Nuit De Noces
C'est le printemps, un samedi après-midi de printemps. Le ciel bleu limpide n'est entaché que de petits nuages effilochés. L'air est doux. Jeanne se prépare avec soin. Elle est invitée au mariage d'une amie, perdue de vue il y a longtemps, retrouvée depuis peu.
Occasion de renouer avec des copines, qui sait
Et puis la campagne c'est sympa au printemps !
Une fois dans sa voiture, elle se rend compte que son bas a filé. Pas grave, elle a un peu d'avance, elle s'arrêtera en route, à Sauveterre.
Sous les arcades, elle entend des pas qui résonnent, une course, un Monsieur la ratt et lui claque deux baisers. Surprise, qui est cet homme ?
Tu ne me reconnais pas ? Nous avons passé une soirée, et il donne l'adresse, à bavarder, rire et flirter et à boire du champagne.
Avec force détails il raconte la soirée et aussi que cette soirée lui avait valu une belle scène de ménage
Jeanne est troublée. Jeanne pense, vais-je dire à ce gars-là que j'allais de ce pas m'acheter des Dim Up ? Ca va te l'allumer illico, déjà qu'il m'a l'air inspiré par le printemps
Jeanne décide qu'il doit être suffisamment grand garçon et elle te l'embarque direct dans la boutique. De toutes façons elle n'a pas tant de temps que ça avant l'église et c'est plutôt sympa de reprendre ce soi-disant flirt d'un soir avec ce gars auquel elle a manifestement laissé un souvenir impérissable.
Jeanne le laisse parler car elle se souvient mal. Heureusement le gars est intarissable et ne lui en laisse pas placer une.
Mais, entrés dans la boutique, ce n'est plus pareil. Les questions de la vendeuse, le poids, la taille, les deniers, le galbe, la jarretière, les transparences, les opacités, la brillance, le satiné, le mat, les couleurs, le gris, le taupe, l'effet bronzé
Le gars comprend qu'il est entré dans un monde différent, complexe auquel ses compétences de mec normal ne l'avaient pas préparé. Il est un peu perdu, d'autant que la vendeuse et Jeanne sont en complicité.
La vendeuse le moque : elle le sollicite, lui demande son avis. Jeanne surenchérit. La question des deniers prend une importance cruciale. Lui voudrait bien qu'on le consulte sur la couleur mais pas plus. En couleurs il sait dire
encore que la différence entre chocolat et terracotta lui échappe totalement.
Alors il reste coi et se blottit dans un coin de la boutique à triturer son portable en émettant des séries de petits bips garants d'une activité sérieuse d'homme important, de professionnel au temps compté.
Jeanne a retenu un modèle, en achète 2 paires et s'isole pour les enfiler. Là elle le voit qui la mate à la dérobée alors qu'elle roule les anciens bas sur ses chevilles, assise sur une banquette de velours gris, derrière un présentoir de nuisettes de soie grège.
Là le gars comprend que ce ne sont pas des collants que Jeanne est venue acheter mais que ces Dim Up sont des bas, de vrais bas. Le portable a cessé de biper
Les regards se croisent... Jeanne décide très vite, se relève et sort de la boutique, l'homme sur ses pas : une messe ne fera pas de mal à cet imprudent !
Sur le parking, elle se retourne, le fixe droit dans les yeux, quelle voiture prend-on ? Monsieur, jusqu'alors si sûr de lui, ne sait plus, hésite ... oh pas longtemps, la mienne !
C'est une voiture de sport très basse ; la soie de la robe glisse sur les bas et ne cache plus grand chose.
Pas un mot n'est échangé, c'est le flou, il n'y a rien d'autre que le ciel bleu, le vent dans les cheveux, les vignes qui défilent à toute allure et Jeanne qui guide.
Là bas, il y a foule ; à part la mariée, emballée dans sa dentelle, peu de monde connu.
Le cocktail très champêtre se tient sous une allée de tilleuls, belles nappes blanches, champagne et petits fours circulent. C'est romantique à souhait !
Jeanne se laisse servir et donner la becquée par Monsieur ; il est aux petits soins, prêt à satisfaire tous les désirs de Jeanne.
Au fil de la conversation, il la mène, main sur la nuque vers les chais. La musique n'est plus qu'un léger flon-flon.
Appuyée du dos au foudre de bois, Jeanne ferme les yeux, lèvres entr'ouvertes. Monsieur l'embrasse avec gourmandise, mais Jeanne en veut plus.
Leur langue fait une ronde, les lèvres aspirent, les dents s'entrechoquent, leurs salives se mêlent, il y a un petit goût d'amande. A court de souffle, Monsieur se recule, il a ses mains sur les hanches de Jeanne, il remonte doucement sur ses seins tout chauds sous la soie.
Par petites lapées, il reprend sa bouche, mordille, enfonce sa langue. Il y a de la joie, de l'envie, de la tendresse et de la violence dans ce baiser.
Jeanne sait où elle va, cest son époque Jeanne
Elle croche des deux pouces lélastique sur ses hanches et descend la culotte à ses chevilles. Elle dégage le pied gauche et lève le droit à hauteur de sa main. Et glisse la dentelle dans la poche de lhomme.
Le bois du foudre est chaud à ses fesses et son ventre sest ouvert au désir. La proximité de la fête lui tourne la tête et elle se sent partir en plaisir à peine pénétrée. Les deux mains sur les fesses velues, elle serre lhomme contre elle, en elle pour limmobiliser et lui imposer accalmie.
Elle lui dit, chut. Et reste ainsi sans bouger.
Puis sur un bruit de pas dans le gravier, elle se dégage promptement et lisse sa robe.
Et elle file retrouver les convives au buffet devant lorchestre. Devant le chai, elle a croisé le couple qui approchait et les a retenus un instant pour permettre à lhomme à lintérieur de se rajuster. Elle sourit moqueusement en pensant quil aura du mal à remiser son matos tant il est pleine expansion.
Elle ne se retourne pas.
Elle demande au serveur en veste blanche un verre de Graves et se mêle aux groupes, indifférente à la destinée de sa dentelle, oubliée dans cette poche anonyme, quelconque.
Son plaisir a été immédiat, réflexe, mais son désir nest pas épuisé, loin de là.
Elle pense, en regardant les fesses sous le tissu, y en a-t-il dautres, qui comme moi, sentent ce soir le souffle de lair frais sur leurs chairs brûlantes et humides ?
Le soir est déjà là. Monsieur doit rentrer mais Jeanne, enchantée, le coeur léger, a, elle, envie de danser.
Jeanne danse déjà en marchant vers le plancher dressé entre chais et tilleuls. Tant elle est légère, tant elle est vive, qu'un gars de vingt ans l'emporte en tourbillon et elle sadonne.
Lautre, frustré, dépité, ne pense plus qu'à son chez-soi peinard et oublie que Jeanne a laissé son auto sur la place du marché de Sauveterre. De toutes façons Jeanne n'est pas pour lui, n'est plus pour lui.
Jeanne est belle, Jeanne est heureuse. Jeanne ne sait pas très bien qui est qui dans cette noce. Jeanne aime bien ça, ce flou, cette douceur des sentiments quand rien n'est encore écrit et que tout peut viendre, advenir
Ce pays est le sien et les gens de ce pays sont ses amis, sont ses amants. Jeanne est bien dans sa peau. Elle ne pense pas à son auto. Jeanne a oublié son auto. Elle ne pense même pas aux hommes, Jeanne est bien là dans la douceur du soir et les étoiles ont le goût de son bien-être. Elle aime globalement, totalement, tous ces gens autour d'elle, les hommes et les garçons surtout. Jeanne est bien. Jeanne sent son corps fondre de bien-être dans la douceur du soir de Garonne.
Son ventre ruisselant va vient tourne virevolte tourbillonne sous la robe légère.
Personne ne sait, qu'elle.
Elle le sait ce ventre en attente d'un garçon qui saura l'aimer et être ce soir aussi aimé d'elle.
Elle est nuit de juin nuit de noce ouverte à l'impromptu et son corps plus que son cur est en accueil.
Enfin, ils le sont tous deux. Et ça elle le sent, le ressent.
Jeanne ce soir n'est que cela, femelle en attente.
Les garçons de la noce, tous, l'ont compris et se pressent autour d'elle. Tous sont gamètes vibrionantes concourant à l'ovule.
Savent-ils par l'odeur ? Ou alors par le sourire de la fille...
Je sais des sourires tellement explicites.
Jeanne est heureuse elle sait elle sent la nuit cette nuit sera la sienne.
*
Sans mentir, cette Jeanne là vaut le détour.
Au soleil levant, un garçon la raccompagnée à Sauveterre récupérer son carrosse et ils ont ensuite filé tous deux à l'océan se noyer dans les vagues.
A poil, vu qu'ils n'avaient, elle que sa robe de soie et lui que son smoking noir.
La plage des Salines, c'est un peu Trousse-Chemise
"On y fait des bêtises, souviens-toi nous deux »
Le sable n'était pas très chaud et sans serviettes ils étaient un peu frisquets mais la dune était déserte et le vent caressant.
Ils n'ont pas couru à l'eau.
Il a serré tendrement Jeanne dans ses bras, tête posée sur un bouquet de varech.
Son ventre avait attendu toute la nuit et lui a souri.
Il na rien su du boute-en-train de lapéritif mais tous deux ont compris que ce moment était le leur.
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