L'Art Délicat De L'Écriture
Adossée au chambranle de la porte, Melissa mobserve en avalant un bol de café au lait par petites gorgées. Aucun sourire ne simprime sur ses lèvres fines, ni aucune gravité dailleurs. Étrange sensation, presque dérangeante, que dêtre la cible de ce regard neutre. Davantage quà ma personne, son attention sattache à mes gestes, à mes attitudes. Sans doute cherche-t-elle à connaître mes pensées, à savoir si une place lui est réservée.
« Oui mon amour, je pense à toi. On se connaît depuis presque trois semaines maintenant, et on commence aujourdhui à vivre ensemble. Comment donc ne pas me focaliser sur notre histoire naissante ? Tu occupes chacune de mes méditations, même alors que je réponds aux messages en jetant un regard amusé au forum. Tu es là, à trois mètres de moi, je fais semblant dêtre occupée, et je tobserve à la dérobée. Ten rends-tu compte ? Pas certain. »
Melissa a disparu. Leau coulant du robinet de la cuisine minterpelle. Elle doit laver son bol, elle me manque déjà. Le robinet ne coule plus, tout à lheure je trouverai le bol sur légouttoir.
Melissa est revenue sans bruit. Prise par mes pensées, je ne lai pas entendue. Elle saccroupit à même le sol et pose sa joue contre ma cuisse. Moment de douceur quand mon amour ronronne de ma main dans ses cheveux. Elle ne cherche rien, rien dautre que ce contact qui dépeint à lui seul la plénitude de nos sentiments partagés. Rien de sexuel, rien de fantasmatique, rien de criard, juste mes doigts lissant la courte chevelure soyeuse et sa joue contre ma cuisse.
« Je taime. » déclare Melissa dune voix profonde, grave, de celle employée pour énoncer une vérité crue. Et moi je jubile en silence de sa déclaration sobre, cependant si merveilleuse. Sinsinue en moi létrange sensation de navoir vécu que pour cet instant, comme si les trente-trois années de mon existence représentaient le chemin que je me devais de parcourir afin de La rencontrer.
« Dis-moi ce que tu écris. »
Je reprends pour elle toute la discussion échangée avec une copine internaute. Melissa sourit de savoir que je reconnais mes sentiments pour elle sur un forum.
« Ouvre une nouvelle page sur Word sil te plait. Écris et lis en même temps, parle de nous. Puis on mettra le texte en ligne tout à lheure. »
Je mexécute sans même minterroger sur cette demande particulière, cest facile. Les mots viennent aisément, langue française est dune richesse insoupçonnée, je ne doute pas lui déclamer mon amour sans la lasser par des mots mille fois répétés. Cette phrase lamuse.
« Quest-ce que ça te fait de savoir que des inconnu(e)s liront ces lignes ? » demande-t-elle, la voix toujours aussi rauque.
Je ne réponds pas, coincée par la question inattendue. Melissa ninsistera pas, fidèle à ses habitudes. Mon cur enfle dans ma poitrine, la saveur unique de cet instant prouve que Melissa un être à part. Je conjuguerai désormais au quotidien les verbes à la première personne du pluriel. Nous est sans doute lun des plus jolis termes qui soit.
Sa main sinsinue sous ma veste de pyjama, Melissa vérifie si mon cur enfle réellement. Cette attitude me ravit au lieu de mamuser. Je lui dis tout ce que jécris au fur et à mesure que les mots salignent. Ses doigts agacent mon téton, pourtant son regard reste tendre, sans lexcitation particulière dansant dans ses prunelles. Voulait-elle que je le note ou souhaitait-elle me lentendre prononcer ?
La caresse se fait précise ou éthérée, rien nest acquis. Sa main cajole mon sein et linstant daprès elle en affole la pointe, se régale de la réaction suscitée, se régale de mes mots. Est-ce la cause ou la conséquence ?
« Je vais me régaler de toi. » entends-je tandis que mes doigts tremblent, suspendus en guirlande au dessus du clavier.
« Continue à écrire. » Elle sait, si jécris je dois parler. Melissa souhaite mentendre décrire ce chemin tortueux qui mènera à la volupté.
Sa joue a quitté ma cuisse, remplacée par son autre main. Je ne suis même pas aperçue de son changement de position. Du pyjama je ne porte que la veste, ses doigts caressent ma cuisse nue, impriment un léger massage qui les amène à lintérieur, là où la peau est plus sensible. Á moi de me mordre la lèvre, pour une autre raison.
Comment va-t-elle sy prendre ? La sait-elle seulement, ou guette-t-elle un signe, une parole qui déterminera le futur proche ? Melissa sourit de provoquer mon émoi dans tous les sens du terme. Labsence de réponse est déjà une forme de réponse.
Mes deux seins réagissent désormais sous la câlinerie particulière, fêtés chacun leur tour par la main audacieuse. Melissa rompt le contact et mobserve, espiègle, elle semble se complaire de ma surprise, de ma hantise de la voir interrompre le jeu. La peur sestompe, elle défait un à un les boutons de ma veste, en écarte les pans, minterdit de lenlever.
« Je veux savoir jusquoù tu peux aller. »
Sa voix rauque me provoque, elle le sait, elle en joue, elle sen délecte. Mes mots trahissent mes pensées, mon tourment, les siens au contraire entretiennent le mystère. Par son timbre si particulier elle me baise déjà. Non, ce terme na rien de vulgaire, il reflète la réalité crue de cet instant. Et mon amante au contraire me remercie de lavoir employé.
Sa main de nouveau sur ma cuisse remonte lentement. Melissa cherche à savoir si je ne mens pas, si je nexagère pas. Un doigt coquin, délicat, parcourt ma blessure intime de bas en haut, puis elle en observe la brillance avec attention. Mon corps pleure de se savoir abandonné. Juste un petit coup de langue sur mes tétons, elle reprend son observation. Comme si elle comparait lhumidité de sa salive à ma cyprine. Cette idée lamuse. Jai envie quelle me touche de nouveau.
« Je sais, mon amour. Écris. »
Je mexécute, car de mon application dépendra la sienne.
« La position de lécrivaine dans la Kama-Sutra lesbien. » Sa phrase ne me fait pas rire. Si je ris, tout sera à refaire. Pourvu que mes parents narrivent pas maintenant. Melissa sourit de ma pensée.
Sans doute partage-t-elle mon angoisse car sa main se pose sur mon sexe, louvre. Un doigt fouineur investit ma vulve. De son autre main elle caresse mes seins, joue avec les tétons
Je peine à écrire, elle sen moque à présent. Je finirai le texte plus tard.
Melissa me désire, me parle, elle sait par sa voix faire monter mon état dexcitation. Je mouille, elle a soif, sa bouche se pose sur mon puits damour. Sa langue se fraye un chemin entre mes nymphes moites.
On ne joue plus.
Melissa me veut, ne parle plus, elle a soif de ma jouissance, naura de cesse de savourer ma liqueur jusquà obtenir ce quelle souhaite. Sa langue distille les premières caresses à la base du capuchon, mon clito exacerbé se montre. Elle le pince entre ses lèvres puis le lèche.
« Viens ! »
De nouveau sa bouche sur ma fente, sa langue en moi, un doigt masturbateur soccupe seul de mon bouton tandis que son autre main caresse mes seins. Mon amante ne veut plus attendre. Elle ne désire pas me faire lamour, juste recevoir mon orgasme. Le moyen elle le connaît, ce quelle souhaite cest profiter de linstant où
« Jouis mon amour. »
Trois mots par elle prononcés, et cest lextase. Melissa a juste le temps de se replacer afin de se repaître de mon plaisir. Cest de la folie, indescriptible. Volcan, raz-de-marée, explosion, implosion, petite mort, tous ces termes et aucun à la fois. Il est si difficile dexprimer ce moment si particulier, quand tout sarrête, quand tout chavire.
Je jouis, sans lui dire, elle le sait.
Le clapotis de sa langue dans mon antre est le langage qui entretient mon orgasme, le prolonge. Cest puissant, long, très long, presque silencieux.
Il me faut la repousser. Jamais je ne suis sentie aussi nue, aussi vulnérable. Elle me prend dans ses bras, je chancelle, elle membrasse. Sa salive garde mon acidité. Je reprends pied doucement.
Cest fini, jai joui.
Melissa me presse de terminer lécriture du texte tandis quelle va nettoyer la cuisine. Mes parents arriveront vers 13 heures. Ces lignes auront été mises en ligne avant.
« Je taime. » clame-t-elle au loin.
« Moi aussi je taime. » Je ne le lui dis pas, Melissa le lira.
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