Mon Roman Érotique : La Tentation Du Velours 1
La tentation du velours 1
Chère Lola,
Aujourdhui 2 juin marque le début dune grande aventure, je dois men persuader. Sinon jaurai souffert pour rien. La décision des parents de me jeter à la rue ne ma pas surprise ce matin, ils ont mis leur menace à exécution juste après mon 18ème anniversaire. Tant pis, je ne laisse pas derrière moi un passé glorieux empli de souvenirs impérissables, exceptés ceux vécus avec toi, mon amie denfance.
Par chance, Alain le frère de mon père avait anticipé la réaction des parents. Il était là à ma descente du train en gare dAusterlitz. Un court trajet en métro, et je prenais possession du petit studio près de lHôtel de ville que ma dernière attache familiale laisse à ma disposition. Si tu voyais mon nouveau royaume, tendre Lola, tu comprendrais pourquoi jy suis déjà attachée. Mon oncle ne sest pas attardé, un Eurostar à ne pas manquer pour retrouver sa vie londonienne. Dommage, les instants passés en sa compagnie sont trop courts. Mais il na pas manqué de me rappeler ma promesse en échange de son aide, je dois reprendre mes études.
Combien de fois avons-nous évoqué Paris, ma douce amie, la possibilité de nous y épanouir ensemble. Les aléas de lexistence en ont par malheur décidé autrement. Tu dois te consacrer à ta formation dinfirmière, je retournerai en cours de littérature à la rentrée prochaine. Il ne me reste que la possibilité de te raconter par lettres les derniers événements. Tu comprendras, jen suis sûre, mon désir de ne pas rester seule pour une première soirée dans la capitale. Je brûlais dimpatience de connaître mon nouveau territoire : le Marais. Le hasard fait parfois bien les choses, habiter à deux pas du quartier gay était une occasion à ne pas rater.
La présence des deux nanas enlacées devant la porte du bistrot, une cigarette à la main, se réfléchit comme une publicité décalée dans mon cerveau embrumé. Un pas timide mamena face à la carte.
« Ouvert du lundi au samedi, de 17 heures à 2 heures du matin. Entrée interdite aux hommes non accompagnés. »
Vouloir était une chose, oser en était une autre. Les filles cessèrent de sembrasser, curieuses de connaître ma réaction. Lune delles me lança un salut amusé, sa copine mencouragea dun sourire. Jignore si jaurais eu le courage de franchir le pas sans leur intervention.
Un endroit réservé aux femmes attirées par les femmes, jen rêvais. Mais cétait quoi être lesbienne dans le subconscient dune petite provinciale à la recherche de sa vérité ?
Tu mas manquée, chère Lola, au moment de passer la porte de létablissement. Même si ton attirance va aux garçons, tu maurais accompagnée pour me soutenir, et nous aurions ri de notre niaiserie. Un élan irrésistible mentraîna donc de lavant.
Bonsoir, lança la serveuse. Vous désirez ?
Surprise de linterpellation directe, je mapprochai du comptoir de zinc.
Un jus dorange, osai-je dune voix intimidée.
Cest la première fois que vous venez ? me demanda la jeune femme brune vêtue dune chemise nouée à la taille sur un jean, soucieuse de me mettre à laise.
Je répondis dun signe de tête, agacée par ma nervosité.
« Bonsoir ! » balança une autre voix.
Léclat du sourire béat soudainement gravé dans le visage poupon de la serveuse mincita à faire un demi-tour. Se tenait dans mon dos une grande femme dune quarantaine dannées, fière sans arrogance, un peu comme notre professeur danglais au Lycée ; tu te souviens sans doute, ma chère amie, de mlle Delaire. Bref ! Á la manière de se regarder, il ne faisait aucun doute que ces deux filaient le parfait amour.
Je mappelle Hélène, souffla larrivante, appliquant ses joues sur les miennes.
Anaïs, balbutiai-je, abasourdie de la bise amicale.
Sois la bienvenue dans mon modeste bistrot. Nhésite pas à demander à Gaëlle ou à moi en cas de besoin.
Annoncée par la gérante du bar vers 19 h 30, la clientèle formée dune trentaine dhabituées séparpilla entre le comptoir et les tables dans une ambiance bon .
Zut alors ! Je mattendais à subir les regards comme un morceau de viande sur un étal, au lieu de ça ma présence passait inaperçue. Ma première apparition dans un bar lesbien ne provoquait aucune réaction. A mourir de rire, chère Lola, ou plutôt de honte. Cest bien cette impression qui me rattrapa, au point de désirer prendre la fuite. Les habituées du lieu étaient du genre à porter la tignasse courte, un débardeur sur un jean. Alors imagine une nana en petite robe dété à la longue chevelure claire, repérable comme un bouton sur le nez.
Oups ! Désolée, lança une voix tout près de moi.
Le temps de tourner la tête sur la droite, je sentis mon bras emprisonné dans une main douce. Linconnue essuya de son autre main le liquide froid quelle avait renversé. Le geste ressemblait à une caresse.
Heureusement que ce nest pas sur le tissu, dit-elle à la volée.
De nouveau la honte sempara de moi. Quelle idée de me saper ainsi ! Linconnue souleva mon menton dun doigt, ses grands yeux sombres de biche sondèrent mon regard.
Hé ! je ne me moque pas. Tu es craquante dans ta robe. Jen porte aussi, mais là, je nai pas pris la peine de me changer après le boulot.
Rassurée par le timbre à la fois doux et espiègle, je dévisageai linconnue. Un joli carré mi-long brun encadrait lovale doux du visage, on devinait sous la longue mèche au raz du regard des sourcils bien dessinés. Le nez fin, droit, surplombait une petite bouche aux lèvres charnues.
Le chemisier blanc écru ouvert sur une gorge appétissante, les seins libres flottaient sous le tissu. Le pantalon de lin blanc moulait des cuisses fuselées sur de longues jambes. Je regrettai de ne pas voir ses fesses, mon péché mignon. Dun âge indéfinissable, entre 20 et 30 ans, elle était dune beauté naturelle, sans tape-à-lil.
Tu fais quoi comme travail ? si elle me tutoyait, je devais en faire autant. La question avait fusé, juste pour la faire parler. Le timbre de sa voix me retournait.
Je bosse dans une agence de casting.
Le souvenir de la publicité pour Coco Mademoiselle envahit mon esprit. La coiffure était différente mais
Dans une agence, pas pour une agence, gloussa linconnue devant mon air ahuri. Je ne suis pas mannequin, je les recrute. Je mappelle Sarah, et toi ?
Anaïs, dis-je, décontenancée.
Ô Lola ! Jamais je ne métais sentie aussi paumée. Linconnue avait tout pour me séduire, la beauté, lassurance, et pourtant elle me faisait peur. Cétait comme si jétais attirée par un feu, sachant le risque de my brûler. Sans doute aussi, linexpérience jouait en ma défaveur.
Parle-moi de toi, susurra Sarah, comme pressée den apprendre sur une ingénue. Tu donnes limpression de porter un malheur trop lourd pour tes épaules.
Qui étais-je ? Le savais-je alors que ma vie venait de basculer ? Je racontai mon enfance vide dans un bled de la banlieue dOrléans, parmi 3000 habitants à lesprit étroit, refusant dévoluer avec le monde. La sensation dêtre différente dès les prémices de ladolescence, le rejet du modèle social imposé, le refus de la soumission aux garçons, puis à un garçon qui serait devenu mon époux. Car je regardais les filles en secret. Sans en connaître la raison, je nétais bien quen leur présence, ne trouvais de beauté que dans leur sourire, et dattirance que dans leurs formes rondes. Toute forme de machisme métait insupportable.
Prévenir les parents mavait semblé honnête, leur mesquinerie sabattit avec la violence de lorage. Contrainte de quitter le domicile parental à tout juste 18 ans, je venais demménager seule dans le pied-à-terre parisien dun oncle vivant à Londres.
Et tu es entrée dans ce bistrot à la recherche de réponses. Même si je doute que ce soit lendroit rêvé pour cela.
Sarah me décontenançait, cela devenait une habitude.
Je passe embrasser Hélène et Gaëlle qui sont adorables, mais la clientèle ici nest pas du tout mon genre. Je suis une lipstick.
Devais-je passer la soirée à jouer lahurie ? Sans doute. Mon interlocutrice commanda deux verres. Je lévaluai une nouvelle fois du regard, incapable de ne pas la trouver belle.
Si tu mavais croisée dans la rue, tu aurais deviné que je suis attirée par les filles ? Non, bien sûr. Les lipsticks sont dallure féminine, certaines se maquillent, elles portent la jupe ou la robe comme le pantalon. Nous revendiquons notre sexualité, mais nous voulons passer inaperçues. Cest le concept de la lesbienne invisible. Assez parlé de moi, raconte-moi ce qui tamène ici.
La première gorgée du cocktail me réchauffa la gorge.
Une partie de la soirée sécoula ainsi, à évoquer ma courte vie face à une inconnue charmante et charmeuse au bout du comptoir dun bar lesbien du Marais, le quartier gay de Paris. Sarah savait écouter, provoquer même les confidences, elle parvenait presque à me mettre à laise, moi, la provinciale timide. La belle inconnue pouvait, par quelques interventions intelligentes, sans donner limpression de simposer, provoquer la narratrice qui sommeillait moi.
Blabla, blabla, blabla
Voici donc pourquoi je suis arrivée à Paris ce matin. Mon oncle me prête son petit appartement, à quelques rues dici, à la condition que je reprenne mes études à la rentrée. Il soccupe des démarches avec la Sorbonne.
Laisse-moi deviner, samusa Sarah, tu vas entrer en section de lettres modernes. Á la manière dont tu parles, tu aimes écrire. Je parie que tu téclates à rédiger un journal.
Euh
fis-je, décontenancée par la pertinence, oui pour les études mais pas pour le journal, jentretiens une correspondance avec une amie denfance. Cest idiot
Non ! me coupa-t-elle en prenant mes mains dans les siennes. Coucher ce qui tarrive sur le papier permet de cerner tes émotions, de comprendre les aléas du monde qui tentoure, alors ce nest pas idiot.
On parlait depuis un bon moment, javais avalé un second cocktail, la pendule au-dessus du comptoir affichait 22 heures, le temps passait à une vitesse folle, et la douceur des mains sur les miennes attisait en moi un désir inconnu.
Il nous était arrivé de nous embrasser, ma tendre Lola, pendant nos années au collège. Tu ten souviens ? La première fois cétait dans ta chambre. On avait joué à touche-pipi aussi, histoire de faire connaissance avec ces nouveaux corps que la nature nous offrait à la puberté. Plus tard au lycée javais éprouvé le désir dembrasser une fille, de ressentir sa chaleur, mais jamais au point de franchir le pas. Mes jeux en solitaire ne concernaient que moi : des attouchements sans fantaisies aux résultats contrastés, balbutiements dun plaisir dont jignorais tout, impossible à maîtriser. Personne jusquà ce soir, pas même toi mon amie adorée, ne sétait imposé à mon esprit comme lexpression du fantasme absolu. Une idée pas très sage meffleura, amenée par quelques morceaux de house-music.
Tu me fais danser ?
Mon audace me parut en cet instant de limpertinence pure, je blêmis davoir peut-être tout gâché dans ma précipitation. Jaurais pu lui dire un banal « On va danser. » plus conventionnel, mais je tenais à faire passer le message. Aussi je mattendais à être remise à sa place.
Sarah sourit, la brillance dans ses yeux de biche saccentua, elle mentraîna sans dire un mot sur la piste de danse entre le comptoir de zinc et les tables.
Le mouvement circulaire des ses hanches sadapta au mien, à distance respectueuse, presque trop, sans cesser de me contempler. Je compris sans tarder léloquence du regard dans le mien, aussi je laissai parler mon corps au rythme de la musique. Le balancement des bras de Sarah autour de mon cou, puis le long de mon buste, semblait redessiner ma silhouette. Jattendais avec impatience de sentir les mains de ma cavalière sur mes hanches, ou dans mon dos, nimporte où sur ma peau. Mais non, pas le moindre effleurement. Alors, en prenant garde de ne rien brusquer, je raccourcis la distance entre nous.
Amusée de ma tentative de rapprochement, Sarah me contra en lançant un collé serré de côté. Elle répondit alors à chacun des mes mouvements vers la droite par une torsion vers la gauche, comme pour méchapper. Son regard rivé au mien disait quelle nirait pas loin. Ça devenait chaud, au point que la piste sétait vidée autour de nous. Mais, pour la première fois, je men fichais de me donner en spectacle.
Le rythme de la musique ralentit encore, pour un slow véritable. Sarah reprit sa position de face, et menlaça enfin. Je ne pus retenir un frisson. Ses mains entrèrent en mouvement entre mon dos et mes hanches, prodiguant des caresses inconnues, enivrantes. Elle lécha sa lèvre inférieure dun coup de langue humide, érotisme suprême, avec une lenteur consommée. Sa poitrine se frotta contre la mienne qui durcit, soudain à létroit dans le soutien-gorge. Ny tenant plus, je baissai les yeux un instant dans léchancrure de la chemise de ma cavalière. Jimaginai ses tétons contre les miens, et me retins avec peine de prendre ses seins à pleines mains, une chaude moiteur sempara de mon entrejambe.
Jen étais toute retournée, chère Lola. Cest donc ça le désir ? Ressentir la transformation de son corps jusquà mettre son âme à nu, percevoir une présence par chacun des pores de sa peau, souhaiter se fondre dans lautre au point de ne plus faire quune seule entité.
Jattendais un baiser, je lespérais, chaque parcelle de mon être criait daccepter lévidence de ce qui allait se passer. Mais Sarah nen profita pas. Elle continua de mobserver, de sonder mon regard, de rester spectatrice face à la perte de mon innocence. Je me sentais belle dans ses yeux, alanguie dans ses bras, décidée à tout lui donner de moi, pourtant elle ne prit rien de ce qui lui était offert. Comme si ce nétait ni linstant ni lendroit.
Sarah saisit ma main à la fin de la musique, et me ramena sagement près du comptoir. Son expression redevint celle dune gentille jeune femme au comportement amical. Jen étais sonnée.
Si javais dansé comme ça avec un mec, avouai-je grisée par lalcool, il maurait sauté dessus sans hésiter.
Sans doute, mais je nen suis pas un. Profiter dun instant et tirer profit dun instant de faiblesse sont deux choses différentes. Je vois que tu nas pas lhabitude de boire, ça aurait été malhonnête de ma part.
Cest vrai que je suis un peu partie. Tu veux bien me raccompagner ?
La nuit étalait son insondable beauté sur Paris. Je vivais le premier instant romantique de toute mon existence. Arrivées trop tôt à mon goût au bas de limmeuble, je nétais pas pressée de quitter ma belle inconnue. On était sur le trottoir à se regarder, il ny avait quune façon de prolonger cet instant magique.
Tu montes 5 minutes ?
Jen avais tellement envie que les mots sétaient échappés de ma bouche, sans le vouloir. Sarah hésita sur la conduite à tenir pour la première fois, pas longtemps, peut-être afin de jauger ma détermination. Je savais que si elle acceptait linvitation, jirais jusquau bout. Ce fut à moi de lui prendre la main cette fois, pour lentraîner vers mon nouvel appartement. Une pensée me fit sourire en grimpant les marches jusquau 1er étage, je navais pas eu le temps de salir, jétais certaine de la recevoir dans un endroit propre. Mais, au moment de mettre la clé dans la serrure, Sarah me retint dans lembrasure de la porte.
Rentre seule, cest mieux. Tu veux que je passe demain matin avec les croissants ?
Létat débriété mempêcha sans doute de pleurer. Peut-être aussi ne laurais-je pas invitée sans ce même état.
Á 9 heures, cest bien ?
Je serai là sans faute, murmura Sarah avant de poser un baiser léger sur mon front. Puis elle disparut dans lescalier.
Tu vois, douce Lola, cest sans doute là que se tient la grande différence entre les mecs et les nanas. Je naurais pas dormi seule si javais été hétéro, car un garçon aurait profité de loccasion. Je ne dis pas que cest bien ou mal, juste différent. Nous navons pas la même conception des relations humaines. Notre vision du désir, du chemin à parcourir avant de le concrétiser, est bien plus complexe.
Nous en reparlerons, mon amie, je te laisse pour ce soir.
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