Dédicace
Non, ce texte nest pas le résultat des élucubrations de mon cerveau mégalo, ou même de mon côté fanfaronne.
Cest juste une petite pochade, pour rendre hommage à tous ceux qui me lisent.
Les fidèles, ceux qui ne loupent aucun de mes récits !
Les picoreurs, ceux qui passent de temps à autre !
Et puis aussi toi, non, pas toi, toi là derrière. Toi qui viens lire une de mes histoires pour la première fois. Cette histoire est aussi pour les novices et les puceaux !
A vous tous, donc.
Ah, une dernière chose
il ny a pas de sexe dans cette histoire. Même si jai hésité à inclure une scène de partouze à la fin, je ne lai pas fait. Pas de sexe, donc cette histoire est réservée aux plus téméraires dentre vous.
Lundi matin, dans ma salle de bain
Jétais dhumeur plutôt guillerette
Jaime me lever tôt le matin, même quand je ne travaille pas. Jai limpression de profiter de ma journée. Il faut dire que je dors peu. Je me couche généralement entre 23h30 et 1h00 et je me lève vers 6h00, fraîche comme la rosée du matin.
Quand tout le monde dort, que cest agréable la tranquillité. Il y a un mot en suédois qui résume assez bien cet état desprit : gökotta. Il est difficilement traduisible en français, mais littéralement, ça pourrait signifier «Coucou du matin». Les suédois, comme moi, aiment se réveiller aux aurores pour sortir au grand air et profiter des premiers chants des oiseaux.
Il y a des suédois dans mon arbre généalogique, dont jai dû hériter de mes cheveux blonds et de mes yeux bleus. Je ne parle pas le suédois, mais je me suis intéressée à la culture de ce pays. Il y a un autre mot intraduisible qui me plait bien : Livsnjutare. Ça pourrait signifier « être accro à la vie » et en profiter à fond, être capable de sémerveiller devant les choses insignifiantes du quotidien. La langue suédoise recèle de plein dautres mots du genre, résumant ainsi létat desprit et la philosophie de vie de ce peuple.
Jétais donc devant ma glace à faire diverses grimaces en me maquillant les yeux, les joues et les lèvres, yeux plissés, bouche en cul de poule et tutti quanti.
La radio à tue-tête, je reprenais les refrains des chansons qui étaient diffusés, agrémentant parfois mes beuglements dune petite chorégraphie devant la glace, deux pas en arrière, roulement des hanches, un tour complet, deux pas en avant et on se remet au pinceau sur les yeux. « Jaime regarder les filles qui marchent sur la plage, sur leur peau le soleil, caresse bien trop sage. Le vent qui les décoiffe, un goût de sel sur mes lèvres, J'aimeuuuu» ou « Here Comes the Sun, Here Comes the Sun and I Say its all right
» Georges Harrison a toujours été mon Beatles préféré. Et le soleil arrivait en effet en ce début de printemps, et cest « all right !! ».
7h30, votre flash dinfo, Yvan Delamousse en direct avec vous :
« Sondage : 71% des français détestent la personne devant eux dans une file dattente »
Ah ah ah !! Tu métonnes !! Rigolais-je.
« Sondage encore : faire lamour sans masque devient le fantasme le plus répandu chez 65% des français »
Préservatifs, masques, gants en latex, gel hydroalcoolique, où tout cela va sarrêter ? Bientôt on sera en tenue de cosmonaute pour faire lamour ! Où va-t-on ! Tempêtais-je.
Avez-vous remarqué quon nous abreuve journellement de sondages divers et variés sur tout et rien ? Le sondage dopinion est devenu information. Et surtout vérité. Ça devient grave là !! Réagissez les gens ! Fulminais-je.
« Société : Le personnel soignant sera imposé sur les applaudissements reçus à 20 heures, lors du premier confinement »
Les salauds ! Ils sont vraiment capables de tout ! Memballais-je.
« Larzac : une rave party rassemble 50 chèvres et 72 brebis, aucune ne portait de masque.
Mais que fait la police ! Memportais-je.
« Mode : une nouvelle cigarette électronique pour colorer vos poumons de la couleur de votre choix »
Grand bien leur fasse !! Méchauffais-je.
« Sports : Vendée Globe, le bateau SNCF séchoue suite à une rupture de caténaires »
Ahahahah, mesclaffais-je
« Horoscope : Capricorne, vous recevrez aujourdhui 45 appels indésirables, mais parmi eux, il y aura peut-être votre âme sur. Décrochez à tous, on ne sait jamais».
Moi, les horoscopes, lastrologie, je ny crois pas !!! Cest mon côté capricorne, concluais-je.
Pour clore ce journal, nous recevons Eva Hévien, notre chroniqueuse Pipolerie.
Alors Eva, de quoi allez-vous nous parler aujourdhui ? Une anecdote croustillante ? La vie des stars, la famille royale ?
- Non Yvan, ma chronique du jour porte sur un scandale qui est en train de naître.
- Un scandale ? Fichtre ! Nous vous écoutons Eva !
- Merci Yvan. HDS dans la tourmente ?
Hier soir, le célèbre site dhistoires érotiques organisait sa traditionnelle cérémonie visant à récompenser les meilleurs auteurs et histoires de lannée : les gourdins dargent. A la surprise générale, cest un quasi inconnu qui a remporté le prix cette année. Le grand vainqueur est Nakilo Sarkasi, pour son texte « Paul Bismuth, Karla et moi, mon approche du candaulisme ».
Cette nomination a provoqué un tollé dans le public, majoritairement composé d'auteures et dauteurs, public traditionnellement policé et réservé. On était loin hier de lambiance bon des années précédentes.
Laetitia, finaliste malheureuse et donc 1ère dauphine, pour son texte « Etes-vous joueuse ? » a quitté la salle avant la fin de la cérémonie, alors quon devait lui décerner un gourdin dhonneur pour lensemble de son uvre. On laurait entendu dire que pour elle, l'élection était truquée.
Olga T, la présidente du SAA-HDS (le Syndicat des Autrices et Auteurs dHDS) a déclaré à notre micro « On ne connaît pas ce Nakilo Sarkasi, cétait son premier texte, et il a le gourdin ? Tout cela me parait un peu gros ». Un auteur dHDS qui a préféré garder lanonymat, a, à linstar de Laetitia, évoqué un trucage et de la corruption. Il se murmure quil sagit dAbdul75, assez véhément après lannonce des résultats, puisquil na pas été avare de quolibets et de lazzis pour les organisateurs, pendant toute la cérémonie. Il aurait été raccompagné vers la sortie par la sécurité, dailleurs.
Un comité de lecteurs se serait créé dès hier soir, une pétition serait en train de tourner, appelant au boycott dHDS. Jacques du Canada en serait linvestigateur et le premier signataire. A lheure où je vous parle, il y aurait une douzaine de signataires.
Nous avons pu joindre Laetitia hier, elle nous a déclaré, je la cite « Calmons le jeu, tout cela na aucune importance, ces récompenses cest de toute façon du pipeau. Leur gourdin nest même pas en or, mais en argent. Vous savez où ils peuvent se le mettre ? Si jécris, cest avant tout pour mes lecteurs, pas pour des prix, et le public jugera ! »
Interrogés, les représentants dHDS nont pas souhaité nous répondre. Mais il est certain que le petit monde de la nouvelle érotique est en pleine effervescence ce matin.
Jai éteint la radio dun geste rageur.
Oui, la veille, je métais un peu emportée. Et je nétais pas encore complètement calmée.
Enfin, tout ça, on va essayer de loublier. Parce quaujourdhui, cest mon jour. Le grand jour.
Celui de la sortie de mon recueil de nouvelles aux éditions Enplomb.
Mais revenons à la genèse de ce projet.
Il y a deux mois, jai été contacté par les éditions Enplomb, par lentremise de leur directeur de publication, Jacques Sohn-Faïvhe. Un de leurs renifleurs de talent, avait repéré ma prose.
Jacques après de longues discussions, dont certaines dans son chalet de Megève devant un feu de cheminée (et après une raclette), ma proposé déditer un recueil de certaines de mes nouvelles, douze pour être précise :
- Etes-vous joueuse ?
- Les deux Petits s entre conjoints
- La bague de fiançailles
- Mangouste
- Scandale rural
- Une sale journée
- Escapade hongroise
- Gâterie
- Imbroglio
- Force 3
- La main passe
Bon, les discussions, quoique au coin du feu, furent acharnées (en loccurrence, nous étions allongés nus sur une peau de bête à ce moment-là) :
- On sort ça à compte dauteur
- Surement, pas, à compte déditeur !
- Euh
- Pas de euh
à tes frais, et je veux des droits dauteur !
- Bon, 5000 exemplaires, ça me parait bien !
- 5000 ? Nimporte quoi ! 50000 pour commencer et on fera des retirages ensuite.
- 50000 ? Cest beaucoup !
- Beaucoup, tu plaisantes ? Et je veux être décisionnaire sur la maquette.
- Mais
Une de mes bonnes amies, Noémie, a un joli coup de crayon, jai réussi à imposer un dessin par nouvelle. Vu la qualité des gravures quelle a réalisé pour loccasion, ça lui fera de la pub à elle aussi.
Jai imposé aussi quon lui signe un contrat pour illustrer les éventuels recueils suivants que je pourrais sortir, et quelle puisse également travailler sur dautres ouvrages, dautres auteurs des Editions Enplomb :
- Tu comprends mon petit Jacques, je suis en relation avec Paul Tergueste des éditions du Cherche Midi à Quatorze Heures. Ils mont proposé un pont dor pour que je publie chez eux. Jai pour le moment refusé, Ma parole est dor. Je me suis engagé avec toi. Enfin, pour le moment
- Mais
- Pas de mais ! Tu traiteras dailleurs dorénavant avec mon agent. Oui, je viens de prendre un agent.
- Qui ?
- Yve-André Pérhémer
- Cest un escroc !
- Ta tatatata
Tu traiteras avec lui ! De toute façon, entre escrocs vous trouverez un terrain dentente !
- Puisque tu insistes
- Tu viens de te faire des couilles en or mon petit Jacques, comme on dit ! On remet ça ? Une autre petite gâterie buccale ?
Et nous sommes tombés daccord. Jai eu gain de cause.
Aujourdhui est le jour de la sortie officielle de mon recueil. Et pour marquer le coup, Jacques Sohn-Faïvhe, mon éditeur donc, en collaboration avec Yves-André Pérhémer, mon agent, a prévu une séance de dédicace dans un des magasins de la chaîne Fnouk, les libraires flegmatiques.
Et nous étions le jour J. Voilà, les wagons sont raccrochés. Je reprends le cours de mon récit.
Jai mis un temps fou à choisir ma tenue. Il me fallait la tenue appropriée. Classe, mais pas trop. Je devais paraître proche de mes fans, pas inaccessible avec une robe merveilleuse par exemple. Classe, mais simple. Après moult essayages, je me suis enfin décidée pour un jeans tout bête, légèrement élimé, voire déchiré par endroits, pour faire genre. Jai complété dun chemisier ivoire, légèrement décolleté et une veste de tailleur grise, à petits carreaux jersey Milano. « Non, pas mal du tout, ya pas à dire », me dis-je en me regardant dans la glace, vérifiant que mon jeans moulant ne me faisait pas un trop gros cul. « Non, impec ». Bon, faut dire, cest le genre de jeans quon enfile avec un chausse-pied.
Il me fallait le truc qui allait me magnifier. Là jétais décontractée, mais classe. Il fallait que je sois décontractée mais super classe. Les escarpins ! Voilà ! Jai exploré ma collection de paires de chaussures alignées sur les étagères de mon dressing. Les Miu Miu ? Non
Les Sergio Rossi ? Non, un peu trop
Les Louboutin ? Euh non
les Louboutin ne se conçoivent quen soirée. Ah ! Les Jimmy Choo, talon de 10,5cm, noirs en daim. Classes mais décontractés, à lavenant du reste.
Quelques bijoux, chaîne en or rose avec un petit pendentif, boucles doreille assorties, pour le côté classe, ainsi que quelques bracelets fantaisie, trois autour de chaque poignets pour accen encore le côté décontracté. Hippie chic ! Bourge flegmatique !
Maquillage très léger, cela va de soi, du rose pâle sur les lèvres, notamment.
Superbe ! Tu en jettes !
Cette séance de dédicace devait se conclure par un échange avec la presse spécialisée. Mon agent et mon éditeur voulaient quon répète et quon révise les questions qui seraient susceptibles de mêtre posées et les réponses à y apporter :
- Pffffff
Non, on sen fout, jimproviserai, ne vous en faites pas, leur rétorquais-je. Et puis ce qui compte, cest la spontanéité !
Je suis arrivée avant louverture à larrière de la limousine à verres ultra-teintés que jai exigé :
- Waaaa, il y a du monde déjà ! Mexclamais-je en voyant la centaine de personnes devant le magasin, attendant lheure douverture.
- Cest la campagne de communication quon a mis en place avec les Librairies Fnouk et ton éditeur, et bien sûr ton talent ma chérie, qui déplace les foules, me dit Yves-André.
- Flatteur va
Ou hypocrite peut-être. Intéressé sûrement
- On va passer par derrière, par lentrée des artistes. Lentrée des artistes, cest ce quil y a de mieux pour toi.
- Hypocrite, oui
Au bout dune demi-heure, Jacques et Yves-André sont venus me chercher dans ma loge :
- Laetitia, on ouvre dans cinq minutes, il y foule dehors, ça va être un succès !
On ma installée derrière une table face à lentrée. Devant le rideau de fer encore baissé, les cinq vigiles sapprêtaient à ouvrir les portes.
Sur la table, on a posé plusieurs piles de mon recueil. Derrière moi, il y avait quelques kakémonos dépliés reprenant le visuel de la couverture du recueil, avec une photo de moi qui mavantageait en surimpression.
La couverture de mon recueil est comme je lai souhaitée, sobre. Blanche avec juste mon nom, Laetitia en haut, recueil de nouvelles au milieu et les éditions Enplomb et leur logo en bas.
Une préface de ma main et ensuite les douze nouvelles choisies. Chacune est illustrée par une gouache de Noémie. Magnifique. Jai une préférence pour celle de « la bague de fiançailles », où on voit une jeune fille habillée à la mode des années folles assise dans un fauteuil, un homme, un genou au sol lui tend un écrin. Superbe.
Jacques Sohn-Faïvhe sapproche de moi avec un type à côté de lui :
- Ah Laetitia, laisse-moi te présenter Geoffroy Denldo, le directeur des librairies Fnouk.
- Ah ça tombe bien, jai deux mots à vous dire à vous! Jai demandé une loge confortable avec une bouteille de Cristal de Roederer frappée et je me retrouve avec un placard à balais recyclé en loge et une bouteille de Crémant. Ça ne va pas du tout ! Jétais à deux doigts de vous laisser en plan. Vous avez de la chance que mon éditeur et mon agent aient réussi à me convaincre de rester :
- On va ouvrir Laetitia.
- Oui eh bien depuis le temps que vous me le dites, je ne sais pas ce que vous attendez. Laissez entrer mon public !
Les vigiles se sont regroupés près de lentrée. Le rideau de fer a été remonté. Les portes se sont ouvertes.
La sécurité a eu du mal à canaliser mes lecteurs, leur demandant de saligner dans la rangée de barrières de cordes en S. Au bas mot, il y avait au moins 200 personnes. Le premier de mes fans a poussé un rugissement :
- Ne poussez pas !
A laccent, bien que je ne laie jamais rencontré, jai tout de suite su qui cétait : Jacques du Canada ! Toujours le premier ! Les gens se sont bon gré mal gré alignés entre les cordes.
Jacques sest donc approché de la table où jétais installée
- Jacques ! Tu as traversé lAtlantique, exprès pour venir me voir ?
- Je naurais jamais raté cette séance de dédicace. Impossible, avoir un exemplaire dédicacé cest obligatoire pour moi.
Jai pris le premier exemplaire sur la pile. Avec mon beau stylo plume, jai mis un petit mot personnalisé pour Jacques de ma plus belle écriture avec pleins et déliés. Ce que jai écrit ne vous regarde pas. Vous ne le saurez donc pas. Si vous voulez savoir, voyez avec Jacques.
Après une vingtaine de dédicaces, jai pris le rythme, un sourire, un petit mot gentil et personnalisé pour chacun, une dédicace et au suivant.
Cest présenté devant moi un grand sexagénaire aux cheveux poivre et sel :
- Cest pour ?
- Patrick
- Patrick ? Le Patrick ? PP06 ? Patrick Paris ?
- Oui, me dit-il, manifestement impressionné.
- Waaaa la chance que jai, des célébrités dans ma file dattente !
Jécris « Pour mon vieux complice décriture, pour nos longues discussions, (négociations) sur une phrase, un mot. Pour Patrick, mais Patrick Paris, car aujourdhui tous les garçons sappellent Patrick ».
Et jai signé Laeti, comme pour les autres
- Voilà mon petit Patrick, garde le précieusement
Le suivant sest présenté, Mimi
- Mimi ? Mon tout premier fan ? Je te fais la bise, on sen fout du Covid., lui dis-je en le serrant dans mes bras.
- Je taime aussi Darling, me dit Mimi.
Les lecteurs se sont succédés, mettre des visages sur des pseudos était plutôt amusant, Éric, Roland, Patco, Phil, Xav, des anonymes et
.
- Patrick ? Encore toi, tu as déjà eu ta dédicace ! Tu en veux une autre ? Gourmand !
Dun seul coup, le silence sest fait dans le joyeux chahut de la file dattente. Tout le monde sest écarté. Une grande femme brune a traversé la pièce et cest approché de ma table :
- Olga ! Je suis contente que tu sois venue ! Merci ! Je le dédicace pour Olga et Philippe. Et merci pour ton intervention à la soirée des gourdins.
Dautres lecteurs sont passés devant moi, VictorBrousse, La Chipie, Francis. Francis à qui jai écrit « Merci davoir été pour moi une source dinspiration, jy pense souvent en relisant « Gloryhole mon amour ».
Jai appelé Geoffroy Denldo le directeur des librairies Fnouk :
- Vous en avez encore ? Il ne men reste que quelques-uns !
- On vous fait amener tout ce quon a en réserve.
- Jespère pour vous que ça sera suffisant, il y a encore du monde qui attend. Vous risquez lémeute !
- Patrick ? Non, pas encore, tu s!! Bon, cest le dernier ! Je le dédicace pour Martine celui-là !
Un gaillard dun certain âge sest approché de moi. Un marin ?
- Pierre ? Non, tu es venu daussi loin pour moi ? Cest trop chou ! Je timaginais tout à fait comme ça, baroudeur et buriné ! Je mets « Pour Pierre, il pourra lire ce recueil entre un accord mineur, une glisse et un tour en pointu (Ahahahah), quil puisse se masturber encore longtemps».
Le suivant s'est présenté devant moi, il avait lair tout timide. Il me regardait la bouche ouverte :
- Tu es ?
-
- Tu es ?
- Euh
Jim.
- Jim ? Pas vrai ! Le Jim ? « Pour Jim, grand amateur dégrillardises, de truculences, de marivaudages et de calinotades. MON admirateur number one qui apprécie mes fadaises et mes calembredaines ». Jai signé Ittalia.e (avec deux T, private Joke). Alors Jim ? Quel effet ça fait de voir son idole en vrai ? On fait un selfie ?
Les lecteurs se sont succédés, Jai reconnu le suivant : Yves-André Pérhémer qui venait de mapporter une nouvelle pile de recueil et un rafraîchissement, sest penché sur mon épaule :
- Tu te le dédicace à toi-même celui-là ? me dit-il.
- Comment ça ?
- Tu as écrit « A Moi » !
- A toi ?
- Non, à Moi
- Jy comprends rien, laisse-moi travailler Yves-André !
« A Moi83000, quasiment toujours parmi les premiers à lire mes histoires, qui aime tant entrer dans mes univers et qui les apprécie tous ».
Enfin, le flot des lecteurs sest tari. Il est temps, maintenant, de rejoindre les journalistes qui mattendaient dans un salon.
- Mes fans viennent aussi, dis-je à Geoffroy Denldo.
- Ça va être compliqué, le salon nest pas très grand.
- Veux pas le savoir, fallait prévoir ! Démerdez-vous ! La bouteille de crémant me reste en travers de la gorge. Amenez-moi du Champagne cette fois.
Une vingtaine de journalistes étaient réunis dans un salon. Je suis entrée avec Yves-André Pérhémer et Jacques Sohn-Faïvhe :
- Laetitia répondra à une vingtaine de questions, vous les poserez à tour de rôle, dit Yves-André.
Mes fans se sont massés devant la porte, tout le monde na pas pu entrer. Une partie du public se trouvait sur le palier.
- Qui commence ?
Une espèce de gnome au teint jaunâtre et à lair libidineux sest levé :
- Bernard Tichot, critique littéraire à Dissonances, dit-il dune voix de fausset.
- Je vous écoute.
- Vous écrivez dans un genre mineur
- Oh la ! Je tarrête tout de suite mon gars ! Genre mineur ? Mais tu te prends pour qui ? Les critiques, vous ne servez à rien, vous ne produisez rien. Pour toi le mot critique na quun but, détruire ! Tu dégages de là
Allez hop ! Virez-moi ce guignol !
Des huées et des sifflets sont montés de lassemblée de mes fans et lecteurs. Vexé, Tichot est sorti, avec son air méprisant. Ce que ce con navait pas mesuré, cest que pour quitter la pièce, il allait devoir fendre la foule composée de mon public massé devant la sortie. Il sest pris quelques claques derrière le crâne en passant. Un croche-pied a aussi manqué de le faire trébucher. « Vous allez entendre parler de moi ! » A-t-on entendu depuis le couloir.
- Cest ça, tas raison ducon. Beati pauperes spiritu. A qui le tour ?
- Jean Tenlelout, grand reporter à Télémama.
- Je vous écoute Jean.
- Vous maniez dans vos textes lhumour assez souvent, Laetitia.
- En effet
- Lhumour est-il une communication différée à intention esthétique, sémiotiquement complexe, et sémantiquement aussi dailleurs, dont la particularité serait dengendrer chez le lecteur une forme très singulière de sourire ?
- Voilà une question intéressante ! Prenez en de la graine les autres. Paízôn ế spoudázôn
disait Socrate à ses disciples. Eh bien, je dirais que lhumour déplace le sérieux bien plus quil ne le contredit ou lannule. Lhumour garde laspect du sérieux tout en sen détachant radicalement. En ce sens, lhumour serait en quelque sorte une ironie déliée du sérieux.
- Merci Laetitia.
- De rien Jean.
Un homme dun certain âge sest levé de sa chaise :
- Armand Talot, du bimensuel Le Cheminot Retraité, rubrique littérature. Aucune de vos nouvelles ne se situe dans un train. Avez-vous lintention décrire une histoire ferroviaire ?
- Alors, en effet ! Parmi les 12 nouvelles sélectionnées, il ny a aucun train. Il y a des passages ferroviaires dans dautres de mes récits, je vous invite à les reprendre. Après, la bagatelle dans un train est un fantasme très répandu. Je ne minterdis pas un jour décrire sur ce sujet. Question suivante ?
- Anna-Lise Durhine, stagiaire à PipolageMag. Revenons à la soirée des Gourdins dargent
- Je vous arrête tout de suite. Lors de la soirée, la passion a pris le pas. Arrêtons la polémique ! HDS ma mis le pied à létrier, et je les en remercie, je leur en serais toujours reconnaissante. Je nai rien dautre à ajouter sur le sujet.
- Barack Affrith du Washington Post, envisagez-vous de publier aux Etats-Unis ?
- Cest une idée qui ma traversé lesprit. Je vais voir ça avec mon éditeur. Plusieurs de mes récits se déroulent dailleurs dans votre pays. Alors, la réponse est oui ! Un grand oui même ! Aux Etats-Unis et dans dautres pays dailleurs.
- Annabelle Hélabaite de Picsou Magazine, mon collègue parlait tout à lheure de lhumour dans vos histoires. Certaines autres, comme Alice et Fed ou Rédemption sont plutôt classées dans le genre du mélodrame. Vous explorez donc différents univers ?
- En effet, jaime me diversifier. Nécrire que dans un seul genre mennuierait. La preuve, le texte daujourdhui ! Jose même un récit quasiment sans cul sur HDS. Il naura peut-être pas le succès attendu, mais quimporte !
- Jennifer Ahre-Passaih, de MeufMag. Vous êtes une femme resplendissante Laetitia, belle et simple. Quel est votre secret ? Pouvez-vous donner quelques conseils beauté à vos lectrices ?
- Cest adorable Jennifer, mais je nai pas la prétention de donner des conseils aux autres femmes. La beauté, ce sont des choses simples, par exemple, échauffez-vous avant une épilation du SIF, sinon, à moins dêtre yogi, vous risquez la déchirure musculaire. Le plus important, cest la beauté intérieure, mais un petit soin du visage na jamais fait de mal à personne. Et noubliez jamais ce précepte : « Contrairement aux hirondelles, quand les esthéticiennes font du rase-motte, cest quil va faire beau ». Ou « En avril, commence à te raser le persil ». Sinon, vous faites quelque chose ce soir Jennifer ?
- Nan
- Passez dans ma loge après, quon en rediscute
- Thomas Teauquaitcheuppe, pigiste à Métrosexuel hebdo. Quelle est selon vous la chose primordiale pour réussir dans lécriture ?
- Merci Thomas de me poser cette question, vous mettez le doigt là où il faut, si je peux me permettre. Le travail ! Thomas, le travail, toujours le travail ! Notez sur votre carnet : le travail ! Ad Augusta per Augusta, comme disait lautre.
- Guy Dondevéleau des Incroquécktibles.
- Je vous écoute Guy.
- Vous abordez différents thèmes dans vos histoires, vous écrivez dans les catégories entre nous les hommes et les femmes, entre nous les femmes, vous avez écrit certains récits qui auraient pu être classés dans la rubrique « dominants-dominés ». Où se trouvent la part de vécu et la part de fantasme ? Avez-vous de lexpérience dans tous ces sujets ? Et si oui, pouvez-vous nous livrer quelques anecdotes ?
- Cest bien trop indiscret Guy. Je suis quelquun de pudique. Aborder ces sujets, je ne le ferais pas. Ma vie personnelle est ma vie personnelle, la fiction est la fiction. Certes parfois, il arrive que les deux se mêlent. Je ne vous dirais pas où !
Cest bon ! On arrête là, je suis lasse. Merci à tous. Merci à mes fans.
Un tonnerre dapplaudissements a retenti du côté du public, depuis lentrée du salon et à lextérieur dans le couloir :
- Vous êtes tous invités au cocktail qui a lieu après. Ça ne va pas plaire à Geoffrey Denldo des Librairies Fnouk, mais on sen fout. Nous nous y retrouvons pour trinquer les amis.
Cest ainsi que sest terminée cette journée riche en émotion.
Cest aussi la fin de cette histoire. Cest à ce moment-là, que jescomptais placer une scène de partouze. Jai changé davis. Imaginez là, si vous le souhaitez.
Plus sérieusement, « MERCI A TOUS », cest le seul objectif avoué de ce récit et cest le message que je veux faire passer.
Une pensée aussi aux anonymes qui me laissent des petits mots sous mes textes. Vous étiez surement aussi dans la queue pour cette dédicace.
PS : Je remercie mon organe (aheum) de presse (ouf) préféré à qui jai emprunté une partie des fausses infos du flash en début dhistoire. Merci donc au Gorafi.
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