Aventures (4)

Ce qui frappe le plus Hubert, réside dans la corpulence du maître d'hôtel, Antoine de
son prénom. Une masse, tout délicat dans le ton de la voix et dans le geste. Élégant
dans la façon de marcher. Mais hyper viril en tous points. Quant au sourire éclatant,
il ferait fondre tous les glaçons de la terre! Plus que bandant, le mec! Peut-être que
la soirée ne sera pas aussi morne que prévu dans la mesure où….

Dîner frugal, selon les critères d'Hubert: douzaine d'escargots en cassolette, foie de
veau persillé purée de céleri, colonel et, pour faire passer le tout, une demie
champagne. Le gourmet se dit déçu par les escargots: manque de saveur, trop peu de
persil et d'ail dans le beurre. Rien à dire sur le foie de veau et la purée qui
l'accompagne, pas plus que sur le dessert. Par contre, il juge le champagne un peu
vert. Miracle! On lui sert un véritable café à l'italienne. Au moment de payer
l'addition, Antoine, en maître d'hôtel accompli, propose:
<< - Monsieur prendra bien un digestif offert par la maison.
- C'est très aimable.
- Un cadeau de bienvenue, en quelque sorte. Et bienvenu, vous l'êtes. Nous avons
rarement l'occasion de recevoir des clients au minois aussi avenant. >>

En prononçant la dernière phrase, Antoine s'est baissé. Hubert sentait son souffle
dans son cou. Oui, décidément, la nuit ne sera pas morose. Une pensée l'effleure:
Ahmed. S'il appelait? Qu'importe! Rester quelques jours sans le voir ne peut que leur
faire du bien. Demain soir, il part avec Paco pour une lune de miel. Peut-être? Cela
le fait sourire. Antoine apporte le digestif et, tout de go:
<< - Je termine mon service dans deux heures. Vous êtes patient?
- Quant je suis très intéressé, je patienterais des heures. Alors, je peux vous
attendre deux heures. Où doit-on se retrouver?
- Eh bien! Au Comptoir d'Or, voici les coordonnées.

>>

Et de glisser un papier sur lequel se trouve inscrit l'adresse. Au moins, voilà de la
drague simple et rapide!

En attendant son rendez-vous, Hubert s'assied à la terrasse fermée du bistrot indiqué
par Antoine. Il observe les gens, se demandant qui ils sont, ce qu'ils font. Il laisse
son esprit errer d'une pensée futile à un sujet plus profond. Cette nouvelle aventure
éclaircira-t-elle ses sentiments envers Paco ou envers Ahmed? L'espère-t-il vraiment?
À moins que cela ne complique encore plus. Pourquoi se monter le bourrichon? Il décide
de ne plus penser à eux mais de se consacrer uniquement au nouveau venu dans sa vie.

Vêtu d'un jogging, Antoine s'assied à côté d'Hubert, commande un thé citron, attaque:
<< - Y'a longtemps que j'avais pas dragué un mec aussi canon et que ça marche en un
clin d'œil. Je croyais pas que tu serais au rendez-vous.
- Je tiens toujours parole. Enfin, dans la mesure de mes moyens.
- Et comment sont tes moyens?
- Ça, tu seras à même d'en juger d'ici peu, si ce que je pense arrive.
- Et tu penses quoi?
- Serrer tout contre moi un certain maître d'hôtel fort à mon goût. J'ai bien envie de
te rouler une pelle. Mais je suppose qu'ici tu es connu.
- Et reconnu. On sait pour moi. Donc, maintenant, on sait pour toi.
- Ah d'accord! C'est ton point de chute!
- T'as tout compris… >>

Tout en devisant, Antoine épie Hubert. Un beau brun aux yeux noisette. Le visage à
l'ovale parfait serait presque féminin s'il n'y avait cette barbe de deux jours
soigneusement entretenue. L'homme paraît grand, un peu frêle, nerveux.
De son côté, Hubert examine Antoine avec soin, bien que discrètement. Il ne s'était
pas trompé. Le mec, baraqué, dégage une virilité incroyable mais délicate. Le sourire
ravissant accompagne des yeux pétillant de polissonnerie. Les mains, aux doigts
puissants, parfaitement soignées, pourraient d'un seul coup de poing.
L'aspect
général du personnage dément toute férocité de sa part.
Ils continuent de bavarder, d'eux, de leurs passés, de leurs présents, des espérances
pour l'avenir. Ils critiquent les films du moment, les livres tout juste sortis. Ils
s'étonnent lorsqu'un serveur leur annonce que le bar ferme. Ils quittent l'endroit,
toujours captivés par leur conversation, marchent le long du boulevard. Plus de deux
heures durant, main dans la main, ils devisent de politique, de religion, du monde
comme il va et se demandant comment va le monde. De temps à autres, profitant d'un
porche, d'un recoin discret, ils s'approchent l'un contre l'autre, s'enlacent;
s'embrassent tendrement tandis que les mains tentent une rapide incursion sous les
vêtements. Puis ils reprennent leur promenade nocturne. Une voiture de police s'arrête
juste devant eux. Deux policiers les abordent, exigent leurs cartes d'identité.
Pendant qu'un pandore vérifie avec son téléphone, l'autre demande:
<< - Qu'est-ce que vous faites là? >>

Antoine et Hubert se regardent étonnés par la question. Le premier répond:
<< - On se balade. On vient juste de se rencontrer, on fait connaissance. >>

L'homme à l'uniforme lance, souriant:
<< - Je vois! J'espère que vous approfondirez cette connaissance ailleurs que dans la
rue. >>

Et de rire de sa plaisanterie. Son collègue rend les cartes d'identité en déclarant
que tout est en ordre. Le véhicule de police parti, Antoine et Hubert reprennent leur
errance. Ils arrivent devant la gare, se dirigent vers le buffet, constatent l'heure:
4h30! Hubert soupire:
<< - Il faut que je dorme. Je travaille tout à l'heure. Et toi?
- Je commence à 11 heures.
- Tu viens chez moi?
- OK. >>

Un taxi les amène.

Hubert fait entrer Antoine, se plaque contre lui afin de lui rouler un magnifique
patin.
Il susurre à son oreille:
<< - Je n'ai pas vu le temps passer avec toi.
- Moi non plus. >>

Ils reprennent leurs embrassades, se dévêtent, se couchent, enlacés, s'endorment dans
les bras l'un de l'autre, corps contre corps, lèvres contre lèvres. Un peu plus tard,
les corps ondulent dans une gesticulation érotique. Les mains se baladent, titillant
les endroits érogènes. Les bouches laissent pénétrer les langues alertes et suaves.
Tendrement enlacés, les amants s'affrontent, bassins frottant l'un contre l'autre,
queues s'affrontant l'une contre l'autre. Ils n'en demandent pas plus, savourent leurs
ébats comme ils sont, laissant échapper leurs éjaculations qui noient leurs corps. Ils
se rendorment.

Lorsque le réveil sonne, Hubert se précipite pour le stopper. Il sort du lit,
délicatement, ferme la porte de la chambre. Le plus silencieusement possible, il
procède à sa toilette, s'habille, déjeune. La porte de la cuisine s'ouvre laissant
apparaître un Antoine à poil, mâchoires écartées tout comme les bras. Il s'étire à
loisir, grogne:
<< - Pourquoi tu m'as pas réveillé?
- J'ai mis le réveil à 9h30.
- Sympa. Mais faut que je passe chez moi. On se voit ce soir? Ou plutôt non, demain.
Je suis libre tout le week-end.
- Normalement, je suis invité. Mais si je peux me libérer, promis. >>

Antoine s'agenouille devant Hubert, admire la queue en éveil, la gobe goulument, lui
fait subir une douce fellation. Le sucé renâcle bien un peu, alléguant l'heure. Mais
le plaisir s'empare de lui, qui annihile toute volonté. Hubert caresse les cheveux de
son suceur avant de lui faire signe de se relever et de s'agenouiller à son tour afin
d'enfourner la bite demandeuse. Succions énergiques. Salivations abondantes. D'un
coup, Antoine soulève Hubert, le pose sur la table, sort prestement un préservatif
venu on ne sait d'où, enfile sa queue dedans et ladite queue dans le fion d'un Hubert
aux anges.
Commence un long pilonnage, profond, langoureux, fouilleur. Les lèvres se
joignent à nouveau. Les mains palpent. Changement de position: Hubert ventre appuyé
sur la table, pied au sol, cul bien tendu et cambré, permet au braquemart de se
faufiler dans l'anus ainsi présenté. Seconde séance de piston avant une période de
lever-baisser qui voit Antoine assis sur une chaise et Hubert assis sur la queue qui
se démène comme un beau diable dans un bénitier (expression sortie comme ça, sans
réfléchir). Les sons gutturaux résonnent dans l'appartement, de plus en plus
fréquents, de plus en plus sonores, jusqu'au lâcher final du cri plaintif annonçant un
autre lâcher: celui du foutre qui s'épanche dans la capote ou qui fuse sur le sol.
Remis de cet instant d'éblouissement, Hubert se lève, libérant le sexe ramolli, afin
de se précipiter dans la salle de bain, immédiatement suivi par son amant qui montre
des signes de revenez-y. Pas question: l'heure n'est plus aux galipettes friponnes
mais au boulot. Pas de petit déjeuner, le temps presse. Tout juste habillés, les deux
hommes échangent leur numéro de téléphone, s'enlacent quelques secondes, pelle
savoureuse, séparation des lèvres avec soupir de regret.

Au bureau, arrivée en catimini du sous patron très en retard, essoufflé. En passant il
donne quelques informations à Fortuné sur les causes de ce retard. Durant la journée,
rien d'extraordinaire si ce n'est la bonne humeur d'un Paco rayonnant. Peu avant la
fermeture, il demande à Hubert:
<< - Tu connais un endroit pas trop mal?
- Oui, une auberge sympa.
- Parfait. Rendez-vous devant chez toi. Tu me montreras le chemin. >>

L'interpellé maugrée de n'avoir pas eu le courage de se décommander. Ces deux
prochains jours, avec son chef, ne lui disent rien que vaille. De plus, Antoine vient
de rentrer dans sa vie et il aimerait bien le côtoyer de façon plus assidue, très
alléché par les quelques aperçus vécus la nuit dernière.

*****

Comme prévu, la voiture arrive à l'heure. Hubert descendait tout juste avec son sac.
Il remarque, à son grand étonnement, qu'une femme est assise à côté de Paco qui croit
bon d'expliquer, sourire à l'appui:
<< - Rien ne vaut une femme avec soi pour un week-end idéal. >>

Hubert ne sait trop que répondre, pas plus qu'il ne comprend très bien où l'autre veut
en venir. Il hésite: mais quelle excuse trouver pour ne pas y aller? Aucune d'autant
qu'il a son sac de voyage avec lui. Il renonce donc à … renoncer. Toutefois, il estime
nécessaire de préciser sur un ton de plaisanterie:
<< - T'inquiète, je ne prends jamais les copines des autres. Aucun risque là-dessus.
>>

Il décide de prendre sa voiture, arguant:
<< - Si vous voulez vous échapper tous les deux, nous serons tous plus indépendants.
>>

Tout en se rendant au garage, une idée germe dans la tête d'Hubert. Il appelle
Antoine, laisse un message lui demandant de le rejoindre, demain dans la matinée, et
lui donne l'adresse.

À aucun moment de la soirée, Hubert ne reste en tête-à-tête avec Paco afin de lui
demander quelques explications. Que veut-il prouver en amenant cette fille, Anna, au
demeurant fort sympathique et intelligente? Que veut-il démontrer? Que les femmes
passent avant lui, l'homme? Mais Hubert se fiche complètement de ça! Par contre, il
n'apprécie guère l'attitude de Paco envers lui. Après le dîner, Anna et Paco regagnent
leur chambre, prenant des attitudes d'amoureux.

Petit déjeuner sur la terrasse fermée. Le soleil éclatant ne permet à aucun nuage de
voiler ses rayons. Les yeux du couple semblent prouver une nuit agitée. La
conversation se réduit au minimum. Une voix réveille le trio, joyeuse, claironnante:
<< - Salut mon tout beau! Je réponds à ton appel! >>

Antoine, vêtu d'un pantalon façon moulant, jouant de sa musculature, s'approche de la
table, dépose un bisou sur les lèvres d'Hubert, s'assied en se présentant:
<< - Moi, c'est Antoine. Le petit copain d'Hubert. >>

Paco grommelle son prénom tout en retenant sa surprise mêlée de colère. Anna,
intriguée, reçoit aimablement l'arrivant, constate:
<< - Bon, comme ça Hubert ne sera plus seul! >>

Le petit déjeuner terminé, Antoine manifeste le désir de monter dans la chambre
d'Hubert afin d'y déposer son sac et de prendre une douche.

Profitant de ce que Anna se retire elle aussi, Paco éclate:
<< - Tu avais besoin d'amener ce pédé?
- Tu avais besoin d'amener cette poufiasse?
- Sois correct!
- Autant que tu l'es!
- Mais enfin, comprends-moi, Hubert!
- J'essaie, j'essaie. Mais j'ai du mal. Tu m'invites afin que nous ayons un week-end
de douceurs, tous les deux et tu rappliques avec Anna, en amoureux. Tu cherchais quoi?
À me blesser?
- Je ne sais pas ce qui m'a pris. Excuse-moi, je n'aurais pas dû. Tu as raison, j'ai
mérité ta réaction. Bon, on n'a plus qu'à rentrer à la maison.
- Et pourquoi donc?
- Parce que je ne supporterai pas de te voir avec cet Antoine.
- Pas de scène de jalousie, tu es très mal placé pour ça! Cela dit, tu te rends la vie
facile. Parce pour toi, il fallait que moi je supporte de te voir avec Anna?
- Ce n'est pas pareil, c'est une fille.
- Décidément, tu ne comprends rien, ou ne veut rien comprendre, aux sentiments! Tu
aurais amené un mec, l'effet était identique, Paco! Peut-être moins vexant, je dois
reconnaître.
- C'est toi qui ne comprend rien, Hubert. J'ai amené Anna parce que je comptais te
rejoindre dans ta chambre. Je voulais pas qu'on pense que j'étais avec toi, voilà la
vérité. Elle et moi, on n'a rien fait. On a parlé, picolé, une grande partie de la
nuit.
- Et je suis obligé de te croire? D'ailleurs, tu n'as pas trouvé le chemin de ma
chambre, cette nuit. De plus, penses-tu que je vais passer ma vie à supporter tes
craintes? Ici, c'est une auberge pour gais. Ici, tu es tranquille. Personne ne te
jugera. Le seul risque pour toi c'est qu'un mec te drague. Maintenant, je suis ici,
j'y reste et avec Antoine. Toi, fais ce que bon te semble. Si tu étais venu seul,
comme prévu, je n'aurais pas appelé Antoine. >>

Hubert se lève, gagne sa chambre où il retrouve un Antoine dormant profondément sur le
lit. Il s'allonge contre lui, passe son bras autour de son cou, et s'endort lui aussi.

*****

<< - Décidément, on ne peut pas se vanter de prouesses érotiques au lit! On se
chatouille juste un peu et on dort!
- Ça change un peu, non?
- T'as raison, ça rend l'avenir plus excitant. >>

Tout en disant cela, Antoine caresse les fesses d'Hubert. Tous deux sont sous la
douche. Le premier reprend:
<< - Tu crois qu'ils seront encore là, le Paco et sa Anna?
- C'est le dernier de mes soucis.
- Tu peux me dire ce qui se passe? Si c'est pas indiscret.
- Rien, mis à part qu'un week-end ne se passe pas comme prévu.
- Je vois. Est-ce que par hasard je ne servirais pas de roue de secours?
- Pas exactement. Disons plutôt que tu m'as servi pour répliquer à une vexation par
une autre vexation. Cela dit, tu savais que je cherchais à annuler cette invitation.
Je t'en avais parlé.
- Et tu n'as pas réussi.
- Et réalité, je n'en ai pas eu le courage. >>

Les lèvres d'Antoine se collent à celles d'Hubert. L'eau chaude coule sur leurs corps
qu'ils savonnent langoureusement. Un doigt s'attarde sur, puis dans la rondelle
d'Hubert qui gémit de plaisir. Sa main masturbe la queue aux proportions raisonnables
d'un Antoine secoué par les spasmes dus à l'éjaculation. Passé cet instant, il se
positionne derrière Hubert, place sa bite contre la raie de ses fesses, entoure son
corps de ses deux bras, ses deux mains formant un fourreau dans lequel va et vient la
bite tendue au maximum. Hubert ne tarde pas à jouir dans un concert de petits cris.

Ils achèvent leur toilette, s'habillent, se rendent au restaurant où, surprise! Ils
retrouvent Anna et Paco. La première, dès que les deux garçons prennent place à leurs
côtés, constate:
<< - Antoine, je crois que toi et moi sommes les jouets de farces que se plaisent à se
faire nos amis Hubert et Paco. >>

Antoine comprend où Anna veut en arriver. Il accepte d'entrer dans son manège:
<< - Eh oui! Toi, Anna, tu sers de couverture à un bi totalement honteux de ce qu'il
est. Moi je suis la roue de secours à un gay déçu par l'attitude de ton bi complexé.
Que veux-tu?
- Nous retirer. La discrétion l'exige.
- Pour moi, pas question. Hubert m'a appelé au secours, je reste. D'autant que
j'apprécie fort sa compagnie très agréable si j'en juge par le petit aperçu de tout à
l'heure, dans notre chambre.
- Quelle chance tu as, Antoine! Moi je rêve d'un aperçu avec Paco. Mais il n'a rien
saisi.
- Mets-lui les points sur les I et les barres aux T.
- Donc, pour toi, le mieux c'est que l'on reste en formant deux couples, l'un homo,
l'autre hétéro. C'est ça?
- Exact! Hubert et Paco reprendront leur duo de bouderies plus tard, quand nous ne
serons plus là pour subir leur mauvaise humeur. >>

Hubert interrompe l'aparté:
<< - Je suis tout à fait d'accord pour ce plan. Après tout, personne n'est marié avec
personne, de nous quatre? Nous sommes libres. >>

Le déjeuner fini, Antoine et Hubert quittent la table pour faire une promenade
digestive qu'ils ne tardent pas à interrompre. Une demie heure plus tard, ils se
retrouvent douillettement enlacés sous la couette, bites tendues, bouches accolées,
mains "palpeuses". Hubert se sent "fondre" dans les bras puissants d'Antoine. Celui-ci
ne cache pas:
<< - Tu sais, je suis exclusivement actif. >>

Qu'importe à Hubert! Au demeurant pouvait-il en être autrement avec un mec pareil?
Antoine ne tarde pas à prouver ses dires, une fois mise l'indispensable capote. Il
glisse sa queue dans l'anus. Se délecte de cette intromission. Son amant, les jambes
levées, ronronne de bonheur, savourant le cylindre dans ses entrailles, la prostate en
folie. Le limage dure longtemps. Antoine sait prolonger le plaisir. Tous deux lâchent
leurs giclées de foutre dans un concerto de cris pour jouissance charnelle.

Dans la soirée, à l'occasion du dîner, les deux couples se retrouvent. À l'évidence,
l'un se présente de fort bonne humeur, l'autre de très mauvaise humeur. L'orage ne
tarde pas à éclater. Paco reproche à Hubert de le "tromper" sous son nez. Anna
reproche à Paco de la traiter comme un objet. Paco reproche à Anna de chercher à
profiter de la situation délicate dans laquelle il se trouve pour l'obliger de baiser
avec elle. Antoine et Hubert font ceux qui n'entendent pas ou ne comprennent pas, se
frottant les genoux, se passant une main rapide sur les cuisses, se zieutant la mine
énamourée. Ils s'envoient maints sourires, se caressent dès qu'ils le peuvent, à la
limite de la provocation. Juste au dessert, le soi-disant couple hétéro s'en va. Ils
montent faire leurs sacs. Ils fuient l'endroit. Antoine conclue:
<< - Ouf! On va enfin pouvoir passer quelques heures tranquillement! >>

Hubert approuve tout comme le patron de l'auberge qui commençait à voir d'un mauvais
œil ce quatuor peu engageant.

Après le dîner, Hubert et Antoine flânent dans le parc, main dans la main, s'arrêtant
souvent afin de jouer museau-museau, de taquiner leurs langues. Parfois, les mains
effleurent un coin de ventre, quelques poils du pubis. Mais la fraîcheur du vent ne
permet guère un déshabillage sérieux. Ils aimeraient pourtant s'allonger sous l'orme
aux branches imposantes bien que dénudées, se donner corps et âme l'un à l'autre. Ils
se le disent, regrettent de ne pouvoir le faire. Ils se promettent de se rattr
dans la chambre.

Lors du déjeuner de dimanche, le patron du lieu offre une coupe de champagne aux deux
garçons, se joignant à eux:
<< - Je suis désolé pour vos deux amis, mais ils ne semblaient pas très bien
s'entendre. Ça n'est jamais bon pour la clientèle, les couples qui se disputent. Par
contre, deux tourtereaux comme vous, ça c'est excellent. >>

Et de trinquer. On comprend, rien qu'à son regard, qu'il envie Antoine et Hubert.

En fin d'après midi, la promenade digestive achevée, ils rentrent en ville. Antoine
projette:
<< - Tu viens dormir chez moi?
- D'accord. >>

*****

Pour la première fois de sa vie, Hubert prête attention au décor. Jamais, jusqu'à ce
jour, il ne s'attardait sur le mobilier, les bibelots, l'aspect en général du lieu de
vie de ses amants. Ses yeux ne voyaient que le mec, son cerveau n'enregistrait que les
appâts de ce mec. Tout le reste était comme voilé, opaque, irréel. Et là, il note les
détails un peu machinalement. Antoine occupe un petit immeuble de deux étages, un bien
de famille. Il habite le rez-de-chaussée, loue le reste. L'entrée commune se présente
sous forme de hall dont les murs, très clairs, sont couverts de reproductions d'œuvres
picturales de Léonard de Vinci. Un escalier, sur la droite, mène aux étages, avec sa
rampe en fer forgé. On peut voir des calligraphies accrochées tout du long. En face de
la porte d'entrée, l'appartement occupé par Antoine. Quatre vastes pièces en plus de
la cuisine et de la salle de bain. Le mobilier sobre, au goût du jour, fonctionnel,
fait ressortir les murs aux couleurs claires. Une banquette de coin, recouverte de
cuir, deux fauteuils idem, un meuble télé, une table basse, quatre poufs dits
"poires", un bar roulant, occupent le salon très haut de plafond. Vient la chambre du
maître de maison. Vaste pièce à l'identique du salon, comprenant plusieurs placards
muraux, un lit rond avec matelas à eau, un petit meuble à chaussures, une table de
chevet, le tout éclairé par deux lampes halogène. La chambre d'amis, en face de celle
d'Antoine, contient un mobilier ressemblant en tous points à l'autre chambre. Derrière
celle d'Antoine, une quatrième pièce aussi spacieuse que les précédentes, l'antre
privé, personnel, composé d'un secrétaire style ancien, d'une écritoire, d'un
confortable fauteuil dit de direction, éclairage indirecte si l'on excepte la lampe de
bureau. Tous les murs de l'appartement sont en crépi couleur blanc cassé. Ceux du
bureau sont recouverts d'étagères supportant un nombre impressionnant de livres.
Antoine précise:
<< - Ces bouquins, c'est pour la retraite. J'en ai pas encore lu le dixième. >>

Une porte-fenêtre du salon donne sur un jardin au milieu duquel trône un splendide
mimosa qui ne tardera pas à fleurir. Beaucoup d'espaces réservés aux fleurs, la
pelouse soigneusement entretenue, quelques arbustes peu connus, un groseillier, une
tonnelle couverte par de la vigne grimpante, présentent un charme indéniable. Au fond,
un amandier s'étiole quelque peu au grand dam d'Antoine.

La visite achevée, il installe Hubert dans le salon, se dirige vers la cuisine, en
revient porteur d'une aiguière d'argent:
<< - Tu vas goûter de ce vin, un vrai délice! >>

Il remarque le regard d'Hubert:
<< - L'aiguière t'intrigue? On se la passe de génération en génération. Un vieux
souvenir dont personne ne veut se séparer. Quand le moment viendra, je la donnerai à
l'aîné de mes neveux. Et oui! Une tradition familiale! Jadis, on léguait la fortune à
son aîné, aujourd'hui on lègue cette aiguière. Remarque qu'elle a une certaine valeur:
elle est en argent. >>

Il semble fier de cet objet, parle de lui avec une douceur presque sentimentale. Le
breuvage s'avère vraiment délicieux. Antoine explique sa provenance: un Lacrima
Christi de plusieurs années, fourni par un sien ami italien.
Ils s'attèlent à la cuisine: quiche lorraine maison, salade de mâche, fromage, tarte
Tatin. Le repas se déroule dans une ambiance amoureuse. On se partage ou on échange
les aliments, prétexte à des pelles génératrices de sensations. Idem pour le vin.
Hubert semble un peu étourdi par la nouveauté, par ce décor à la fois sobre et riche.
Riche parce que donnant une impression d'opulence. Une question le tarabuste:
<< - Ton métier ne va pas avec tout ce qui t'environne ici.
- Qu'est-ce qui te paraît anormal?
- Je ne sais pas. C'est une sensation comme ça. C'est plus un appartement
d'intellectuel que celui d'un manuel. Cette écritoire est d'époque?
- Comme l'aiguière, un des derniers vestiges d'un passé. D'une fortune passée,
devrais-je dire.
- Même toi tu ne vas pas dans cette ambiance. Ton physique de sportif irait mieux dans
un gymnase qu'ici.
- Mais je fréquente un gymnase deux fois par semaine. Bon, je te mets au parfum. Le
restaurant, c'était juste pour dépanner mon frangin. Je connais le métier pour y avoir
été élevé, mais sans plus.
- Ah! Et que fais-tu d'ordinaire?
- J'achète, je revends des vieilleries.
- Antiquaire?
- Pas exactement dans le sens où on l'entend.
- Ça aussi ça ne va pas avec ton personnage.
- Idée préconçue, Hubert.
- Même ton appartement dément ta profession. Il devrait être meublé de vieilleries,
comme tu dis.
- Là encore, idée préconçue. Mises à part l'écritoire et l'aiguière, souvenirs
familiaux, ici tout est moderne. Une sorte de contrepoids si tu veux.
- Et qui tient ton magasin?
- Je n'ai pas de magasin. Je traite uniquement par internet ou par fax ou téléphone.
Quelqu'un me demande tel objet, je le cherche, sert d'intermédiaire concernant le
prix, les modalités de paiement et de livraison. Je prends une commission sur la
vente. Mais, au fait, je subis un véritable interrogatoire. À ton tour d'être torturé.
Que fais-tu?
- La banque, sous-directeur d'une agence. Paco, que tu as vu, en est le directeur.
Rien de bien passionnant, comme tu le vois.
- Jongler avec les millions des autres ne doit pas manquer de palpitant.
- Jongler avec le RSA des autres, oui. Notre clientèle est très modeste pour ne pas
dire dans le besoin. Exception faite d'une trentaine de clients aisés, de deux riches,
le reste se compose de RSA, de chômeurs, d'allocataires des allocations familiales, de
petits retraités et de smicards.
- Ça ne doit pas être drôle tous les jours.
- Le tout c'est de ne pas les provoquer, d'essayer de les comprendre. Pas facile,
c'est vrai, mais pas inintéressant…. >>

Antoine n'écoute plus. Il se glisse sous la table, ouvre la braguette d'Hubert, lui
inflige une pipe maison. Excité au maximum, ce dernier propose un lieu plus
confortable afin de retourner la politesse. Antoine refuse, désireux de finir le repas
à la cuisine, en savourant certaine crème spéciale. Derechef, il reprend son
occupation, avalant la queue dans son entier, la refluant au dehors de sa bouche avant
de l'ingurgiter à nouveau. Il maintient la cadence jusqu'à ce qu'une première giclée
de foutre tapisse son gosier. Ralentissant le mouvement, il déguste le reste de cette
liqueur, n'en laissant pas une seule goutte se perdre. Taquin, coquin Hubert le
provoque en tendant son fessier que l'autre emboutit sitôt le latex protecteur posé.
Reprenant son rythme habituel, il lime ce cul qui l'attire tant, plonge sa matraque au
tréfonds de ces chairs palpitantes, bouscule les entrailles afin de s'aller caresser
la prostate. L'un comme l'autre soupirent de bonheur, s'embrassent à bouche-que-veux-
tu, laissant les doigts folâtrer où bon leur semble. Lorsqu'Antoine se crispe, lorsque
tous ses muscles se tendent, Hubert le repousse, se retourne prestement, ôte la capote
et engloutit la verge presque rugissante de désir. Quelques coups de langue suffisent
à provoquer l'éjaculation dont se régale le suceur qui se pourlèche les babines.
Petite toilette puis petit tour dans le jardin.

La nuit totalement tombée, le ciel dégagé, ils admirent les étoiles tout en marchant.
Hubert trébuche sur une pierre, tombe lourdement à terre. Une douleur fulgurante
traverse son bras droit. Antoine l'aide à rejoindre le lit, appelle un médecin. Une
heure plus tard, une radio donne le diagnostic: fêlure au niveau du cubitus. Quelques
semaines dans le plâtre sont nécessaires.

Antoine reste au chevet du patient, un petit lit est mis à sa disposition. La clinique
permet de telles facilités. Heureusement, sa présence au restaurant n'est plus
nécessaire.

Lundi matin, 10h. Après d'autres examens plus poussés, le médecin plâtre le bras
d'Hubert, lui donne quelques conseils et le libère avec une ordonnance. Antoine sert
de chauffeur, de soutien. Dans la voiture, il propose:
<< - Chez toi ou chez moi? De toute façon tu ne peux pas rester seul.
- Si tu dois me servir de nounou, je préfère que ce soit chez moi. Ce sera plus
pratique. On ne va pas transborder toutes mes affaires chez toi.
- Parfait! On passe chez moi pour prendre des vêtements et mes objets de toilette. >>

*****

Paco ne sait que penser. D'abord, il regrette son attitude, d'avoir amené Anna, se
prend la tête avec ce qu'il nomme sa connerie. Ensuite, il regarde sans cesse vers le
bureau vide de son adjoint. Pourquoi ne vient-il pas? Aurait-il décidé de quitter
l'agence, d'aller vivre avec cet Antoine de malheur? Lorsque son téléphone sonne, la
standardiste lui annonce:
<< - Votre adjoint, monsieur le Directeur. >>

Paco, inquiet, crie presque un allô, comme s'il donnait un ordre. Hubert explique la
raison de son absence. Sur le coup, Paco n'y croit pas. Il ne cache pas ses doutes.
Alors Hubert coupe net l'entretien après avoir annoncé l'envoi d'un certificat médical
et un au-revoir des plus secs.

Cette démarche officielle effectuée, le blessé peut se consacrer à … se laisser
dorloter et il ne s'en prive pas. Certes, il souffre malgré le traitement
médicamenteux, mais cela se compense par le fait d'avoir à ses côtés un Antoine aux
petits soins. Un infirmier, à domicile, qui vous gratifie de caresses, de baisers! Que
demander de plus? Toutefois, une pensée assombrit ces perspectives: et si Ahmed
rappliquait? Il chasse rapidement cette éventualité. Après tout, comme il l'a si bien
dit, il est libre de tout attachement. Pour l'heure, c'est Antoine qui compte,
seulement lui. Afin d'éviter toute surprise, il déclare:
<< - Tu sais, Antoine, je fréquente un mec, Ahmed. Un client de la banque. Je tenais à
te le dire afin qu'il n'y ait aucune cachotterie entre nous.
- Merci, mais ça me regarde pas. Moi aussi j'ai des petits copains. Il va venir,
Ahmed?
- Je ne sais pas. Je crois que je l'ai un peu vexé la dernière fois. Il n'a pas
apprécié que je ne le laisse pas dormir à la maison quand je suis parti travailler.
- Ah parce que tu vires le mec?
- Une habitude rien de personnel contre lui.
- Faut reconnaître que c'est pas très sympa! Surtout si c'était pas la première fois.
- Oui mais je fais difficilement confiance.
- Pour moi, si le cas s'était présenté?
- Pareil probablement. Une habitude prise à Paris
- Bon, n'en parlons plus. >>

À suivre …

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