Elle Me Quitte 1

Devant la penderie et les étagères vides je me rends à l’évidence : Catherine est partie, ma femme m’a quitté, elle a emporté sa garde-robe. Pas de musique à mon retour, pas de chants, le silence m’a frappé quand je suis revenu du travail. Je l’ai appelée, je l’ai cherchée, elle ne répondait pas. Elle était habituellement là quand j’ouvrais la porte, elle accourait pour m’embrasser, me demandait comment s’était passée ma journée de travail, me racontait sa matinée chez son patron ou ses activités de l’après-midi depuis qu’elle exerçait à mi-temps. Lorsqu’elle prévoyait de s’absenter assez tard, elle me prévenait :

-Ce soir je suis invitée chez Léa ; nous avons une réunion tuper-ware, tu trouveras un en-cas dans le réfrigérateur.

En dernier elle tentait de retrouver un emploi à plein temps et s’absentait assez fréquemment dans ce but. Elle me racontait ses échecs, mais gardait toujours l’espoir de décrocher la bonne place dans la meilleure entreprise. Je l’encourageais à persévérer. Elle s’en voulait de me laisser seul devant la télé ou au jardin ; hier elle m’avait déclaré :

-Cette fois je crois avoir trouvé. Notre vie va changer.

Elle n’avait pas voulu me donner de précisions, par superstition. Elle déclarait d’un air mystérieux ;

-Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. J’attends d’avoir la place avant d’en parler, car triompher trop tôt pourrait me porter malheur comme d’autres fois. Je veux toucher pour croire. C’est du ferme ; tu verras, tu seras surpris. Plus surpris que tu ne le penses !

C’était hier soir. Elle était excitée, fébrile. Elle est venue m’embrasser. Je n’ai pas insisté, respectueux de son désir de me prouver qu’elle savait traiter ses affaires en femme mûre, déterminée. Je connaissais ses exigences : l’emploi devait correspondre à ses compétences et avant tout lui plaire.

-Fais-moi confiance, mon amour, si j’obtiens ce poste je serai heureuse.

Embrasse-moi encore, ton amour me donne des forces.

Au lit, elle s’est fait une grande réserve de forces. Quand faire l’amour devient une habitude agréable et souhaitée, faire l’amour comme nous l’avons fait hier soir paraît « extraordinaire ». Cat s’est donnée à en perdre le souffle, a récité toute la gamme des positions possibles, a rejeté le recours au préservatif, n’a pas eu pitié de ma fatigue éventuelle. Jamais elle n’avait été aussi active, jamais elle ne m’avait autant incité à être plus vif, plus ardent, plus vigoureux. Plus je répondais à ses appels à la rudoyer, plus sa voix se faisait rauque et suppliante :

-Allez, baise-moi fort, plus fort. Va au fond, cogne, cogne encore, plus fort, vas-y, n’aie pas peur, je veux jouir. Replie mes jambes, monte et laisse toi tomber. Plus fort, fais-moi mal, baise-moi, baise.

-Quel démon l’habitait soudain ? D’où lui venait ce besoin de violence tout neuf ? L’approche de sa victoire la transformait complètement. Je demandai grâce. Elle me traita de mauviette et continua à me chevaucher puisque mon zizi ramolli se montrait trop tendre, elle me maintint en quasi rigidité par l’emploi d’artifices, me masturbant ou me suçant avant de me fourrer à nouveau dans son fendu.

-Ma chatte a soif, crache dedans. Tes bijoux de famille sont en sécurité dans mon paradis. A propos, que penserais-tu d’une épilation complète de ma toison ? Il paraît que ça se pratique beaucoup. Aimerais-tu voir disparaître mon hérisson ? Mon abricot tout nu devrait t’inspirer. Tu me sucerais le berlingot sans crainte de coincer des poils entre tes dents ?

-Ne pourrions-nous pas aborder ce sujet vital demain ? Je te souhaite une bonne nuit.

-Pas question, ma moule a encore faim. Laisse-moi lui offrir ton poireau.

Sa fringale me laissa vanné et je crois bien quelle finit par calmer les flammes de sa craquette avec ses doigts alors que je m’endormais. Je l’entendis encore geindre, souffler en saccades dans ma nuque et pousser un dernier cri de bonheur.
Au petit déjeuner ce matin, elle était rayonnante, me couvrit de baisers, me remercia pour la nuit formidable. Au moment de mon départ elle me sourit, prit un air grave et solennel pour me recommander :

-Mon amour, n’oublie jamais que je t’aime et que je t’aimerai toujours. Embrasse-moi.

Ce soir j’erre seul dans ma demeure. Où est-elle ? Pourquoi a-t-elle emporté tous ses vêtements, toutes ses chaussures, ses quelques bijoux de valeur, ceux de pacotille, ses pots de crèmes, ses flacons de parfums ? Comment a-t-elle transporté toutes ses affaires ? C’est un travail de déménageur. Il ne peut pas s’agir d’un enlèvement. C’est incompréhensible ! Je tourne en rond. Je n’ai rien vu venir. Me reviennent ses paroles d’hier :

« Tu verras, tu seras surpris. Plus surpris que tu ne le penses ! » ou : « Fais-moi confiance, mon amour, si j’obtiens ce poste je serai heureuse. » ou encore : « Cette fois je crois avoir trouvé. Notre vie va changer. »

Mais alors ce feu d’artifice amoureux, c’était une façon de me faire des adieux ? Elle savait déjà qu’elle m’abandonnait, elle n’a pas improvisé son départ. Elle m’a laissé un message codé : « je serai heureuse ». Elle a bien dit « Je », elle n’a pas dit « nous ». Sur le moment je n’y ai pas prêté attention, je ne m’attendais pas à une surprise aussi étonnante. Mais pourquoi a-t-elle voulu me faire savoir qu’elle m’aimerait toujours ? Ce n’est pas cohérent. C'est incohérent, incompréhensible. Faut-il avertir la gendarmerie ? Elle est adulte, elle disparaît, elle ne me laisse pas de piste. Elle n’est pas chez une de nos connaissances. Est-elle allée travailler ce matin ?

Elle aurait pu m’annoncer clairement son envie de me quitter au lieu de me jouer la comédie de l’amour et de s’offrir cette relation sexuelle folle hier soir. Elle s’est fait reluire le berlingot comme une dingue uniquement pour me laisser un souvenir impérissable et des regrets éternels après sa fuite ? Pour me signifier qu’aucune autre ne l’égalerait ? Mais pourquoi, pourquoi ? Pourquoi comme ça, sans une explication honnête, sans un mot écrit si elle craignait de m’affronter ? Un mot, peut-être… Non, il n’y a pas d’écrit sur mon bureau, ni sur la commode, ni sur la table du salon ni sur le plan de travail de la cuisine.
Rien ! Ah ! Des feuilles chiffonnées cachent le fond de ma corbeille à papier. J’en prends une, je la défroisse. C’est l’écriture de Cat, je déchiffre

-Mon chéri, je te quitte. Ne t’inquiète pas pour moi, j’ai trouvé un emploi formidable. Ne me cherche pas. Quand je serai bien installée, je te donnerai des...

C’est tout. Voyons s’il y a autre chose. Oui, elle a écrit ceci :

-Mon amour. Tu as été magnifique hier soir. Je t’aime sincèrement. Pourtant je pars avec un autre homme. Nous nous sommes trouvés sur internet, nous nous sommes rencontrés plusieurs fois à l’hôtel quand je te disais que je cherchais une meilleure situation professionnelle. Je t’aime toujours, mais les sentiments ne suffisent pas. René, c’est son nom, me bouleverse sexuellement. Tu étais parfait. Mais depuis que je le connais il me faut des rapports plus forts. Il m’a révélée. Pardon de le dire, mais il me fait jouir plus que toi, plus fort et plus souvent. Je ne peux plus me passer de lui. Pardon, je t’aime, lui il me fait grimper aux rideaux, c’est incroyable. Une révélation. Je pars avec lui, pour ne plus avoir le sentiment de te tromper. Avec deux hommes en moi l’un derrière l’autre, je me sentais sale. Ne me cherche pas. Je t’embrasse une dernière fois. Ta Cat.

Des larmes ont mouillé l’encre, taché la feuille. Il y en a une troisième

-Chéri. On dit que la taille d’un sexe masculin importe peu, que l’essentiel est de savoir s’en servir. C’est une légende. J’ai fait la connaissance d’un autre homme armé d’un terrible gourdin. Quand il me pénètre j’ai l’impression qu’il me défonce, que je vais m’évanouir ; j’ai un plaisir infini, sans cesse répété, des orgasmes qui se succèdent comme les éclairs d’un terrible orage. Il me veut. Il va venir me chercher. Ne me cherche pas. Adieu, mon amour. Tu peux me remplacer, je te souhaite beaucoup de bonheur. Ce que je te fais est moche, mais René est si fort et si vicieux, je ne peux plus me passer de lui.
Bisous. Je…

Ces textes sont des brouillons, écrits d’une plume tremblante, souillés par des larmes. Elle a dû être interrompue avant de réussir une synthèse claire, a renoncé à s’en donner la peine. René est peut-être arrivé plus tôt que prévu et lui aura déconseillé de laisser des traces. Elle n’a pas eu le temps de les déchirer, elle les a jetés à la corbeille en pensant que la bonne les jetterait à la poubelle et parce qu’elle n’a pas voulu montrer à l’élu de son minou en chaleur qu’elle avait commencé à écrire.

Enfin j’ai une réponse. C’est simple, un type qui en a une bien grosse et bien longue et qui sait mieux s’en servir que moi, rencontré sur internet, essayé à l’hôtel plusieurs fois « ESSAYER C’EST l’ADOPTER » a conquis les sens et le cœur de ma femme. Elle est partie avec lui après une dernière comparaison peu avantageuse pour moi. En guise de consolation elle a déclaré qu’elle m’aimerait toujours ! C’est du foutage de gueule ou je ne m’y connais pas.

A suivre

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