La Chute - 1

J'étais attablé dans le bar un peu à l'écart de l'entrée, dans un angle mort, près de la vitre. Et je me demandais nerveusement ce que j'étais en train de faire depuis une heure.
Lui était accoudé au bar et prenait visiblement plaisir à cette situation. Nettement plus âgé que moi, dans les 65 ans, il était plutôt baraqué, mais en surcharge pondérale. Gras je devrais dire. Chauve, aussi - ce qui le rajeunissait. Une mâchoire carré et des lèvres épaisses et très rouges, presque obscènes. C'était sans doute ce qui avait attiré mon attention au départ, cette bouche déformée par un rictus goguenard comme s'il se foutait en permanence du monde et de la vie. Une bouche constamment humide, sans doute parce qu'il la parcourait régulièrement de la langue. Oui, cette bouche m'avait interpellé et je m'étais laissé aller à observer l'homme. Le reste de son visage n'ajoutait rien de beau à sa physionomie. Un nez busqué qui lui donnait un air de rapace ajoutait même une note discordante à son faciès. De grandes oreilles encadraient son crâne et ses yeux, ses yeux prenaient presque trop de place sur sa figure. Des yeux très noirs et brillants, dérangeants.
Je n'arrêtais pas de me dire: laisse-le tranquille, sors de là, le boulot t'attend... tu as beau être ton propre patron tu ne peux tout de même pas rester des heures à ne rien faire et surtout ça. Mater un homme - parce que c'était ce que je faisais.
Il n'avait rien d'intriguant ni de curieux, ce qui pouvait généralement me motiver à observer des inconnus. Un chef de chantier en tee-shirt blanc délavé, pas très propre, qui profitait tranquillement de sa pause déjeuner. Je n'avais donc aucune raison de me faire cette fixation. J'avais du travail par dessus la tête et ... oui, je ne cessais de me le répéter, je n'éprouvais aucune attirance pour les hommes. En me demandant bien pourquoi je ne cessais de rabâcher cette évidence. Je n'avais pas baissé les yeux sur son jeans serré, moulant.

Presque pas. Mais la seule et unique fois il avait capté mon regard et j'en avais instantanément rougi. Peut-être restais-je coincé à ma table à touiller mon fond de café refroidi pour me convaincre qu'il y avait une raison, n'importe laquelle, à mon attitude.
Il ne me laissa pas le temps de la trouver.
- je peux m'asseoir quelques minutes?
Je ne l'avais pas vu approcher ou l'information ne m'étais pas arrivée au cerveau. Il n'attendit pas ma réponse et s'installa en posant deux tasses de café sur la table.
- Le serveur s'est planté et en a fait un de trop. J'ai pensé que vous préféreriez quelque chose... de bien chaud.
Je rougis et me maudissait dans la foulée.
- Merci, dis-je en souriant pour donner le change.
Il me regarda en trempant ses lèvres rouges dans la tasse de café bouillant. Bon sang, dans quoi étais-je fourré et cette seule question me fit rougir encore. Rien ne fonctionnait normalement.
- Je ne vais pas tourner autour du pot. Vous avez l'air de quelqu'un qui est très occupé. On sent que vous avez l'habitude de diriger mais là c'est moi qui prend les devants, d'accord?
Je le regardais bêtement et il enchaîna en posant ses avants bras musclés, couverts de poils gris, devant lui, vers moi...
- Je sais de quoi vous avez besoin et je suis l'homme qu'il vous faut... Mais êtes vous prêt vous-même? je me le demande...
- De quoi voulez-vous parler? Je ne comprends pas...
- C'est ce que je pense aussi... Vous ne comprenez pas encore... Ca fait une heure que vous ne comprenez pas. Vous êtes marié j'imagine ? des s?
- Euh, oui... Mais je ne vois pas le rapport...
Il me fit un large sourire et je ne pu m'empêcher de me dire que ça bouche avait vraiment quelque chose de dérangeant...
- Non en effet, il n'y a pas de rapport... Mais ça change tout. Pris socialement, libre dans votre tête. Vous êtes quelqu'un d'honorable et c'est pourquoi vous pouvez tout vous permettre. La morale est sauve.
.. Alors pourquoi résister?
J'étais de plus en plus mal à l'aise, et me mis à transpirer. Il me fixait du regard et je ne pouvais quant à moi lui rendre la pareille. Mes yeux tombait sur ses épaules nues, elles aussi poilues, son poitrail broussailleux, sa large poitrine ou se dessinait clairement deux tétins bruns sous le tee-shirt transparent....
- C'est ça, murmura-t-il... profites-en...
J'osais l'affronter du regard, le rouge ne me quittant plus les joues.
- On se tutoie maintenant?
- Bien sûr, on va faire bien plus que cela, lâcha-t-il d'une voix basse et rauque, en se penchant en avant. Tu crois que je n'ai pas vu ce qui se passait, moi? Je te fais de l'effet, c'est évident. Ca faisait longtemps que je n'avais pas croisé quelqu'un qui réagisse comme ça. Et tu peux me croire, j'ai un radar pour ça.
Comme je m'apprêtais à protester, il ajouta....
- Tu me plais aussi. Ton costard, tes airs virils, ton statut social, ça me botte.
- Je ne suis pas... enfin, je pense que vous vous trompez... Je ne suis pas... de ce genre là...
Il sourit encore et passa lentement sa langue - je la trouvais dégoutante, énorme et presque violacée - sur ses lèvres écarlates.
- Tu ne sais pas encore de quel genre tu es, mais je vais t'aider à le découvrir...
S'en était trop et je m'apprêtais à me lever, la colère remplaçant la gêne. C'est alors qu'il saisit mon poignet d'une main ferme et planta ses yeux noirs dans les miens.
- Reste assis et écoute-moi deux minutes.
Je me rassis lentement, ne sachant trop quoi penser. Pouvait-il devenir violent? Mais la suite me cueillit par surprise... Sans lâcher mon poignet, posant son autre main sur la mienne en l'enveloppant délicatement, il parti dans un monologue ahurissant...
- Tu ne comprends pas ce qui se passe? Tu es en train de craquer pour un mec pour la première fois de ta vie et tu as de la chance: je ne suis pas homo non plus. J'aime les femelles, vois-tu, même si elles se cachent derrière un masque de virilité et de certitudes.
Et ce que j'ai vu tout à l'heure c'est une femelle qui s'ignore mais avec un sacré potentiel. Tu sais quel est le meilleur dans la femelle? C'est sa capacité à s'abandonner à son mâle, à se livrer corps et âme... A se dépasser pour le plaisir de son homme - la source de son propre plaisir...
Comme je le regardais, estomaqué, il ajouta...
- Si tu veux connaître le vrai plaisir et jouir comme jamais, tu n'as qu'un mot à dire... Ou plutôt, tu n'as rien à ajouter. J'habite à côté et on peut se retrouver chez moi dans le quart d'heure qui suit. Tu lâches prise et tu ne le regretteras jamais, crois-moi.
Je ne disais rien, n'arrivait pas à réfléchir, comme si réfléchir pouvait changer quoi que ce soit... Il en profita pour s'approcher de moi sur la banquette et me parla plus bas...
- Je suis sûr que tu les aimes épaisses et juteuses... C'est celles là que tu préfères regarder sur Internet? Hein? Tu ne vas pas être déçu...
Et tandis qu'il fixait mes lèvres d'un air gourmand...
- Je vais adorer jouir dans ta petite bouche... hmmm et plus encore...
Je ne savais plus ou j'étais. Il avait posé ma main sur son entrejambe et je sentais la chaleur de son sexe transpirer dans son jeans, un sexe de taille impressionnante alors même qu'il ne bandait pas complètement. Son excitation le faisait suer dans son tee-shirt échancré sous les bras et je sentais les effluves de ses aisselles frapper mes sens... Lui ne me laissait aucun répit...
- Avoue que ça t'excite, hein, bébé, ce gros biberon sous tes doigts... je vais t'apprendre à bien le téter, ohhhh j'en mouille déjà.... des mois que je n'ai pas baisé, juste ma main pour me satisfaire, je ne pensais pas tomber sur une bonne femelle en chaleur comme toi, regarde-moi comme tu transpire, regarde moi ça comme tu bandes ma salope...
Il empoignait à présent mon sexe dressé dans mon pantalon de costume, sans défense, et oui je bandais honteusement, en plein lieu public, incapable de rien faire à part subir.
.. Et rendre les armes, petit à petit... Oui j'avais regardé les sites pornos gays sur Internet, oui mais juste par curiosité! Oui j'avais parfois fantasmé, mais c'était des fantasmes! Et là cet homme plus âgé, que je continuais de trouver laid, vulgaire et vicieux, me révélait la noirceur de mon âme...
- Non, non, soufflais-je sans vraiment me débattre...
Il se pencha à mon oreille et m'acheva...
- Allez viens, on va faire des saloperies...
Je n'avais plus de jambes mais je me levais malgré moi à sa suite...
Nous sortîmes rapidement et il ne me lâcha pas une fois dans la rue. J'avais l'impression, ou peut-être voulais-je le croire - de me faire enlever. Je ne débandais pas et il ne manquait pas de discrètement passer le dos de la main sur ma braguette ou sur mes fesses pour m'entretenir dans cet état. J'avais envie de fuir, de hurler, mais le suivait, docile... Et mon cerveau bloquait toute pensée sur ce qui allait se passer ensuite. Il avait pourtant été assez clair et ne manquait pas d'en rajouter sur le chemin, mais je faisais la sourde oreille...
- Hmmm tu vas voir comment je vais bien te prendre... Tu vas aimer te faire enfiler par mon engin! Pour une première fois tu as de la chance! J'ai de l'énergie à revendre, tu vas voir.. Et plein d'idées pour en profiter...Tu vas appeler ta femme pour lui dire que tu travailles tard ce soir... Oh je sens que je vais faire exploser mon jeans! Une vraie chienne, je le sens.. Hein que tu es une vraie chienne?
Je ne répondais pas et nous arrivâmes à la porte de son immeuble. Il me prit par les épaules et me fixa droit dans les yeux.
- C'est le moment de renoncer si tu veux. Si tu ne le fais pas, tu es à moi, et rien ne sera plus comme avant. Je vais te faire faire des choses que tu n'imagines même pas... Mais tu vas jouir, je te le promets...
Comme j'hésitais encore, il ajouta.
- Tu as déjà joui du cul? C'est une expérience que l'on n'oublie jamais.
Et lentement, me prenant par la main, il me fit franchir le seuil de son immeuble. Je sus que je n'allais plus faire demi-tour avant d'avoir découvert la suite... et la suite... et sans me l'avouer tout ce qu'il pouvait me proposer...

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