Repas Épicé

Malgré l’heure tardive, il y a encore pas mal de client dans le restaurant. Contre toute attente, le serveur qui nous accueille nous propose une table à part, derrière une sorte de cloison à mi-hauteur. C’est inespéré. Nos regards, complices, se croisent, approbateurs.
Je tiens le dossier de la chaise pour la tirer et je t’invite à prendre place. Je m'assieds face à toi alors qu’une serveuse se présente et nous dépose les menus.
J’en saisis un, non sans avoir pris la peine de te regarder en souriant... Mon esprit est encore plein des images de cet après-midi... je revois ton débardeur glisser sur ta peau, révélant la dentelle de ton soutien gorge... ton paréo noué sur la hanche était un affront... Occulter à mes yeux ton corps était inadmissible. Tu me fixais de tes yeux bleus tandis que tes doigts agiles venaient à bout du lien. Il glissa doucement. Je te revois me plaquant sur le lit, au dessus de moi, les mains sur mes épaules. Je sentais ma virilité épouser la douceur de ton intimité et toi de t’en amuser, de prendre un malin plaisir, par un déhanchement dont tu as le secret, à l’enduire de cette onctueuse liqueur...
- Tu prends quoi ?
Ta question interrompt ma rêverie...
- Heu, je ne sais pas encore, je n’ai pas regardé
- Et bien ? A quoi penses-tu, m’interroges-tu d’un regard coquin
Je ne réponds que d’un léger sourire et je plonge le regard dans les pages glacées. Quelques instants après, mon choix apparaît comme une évidence. Je ne dis pourtant rien jusqu’à ce que la serveuse s’approche.
- Pour commencer, deux coupes de champagne...
Tu sembles agréablement surprise.
- Ensuite, ce sera 6 huitres. Puis des crevettes de la passion...
- Du vin, Monsieur ?
- Une bouteille de Jurançon blanc, s’il vous plaît
- Et Madame, qu’avez-vous choisi ?
- Hum, ma foi, le choix me parait intéressant : je prendrai la même chose
La serveuse s’éloigne et nous nous retrouvons seuls.

J’examine la salle par dessus le paravent : quelques couples, des amis qui finissent leur repas. Tous sont visiblement très occupés. Nous semblons invisibles et notre emplacement ne gâche rien.
- Cette journée est magnifique et quel temps !
Comme pour joindre les actes à la parole, tu illustres tes propos en saisissant les brettelles de ton débardeur et les agites. Il dévoile alors ta poitrine délicieuse. La même qu’il n’y a pas plus tard que deux heures, je dévorais avec gourmandise. Encore une fois, des flashes reviennent. Mon regard qui t’observe me trahit
- Très cher, si vous avez encore faim, il fallait manger plus tout à l’heure... pour l’instant, c’est une autre nourriture qui vous attend.
- Qui m’attend ? Ma chère, vous y êtes également conviée...
Tu me réponds d’une moue moqueuse.
Nos sous-entendus sont interrompus par la serveuse qui nous apporte nos assiettes d'huîtres. Nous entamons cette entrée non sans un appétit certain. Les émotions et les efforts creusent, c’est connu. Leur goût légèrement iodé et relevé d’une pointe de noisette est un régal pour les papilles. En portant le coquillage aux lèvres, je te regarde en faire de même. Tes lèvres pulpeuses pointent. Ta main s’en approche. Ta bouche s’entrouvre doucement. Le bout de ta langue apparaît et tu viens y déposer ce cadeau salé. Je l’imagine à sa merci, manipulée, goûtée, sucée, jusqu’à ce que tu décides de l’avaler. Ton visage exprime une certaine satisfaction. Le met est visiblement à ton goût.
Je décide d’en faire autant. J’observe l’huître, claire, parfaite, brillante. Elle semble dessinée au fusain tant ses traits sont fins. Je la penche doucement pour en savourer le jus. Il emplit ma bouche de sa saveur. Mais bientôt, sa chair vient heurter mes lèvres. Je les ouvre légèrement et commence à l’aspirer. Sa douceur flatte mes lèvres. Enfin, après en avoir extrait toutes les saveurs, je me résous à l’avaler. Une joute gustative commence entre nous. Cependant, nous n’avons pas beaucoup de munitions.
C’est peut-être préférable... pour l’instant.
La serveuse revient et nous débarrasse. En attendant, nos mains se retrouvent, nos doigts se croisent. Ils témoignent encore de notre envie, de notre impatience... Ils osent ce que nous ne pouvons faire ici... Mais ils s’emballent, s’oublient et par maladresse une perle qui décorait le centre de la table roule et tombe par terre. Je me penche pour la rattr. Inconsciemment, mon regard se porte vers toi. Le devines-tu ? Quoiqu’il en soit, tu écartes légèrement les cuisses. Je revoyais cette délicieuse petite culotte blanche que tu portais, que j’avais pris soin de retirer, qui glissa le long de tes jambes pour choir innocemment à tes chevilles... Oui, mais c’était un souvenir : car là, je ne percevais rien... rien si ce n’est une chair rose et immaculée... Je n’en revenais pas... Je déroulais la fin de l’après-midi... notre douche ensemble, nos derniers ébats sous une eau tiède, la recherche de nos habits respectifs... nos baisers volés... ton soutien gorge, ma chemise, mon pantalon, ton paréo... mais je ne vois pas ta culotte... Je ne rêve donc pas...
J'émerge de sous la table. Je te questionne des yeux... et ton regard est un aveu. Je me redresse, et, non sans fierté, je pose la boule sur la table... Tu t’ajustes sur la chaise, le sourire aux lèvres... De mon index, je joue avec la bille, feignant d’être perdu dans mes pensées... Puis, maladresse d’homme, elle m’échappe et roule à terre. A nouveau, je me dévoue. Mon regard ne perd pas de temps... Je comprends mieux alors ton petit manège... En t’ajustant sur la chaise, tu en as profité pour relever ton paréo. Tu t’es un peu reculé, si bien que l’applique qui nous surplombe vient apporter un nouvel éclairage sur ce spectacle. Le doute n’a plus raison d’être. Soudain, ta main s’invite. Elle glisse le long de ta hanche et plonge entre tes jambes. Ton majeur pointe et souligne tes lèvres gonflées.
- Monsieur, votre plat...
La voix de la serveuse me surprend.
Je manque de me cogner la tête contre la table en me relevant brusquement. Tu te retiens pour ne pas rire.
- J’aimerais t’y voir !
Je tente de justifier ma position
- Un problème, Monsieur...
- Non, non, je ramassais juste la bille qui était tombée...
J’ouvre la main et la pose sur la table : nous sommes sauvés.
- Attendez, je vais vous en débarrasser.
Je ne dis rien, pris de court, et je vois disparaître le prétexte de notre petit jeu avec une pointe de regret. Tu tends la main pour me réconforter, amusée. A nouveau, nos doigts s’entremêlent. Mais alors qu’ils se séparent, tu laisses glisser négligemment ton doigt humide dans la paume de ma main. Mon coeur bat la chamade...
J’observe mon assiette de crevettes. J’en saisis une par la queue et commence à la sucer langoureusement. Il est hors de question que je sois le seul à être torturé. Je fais tourner le crustacé entre les lèvres. Je le goûte, le mordille. Il ressort pour être mieux englouti... Je le dévisage... j’envisage sa fin... je cherche la meilleure façon de rendre hommage au cuisinier qui l’a préparée. Enfin, je me décide : elle disparaît et je le croque une dernière fois avant de la confier à mon estomac affamé... J’ai de la chance : d’autres de ses soeurs m’attendent... Le filon n’est cependant pas éternel... alors je vais jouir de chacune comme si c’était la dernière...
Le spectacle ne t’échappe pas... Elles sont visiblement aussi à ton goût. Tu nappes chacune d’elle dans la sauce... elle goûte mais tu la ratts du bout de la langue. Tu la prends avec délicatesse en bouche. Tu la pinces de tes lèvres. Je vois ta langue tournoyer autour. Elle est un prétexte pour reprendre de la sauce... Cette même sauce qui enduit tes doigts... tu les portes à la bouche à leur tour. Tu les suces pour en récupérer chaque once...
Je dois boire... Ma gorge est sèche... Je vois ton visage onduler au travers du verre... J’ai chaud... Plus que la température de la salle ne peut le justifier.
J’en connais la cause...
L’état de nos assiettes témoigne de notre appétit. Nous vidons nos verres. Nos corps s’observent, se guettent...
Cette serveuse, si prévenante, se fait désormais désirer... Tu me sens tendu... Soudain, je sens quelque chose sur ma jambe. Ton pied remonte le long, heurte mon genou. Tu m’interroges du regard : je ne dis rien, comme si je n’avais rien senti. C’est presque un défi, un affront ! Tu insistes. Tu te rapproches de la table et en même temps, ton extrémité audacieuse vient se poser naturellement sur mon entre jambe.
Ta plante vient épouser à merveille la protubérance qui me depuis tout à l’heure. Mais tu as des doutes sur son authenticité. Ton pied ondule, tes orteils explorent, titillent. Je prends sur moi... Bien m’en a pris... car tu veux savoir... tu veux que je réagisse... J’écarte à mon tour les jambes... Mon pantalon devenu étroit révèle tout mon état. Tu insistes. Je resserre alors les jambes, et mon piège par la même occasion. Tu es désormais littéralement accrochée à moi. Un seul faux geste et tu glisseras de la chaise. Je n’ai pas envie que tu tombes et tu ne veux pas arrêter. Le massage que tu entames est une annonce de ce que tu voudrais me réserver.
Enfin, la serveuse revient.
- Un dessert , messieurs dames ?
Il y a longtemps que j’ai oublié ce que je voulais... j’aspire à un autre dessert...
- Que nous proposez-vous ?
- Une délicieuse salade de fruits frais : fraises, kiwi et pastèque.
Nous acceptons la proposition... la fraîcheur ne sera pas un luxe... Etrangement, nous dissimulons avec difficulté notre impatience à passer à autre chose...
Le repas terminé, je me lève en premier pour t’accompagner. Une rapide inspection autour pour s’assurer qu’aucun regard indiscret ne surprendra ta tenue. Caché derrière moi alors que je te fais face, tu rajustes ton paréo, le regard plongé dans le mien... Tu te retournes vers la table. Il reste quelques fruits dans ton assiette. Tu saisis une fraise du bout des doigts et tu l’écrases contre ton débardeur. J’observe, incrédule. Soudain tu t’écris :
- Oh mince, regarde, j’ai du faire tomber une fraise et je n’ai pas fais attention... Regarde cette tâche ! Il est foutu !
Je rentre dans ton jeu, sans trop en connaître les règles. Tes éclats de voix dans le restaurant, désormais presque vide, n’ont pas échappé à la serveuse qui passait non loin.
- Que vous arrive-t-il ? interroge-t-elle
- Regardez !
Tu lui exposes le résultat de ton imposture avec un aplomb qui me déroute.
- Il faut que je l’essuie dès que possible. Vous avez des toilettes ?
Elle te montre un petit couloir à droite de la salle. Tu t’y diriges.
- Je n’en ai pas pour longtemps, me lances-tu, avec un petit clin d’oeil.
Je commence à comprendre.
- Attends, je vais en profiter pour aller aussi aux toilettes.
Nous prenons congé de la serveuse qui nous assure prendre soin de nos affaires laissées aux dossiers de nos chaises. Je te suis, en contrôlant une impatience intérieure certaine.
Le couloir s'assombrit. Au bout, deux portes se font faces. Tu jettes un oeil derrière nous : la conformation du restaurant fait que personne ne peut nous voir. Tu prends fermement mon poignet et m’attire dans la pièce de droite. A peine la porte passée, tu me plaques au mur. Collée à moi, tes courbes épousent les miennes. Tes lèvres prennent possession de ma bouche. Ta langue s’y invite. Ta main glisse entre mes jambes, tandis que les miennes se posent sur ta chute de reins. Tu jauges avec précision ce que ton pied a deviné. Tu t'interromps pour observer autour. Sans un mot, tu me nappes et me pousse dans la première toilette. Une rapide inspection : elles sont d’une étonnante propreté et spacieuse. On n’aurait pas espéré moins dans un restaurant de cette réputation.
Cette fois, les rôles sont inversés : tu t’adosses au mur. Je m’agenouille. Tel devant un autel, je découvre ce tissu qui le protège. Ton intimité m'apparaît. Je m’en approche et respire cet effluve, mélange de vanille et de ton excitation. Mes mains l’entourent et j’y appose ma bouche. Ta respiration s'accélère. Ma langue curieuse commence son exploration. A mon tour, je m’assure de ton état. Ton nectar m'abreuve. Je suis à sa source... Nous assouvissons une pulsion, un besoin, une envie terrible... Tes doigts plongent dans mes cheveux... Tu me plaques à toi, tu encourages mon audace.
Mais la raison nous ratt. Depuis combien de temps sommes nous là ? A contre coeur, je dois me contenter des quelques lampées que j’ai pu te voler pour assouvir ma soif de toi.
Nous guettons le moindre bruit : rien. Je sors le premier. A pas feutrés, je me dirige vers la porte. Une dernière vérification et je sors. Dans le couloir, personne. Je t’invite à me suivre. Nous remontons le couloir en tentant de dissimuler nos émois.
Je règle la note alors que tu m’attends déjà à l’entrée. Je passe le bras sur tes reins pour accompagner ta marche. Dehors, la nuit est tombée depuis un moment. La température est douce. Le chemin vers la voiture me semble long. Je n’ose t’embrasser, risquant de provoquer une réaction incontrôlable.
Nous arrivons enfin à la chambre. Je sens la délivrance. Au bruit de la porte, nous reprenons notre étreinte. Ce ne sont pas tes vêtements qui me prendront beaucoup de temps à enlever. Tu t’écroules sur le lit. Là, droit devant toi, j'ôte à mon tour mes vêtements en ne perdant pas une miette du spectacle que tu m’offres.
- Tu sais qu’il faut toujours finir un repas par un fruit ? J’ai un délicieux abricot à te proposer...

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