'alla dîner dans la cuisine, sans faire de bruit, puis revint dans la chambre, ne sachant trop que faire. Il décida, enfin, et se coucha aux côtés du blessé. Le contact fut électrisant pour Yannick. Là, plus question de frôlements voulus. L'exiguïté du lit pour une personne ne permit pas de dormir sans se coller l'un à l'autre. Il hésita: peut-être devrait-il dormir par terre? Cette idée ne lui plut guère: il n'avait rien pour faire un second lit. Il se résigna, tourna le dos au jeune, espérant s'endormir rapidement. Ce qu'il fit. Mais l'appel de la chair ne dort jamais. Vers 1h du matin, Yannick ouvrit les yeux: sa queue, encapuchonnée d'un latex, était chaudement installée au tréfonds du cul d'un Kévin s'évertuant à lui donner tout le plaisir possible en remuant son postérieur. L'émerveillement, la surprise, amena le baiseur à jouir rapidement dans la capote tandis que le baisé l'imita, éjectant son foutre dans les draps. Le premier reconnut!
<< - Jamais j'ai fait ça! Qu'c'est bon un cul! Les vieilles elles veulent pas! Pareil pour c'qui est d'piper un mec! T'as d'l'art dans la langue, j'suis sûr. Vas-y, t'gêne pas, j'en rêve d'puis trop longtemps. >>
L'autre rougit presque sous le compliment. Désireux de conserver son avantage, il plongea la tête afin de la porter au niveau de cette queue qui ne débandait pas et lui infligea une pipe en règle. Ça non plus, il ne connaissait pas le Yannick. Au bord de l'éjaculation, son tortionnaire le finit à la main. La jute explosa, arrosant le visage de Kévin qui se branla de suite après. Son partenaire, peu au fait des agissements entre hommes, le regarda gicler son foutre. Néanmoins, avide de toucher cette peau si douce, il ne cessa de le caresser. On se rendormit, satisfaits de soi et de l'autre.
Kévin s'installa chez Yannick. Ce dernier prit l'habitude de niquer le premier chaque soir. Les ébats s'améliorèrent peu à peu, se compliquèrent, se complétèrent. L'ancien hétéro pour vieilles en solitude apprit à bouffer un cul, à lécher des couilles, à sucer une bite. Il soumit son anus au doigté polisson, à une langue fouilleuse, accepta l'intromission d'une bite entre ses fesses. En résumé, il connut l'amour entre hommes. Toutefois, son long passé, ses habitudes, le maintinrent dans son opinion qu'il préférait baiser qu'être baisé. Il accepta bien d'autres concessions, se doucher et changer de linge chaque jour, par exemple. Il fait partie de ces générations habituées à une mise au propre hebdomadaire, jamais plus. Mais Kévin connaissait le moyen d'obtenir gain de cause: bite non lavée du jour, bite au repos. L'appétit sexuel de Yannick étant ce qu'il est, le passage quotidien sous l'eau savonneuse devenait vital s'il voulait se vider les couilles, comme il disait.
Au-delà de la sexualité, l'habitude prit le pas et, contrairement à la généralité dans la majorité des couples, celle-ci fit place aux sentiments amoureux. L'un comme l'autre ne pouvait se passer
de l'autre justement. Après quelques semaines de vie commune, sans se consulter, les deux abandonnèrent leurs activités putassières: ils ne louaient plus leur corps afin de subsister. Tout naturellement, ils convinrent de vivre du fruit de leurs larcins. L'équipe se forma sous la férule de l'aîné autrement plus expérimenté que son compagnon. On changea d'appartement, on acquit un mobilier plus adapté, notamment un lit de deux personnes.
Ainsi se passa plus d'une année de vie commune.
*****
Les deux grandes mains de Yannick, toujours debout, glissent doucement sur la poitrine d'un Kévin assis. La mise au point de l'opération s'achève par un ultime rappel:
<< - N'emporte rien: pas d'clés d'appartement, pas d'lettres ou d'papier portant ton adresse. Ta carte d'identité suffit: l'adresse qu'est d'ssus est plus bonne. Comme ça, si on s'fait boucler, y sauront pas où qu'on crêche. Officiellement, on vit sous les ponts. Si y'a un r'tour plus tôt qu'prévu des vieux ou l'moindre truc qui cloche, tu t'barres vite fait. Tu laisses tomber les babioles, on s'content'ra seul'ment du fric qu't'auras fourré dans l'sac sitôt entré dans la place! Tu l'promets, dis Kévin? >>
Kévin se lève, tourne son corps vers celui de son partenaire, se plaque contre lui, dépose ses lèvres sur les siennes, murmure:
<< - OK! Papa poule! Ça fait au moins cent fois qu'tu m'dis ça. J't'aime, tu sais, le gros Nounours. >>
Les bras de Yannick entourent la taille de Kévin. Les baisers deviennent plus langoureux. Entre deux, le premier murmure:
<< - Moi aussi, j't'aime, le gringalet. Allez! Faut s'habiller comme des clodos. C'est pas l'moment de s'la donner
>>
La passion des corps ne le cède en rien à la passion sentimentale. Les doigts imposants de Yannick écartent les fesses rebondies d'un Kévin au dos automatiquement cambré. Très vite, une langue chatouille l'anus qu'elle tente de pénétrer. La décontraction autorise cette approche. Le léché glousse, le lécheur augmente son ardeur. On tombe sur la moquette. Les bouches aspirent les queues que les langues palpent délicieusement. Les glands subissent une douce violence. Les couilles, englouties à leur tour, se voient agréablement molestées par des lèvres sensuelles. On se sépare quelques secondes, on se regarde, on se roule une pelle. Les bites se touchent, raides entre les deux ventres. L'une d'elle s'échappe pour se nicher entre des cuisses. Un mouvement lui permet de glisser dans cette chaleur humide de sueur. Enfin, couché sur le dos, les jambes levées pieds posés sur les épaules de Yannick, Kévin offre son cul à la bite de son amant impatient de la planter dans cet antre. Plus besoin de capote, maintenant qu'ils vivent en couple, fidèles l'un à l'autre. Le braquemart coulisse dans l'anus, entrant, sortant. Une langue sillonne les mollets, laissant une trace de salive. L'enculé ne retient pas ses manifestations de plaisir. Toujours souple, malgré sa trentaine sur le déclin, Yannick se penche un peu plus afin d'atteindre la bite de Kévin dont il happe le gland avec voracité. Très vite les chairs survoltées, secouées par des spasmes de jouissance, éjectent le foutre en giclées violentes. L'enculé étend le liquide sur son corps pendant que son anus s'emplit de la semence de son amant. On souffle un peu avant de reprendre les activités rémunératrices.
*****
Toujours à l'affût d'un coup, Yannick n'a pas eu à chercher longtemps de quoi renflouer les caisses vides du "ménage". Accidentellement, il a surpris une conversation, chez le boulanger, par laquelle une femme de ménage assurait, en confidences bien entendu, que ses patrons conservaient chez eux, en permanence, près de 60.000 euros. Ces personnes, âgées, détentrices d'un commerce de vieilleries, vivent encore sous les habitudes acquises au début du 19ème siècle: on n'a guère confiance dans les banques qui vous escroquent en comptant des frais imaginaires et fort élevés, la caisse d'épargne rapporte bien trop peu, et on a toujours besoin d'une certaine somme disponible au cas où
Après une brève surveillance de la maison et des allées et venues de leurs occupants, le cambriolage était décidé.
Comme convenu, ce vendredi soir, Yannick mène Kévin aux environs de l'habitation, le dépose, se gare beaucoup plus loin, revient pédestrement aux alentours afin de guetter.
Prudemment, le voleur, dûment ganté, pénètre dans la maison, après avoir la porte d'entrée à l'aide de son outillage spécial. Éclairé par une minuscule lampe de poche, il se dirige droit vers la chambre, ouvre un coffre de rangement, le vide afin d'atteindre la boîte dans laquelle se trouve l'argent. Il soulève le couvercle de cette dernière, constate que les billets sont bien là, les fourre dans son sac à récolte (comme il le nomme), lui-même escamoté dans la poche intérieure de son blouson remet la boîte en place ainsi que le coffret: on ne devrait pas s'apercevoir immédiatement de son intervention. L'aigrefin effectue ensuite un rapide tour des lieux. Beaucoup de vieilleries encombrantes, rien de bien intéressant en fait, parce que rien de valeur: il s'en persuade en constatant que les objets dorés n'ont aucun poinçon. Juste avant de sortir, il remarque un magnifique briquet en or massif sur une table basse du salon. Il le scrute, le repose: des initiales et une date sont inscrits dessus, trop dangereux. La visite se termine, elle n'a pas durée plus d'un quart d'heure. Kévin s'apprête à sortir non sans avoir, auparavant, porté sa main sur sa braguette afin de caresser sa bite: une sorte de tic porte bonheur! Délicatement, il ferme la porte derrière lui, regagne le trottoir. Il ne réalise pas que deux voitures de police arrivent en trombe, lui barrent le passage. Les pandores l'entourent. Il comprend qu'il est fait. Inutile de résister. Ses yeux constatent que des lumières brillent dans la maison d'en face: on a dû voir le rayon lumineux de sa lampe. Fataliste, il hausse les épaules, attend qu'on lui mette les menottes.
Yannick assiste à l'arrestation de son compagnon. Prudent, il s'éloigne afin de regagner la voiture. Il rentre à la maison.
Deux heures plus tard, Kévin se retrouve dans une cellule du commissariat, en attendant de passer en jugement dès demain matin, en comparution directe. Il vient de reconnaître les faits, sans aucune résistance.
Le juge écoute la version de l'accusé: vol avec effraction, sans complice. L'accusé n'a jamais été condamné. L'avocate, commise d'office, plaide l'enfance malheureuse, l'obligation de se débrouiller comme on peu pour survivre alors qu'on n'a pas de toit ni le moindre croûton de pain. La sentence semble douce: six mois de prison dont quatre avec sursis et deux ans de mise à l'épreuve. Le condamné remercie, sans savoir pourquoi, suit les deux pandores chargés de l'amener à la prison du coin. Kévin ne se fait pas grand soucis. Il sait que Yannick lui adressera régulièrement de quoi cantiner, se chargera de son linge. Bien entendu, il ne le fera pas lui-même, ce serait risqué. Une de ses cousines, Mimi, assumera cette tâche en se faisant passer pour la fiancée du prisonnier. Tout cela est convenu depuis le début de leur collaboration. Par ailleurs, si l'enfermement n'a rien de réjouissant, présente beaucoup d'inconvénients, Kévin se promet de passer le temps le mieux du monde. Il connaît, ou croit connaître, la vie carcérale d'après ce que lui a raconté Yannick. Le tout sera d'être patient.
*****
Quatre dans la même cellule, soit 3 m2 par tête, dont une partie est encombrée par le lavabo (eau froide uniquement), les WC, et deux lits à étage. Les co-locataires de Kévin ne l'intéressent nullement. Un vieux voleur non loin de la retraite et ronchon de surcroît, un quadra ventru et sale, un autre quadra muet volontairement au regard assassin et à la trogne rubiconde. Ces trois-là ignorent complètement le nouvel arrivant. Au moins, celui-ci n'aura pas à subir leurs assauts sexuels tant ils semblent amorphes. Dans la soirée, il comprend le pourquoi de leur peu d'entrain: tous avalent un traitement qui endormirait un cheval! Dans la nuit, Kévin descend de son lit, va s'asseoir sur la cuvette des WC, prend sa bite en main et s'applique une branlette tout en pensant à son Yannick qui, cela va de soi, doit faire ou a fait, la même chose en pensant à son amant enfermé.
Dès le lever, le café froid avalé (il n'a pas encore la petite résistance électrique pour le chauffer), Kévin attend que ses collègues aient procédé à leur toilette. Ces messieurs passent rapidement devant le lavabo. Une fois propre, on vient le chercher pour la visite médicale puis il se rendra chez l'assistante sociale. À son retour, on lui annonce qu'il change de cellule. Illico, il emballe son "paquetage", suit un gardien qui lui ouvre la porte de son nouveau "foyer". D'un coup d'il, il constate qu'il n'a pas perdu au change. Cellule de même dimension que la première mais avec seulement deux compagnons âgés entre vingt et vingt cinq ans. Leur aspect physique n'a rien de désagréable, loin s'en faut. Suivant les conseils, jadis prodigués par Yannick, Kévin se contente d'un salut marmonné, s'installe. Les deux autres l'ignorent, en apparence. Au moment de la promenade, ils partent ensemble. Le nouveau reste en cellule: il désire quelques instants de solitude afin de se donner du plaisir tout en rêvant du corps de son très aimé.
Une heure plus tard, ses compagnons reviennent, accaparés par une importante discussion. En voyant Kévin, ils réagissent comme s'il ne l'avait jamais vu. Le plus jeune, annonce:
<< - Moi, c'est Jean-Michel, lui c'est Bernard. Et toi? >>
Kévin se présente. On donne la raison de sa présence en ce lieu. Les deux "anciens" parlent d'un fric frac qui aurait mal tourné (coups et blessures). Récidivistes, ils purgent une peine de quatre ans. On papote un moment sur des banalités importantes ici puis, le plus âgé croit bon de spécifier, le regard mauvais:
<< - Ici, on n'aime pas les pédés! Alors, si t'es d'la partie, d'mande à changer d'crèche! >>
Pas besoin de précisions. Kévin déchante: il est tombé avec deux casseurs de pédés!
<< - Y'a pas d'problème pour moi! J'suis comme vous! >>
C'est tout ce qu'il trouve à répondre. Maintenant, il est sûr d'une chose: pour se branler il devra se priver de promenade.
*****
Depuis quatre semaines, Kévin vit au rythme des horaires de la prison. Ses co-locataires ne s'occupent guère de lui. Comme promis, Yannick se charge de lui procurer quelque confort à l'aide de mandats réguliers, de linge frais. Les deux autres ne semblent pas jaloux de l'opulence relative de leur compagnon.
Il reste un peu plus de quatre semaines à effec dans ce trou à rats. Ce qui chagrine le plus Kévin, outre l'absence de son amant adoré, c'est de ne pouvoir baiser librement. Même pour une branlette, il doit faire montre d'une prudence extrême. Afin de supporter ces privations, il s'occupe à lire, fait des exercices physiques journaliers dans la salle de gym. Jamais il ne se promène, profitant de la solitude pour enfin s'occuper de sa queue. Mais la masturbation lui laisse un goût amer. Plus il se branle, plus il a envie de baiser. Par contre-coup, plus il observe en cachette ses collègues. Le plus terrible, c'est la douche en commun! Heureusement, les deux mecs très prudes ne quittent pas leur slip pour se doucher. Ils se contentent de savonner puis de rincer en soulevant le sous-vêtement. En maintes occasions, fugacement, Kévin admire les fesses du plus jeune, le paquet provoquant de l'autre, surtout le matin quand il bande au lever. Il en rêve, lui sauterait presque dessus tant il a besoin d'un contact avec une chair autre que la sienne. D'ailleurs, il en arrive à avoir des illusions. Hier, par exemple, alors qu'il arrangeait son lit, Bernard lui a passé la main aux fesses en se rendant aux WC. C'est, du moins, ce qu'il semblait. Ce matin, c'est Bernard qui l'épiait pendant qu'il changeait de sous-vêtement après la toilette. C'est, du moins, ce qu'il semblait. Enfin, voilà à peine dix minutes, alors que les deux revenaient de promenade, ils discutaient de leur compagnon de cellule en des termes salaces. C'est, du moins, ce qu'il semblait. Kévin s'oblige à se maîtriser. Tout cela devient irréaliste. Après tout, ces mecs sont peut-être cons et homophobes, mais au moins ils ne l'emmerdent pas. Il doit se raisonner, calmer ses pulsions sexuelles, apaiser ses ardeurs. Il décide de s'octroyer deux branlettes, coup sur coup, pendant l'absence des autres. Cela provoquera une certaine fatigue au niveau de sa queue. Dès le lendemain, il se met à l'ouvrage: il jouit une première fois, n'arrête pas de se masturber jusqu'à ce que le foutre jaillisse de nouveau.
Victime d'une péritonite, Bernard est évacué vers l'hôpital. Jean-Michel reste seul avec Kévin. Force est, au premier, de s'aboucher avec le second: la peur de l'ennui, de la solitude, le besoin de parler, l'obligent à cet échange. Très vite, ils s'entendent à merveille.
Cinq jours après le départ de Bernard, un nouvel arrivant occupe la place vacante: Charles, jeune homme de 28 ans, un tantinet efféminé. Passées les quelques minutes d'observation, le trio se forme naturellement. Kévin se souvient de l'avertissement reçu à son arrivée. Il s'étonne de ce que Jean-Michel se lie malgré tout à Charles qui, à l'évidence, est pédé. Tous deux en parlent. Jean-Michel confie:
<< - C'est Bernard, l'casseur d'pédés. Y'a longtemps que j'le guigne, c'mec. Mais y'a rien eu à faire. R'marque, y savait pas que j'zieutais sur lui. Sinon, y m'aurait tué d'puis longtemps. Dehors, j'baise avec des mecs, mais y sait rien lui. J'ai une pépée pour la forme, une bonne copine qui m'couvre. Ici, j'fais gaffe encore plus, avec lui. Mais ça m'démange dur! Des fois, j'voudrais l'violer, l'salaud! Enfin, y s'ra pas là pendant un moment. Quand j'pense que t'aurais bien voulu avec moi, qu'est-ce qu'on a perdu comme temps! Enfin, j'crois qu'on va avoir c'qu'on cherche, toi et moi, Kévin, avec l'Charles. Y doit aimer la bite, c'mec. >>
En effet, Charles aime la bite. Il n'hésite pas à le faire savoir par une déclaration franche et directe:
<< - Bon, les mecs, j'suis pédé! Si vous voulez, on baise. Et quand j'dis on baise, c'est la totale. Z'êtes pas mal foutus! Ça m'plaît. Si vous voulez pas, ça fait rien. Mais ça s'rait con d'perdre une pareille occase de s'soulager un peu. Croyez pas? Et pi, l'temps est long ici, alors faut l'passer à s'faire plaisir. Pas vrai les mecs? >>
Les choses mises au point, sans barguigner on convient de tout un programme afin de ne pas se faire surprendre la queue dans les fesses ou dans la bouche d'un autre. Dès les programmes bien établis, arrivé le moment propice, on passe aux actes sans plus attendre. Jean-Michel et Kévin comprennent aussitôt ce que Charles voulait dire par "la baise totale". Par contre, ils sont également fixés sur les préférences du nouveau. Après les papouilles, vite fait bien fait, on se suce un tantinet, juste pour rappeler le goût que peut avoir une bite car la pression est telle que les éjaculations se manifestent très vite. On se retient, le temps de se retrouver à quatre pattes sur le sol froid, le cul bien exposé. Seuls Jean-Michel et Kévin se retrouvent dans cette position alors que Charles encule le premier après s'être couvert la bite d'un latex. Le tour du second ne tarde pas. Les enculés soupirent de bonheur bien qu'ils grimacent de temps à autre: l'engin de l'enculeur, long, mince, dur comme une barre de fer, n'est pas que douceur. C'est au tour de Jean-Michel d'enfourner sa queue dans les culs qui se présentent puis Kévin prend la relève. On s'est tous sucés, enculés, caressés. Maintenant, le foutre gicle atteignant le sol que l'on s'empresse de nettoyer. Les ébats n'ont pas durés plus d'un quart d'heure. Les deux anciens de la cellule poussent un soupir de soulagement: enfin, ils viennent de forniquer convenablement, voilà qui va leur permettre de patienter quelques jours avant de remettre ça, prudence oblige! Le nouveau, quant à lui, se couche sans plus de façon: hier encore, il fourrait un gentil petit jeune homme de
. 51 ans!
Durant les conversations entre les trois prisonniers, Charles annonce le motif de sa condamnation: proxénétisme. Il fait "travailler" des filles qu'il "protège". En ce qui le concerne, son occupation favorite est de se taper des mecs d'âge mûr, mais pas trop mûr quand même. Il n'apprécie guère la jeunesse, trouvant que leurs aînés sont beaucoup plus expérimentés dans la baise et, surtout, qu'ils posent bien moins de problèmes dans la drague et par la suite, quand suite il y a. À noter que Charles, s'il professe le métier de maquereau, ne se prostitue pas. Les demoiselles sous sa garde connaissent ses amours, ne rechignent pas, ne se moquent pas. Il est vrai que leur protecteur les protège vraiment, ne leur demandant en compensation que le tiers de leurs gains, il ne les "vend" pas ne prenant sous sa garde que les "volontaires": un tendre en somme, le Charles! Mais allez faire entendre une telle magnanimité aux gens chargés de la justice!
Une à deux fois par semaine, on partouze dans la cellule 127! On s'en donne à cur joie, on en prend plein la bouche, plein les fesses. Se pose la question cruciale des capotes. On en manque. Jusqu'alors, on utilisait la même capote pour baiser le même mec. Ces capuchons à queue, neufs, avaient été abandonnés par un précédent pensionnaire peu enthousiaste à l'idée de laisser les gardiens trouver ce trésor lors de la fouille au moment de sa libération. Donc, on lavait entre deux coups l'ustensile. Certes, ça n'était pas très hygiénique mais au moins on évitait les maladies sexuelles, tout au moins le pensait-on. Cet usage intensif ne dure que le temps de trouver un moyen d'en acquérir d'autres de capotes. Charles, grâce à ses connaissances, sans préciser lesquelles, s'approvisionne régulièrement alors que la pénurie devenait totale. Il déclare:
<< - Le plus chiant, c'est d'trouver des capotes sans qu'on sache qu'elles viennent ici. Sinon, toute la taule saurait qu'on partouze! J'vous dis pas c'que ça f'rait! Alors, l'seul moyen, c'est qu'elles arrivent direct'ment de l'extérieur à ici, sans intermédiaire. >>
Aucune "infidélité" n'est commise. Quand on baise, c'est à trois, jamais deux sans le troisième. On partage tout. Kévin, le plus gâté question colis et fric, apporte un certain confort à ses compagnons. Cette promiscuité e, cette amitié quasi obligatoire s'il ne veut pas sombrer dans la solitude, ne l'empêche nullement de penser au seul être dont il soit vraiment amoureux: Yannick. Souvent, alors qu'il enfourne sa queue dans l'anus de Charles ou de Jean-Michel, il croit voir le cul de son Yannick. Alors, il s'imagine l'enculant avec tendresse ou se faisant baiser avec maestria par lui. Durant toutes ces parties de jambes en l'air, il ne pense, ne voit, que son Yannick. Le foutre giclé, il s'étonne de trouver à ses côtés deux personnages qui, passé le temps d'un éclair d'éjaculation, lui paraissent étrangers.
*****
La libération arrive enfin. Kévin emballe ses quelques affaires. La veille, les trois se sont offert une baise mémorable. On a recommencé à deux reprises! La cellule puait la sueur, le foutre, le cul. On a aéré malgré la fraîcheur de la nuit.
Le gardien se pointe, appelle le sortant qui, d'un geste de main dit adieu à ses compagnons d'infortune. Fouille puis récupération de ses papiers d'identité avec signatures, puis sortie. Le libéré s'arrête juste devant la porte qui se referme derrière lui. A pas lents, il se rend à l'abribus situé à quelques centaines de mètres, comme convenu. Personne en vue. Pourtant, il avait bien prévenu la "cousine" de Yannick de sa sortie. Il pose son sac à terre, entre ses jambes: peut-être a-t-il du retard à cause des embouteillages. Un quart d'heure s'écoule. Kévin s'inquiète de plus en plus. Une demie-heure de plus et c'est l'effondrement complet. Le pauvre garçon voit toutes ses illusions, ses espoirs, réduits à néant. Une voiture arrive, klaxonne, s'arrête. Une femme en sort:
<< - Kévin! Désolée de ce retard! >>
La "cousine" se présente. Ils ne s'étaient jamais rencontrés. Tous deux montent dans le véhicule. Durant le trajet, Mimi propose:
<< - C'est l'heure de manger. Un resto, ça te dit? >>
Kévin, un peu tourneboulé par la tournure des événements, rétorque simplement:
<< - Pourquoi Yannick est pas v'nu m'chercher? >>
Mimi hésite. Visiblement, elle cherche quoi répondre. Elle déclare:
<< - On en parlera pendant le repas, d'accord? >>
Kévin comprend que quelque chose d'anormal se produit. Il éprouve la sensation de perdre ce qu'il a de plus précieux. Il pose une main sur le bras de Mimi, ordonne sèchement:
<< - Arrête la bagnole et dis-mois c'qu'y'a! >>
Elle obtempère, jugeant préférable de se plier à cette injonction tant le visage de son passager est livide de colère, de peur aussi. Une fois garée, elle bredouille:
<< - Yannick n'est pas mon cousin. On sort ensemble depuis six mois. Maintenant, on est mariés. Il veut oublier son passé, tout son passé. Finis les vols, finie la vie hasardeuse qu'il menait avec toi. Il a décidé de tirer un trait sur tout ça. Je sais que vous avez couchés ensemble. Ça aussi il veut l'oublier. >>
Mimi observe Kévin. Celui-ci ne bouge pas, se contente de marmonne:
<< - Alors y m'trompait! Y m'a rien dit! J'ai rien vu! Quel con je fais! >>
La jeune femme ajoute:
<< - C'est vrai, il ne t'a pas parlé de notre relation. Il n'était pas sûr de ses sentiments envers moi. C'est quand il s'est retrouvé seul, après ta condamnation, qu'il a compris. Tu sais, il n'est plus de première jeunesse. Il est temps pour lui de se caser, d'arrêter les conneries. Toi, tu es jeune, c'est différent. >>
Kévin sent la révolte s'emparer de son cerveau. Il hurle:
<< - J'l'aime, j'vois pas c'qui y'a d'différent! Jeune ou vieux, ça change rien! >>
Désireux de quitter cette voiture, par crainte de tabasser Mimi s'il restait à ses côtés, il sort brutalement, s'en éloigne. Yannick lui a appris à ne jamais taper une personne du sexe féminin, c'est se dégrader soi-même, selon lui. La jeune femme le ratt, demande:
<< - Où tu comptes aller, comme ça? Yannick a prévu de quoi te débrouiller pendant quelques temps. J'ai ce qu'il faut pour que tu ne manques de rien. Tu sais, il t'aime, mais à sa façon. >>
Kévin bouscule Mimi, fait quelques pas. Elle le ratt. Il gueule:
<< - Fous l'camp! Toi, ta bagnole, ton Yannick pourri! Foutez tous l'camp! J'veux plus vous voir ou vous entendre! Que des pourris! J'veux r'tourner en taule! >>
Aveuglé par les larmes, la douleur, le jeune homme chancelle, s'accroupit à même le trottoir. Il remarque à peine une main déposer son sac devant lui. Il entend tout juste une voix lui dire:
<< - Bon chance, Kévin! >>
Il lève la tête, maugrée:
<< - Dis-moi, quand j'étais avec lui et qu'y t'baisait, est-ce qu'y s'servait d'une capote au moins avec toi? Lui et moi on s'aimait, on n'en avait pas b'soin. >>
Interloquée par la question, Mimi reconnaît:
<< - Bien sûr qu'on se protégeait au début. Maintenant, c'est plus pareil, on est mariés. >>
En prononçant la dernière phrase, son ton était ferme, comme si elle voulait marquer une victoire. Mimi s'attend à une réaction. Kévin la regarde de façon insistante, hausse les épaules, fataliste, prononce entre deux sanglots:
<< - Barre-toi, connasse, avant que j'te bousille la tronche! >>
Il aperçoit deux jambes s'éloigner, entend les talons battre le bitume. La voiture démarre. Tout s'écroule autour de Kévin qui se relève, s'empare de son seul bien matériel, se dirige vers la prison, sans même s'en rendre compte. Il revoit son "bonheur" d'hier, celui qu'il éprouvait durant la partouze avec ses confrères condamnés, alors qu'il les tronchait tour à tour en s'imaginant que l'un d'eux (ou peut-être les deux) était Yannick.
À suivre
Comments:
No comments!
Please sign up or log in to post a comment!