Chroniques Pénitentiaires D'Une Rebelle 3
3 De surprise en surprise
Cinquième jour dincarcération, rien ne différenciait le dimanche de la semaine en préventive, quen sera-t-il au pénitencier ? Réveil à 7 heures et demi, je me sens proche dune délicieuse impression de grasse matinée. Perception du linge, draps et tenues, on a une heure, deux fois plus de temps quen semaine, pour nous laver puis nettoyer la cellule. La matonne se montre de mauvais poil, ça doit la faire chier dêtre de service au lieu de profiter dune grasse matinée, un mec lattend peut-être dans le petit logement de fonction fourni par ladministration.
Seules les gradées mariées habitent à lextérieur, les autres ont des heures et des jours de sortie autorisée, quartier libre comme à larmée. Surveillant pénitentiaire nest pas le job le plus cool au monde, ni le mieux rémunéré, la plupart nont pas eu le choix après le lycée.
Froide devant les autres, Christelle se montre charitable entre nous, sensible malgré sa formation de commissaire de police. Les horreurs quelle a supportées pendant toutes ces années à la brigade criminelle de la préfecture de police de Paris lont humanisée, jaurais imaginé le contraire. Elle est née en 2020 au domicile familial pour raison de confinement, se rendre à lhosto représentait un risque au mois davril de cette année-là. Une sage-femme libérale a fait le travail, plaisanterie mise à part, cétait facile dans un milieu favorisé.
Je ne suis pas seule à apprendre de nos discussions, la lecture des livres interdits à la fac ma ouvert les yeux. Les différents confinements jusquà lannonce de la découverte dun vaccin saisonnier puis dun traitement efficace, le président de lépoque en était à son deuxième mandat, réélu en grande partie à cause de la peur collective entretenue par le gouvernement ; certains soupçonnèrent des scientifiques davoir retardé sur ordre la divulgation de leurs avancées. Plusieurs centaines de millions de morts, directement ou indirectement liés au coronavirus, la plupart dans les pays défavorisés, ça en arrangeait quelques uns de par le monde.
Réalité ou théorie du complot ? Personne ne le saura jamais. Par contre, la volonté du président de rendre à la France, non pas sa grandeur morale, plutôt une place de choix sur les marchés internationaux, guida sa politique. Sitôt réélu, il nhésita pas à sacrifier un modèle social considéré trop protecteur pour privilégier le capitalisme à outrance, gouvernant par ordonnances au mépris de la démocratie. Les pays riches et émergeants suivirent le mouvement, tous unis derrière largent roi, lhumanité perdit une fois encore loccasion de se choisir un avenir meilleur.
Le déverrouillage automatique de la porte coupe court à des réflexions que jai peur de perdre. Dehors, jaurais pris des notes ; ici, demander la permission décrire suffirait à me rendre suspecte, on ne ma pas interdit laccès à la bibliothèque dans le but de ménager mes méninges après trois années de fac. Christelle a repéré quelques ouvrages intéressants, une lettrée peut déchiffrer entre les lignes une certaine prise de conscience, du moins une étincelle. Je ne me bats pas seule, la révolution est en marche, à ma sortie dans cinq ans...
Fais la gueule ou marre-toi, mais ne montre jamais aux autres que tu réfléchis, cest une marque de faiblesse derrière les barreaux.
La remarque de Christelle est logique ; de son côté, elle a déjà retrouvé la froideur qui la caractérise hors de la cellule. Je choisis la première option, la seconde me paraît hors de portée ce matin.
De la brioche maison facile à cuisiner, un coût de revient minime qui ne grève pas le budget, cest dimanche. Les discussions dépassent le stade des murmures sans jamais tomber dans lexcès, on se croirait presque au restaurant universitaire où les étudiantes auraient choisi de sattifer dune même combinaison rouge. Certaines se servent du rab de café ou de lait au distributeur près duquel deux matonnes ont élu domicile, dautres changent de table après avoir évacué leur plateau sur le tapis roulant surveillé de près, les couverts en plastique sont comptés à chaque repas.
Des affinités mises de côté en semaine, quand les places sont attribuées par cellule, se révèlent. Des amitiés nouées sur place ont évolué, des mains se croisent, des corps se cherchent, se frôlent, sapprivoisent. Ladministration pénitentiaire sen accommode par intérêt, certainement pas par générosité, personne nempêchera jamais les êtres humains déprouver des sentiments ni de chercher à les exprimer. Les surveillantes ont lordre de laisser faire dans la mesure où rien ne trouble la tranquillité du bloc A ; mieux vaut voir les détenues baiser que faire des conneries. Un virage à 180° que jaurais pu mentionner dans ma thèse de fin détude.
La petite blondinette arrivée vendredi peine à trouver ses marques, ses codétenues la tolèrent à leur table, règlement oblige ; mais rien ne les force à lui adresser la parole, les chaises laissées libres autour delle témoignent dune mise à lécart. Malheureusement, la pauvre est moins solide que ma codétenue satisfaite de son isolement. Lhistoire de la récidiviste du vol à létalage provoque les moqueries de tout le bloc ou presque ; une troisième présentation au tribunal des délits mineurs devient un crime puni de cinq ans fermes. Elle devait le savoir après deux séjours en maison de redressement, seule une abrutie se permet dignorer les avertissements, et personne ne veut se montrer proche dune imbécile.
Cétait son choix de se faire choper, son père la maltraitait.
Demander à Christelle de dévoiler sa source dinformation romprait le charme, je me contente découter les révélations faites sur le ton de la confidence.
Le salaud est sous-préfet de la Loire Atlantique, personne na osé lui chercher des poux dans la tête quand sa fille a voulu porter plainte, tu ten doutes.
Bien sûr, tant quun politique navigue dans les sens du courant, il reste intouchable, encore une raison de vouloir une révolution.
La pauvre va se faire bouffer toute crue ici.
Le sourire sans joie de Christelle démontre que jai raison, Laval à lautre bout de la table la remarquée, on dirait un fauve guettant sa proie. Ne plus être la cible privilégiée de la prédatrice du bloc A me rassure à peine ; dabord, rien ne prouve que cette salope ne reviendra pas à la charge après avoir obtenu ce quelle veut de la nouvelle. Et merde, je ne vais pas rester simple spectatrice comme les autres. Le pied de ma codétenue sous la table me rappelle à lordre.
Laisse tomber, à moins que tu te moques des conséquences, ça ne la protègera pas pour autant. Laval va y aller mollo, les surveillantes interviendraient.
Profiter dune pauvre fille au prétexte de la protéger, cétait déjà aller trop loin pour moi, la toubib nest peut-être pas la seule à jouir de sa position. Pourtant, malgré une apparente froideur, Christelle bout dintervenir.
Cest bon, soupire-t-elle fataliste, je vais men occuper. Toi, tu restes en dehors de cette histoire. Jai ta parole ?
Mon sourire la rassure à peine. Pourquoi ? Je suis sincère, elle devrait le savoir. La promiscuité imposée amène la complicité, on arrive à se comprendre avec un minimum de mots.
Les portes des cellules resteront déverrouillées jusquau repas du soir, les détenues peuvent se déplacer à leur guise sous lil indiscret des caméras. Le dimanche après-midi est aussi le moment des visites tant attendues, jassiste de ma couchette au va-et-vient dans la coursive. Profiter du rez-de-chaussée transformé en salle de jeux, faire semblant daller bien quand ma petite sur me manque ? Très peu pour moi. Jai hâte darriver à demain, de noyer ma solitude dans le tourbillon du boulot, ma haine du système se nourrit de lennui. Ma codétenue patiente sur son pieu, silencieuse, les yeux dans le vague. Comment fait-elle ? Lhabitude sans doute.
Vous êtes prête, Maillard ? Il y a du boulot qui nous attend.
Jouvre les yeux, la surveillante en chef se tient à lentrée de la cellule, droite, froide, les bras croisés durcissent son attitude bien quelle soit la seule à vouvoyer les détenues.
Elle a envie décrire à sa petite sur, cest possible ?
La voix délicate, presque suppliante, de ma codétenue mamuserait en de meilleures circonstances. Quelle comédienne ! La matonne hésite un instant, puis extirpe un drôle de petit tube de sa poche, en fait une clé qui ouvre un panneau dans la cloison au-dessus de la table. Un clavier dordinateur sabaisse, laissant apparaître un petit écran incrusté. Je pensais que le trou servait à maintenir un stylo au bout dune chaînette, comme la brosse à dent au-dessus du lavabo.
On lit tout ce que vous écrivez, Marvault, pas de connerie, et inutile de chercher, aucune connexion Internet. Lenregistrement se fait automatiquement, relevez le clavier jusquau clic quand vous aurez fini, ladministration enverra la lettre en votre nom. Par contre, je dois verrouiller la cellule.
Merci madame.
La formule de politesse fait partie des règles, je nai aucune envie de rater loccasion de communiquer avec ma petite sur pour une connerie largement évitable. Ce qui compte, cest de parvenir à mes fins.
La fermeture de la porte, le pourquoi de la disparition de ma codétenue, plus rien na dimportance sauf écrire, maintenir le lien. Le beau-père ne soccupe jamais du courrier à la maison, il ne saura rien, maman est assez maligne pour garder le secret, à condition de le vouloir. Dabord quelques lignes à son intention, je tiens à lui dire quelle ne doit pas se sentir coupable de ce qui est arrivé, à moi dassumer mes erreurs, de tirer les leçons de tout ça. Jespère que mes conneries ne vont pas compliquer sa vie, quelle me pardonnera un jour.
Je nen pense pas un mot, évidemment. Ces balivernes sont destinées à lamadouer pour obtenir des nouvelles de mon adorable Manon. Une chieuse comme toutes les gamines de 10 ans le sont avec leurs grandes surs, irrésistible quand elle fait semblant de bouder, si mignonne avec ses bouclettes brunes, les charmantes fossettes qui mettent son sourire entre parenthèses, un caractère fort semblable au mien. Je me souviens du jour où, toute petite, elle sest glissée à la place de mes vêtements dans la valise que je devais emmener en camp de vacances, un sacré souvenir de lépoque insouciante qui a suivi le divorce des parents. On se tirera ensemble à sa majorité.
On sen sortait bien toutes les trois, papa payait la pension alimentaire, maman avait un bon travail. Bien sûr, jaurais accepté quelle tombe amoureuse dun homme gentil, jaurais expliqué la situation à Manon. Mais là ! Comment ignorer que son nouveau mec participe au système pourri mis en place par le pouvoir central, que son seul plaisir est dengranger des millions au mépris de la classe ouvrière quil exploite sans vergogne, un profiteur de la pire espèce capable de balancer sa propre belle-fille. Son fric ne lui servira à rien le jour du jugement.
Balancer des excuses bidons pour faire passer ma lettre ? Aucune importance, lheure de la vengeance sonnera dans cinq piges, ma fierté est ailleurs. Je me réjouis à lidée de tromper ma mère malgré les sentiments qui nous unissent, davantage encore que les garces du personnel administratif chargées de censurer le courrier pour ladministration pénitentiaire. Jamais on ne me transformera en mouton obéissant, plutôt mourir ; mais pas avant davoir assisté au réveil des forces vives du pays, de voir les assassins de la démocratie traduits en justice, surtout davoir assuré un avenir digne à Manon, et à toutes les petites surs.
Labsence de Christelle na soulevé aucune question au réfectoire, la surveillante en chef a certainement prévenu ses collègues de service ; quant aux autres détenues, elles ont mangé comme si la situation était normale, comme si une disparition navait rien de suspect. Merde ! Quelle corvée peut exiger autant de temps ? Un accident ? La rouquine de linfirmerie en aurait parlé. Jai grignoté seule au bout de la table sans que Laval, occupée à lorgner sur la nouvelle, ne profite de laubaine.
Maigre consolation, la sensation de solitude sintensifie dans la cellule, au point de ne pas oser me déshabiller. Jattends devant la télé sans savoir quel programme tient tête au silence. Mon esprit en surchauffe échafaude des hypothèses plus ou moins farfelues, de la mutation de Christelle dans un autre secteur à la volonté de durcir les conditions de détention dune opposante politique. Jai peur dêtre éliminée ou poussée au suicide. Cest quoi le pire ?
Bonsoir ma belle.
Enfin ! Le verrouillage de la porte dans son dos résonne joliment à mes oreilles, une musique douce ce soir, lexistence reprend un cours normal, même si lexpression est un peu vide de sens ici. Ma codétenue se pose avec difficulté sur la chaise à moins dun mètre de ma couchette, les yeux sombres me dévisagent, ça me rappelle le soir de mon arrivée, sauf que là, elle est complètement saoule. Pourquoi, et surtout comment cest possible ? Christelle hausse des épaules en souriant, son flair denquêtrice a senti mon questionnement intérieur.
Je laide à préparer le concours dentrée à lécole de police judiciaire, cest difficile vu le niveau détudes générales des surveillantes. Bref ! une chose en entraînant une autre... Pas besoin de te demander de garder le secret.
Inutile en effet, jai appris à fermer ma gueule ; au fait, lavertissement concerne les autres matonnes ou aussi les détenues ? Peu importe, on doit pouvoir se faire confiance, le pacte du silence est signé.
Tu as pu faire quelque chose pour la nouvelle ?
La combinaison de Christelle tombe à ses pieds, puis elle savachit près de moi dans une position équivoque. Je ne la savais pas exhibitionniste, à condition de pouvoir connaître quelquun au bout de cinq jours. Peut-être que la taule, ou lenfermement en général, développe lintuition.
La surveillante en chef va essayer de faire remonter linformation. Ça prendra du temps, des semaines, sans garantie de résultat. Ne te fais aucune illusion, Laval sait se montrer persuasive quand lenjeu lintéresse vraiment. Une gamine de 18 ans dans un pénitencier, cest une tentation exceptionnelle, on ne peut pas avoir plus jeune. À quatre mois près, elle était jugée au tribunal des mineurs.
Ma vision de la jeunesse à seulement deux ans de plus se heurte à la réalité du milieu carcéral, la plupart des relations sinscrivent dans le mode dominante-dominée dont les deux parties tirent un avantage. Même les prédatrices doivent donner de leur personne, leur statut en dépend, et elles ont peut-être plus à perdre que les supposées proies. Ça ne suffit pas à rendre Laval sympathique pour autant.
Tu vas te pieuter habillée ?
Lhaleine chargée de Christelle me rappelle quelques beuveries mémorables à la fac dAngers, les réjouissances entre potes, linsouciance, la liberté. Maintenant quelle est rentrée, je peux aller prendre une douche, sa présence me rassure. Ne serait-ce pas déjà une forme de soumission ?
Le ronronnement du séchoir automatique sarrête, dire que cette invention de la fin du 20ème siècle était destinée aux mains dans les toilettes publiques, la qualité de lair pulsé rassure le plus timbré des écolos aujourdhui. Christelle, que je pensais endormie sur ma couchette, se redresse ; tant mieux, il y aurait eu un sacré poids mort à déplacer. Une fois encore, son regard brillant me rappelle lépisode malheureux sous la douche, un accident ? Je me glisse sous le drap, à peine rassurée.
Tu ne te couches pas ?
Bientôt, après.
Merde, après quoi ? Le calme devient angoissant, jattends lextinction des lumières à 22 heures, impatiente de trouver refuge dans le noir. Dehors, le printemps prend ses marques à travers la lucarne que je fixe dans lespoir déchapper à lemprise mentale de ma codétenue, de linciter à rejoindre sa couchette. Les nuits restent supportables sans la climatisation, un temps idéal pour squatter dans le jardin de la maison familiale, après avoir pris la précaution de débrancher larrosage automatique... Oh non ! Christelle envoie valser le drap.
Quest-ce que tu fais !
Lautre soir quand jai voulu la caresser pour la remercier, elle ma repoussée, son fantasme est peut-être de se masturber en me regardant. Quelle le dise alors ! Je saurai my habi, faire avec. Le voyeurisme, il y a pire comme déviance sexuelle. Là, cest langoisse. La présence des caméras ne suffit pas à me rassurer.
Chut, profite.
Profiter de quoi ! Je nai pas envie de coucher avec une nana, encore moins avec une femme en âge dêtre ma mère, cest dégueu. Elle sempare de mes seins, les couvre de baisers brûlants, les malaxe trop violement à mon goût. Je devine son sexe sur ma cuisse à travers le drap, le va-et-vient lancinant. Quon en finisse, je déniche son clitoris à laveugle, le regard toujours rivé à la lucarne. Ne pas voir, ne pas penser à ce que je suis en train de faire ; demain, ma codétenue aura retrouvé sa lucidité. Sa mouille imprègne enfin le drap.
Oublie, cest nul.
Mes efforts nont servi à rien sauf à me filer une foutue crampe au poignet, Christelle se laisse tomber lourdement près de moi en soupirant. Je la sens frustrée, vulnérable, attendrissante, elle pose la tête sur mon épaule. Pourtant, le plus déstabilisant est sans doute ma déception personnelle, lamertume de ne pas avoir été à la hauteur me fout en rogne, cest complètement dingue, le monde à lenvers. Je flatte sa joue dun doigt distrait histoire de la rassurer un peu.
Ça arrive, on essaiera plus tard.
Son souffle apaisé, Christelle sombre dans linconscience du sommeil, rattrapée par labus dalcool. Il y a bien longtemps que je nai pas passé la nuit avec une copine, depuis le lycée. Et encore, on ne pensait quà dormir. Aucun problème, les matonnes sont au courant du moindre de nos faits et gestes de toutes façons, nous trouver dans le même pieu demain sera à peine une surprise. Et moi, je me fiche de ce quelles pensent. Extinction de la lumière, la tension nerveuse retombe enfin, lenvie de dormir brouille mes pensées, seule limage de ma sur fait de la résistance.
Je rêve que je rêve, ça pourrait être marrant, cest plutôt déstabilisant. La conscience simpose au réveil dhabitude, dans le flou dun souvenir dont les détails sestompent parfois trop vite. Je rêve que je fais lamour, enfin presque, « on » me fait lamour, du moins « on » me prépare. Aucun doute malgré le noir total, une présence entre mes cuisses me fait du bien. Ça change, les mecs veulent toujours quon les suce, ils sont moins nombreux à nous rendre la politesse. Pourvu que le plaisir arrive, ou je vais me réveiller comme une conne, mal à laise.
« Ouvre les yeux ! » Ma conscience travaille aussi la nuit ? Bizarre. Christelle a foutu le camp, sans doute retournée dans son lit. Je rêve que je me réveille maintenant, car jai lhabitude de dormir sur le côté, non sur le dos. La présence insiste entre mes cuisses au lieu de se dissiper, la sensation devient... Oh la vache ! Cest bon. Continue, surtout ne tarrête pas, imagine que je dors encore. Cest le cas ? Peut-être. À chaque fois que jai cru prendre du plaisir comme ça, le mec na pensé quau sien en me fourrant sa bite dans le minou.
Christelle, non, pas elle ! Se faire lécher par une femme, par ma codétenue en plus, dans la cellule quon partage, mon pire cauchemar devient réalité. Je hume lair à pleins poumons pour trouver la force de la repousser. Je dois me libérer de cette étreinte au plus vite, avant de succomber à la montée dun plaisir toxique, lui faire comprendre que cette relation ne mène nulle part.
Deux mains autoritaires ségarent sur mes seins, moins violentes que la première fois, avec juste assez de fermeté pour soumettre ma volonté. La garce sait que je ne dors plus, que je ne peux pas menfuir, que lexcitation me pousse au contraire à accepter ses caresses. Oh cette langue à lentrée de mon vagin, dedans, dehors, dedans, merveilleuse sensation de plénitude.
Le plaisir monte, improbable, indomptable, inconnu, Christelle le sent. Je me touche, fébrile, pour lui donner limpression de participer. La réaction est immédiate, lair me manque, je mords ma main pour cacher ce maudit orgasme indépendant de ma volonté. Pourquoi le corps dit oui quand la tête affirme le contraire ? La jouissance me cloue sur la couchette, une vague odeur douce-amère flatte mes narines. Et la langue dedans, dehors, dedans, insensible au bouleversement.
Christelle lèche ma vulve maintenant, prolongeant la redescente, je ne limaginais pas experte en relations sexuelles lesbiennes. Ses doigts ont libéré mes tétons, elle se contente de caresser mes seins avec une tendresse amoureuse, lodeur de létreinte flotte dans lair. Je mattends à sentir monter la bile, écurée par mon abandon ; rien, sinon un étrange bien-être, une sensation de plénitude aussi inconnue quincompréhensible. Je narrive même pas à être en colère.
Pourtant, je me déteste davoir joui, un putain de pied dont je ne voulais pas. Les besoins du corps ont été plus forts que la voix de la sagesse dans ma tête, lhorreur cest ma réaction, ce besoin de relativiser. Le bonheur de sa langue en moi reste intact, son désir de moffrir un deuxième voyage aussi. Non ! Pas question de succomber encore, je mefforce de la repousser cette fois. Déçue ou heureuse, impossible de savoir à cause de la pénombre, Christelle se lève. Jaurai préféré quelle reste dormir avec moi, tant pis.
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