Se Decouvrir (3)

Je publie à nouveau avec un titre, sinon ça n'a pas de sans.

« Ah ? Etrange quand on va un samedi après-midi chercher un jouet, c’est en général pour une urgence. Votre mari n’était pas intéressé ? »
Et voilà, je vacille.
Claire me prend le bras « ça fait deux fois, vous m’expliquez ? »
Comment peut-on annoncer un veuvage sans tomber dans le mélodrame ou l’apitoiement ? Alors simplement, je lui explique que mon mari est mort.
Et là c’est elle qui flanche « je suis désolée, c’est terrible, je me sens vraiment débile avec mes allusions sur votre achat, je comprends maintenant, non ce n’est pas ce que je voulais dire, quelle conne ».
C’est à moi d’éclater de rire entre deux sanglots. Elle doit me croire folle à lier. Je me calme.
Elle s’excuse encore et me dit à bientôt puisque nous habitons le même quartier. Je rentre chez moi me faire un thé, mettre la radio sur TSF Jazz et me laisser bercer par la musique. Ma tête est enfin vide, je suis d’humeur guillerette et décide de m’offrir un petit apéritif. Problème, il n’y a rien ici. 7
Je descends à la superette acheter du jus de pomme et de la vodka pour parfumer. C’est pas vrai, encore elle quand je sors avec mon sac. Le même quartier peut-être, le même pâté de maison c’est trop.
Toujours cette honte qu’elle sache ce que j’ai acheté…
Pas possible de l’éviter, elle vient vers moi. « Encore ? Tu me suis » dit-elle.
« Non, j’habite un peu plus haut dans le rue. »
Elle regarde mon sac, voit mes achats. « Tu m’invites à prendre l’apéritif ? »
Et me voilà avec cette femme qui s’invite et qui, il faut bien le reconnaitre, m’a aidé en pleine voie publique.
Nous entrons dans mon appartement et je sors deux verres « vodka-pomme ou rien » lui dis-je. « Ca sera parfait ».
Elle trempe ses lèvres dans le cocktail et me dit « bon, c’est quoi ton histoire ? Tu donnes l’impression d’être forte et tu t’écroules dès que l’on évoque ton mari ».


Badaboum, je tombe en larmes, encore une fois. Elle me regarde, ses yeux sont doux, bienveillants, elle est assise et son mètre soixante-cinq est tassé dans le canapé. « Raconte ».
Et là, je lâche tout : mon amour pour mon mari, notre engagement, sa mort, mon boulot que je n’ai pas quitté, ma solitude aussi depuis mon arrivée à Paris et la fin de la camaraderie des postes en opération.
Claire ne dit rien, m’écoute en silence, nous ressert un verre. Au bout de deux heures, son expression se limite à « bon, il est tard, tu dois avoir aussi faim que moi alors commandons une pizza ».
En attendant la livraison, elle me dit d’aller prendre une douche pour me détendre. Je refuse d’abord, étant passée par une douche matinale et un bain dans la journée mais elle n’entend pas les choses ainsi et ne me laisse pas le choix.
Je sors de la salle de bain en peignoir, c’est plus dur de finir en larmes devant une inconnue que d’être peu vêtue (la vie militaire où la pudeur est très limitée).
Nous commençons à grignoter, je la laisse parler. Elle m’explique qu’à 42 ans, elle a fait le tour des hommes, aucun d’eux n’a été capable de lui donner des s, deux divorces, finalement très rentables, elle vit aujourd’hui de ses rentes dans un grand appartement laissé par un de ses ex-époux.
Ses journées sont consacrées au shopping et aux recherches de voyages.
Comme elle est assez taquine, elle me dit doucement qu’il y a une autre occupation pour ces journées, le plaisir. Selon elle, elle a tout connu, y compris une fois avec une de ses amies. Elle préfère maintenant se satisfaire elle-même, d’où sa présence dans le magasin « coquin ».
Elle connaît tous les rayons, ne fréquentant que ceux qui lui plaisent et m’annonce de but en blanc être une grande fan des films érotiques. « Pour le peu que j’en ai vu, il s’agissait surtout de films pornographiques, comment fais-tu la différence ? »
« Tu sais Stéphanie, je n’achète jamais un DVD dans ce magasin, c’est effectivement de la pornographie, pas de l’érotisme.
Eros est le dieu de l’amour et l’érotisme, c’est surtout de la suggestion, regarde Emmanuelle ! ».
Evidemment, je ne l’ai jamais vu et je suis encore passée pour une godiche. Claire me demandât alors si j’avais un ordinateur. Quand même, nous sommes au XXIème siècle …, je lui ai montré mon portable dans ma chambre.
Ni une ni deux, elle s’est lancée dans la recherche d’histoires de sexe et ne fut pas longue à trouver. Le fruit de l’expérience sans doute. « Je vais te lire celle-là, tu vas voir que c’est érotique et non pornographique ».
Elle a commencé à lire l’histoire d’un jeune homme qui faisait l’amour avec une femme plus âgée. Celle-ci découvrait dès le lendemain l’amour saphique devant son amant qui profita des deux belles en les comblant de ses attentions.
Effectivement, ce n’était pas pornographique mais la simple description des scènes m’avait mise dans un état d’excitation que je n’avais pas connu depuis longtemps.
Il fallait que je jouisse, mes sous-vêtements étaient trempés, si je n’avais pas eu de string, mon anus aurait connu le même sort.
Claire avait l’air contente d’elle : « ça m’a excité de te lire ça, je coule comme une adolescente lors de son premier rendez-vous. Tu es comme moi ou bien ça te laisse de glace ? »
« Arrête Claire, j’ai besoin de me retrouver seule et tu t’en doutes. Je ne t’ai rien caché de ma vie sexuelle depuis la disparition de mon mari. Alors oui, je coule et c’est pour ça que tu dois partir ».
« Stéphanie, je ne suis pas certaine de pouvoir attendre d’être chez moi. Je peux me faire du bien maintenant ? »

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