Chroniques Pénitentiaires D'Une Rebelle 4

4 La pyramide de Maslow

Ces derniers jours ont été difficiles pour de multiples raisons, je suis impatiente de recevoir des nouvelles de Manon, la conscience d’avoir cinq ans à tirer loin de ma petite sœur m’angoisse. On ne me laissera pas sortir avant, le système des remises de peine a disparu dans la réforme du code pénal en 2035, la liberté surveillée aussi. Consolation plutôt maigre, les trente jours de préventive seront décomptés. Non, aucune possibilité de sortir, à moins d’une révolution qui pourrait se faire sans moi, un coup au moral supplémentaire malgré les efforts de Christelle pour me tirer vers le haut. J’ai honte de comparer ses douze ans d’enfermement à mes onze jours de présence.
Elle s’est excusée de... l’incident de dimanche dernier, sans chercher à se justifier. Il m’aura fallu presque une semaine pour relativiser, le bon sens m’interdit de lui en vouloir, mieux vaut évacuer le moindre motif de tension entre codétenues. Ça devait arriver de toutes façons, peut-être pas si tôt ni dans ces conditions, mais ce n’est la faute de personne, seulement une conséquence logique de la promiscuité, alors n’en parlons plus. J’estime avoir eu de la chance d’échapper à l’emprise de Laval au contraire, cette garce aurait certainement pris son plaisir sans s’occuper du mien. Au moins, on ne peut pas taxer Christelle d’égoïste.
Laisser une femme me brouter le minou, une idée inimaginable qui ne m’a jamais effleurée, même pas à l’époque de la découverte. Ça arrivera certainement encore, c’est long cinq ans, autant adopter la politique du pénitencier sans chercher de réponse à des questions évidentes d’hygiène. Après tout, j’ai pris mon pied la première fois, pourquoi pas les suivantes. Ça change, aucun mec n’a réussi à me faire jouir, c’est vrai que je n’en ai pas connu beaucoup. Le sexe est arrivé tard dans ma vie, et n’a jamais été une priorité. Au moins maintenant, j’ai un souvenir qui me permet de rester à flot dans les heures les plus sombres.


En réalité, j’angoisse à l’idée d’être obligée de revoir mes anciennes certitudes, d’y perdre mon esprit critique au passage, pour simplement parvenir à survivre un jour après l’autre dans l’antre de l’enfer carcéral. J’ai peur de devenir « comme elles », comme ces criminelles de droit commun aux comportements douteux motivés par un égoïsme primaire. Eh ! je suis une révolutionnaire pacifique, une libre penseuse, une libertaire à la limite, aucunement une terroriste qui pose des bombes ou qui tire sur des flics. Alors pourquoi je supporterais une telle comparaison ? Non, c’est tout à fait inacceptable, une injustice supplémentaire.
« Ta gueule, Louise Marvault, pour qui tu te prends ! T’as essayé de connaître ces femmes avant de les juger une seconde fois, de savoir ce qui les a amenées là ? Bien sûr que non, le temps ne te manque pourtant pas. Mais c’est tellement plus gratifiant de te croire différente, meilleure, rassurant sans doute aussi. Et sur quelles bases appuyer ta théorie fumeuse ? La colère ne justifie rien, sinon une incompétence latente à prendre les bonnes décisions, à réagir au lieu d’agir. Alors arrête de jouer les victimes, bon sang, relève la tête. »
La voix de la sagesse a frappé fort ce dimanche matin au réfectoire, les connexions de mon cerveau en surcharge menacent de griller. Christelle se marre, on dirait qu’elle a entendu ma conscience se rebiffer.
– T’as intérêt à relativiser si tu veux tenir le coup, ma belle, je me suis faite à l’idée de partager mon palace avec une petite étudiante en histoire aux idées subversives, alors évite les conneries pendant que je serai chez la surveillante en chef.
Waouh ! rarement ma codétenue a usé d’autant de mots dans une phrase. Le sens de l’humour me donne envie d’y croire. Ce serait exagéré, disons que ça consume un excès de culpabilité.
– Tu veux du rab de café ?
– Avec plaisir puisque tu l’offres si gentiment, ma petite Louise, puis on ira s’offrir une balade dans la cour.

J’adore l’entendre parler.

Une petite pluie fine rafraîchit à peine l’atmosphère, les sentinelles armées se terrent dans les casemates sur les miradors ; ça ne change rien, personne ne s’évade d’un pénitencier. Les mesures de sécurité sont imposées par les assureurs, paraît-il, je le crois sans peine, encore une question de profit. Il y a quarante ans, de telles remarques m’auraient valu une réputation de gauchiste ; j’espère ne pas me tromper beaucoup en affirmant que l’ambition politique sert souvent d’excuse à un vulgaire appât du gain. Un véritable attrait pour l’exercice du pouvoir serait trop glauque à imaginer, preuve de l’instabilité mentale de ceux qui s’arrogent le droit de prendre les décisions pour nous.
Vendre, des biens ou des services, vendre toujours plus, toujours plus cher, voici le fil conducteur de notre société. Pas étonnant que des gens essaient de voler ce qu’ils ne peuvent acheter. On en retrouve ici, à faire les cent pas dans la cour clôturée d’un grillage de huit mètres de haut sous un ciel maussade, victimes désabusées d’un système qui a refusé de tenir ses promesses. Le pognon serait-il la cause de tous nos maux ? L’avidité plutôt, qui veut que l’être humain se trouve toujours de bonnes excuses à amasser des fortunes.
Pourquoi aucune révolution n’a abouti à une équité véritable ? Les pauvres sont bien plus nombreux que les riches de part le monde, il leur suffirait de s’unir, de se faire entendre d’une même voix. Certains s’y sont essayés dans l’histoire, aucun n’a réussi, le mal est trop profond, les sages trop peu nombreux à prendre la parole. Le problème est simple : les pauvres ne sont aucunement intéressés par le partage des richesses, non, ils veulent devenir riches à la place des riches, amasser eux aussi plus que ce dont ils ont besoin, quitte à laisser leurs voisins crever de faim.
Et moi, pour qui ou quoi est-ce que je me bats ? Certainement pas pour le fric, ou j’aurais choisi une autre carrière que le professorat après mes études universitaires, pour la liberté d’avoir le choix sans doute, pour que ma petite sœur ne reste pas enfermée dans un monde d’illusion à cause d’un statut de privilégiée que ni elle ni moi n’avons mérité, pas même nos parents.
Fermez la porte d’une cage dorée, vous êtes en prison, passer par la case départ et toucher le jackpot n’y change rien. C’est beau l’utopie, ça aide à vivre, ça entretient l’espoir.
La petite voix dans ma tête disait vrai tout à l’heure, il y a mieux à faire que de jouer la carte de la victimisation, je ne suis pas plus innocente que les autres dans ce merdier. Participer sans état d’âme au jeu de dupe selon les règles truquées établies par ceux qui distribuent les récompenses, bonnes ou mauvaises selon l’humeur du moment, ai-je le choix ? Tirer le meilleur des cinq années à venir, surmonter le pire, je dois absolument revoir la pyramide de mes besoins afin d’y parvenir. Christelle, donne-moi ta force, sois mon mentor sur ce coup, j’ai besoin de toi.
– Tu disais ?
J’ai réfléchi à haute voix ou quoi ? Un sourire illumine son visage lisse, une fenêtre s’ouvre sur son âme, ce que j’y vois me plait, loin de l’image de bad girl qu’elle impose aux autres. Sa bouche, ses mains... merde ! Pourquoi l’épisode de dimanche dernier revient en boucle dès que je me sens un tant soit peu démunie ?

Devant nous, Laval insiste dans son plan drague entrepris dimanche dernier, aura-t-elle davantage de succès aujourd’hui ? J’en doute, la blondinette fait de la résistance. L’attitude très protectrice typiquement masculine frise le ridicule, même si personne n’ose se moquer ouvertement. La proie potentielle semble du genre à crier au viol dès qu’un courant d’air s’insinue entre ses cuisses, elle ferait bien de se reprendre ou sa vie va vite devenir un enfer. La forte tête du bloc A tente d’envelopper les épaules de la nana, celle-ci se dégage mollement du geste possessif, sans conviction.
– Cette garce devra se rabattre encore une fois sur sa régulière, pouffe Christelle à mon oreille par souci de discrétion. Elle doit être verte de jalousie, celle-là.
– Tu parles de Gaëlle ?
– Ouais, un couple d’enfer. J’ai enquêté sur quelques uns à la criminelle, ce genre d’histoire se termine souvent par un .

La vache ! J’aurais pu comprendre un aveu d’impuissance ; cependant, la froideur de ma codétenue ne fait aucun doute. L’animosité est particulièrement forte entre Laval et elle, j’ai l’impression d’assister à une bataille à distance ; alors, que la braqueuse tue ou soit tuée importe peu, elle disparaîtra des radars.
– Qu’est-ce qui s’est passé entre vous ?
Christelle préfère éluder la question, comme les adultes fuient leurs responsabilités devant les s.
– Rien. Viens, on rentre. La surveillante en chef ne va pas tarder.
Oui, et je me retrouverai seule à essuyer les moqueries, les autres ne voient encore en moi que « la copine de la fliquette », une donneuse dont il faut se méfier. Écrire à ma petite Manon ? Pas avant d’avoir reçu une réponse au premier courrier. Me pieuter devant la télévision ? Un coup à m’endormir vu le programme, et je ne trouverai plus le sommeil cette nuit. Amorcer un rapprochement amical avec des détenues capables de passer outre le passé de Christelle ? Ça ne coûte rien d’essayer, il serait peut-être temps pour Louise Marvault de tisser des liens au bloc A.
– Tu boiras un coup à ma santé.
– Je n’y manquerai pas, ma belle, deux même. De ton côté, n’oublie pas ce que je t’ai dit, tout ce que tu devras faire ici n’aura aucune importance dans cinq ans, c’est la base de la survie. Et n’hésite pas à m’envoyer chier au cas où...
Mouais, promis. C’est bizarre, j’ai envie d’y repenser en cet instant précis, même de faire autre chose que ressasser un souvenir.
– Elle a l’air cool, la matonne en chef.
Sans aller jusqu’à mettre les surveillantes et les détenues dans le même sac, du moins pas toutes, j’ose croire qu’il y a de bonnes personnes dans les deux camps ; sinon, ma conscience serait ridicule. J’ai l’air d’une girouette, de changer d’avis plus souvent que de combinaison, c’est la conséquence de nombreuses réflexions parfois contradictoires, d’un violent coup de blues entre deux périodes de calme relatif. Il faudra du temps pour que ça se stabilise, comme l’accord improbable des éléments d’une sauce aigre-douce. Le noir et le blanc forment un gris plus ou moins sale selon l’humeur du moment.
– Elle l’est, soupire Christelle en s’octroyant une chaise à l’écart au rez-de-chaussée, intelligente aussi. Je déteste perdre mon temps avec des connes.
Le compliment me touche, on serait probablement amies dans un contexte différent. Pourquoi une femme pareille est devenue flic ?
– Ce qu’on appelle la force publique est chargée de maintenir l’ordre, c’est le bras armé du pouvoir contre la contestation, une bande de brutes en uniformes recrutés sur leur capacité à obéir sans réfléchir. La police judiciaire mène des enquêtes, analyse des faits, on se sert de notre tête pour arrêter de véritables criminels nuisibles à la société. Tu vois la différence ?
Encore un sujet de réflexion.

– Salut ma mignonne. C’est trop bête de rester seule dans un coin.
Bla-bla-bla, les branleurs au resto universitaire ou en boîte de nuit se débrouillent mieux que ça. La quinquagénaire pose les gobelets sur la table avant de s’asseoir sans gêne en face de moi ; le dimanche est le seul jour où les détenues ont droit à un café après le déjeuner.
– J’ai mis un demi-sucre.
Aucun doute, la vieille a l’œil sur moi depuis au moins une semaine. « C’était tentant de profiter de l’absence de ma codétenue, hein ? Tu m’aurais abordée dans d’autres circonstances, si tes intentions étaient purement amicales, devant Christelle ? Ben non, tu veux passer un moment avec moi sous la couette, rien d’autre. » Je préfère me montrer diplomate.
– Merci.
Voilà, tout est dit, je fais glisser mon plateau jusqu’à celui de Cat esseulée à l’autre bout de la longue table, en prenant soin de laisser le gobelet sur place. Rien n’est cadeau ici, oh non ! Accepter le café, c’était permettre à l’autre de croire en la possibilité d’un rapprochement intime, lui donner la permission de me draguer. Que les choses soient claires, je ne suis pas à vendre quel que soit le prix.
La troisième de l’équipe Laval m’accueille avec un sourire franc, une réputation d’attardée garde les autres à distance, comme si la simplicité était contagieuse. Cat est saine d’esprit, limitée intellectuellement peut-être, ça n’en fait pas une tarée. Les juges ne prennent aucun risque avec le handicap mental ; en taule ou en hôpital spécialisé, la peine est pareille, même plus difficile à vivre dans la deuxième option. Elle joue un rôle histoire d’avoir la paix, plutôt bien en fait.
– On doit subir ces conneries combien de temps ?
Le manège de la vieille n’est pas passé inaperçu, chaque changement de table provoque une avalanche de commentaires.
– Ça dépend si t’as une protectrice. On m’a foutu la paix tout de suite car tout le monde croyait que j’étais avec Pauline.
– Ce n’étais pas le cas ?
Cat n’a rien d’un laideron, l’autre a bien dû tenter sa chance.
– Elle aboie mais ne mord pas beaucoup. En plus, Gaëlle veillait au grain à mon arrivée, une vraie teigne, pas question de me retrouver au milieu.
Oh, oh ! on apprend des choses en tendant l’oreille.
– Et toi, pourquoi t’es là ?
Comprenant que ce n’est pas son cul qui m’intéresse, Cat a l’air d’apprécier ma présence, tant mieux.
– Je suis tombée amoureuse d’un connard d’escroc quand j’étais en apprentissage, le salaud n’a pas hésité à se servir de mes sentiments pour faire de moi sa complice. Six ans, il m’en reste quatre à tirer.
Le coup tordu habituel, une confiance aveugle placée dans la mauvaise personne et c’est l’engrenage, l’arrestation, le tribunal puis la taule. Je suis contente d’avoir écouté ma conscience, un mauvais choix ne fait pas de toutes ces femmes des criminelles en puissance, irrécupérables pour la société.
– Et toi ?
– Tentative de déstabilisation de l’État, cinq ans, j’ai distribué des tracts contre le gouvernement à la fac.

L’après-midi a été moins barbant que je ne le craignais en l’absence de Christelle, instructif aussi. En rentrant après avoir raccompagné Cat, j’aperçois les nanas qu’on a surprises à l’aller en train de flirter gentiment. Elles sont toujours à l’angle ouest de la coursive, appuyées contre le conduit d’air conditionné, peut-être un peu plus proches l’une de l’autre. Le temps des visites terminé, la plupart des détenues attendent l’heure de la bouffe du soir au rez-de-chaussée ou dans la cour. Une question me travaille, quel est l’intérêt d’accorder autant de liberté sexuelle aux détenues ? La paix sociale ne peut pas tout justifier. Du laxisme ? Ça m’étonnerait.
À moins que... inutile de m’attarder à des théories fumeuses. Ces deux-là ont trouvé un angle mort à l’abri des caméras alors qu’il n’y en a aucun en cellule, baiser dans la coursive à ce moment de la journée leur assure certainement une impression d’intimité. Enfin, difficile de qualifier de baise les quelques caresses à travers les combinaisons, ça ressemble plutôt à un tripotage entre novices. En m’approchant cependant, celle qui restait dans l’ombre appuyée contre le conduit semble secouée de spasmes. L’autre la... la retient de tomber ?
J’approche au ralenti, curieuse, jusqu’à les voir de trois-quarts. Le bras enfoui dans le vêtement de sa copine, celle qui me tournait le dos masturbe l’autre copieusement d’une main en triturant un sein blanc de l’autre. C’est chaud, elles savent que je les observe se donner en spectacle. Les deux exhibitionnistes en tirent un supplément de motivation, jusqu’à pousser le vice à prendre la pause rien que pour moi. Une invitation ? Putain de merde ! Je sens un désir malsain grossir dans mon ventre.
Si cette maudite combinaison avait eu des poches, j’en aurais profité volontiers pour me toucher en douce. C’est excitant, plus troublant que vulgaire. J’arrive presque trop tôt à leur hauteur pour saisir le mouvement saccadé sous le tissu. La nana aux cheveux châtains prend un téton de sa copine entre ses lèvres. Le rythme des caresses s’accélère, devient précis. La brune aux seins laiteux ouvre la bouche, l’air lui manque tandis que l’autre ne ménage aucun effort dans le but de la faire jouir à cet instant précis.
Je continue mon chemin sans ralentir ni accélérer, surtout sans me retourner malgré le désir d’assister au final en spectatrice privilégiée, un petit couinement de plaisir ne serait pas surprenant. Malheureusement non, je rentre en cellule sans rien entendre qu’une voix connue.
– T’en fais une tête !
De retour, Christelle patiente sur sa couche devant la télé allumée sans doute par défaut. Qu’est-ce qu’elle a ma tête ?
– T’es toute rouge.
– Je viens de voir deux nanas s’envoyer en l’air dans un coin de la coursive.
Le plus troublant, c’est que la scène m’a excitée, j’aurais voulu avoir le courage de m’arrêter pour les observer de près. Eh ! c’est quoi ce délire ! Ferme ta gueule, Louise, reprends-toi. Et là, ce n’est pas la voix de ma conscience, car je n’en ai plus vraiment à cet instant précis.
– Tu t’y feras, sourit Christelle amusée.
Peut-être, sans doute, très certainement ; ma plus grande frayeur serait d’apprécier ce genre de spectacle avec le temps.
– On est toutes des saintes-nitouches en arrivant, ça passe, crois-moi.

De retour après le dîner, j’en arrive presque à regretter la sobriété de ma codétenue, il n’y aura aucun incident ce soir, aucun débordement du type « démonstration n° 2 de ce que des femmes peuvent faire ensemble » ou « exercice pratique de lesbianisme entre expérimentée et débutante ».
– Je vais à la douche.
La provocation tombe à plat, Christelle reste allongée sur sa couchette. J’aurais aimé qu’elle me suive, au moins comme le soir de mon arrivée, qu’on se caresse l’une en face de l’autre à défaut d’autre chose. Tant pis, je suis bonne pour une petite masturbation hygiénique après l’extinction des lumières.
– Qu’est-ce qu’il y a entre Laval et toi ?
Christelle débarque dans la salle de bain après un long silence, elle commence à se brosser les dents sans un regard sur moi.
– Pourquoi voudrais-tu qu’il y ait quelque chose.
L’intuition, c’est tout. Cat n’a pas su me répondre cet après-midi ; pourtant, elle aussi a remarqué l’animosité particulière, comment ne pas la sentir. D’ailleurs, la braqueuse a clairement fait savoir à son équipe qu’elle me draguait pour faire chier ma codétenue, ce qui a profondément emmerdé Gaëlle.
– T’as pas confiance en moi ?
Christelle s’invite sous la douche avec une idée précise en tête, elle me savonne le dos puis le haut de mes fesses.
– Si, bien sûr.
C’est sympa mais un peu tard, la curiosité a relégué le désir en arrière plan. Je me retourne afin d’exprimer ma détermination.
– Allez ! Dis-moi.
Les mains à hauteur de mon intimité, Christelle grimace, ça ne sert à rien d’insister dans cette voie pour l’instant. Eh oui, je suis une femme, donc entêtée. De toute façon, elle m’aurait donné du plaisir uniquement pour éluder la question.
– Je connais le convoyeur sur lequel elle a tiré, il est dans un fauteuil roulant.
Oh merde ! J’ai encore perdu une occasion de fermer ma grande gueule. C’est quoi cette manie de vouloir tout savoir, tout justifier.
– Je suis désolée.
– Laisse tomber, c’est le passé.
La franchise ne sert à rien, la pauvre ressemble à un clown triste, un Auguste en train de se noyer dans la boue d’une gaité trop malsaine pour être partagée. Un semblant de sourire sur ses lèvres pincées reflète l’innocence de l’, mais son regard trahit la douleur, l’incommensurable douleur des grands.

Extinction de la lumière, la pénombre envahie la cellule, les projecteurs sur le mur d’enceinte empêche la nuit noire, le sommeil me fuit. Christelle, tournée vers moi, ne se pose aucune question, le léger ronflement trahit son évasion momentanée. Et moi alors, comment vais-je pouvoir m’échapper ? Le drap a glissé, dévoilant un sein, le manque de luminosité m’empêche d’en profiter. Dommage. Le souvenir des nanas dans la coursive se substitue à l’image trop imparfaite.
Est-ce qu’une femme peut apprécier de prendre le sein d’une autre dans sa bouche ? Faire bander un téton entre ses lèvres ? Quelles caresses se permettent les lesbiennes ? Superficielles sur le clitoris, ou plus profondes aussi ? Le désir refait surface, mes mains balbutient les premiers attouchements. Ô Christelle, le souvenir de ta langue m’obsède, j’ai envie de plonger la mienne dans ton antre, de te goûter, de te lécher jusqu’à te faire devenir folle.
J’essaie d’attr un téton avec mes lèvres, mes seins sont trop petits. Un doigt puis deux en moi, je caresse ma vulve doucement, partout, c’est bon. Un troisième trouve l’entrée de mon vagin, délicieuse sensation de vouloir me prendre, de me retenir pour ne rien précipiter. La tension monte.
Christelle repousse le drap, elle sait, elle m’offre la vision imparfaite de sa nudité. Je déniche mon clito.

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