44.2 Jérém. Stéphane. Thibault. Variations Sur Un Même Thème.
« Je ne te demande rien, tu sais
tu le sais que j'adore coucher avec toi... mais quand tu ne veux pas, surtout quand tu vas voir ailleurs et que tu le fais sous mes yeux... alors là, ne me demande surtout pas de t'attendre...
Je le vois sénerver
touché une fois encore, jai limpression que le navire a perdu le contrôle de sa trajectoire, quil dérive ; alors, comme un animal excité par le sang et par la peur de ladversaire blessé je continue, impitoyablement, cherchant langle de tir parfait pour mener le coup de grâce
Insatiable dans ma vengeance, limite cruel, profitant pour la première fois dune position de force vis-à-vis de mon con de beau brun, je décide de tenter un piège, une feinte
de faire durer mon « plaisir »
je vais lobliger à sortir à découvert pour mieux le frapper
mon but est de le terrasser comme lui il ma terrassé tant de fois
« De toute façon, à tentendre, il ny a aucun mec qui pourrait être bien pour moi
le mec de la piscine non plus ce nétait pas un mec pour moi
mais ce nest pas comme si tu avais ton mot à dire, Jérém
»
« T'as baisé avec le pd de la piscine? ».
Le piège a marché. Les dernières défenses du cuirassé Jérém ont sauté, le navire est à découvert, et ma puissance de feu le tient dans le cur de cible ; il ny a qua tirer pour couler lobjectif... cible inratable
Je nen ai pas assez
je deviens cruel
jai vraiment envie de savourer ma vengeance
« Le pd a un nom
il s'appelle Stéphane
» jassène froidement.
Ça le met encore plus en rogne. Je le vois et je men réjouis. Je sais quil attend ma réponse à sa question et je sais aussi que, quoi que je dise, soit il ne va pas me croire, soit il va me détester
alors jhésite... mais pas quant à ma volonté dasséner le coup de grâce, ça je ny renoncerai pas
Là où jhésite, cest surtout sur le type de munition à choisir
la plus douloureuse, celle qui consiste à lui dire que je n'ai pas baisé avec Stéphane, mais que j'ai fait l'amour avec lui, et ce pour la première fois de ma vie, lors dun après midi de rêve.
J'ai envie de tout lui balancer a la figure dans les moindres détails, de lui jeter à a figure ma sexualité, mon plaisir sans lui, comme lui il la fait si souvent et sans aucun scrupule ni respect vis-à-vis de moi
jai envie de lui faire mal, pour une fois que jen ai la possibilité
oui, jai envie de lui faire mal tellement il ménerve, tellement il mexaspère avec sa jalousie hypocrite et mal placée
Au final, dans un éclair de lucidité, je me dis que si une vengeance s'impose, un aveu partiel avec des circonstances atténuantes fera assez de dégâts dans sa fierté de mâle sans pour autant lanéantir comme le ferait un aveu complet de toutes les sensations nouvelles que cette rencontre, que ce garçon ont su mapporter
« Oui... jai couché avec lui dimanche dernier
» je finis par admettre, calmement mais fermement ; jai sciemment utilisé le mot « couché », le plus neutre qui soit, pile au milieu de la gamme qui va de « faire lamour » à « baiser » : je ne veux pas lui montrer que Stéphane ma apporté quelque chose que lui na jamais su mapporter, mais je ne veux pas non plus quil croit que ce garçon nest quun simple coup de queue comme il semble laffirmer à travers de son mépris
Oui, je suis diplomate, mais avec modération, une modération qui semble par ailleurs soudainement sabsenter lorsque je crois bon ajouter, comme un pied de nez :
«
mais tinquiète, jai mis une capote
».
Plus tôt dans la semaine
Le lendemain matin, jeudi, je me réveille aussi mal en point que je métais bien réveillé la veille
je sais que je noserai pas aller sonner à la porte de Stéphane, je ne connais même pas son emploi du temps, et je sais désormais que je narriverai plus à le revoir avant son départ
Jai du mal à ressembler mes pensées, à me sortir du coltard dune nuit difficile, et pour arranger le tout, le portable na cesse de couiner
les sms autour de la soirée pleuvent et je nai vraiment pas envie dy répondre
je nai pas les yeux en face de trous, jai la tête dans le q
je persiste à faire le mort
vers dix heures le tel sonne
je ne réponds pas
il sonne une deuxième fois
je ne réponds pas et je le mets en vibreur
un instant plus tard il se met à vibrer
ça magaaaaaaaace !!! Pourtant
Pourtant cest là que je commets la bêtise de répondre.
Ce qui ménerve le plus dans lhistoire, cest quelle parle comme si ma participation était acquise
elle ny est pour rien, elle ne sait rien de ce qui se passe entre moi et un autre camarade de classe, mais ça magace
Bodega
Esmé
ces mots résonnent dans ma tête comme des déflagrations
rien que lidée de retourner à lEsmé après la fameuse soirée dil y a quelques semaines, me parait définitivement hors de ma portée
Elle me saoule, mais je nai pas la force de me battre, alors je finis par me laisser faire
je lui confirme ma présence, même si je vis cela comme du harcèlement
elle maura eu à lusure
je nai pas envie de lutter, au pire je trouverai une excuse à la dernière minute ou je poserai un lapin, de toute façon personne ne va remarquer mon absence
Je finis par me lever, mais je sais déjà, rien quen posant le pied sur le parquet, que ça va être une journée de merde
je suis contrarié par le rendez vous manqué de la veille, et encore plus contrarié davoir laissé Laura membarquer dans cette putain de soirée
mais par-dessus tout je suis agacé par le bordel qui remue sans cesse dans ma tête
je me traîne toute la matinée sans me décider à mattaquer à quoi que ce soit, en attendant midi
et surtout lheure de la sieste
Mais rien ne va ce jour là, je rate même le petit somme de laprès midi
je me lève, je reprends un café, me revoilà en mode zombie
errant de pièce en pièce, le mal au crâne qui persiste et qui me plombe lesprit, qui me rend incapable de réfléchir, incapable de prendre une quelconque initiative pour éviter quune belle journée de soleil et de vacances se retrouve gaspillée dans une morosité inéluctable
Heureusement Internet est là
les vidéos, bien que pourries, dune date du DW Tour passent sur lécran de mon ordi me donnant un avant goût de ce à quoi je vais assister
« Ray of light » et « Music », ses deux derniers bébés électroniques résonnent dans ma chambre
oui, sa voix et elle seule, a le pouvoir magique de mapaiser
Je sens que je glisse sur une mauvaise pente
pas dsms, son départ approche : Stéphane séloigne
samedi avance à grand pas, mon inquiétude avec : collision avec le beau brun inévitable
le coté obscur de la force me guette
Je nai pas envie daller à cette soirée, mais je sais au fond que je serai incapable dy renoncer
alors la grande question se pose
comment le retrouver après tout ce qui sest passé samedi dernier ? oui, comment le retrouver après ce que je lui ai chuchoté à loreille, après lui avoir avoué dans les moindres détails toute ma soumission à sa queue, après mêtre rabaissé à assumer, à verbaliser avec des mots crus, mon rôle de salope à lui ? comment le retrouver après quil mait balancé à la figure daller me branler tout seul aux chiottes ? après son regard provocateur, insolent et blessant pendant quil embrassait sa pouff
Et surtout, comment le retrouver après lhumiliation de le voir partir avec les deux nanas et son pote Thibault, après avoir remué, bouilli à lintérieur en imaginant la nuit quils allaient passer ? après avoir imaginé son plaisir sans moi ? après avoir ressenti lextrême jalousie de penser à Thibault en train de le mater prendre son pied, tout aussi forte que celle de limaginer en train de mater Thibault prendre le sien
une jalousie, celle de savoir les deux garçons nus tous proches dans le même lit, qui aurait même tendance à la faire passer au deuxième rang celle de le savoir en train de baiser les deux pouffes
je crois que cest bien cela qui ma fait le plus mal
le fait dimaginer les deux coéquipiers nus dans la même pièce, leurs corps en sueur, pris dans une excitation qui pourrait leur donner des idées pour la suite
les imaginer dans le même lit après que les deux nanas soient parties
pour peu quElodie ait raison au sujet des sentiments que Thibault éprouverait pour Jérém
et pour peu que Jérém boive un verre de trop, queutard comme il lest dans ces moments là
Arrête donc Nico, tu te fais du mal
Maintenant que je réalise que je vais le voir samedi, tout remonte en moi, et la colère avant tout, beaucoup, beaucoup de colère
alors, quelle attitude adopter ? Lignorer, en me disant tout simplement que cette soirée nest quun mauvais moment à passer, que de toute façon nos vies vont nous éloigner et quà lavenir il ny aura plus de raisons de nous croiser ? Oui, lignorer, sage stratégie, stratégie de défense
mais que faire en revanche, si je suis la cible dune attaque délibérée
si je reçois un de ses regards charmeurs en pleine figure ? Et sil vient me causer ?
Jappréhende vraiment la soirée de samedi
jai une boule au ventre et, bien que mort de fatigue, je décide daller marcher pour me détendre
je sors de chez moi et là surprise
Le vent dautan sest à nouveau levé
il souffle de façon insistante et il semble augmenter dintensité de minute en minute
et ça, ce nest pas fait pour me rassurer
je naime pas ça
je suis inquiet
quand le vent dautan souffle aussi fort, jai toujours limpression quil veut mannoncer quelque chose, mais je narrive pas à savoir quoi évidemment
oui, quelque chose va se passer, mais quoi, ça je ne le saurai que plus tard, bien plus tard dans la semaine
Je marche sans but, jonglant dans la foret épaisse de mes pensées, me laissant probablement entraîner par mon (in)conscient
je suis trop fatigué, je narrive plus à maîtriser mes émotions, encore moins que dhabitude, ce qui nest pas peu dire
je remonte ma ville de rue en rue, je remonte ma vie, de souvenir en souvenir
sans trop savoir comment et pourquoi, je me retrouve dans le quartier de la Halle aux Grains
Stéphane me manque, et lorsque japerçois lentrée de son immeuble, me voilà à nouveau à deux doigts daller sonner à sa porte
jai besoin de le voir
il ny a que lui qui saurait moffrir le câlin quil me faut à cet instant pour me remonter le moral, pour me retrouver
japproche du seuil, je ralentis mon pas, je jette un il rapide dans le hall inanimé et sombre
je marrête
jhésite en regardant son nom sur lune des sonnette
ce nest que lespace dun instant, je repars, je nai pas le courage de le faire
je me dis que de toute façon à cette heure là il doit être au taf
Alors je trace
je parcours les petite rues, et je me retrouve à St Aubin
ça sent le danger, japproche du feu
rue de la Colombette nest quà quelques pas, lentrée dun autre immeuble bien connu est si proche
je suis tiraillé entre le désir de tourner au large et celui de mengouffrer dans le Chemin de Traverse
cest con, cest irrationnel mais jai envie de passer devant cette porte que jai tant de fois franchie la respiration coupée, le cur hors de la poitrine
le danger me guette
et si je le croise ?
Le temps que je me pose toutes ces question auxquelles je ne sais pas répondre, mes jambes mont amené toutes seules devant sa tanière
je panique, je leur ordonne de mamener vite loin de là, elles mobéissent
hélas, ma tête nen fait quà sa tête, mon cou se relève, mes yeux accrochent cette terrasse bien connue
le cur bondit de ma poitrine
je crois déceler un mouvement là haut
Jai limpression davoir vu un bout de cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc disparaître à linstant précis que mon regard sy pose
on est en milieu daprès midi, peut être bien quil est en pause
en train de fumer une clope en terrasse
est-ce quil ma vu avant que je nose lever la tête ? est-ce quil ma vu et quil sest retiré pour ne pas croiser mon regard ? est-ce quil a ressenti ma présence dans la rue comme un harcèlement ? ou alors, est-ce que jai rêvé tout simplement ?
Instinctivement, pour en avoir le cur net, je relève mon regard de façon bien imprudente
je prends un risque de plus de croiser son regard
hélas, je dois admettre avec soulagement plutôt contrarié que la terrasse est vide, tristement vide
Le cur tapant de grands coups dans ma poitrine, je trace vite vers le Canal et je méloigne à grands pas du Chemin de Traverse
ce nest quen arrivant à la Gare Kings Matabiau que jarrive à me calmer un peu
je rentre dans le hall et je me perds dans la foule des voyageurs
envie de prendre un train et de partir loin, très loin de là
mais le Pourdlard Express a du retard, alors je mapproche dun comptoir et je prends un café
je me pose sur un banc et, assis face au grand tableau des Arrivées et des Départs, regardant les gens défiler devant moi et buvant mon café, jessaie de ranger un peu le bazar qui encombre ma tête
Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane
Stéphane, Jérém
Stéphane, ladorable garçon qui ma fait découvrir ce quest faire lamour
Jérém, le mâle serial insatiable qui ma fait découvrir le plaisir de la baise avec un étalon dominant
Stéphane qui ma montré que les câlins cest trop bon, Jérém qui refuse toute tendresse
Stéphane qui ma appris que jaime jouir comme un mec
Jérém qui ma appris à quel point cest bon de faire jouir un mec
Stéphane que je trouve touchant, Jérém que jai dans la peau
Stéphane charmant et adorable, Jérém le petit con ultrasexy à gifler
Stéphane calme et posé, gentil, rassurant
Jérém impulsif et sanguin, imprévisible, parfois agressif
Stéphane attentionné, doux, Jérém dur, parfois brutal
Stéphane avec qui lamour est partage
Jérém pour qui il ny a que son plaisir qui compte
Stéphane sexy et adorable, fougueux et généreux
Jérém sexy et odieux, macho et égoïste
Stéphane avec qui tout parait possible, Jérém avec qui il ny a que la baise de possible
Stéphane qui me respecte, Jérém qui fait de moi ce quil veut
Stéphane au regard doux et bienveillant, Jérém au regard viril et fuyant
quartier de la Halle, rue de la Colombette, Jérém la baise, Stéphane lamour
la balade au Jardin des plantes
la baise à la piscine
le risotto
la baise au terrain de rugby
le dvd dAladdin
la baise dans les chiottes du lycée
me sentir bien dans des bras chauds, me sentir bien défoncé par sa queue bien chaude
la serviette verte de Stéphane
le t-shirt blanc de Jérém
les images senchaînent et saccélèrent dans ma tête, ça va si vite que jai du mal à gérer
je me pers, jen ai la tête qui tourne
Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane et
Paf !
Ça bogue méchamment
tout se bloque dans ma tête, les images sarrêtent, plus de signal, lécran devient noir
ça dure un petit instant, le temps que je rouvre les yeux et que je termine mon café
je mabandonne sur le dossier du banc, je respire profondément
et là, une petite voix se fraye un chemin dans ma tête
elle chuchote quelque chose
cest un tout petit message, mais il est si dur à admettre
je secoue la tête, je tente de la faire taire
je me lève, je marche, jarrive à la distancer un peu, mais elle me suit de près
je fais semblant de ne pas lentendre, mais elle ne me lâche pas
Jai la tête comme un tambour, je suis terrassé par la fatigue
je décide de rentrer en faisant un grand détour pour éviter toutes les tentations et les rencontres inopportunes
marcher me fait du bien, jarrive à détourner lattention de mon esprit, de ses troubles
mon odyssée vers la maison mamènera à léglise de St Sernin, me fera transiter sur le pont St Pierre, mon préféré avec son élégante architecture métallique ; me fera continuer vers St Cyprien, avant de rejoindre enfin le Fer à Cheval et ma maison
Commencée avec deux branlettes au réveil, après une nuit guère meilleure que la précédente, la journée de vendredi promet dêtre longue
je vis dans lattente, je ne suis que dans lattente
lattente dun sms de Stéphane qui ne vient pas, lattente de la soirée du bac, de revoir Jérém, lattente de savoir ce que je vais ressentir à ce moment là, lattente de voir comment ce petit con va se comporter vis-à-vis de moi
oui, je suis dans lattente que le temps sécoule
Mais lattente la plus insoutenable, celle qui a le pouvoir déclipser et dapaiser toutes les autres, est celle du concert de Madonna
oui, plus que quelques jours avant le Drowned World Tour
Drowned World, le monde englouti
quand je dis que Madonna est la bande son de ma vie
plus que quelques semaines et mon monde actuel sera englouti sous une vague de départs, de changements, de bouleversements tous azimuts
mon enfance est en train de partir loin, très loin, ma vie de jeune adulte se profile, approche à toute allure, cest une page vide ou tout est à écrire, à remplir, avec dautres temps, dautres rythmes, dautres gens, dautres amours
excitant et terrifiant à la fois
Mais en attendant, encore je narrive par à croire que je vais la voir en chair et en os
lattente est insoutenable
jai besoin découter la voix de Madonna mais jai besoin aussi de sortir de ma chambre
il fait beau et jai envie, jai besoin de me dépenser pour vider ma tête et détourner mon attention de ma montre et laisser le temps passer
Cest ce jour là que jachète mon premier baladeur mp3
si cest pas le bonheur ça
de la musique quon amène partout, en grande quantité, en bonne qualité audio, sans avoir à se trimballer ni cd ni cassettes, dans un boîtier tout petit à qui il ne faut pas changer les piles toutes les cinq minutes
non, le mp3 ce nest pas le bonheur
cest carrément le pied !
Armé de mon baladeur soigneusement casé dans un brassard livré avec la bête, je vais courir le long du Canal du Midi en compagnie de Madonna
je confirme, sa voix a le pouvoir de mapaiser, sa musique le pouvoir de me faire rêver
je cours et je marche de longues heures, je me dépense beaucoup et ça maide à maérer lesprit
Lexercice physique est propice à changer les idées
leffort nous accapare, notre corps réagit en vidant notre cerveau de son énergie pour la réserver aux membres sollicités, jambes, cuisses, bras
lorsque lon fait du sport, la tête se vide de tout ce qui laccablait auparavant
cest comme un redémarrage de Windows, une fois quon a éteint et fait repartir la machine, tout a lair de tourner mieux pendant un moment
comme les logiciels, les idées qui étaient en conflit entre elles le sont toujours, mais puisquelles reviennent dans un ordre différent que celui qui les avait conduites à boguer précédemment, elles sagencent autrement
cest pour cela que après leffort, on a limpression de voir les choses autrement
Au bout de deux heures de course et de marche je me pose sur un banc à lombre et jessaie de ressembler mes idées
Dans lordre
cest vendredi après midi, et depuis mercredi soir, je nai eu de message de Stéphane que celui annonçant lannulation de notre rendez vous
toujours pareil, je ne lui en veux pas, je comprends que cest une période chargée pour lui
pourtant il me manque, et je sens que dans ce silence je dérive
par moments des images remontent à ma mémoire et jai limpression de pouvoir rattr mon état desprit de dimanche soir, je le sens tout proche, à ma portée
Jessaie de retrouver sa tendresse, ses sourires, leffet de ses caresses, mes émotions, la sensation davoir été plongé dans une autre vie, dans une autre dimension
un autre espace-temps dans lequel jai découvert que je peux être désiré, que lon peut avoir envie de me faire plaisir, que lon peut me trouver attirant et désirable
que mon besoin de tendresse et de câlins peut être partagé
jessaie de retrouver le sentiment puissant, incroyablement puissant, bouleversant
le sentiment que lon pourrait maimer pour ce que je suis
ses mots avant de nous quitter résonnent dans ma tête comme la plus belle des mélodies.
«
tu as le droit dêtre heureux
tu as le droit daimer et tu as le droit de te sentir aimé
Nico, tu es un très beau cadeau... prends confiance en toi
tu vas y arriver, tu vas la trouver ta place
pour peu que tu croies en toi
il faut que tu croies que tu as le droit d'être heureux, avant que les autres puissent te reconnaître ce droit
sois toi même, ne laisse pas les autres choisir pour toi
tu es un bon gars, même trop bon, trop gentil, fais attention que cela ne te joue pas de tours
fais attention aux gens que tu vas rencontrer, surtout dans le milieu, car il ny a pas que des gentils
la mauvaise herbe nique souvent ce qui est trop bien cultivé
fais gaffe à ne pas te perdre, même pas par amour
veille toujours à rester toi-même
à tout donner mais à ne pas tout accepter par amour
et si un jour tu as besoin de quelquun pour parler, je serais toujours là pour toi
toujours
».
Cest bien touchant, et ça fait vraiment chaud au cur, ça donne carrément des ailes que dentendre cela à ce moment de la vie
à 18 ans, cet age durant laquelle on se cherche et on cherche lamour
oui, ça fait un bien fou quun mec de 26 ans nous prenne par la main, nous guide, nous apprenne, nous rassure, nous dise de ne pas avoir peur, nous montre quon a droit au bonheur, le droit dêtre soi même, quil nous tende une main en cas de besoin
cest beau, plus que beau, comme une révélation
Pourtant, au fur et à mesure que le samedi approche, je repense de plus en plus souvent à Jérém
je sais quil ne faudrait pas, que je suis en train de trahir les belles promesses de dimanche soir, les promesses dune nouvelle vie, la promesse de retrouver ma liberté et de reprendre ma vie en main, et par-dessous tout cest moi-même que je suis en train de trahir
Jai beau me dire quil ne faudrait pas que je cède à mon envie de lui céder
quil faut que je garde en moi le feu sacré que jai ressenti quand jétais dans les bras de Stéphane
quil ne faut pas que je laisse échapper trop loin de moi cet état de grâce, cette détermination à reprendre le contrôle de ma vie, de le reprendre des mains de
Jérém
pourtant je sens que ma volonté vacille
« leffet Stéphane » diminue dintensité au même rythme que « leffet Jérém » me ratt
jai tellement besoin dune piqûre de rappel, mais comme elle ne vient pas dans le délai, ma couverture vaccinale est insuffisante
ses effets vont séteindre
Oui, par moments des images remontent à ma mémoire et jai limpression de pouvoir rattr mon état desprit de dimanche soir
jessaie de men saisir, jai besoin de le garder avec moi, de lenfermer dans mon cur
mais à chaque fois il senvole, disparaît, séloigne
Soudainement un souvenir lointain se présente à moi venant de nulle part
cest un jour de mon enfance, un jour dété, je devais avoir pas plus de 6 ou 7 ans, jétais à la campagne chez mes grands parents
il venait de faire de lorage et voilà que, la pluie ayant cessé, un énorme, magnifique arc-en-ciel bien lumineux venait dapparaître
ce jour là, jétais bien décidé à pédaler sur mon vélo, autant quil le faudrait, pour atteindre lun de ses pieds
oui, je voulais aller là ou larc-en-ciel se pose, prend naissance
je ne sais pas pourquoi je métais donné cet objectif, ce que je voulais y découvrir, mais trouver le pied de larc-en-ciel me semblait chose intéressante
je me souviens davoir pédalé longtemps, encore, encore et encore, jusquà lépuisement, davoir avancé sur les sentiers en terre battue qui sillonnaient la campagne jusquà une heure où mes grands parents avaient commencé à sinquiéter pour moi
javançais droit vers mon but, inlassablement, mais plus je pédalais, plus javais limpression que ma cible séloignait
Cest un peu le sentiment que jai vis-à-vis de mon état desprit de dimanche dernier
jessaie daller à sa rencontre, mais plus je my efforce, plus jai limpression que je serre ma main pour attr un fantôme
Si seulement Stéphane ne devait pas partir si tôt, si loin
si seulement Jérém devait partir, lui, à sa place, dans quelques jours, au lieu de rester dans mes pattes tout lété
avec Stéphane à mon coté, je crois que mon bonheur serait vraiment à portée de main
mais Stéphane séloigne et Jérém est toujours là, si loin de mon cur, mais si physiquement près
Et force est de constater, de réaliser et dadmettre que, assis sur ce banc à lombre des platanes qui bordent le Canal, je me fais violence pour ne pas céder à lenvie de me rendre rue de Metz
cest une envie qui me chatouille depuis le début de la semaine mais que javais réussi à anesthésier avec ladrénaline qui alimentait mon état de grâce dans lattente du rendez vous avec Stéphane ; une envie qui ma cueilli de façon vive et brûlante après lannulation de notre rendez vous ; une envie qui a explosé en moi la veille, lorsque jétais assis dans le Hall de la Gare Matabiau, après cette image furtive cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc que jai cru capter rue de la Colombette
une envie qui, dès lors, est en train de me ronger de lintérieur comme un vers de bois ; une envie qui ma carrément harcelé depuis le réveil ce matin
Une envie à laquelle je tente de résister du mieux que je peux
hélas, cette envie est en moi, et quoique je fasse, elle ne me quittera pas
de plus je suis fatigué, depuis le week-end dernier je ne fais que creuser mon déficit de sommeil, alors il mest tout particulièrement difficile de mopposer à mes démons intérieurs et aux tentations
surtout lorsque la tentation est si forte
et là, la tentation est forte, et plus que ça
il est si près de moi, je peux le rejoindre à pied en quelques minutes
alors, très difficile de résister, surtout lorsquon est si peu occupé que je le suis à cette période
Je suis au bout de mes forces, mais jemploie toute mon énergie pour soutenir ma volonté de ne pas y aller
en allant courir de longues heures durant sur le Canal, Madonna à fond dans mes oreilles, pour essayer de loublier
hélas, il y a bien un moment où mon énergie ne suffit plus, ma volonté ne suffit plus à faire taire mon désir de plus en plus débordant au fur et à mesure que je le malmène
non, ma volonté ne suffit plus quand, dans mon esprit, Jérém
redevient soudainement MON Jérém, mon (con) de beau brun
Il faut que je voie mon beau brun
il me manque
putain
il me manque
oui, il faut que je le voie
cette idée saffiche en moi comme une évidence
il faut que je le voie avant la soirée, il me faut savoir si je suis toujours assez fort et déterminé à me passer de lui
ok, je ladmets, je suis une boule de contradictions, cherchez lerreur
Il faut que je le voie
mais comment my prendre ? Y aller franco
minstaller tout seul en terrasse, lui commander une bière
même pas la peine dy penser, je noserais jamais
y aller avec ma cousine, en admettant quelle veuille bien maccompagner, ce qui est par ailleurs loin dêtre gagné
ça non plus je noserais pas
juste passer dans la rue, lair dêtre là par hasard
jaurais surtout lair dun con
je pense quà ce stade de notre « relation », rien ne va plus, surtout en labsence de ce charmant Thibault dont la simple proximité a le pouvoir de rassurer et dapaiser le beau brun
Pourtant jai très envie de le voir, même de loin
très très envie, même
ce dont je nai en revanche aucune envie, cest de me taper un numéro de pauvre type qui piste le mec par qui il sest fait jeter et dont il est toujours fou amoureux
Comment faire alors ? Avec la ruse.
Le temps de rentrer chez moi et de prendre une douche, jembarque à quelques arrêts de la rue de Metz aux alentours de quatre heures
ladrénaline monte à lapproche du déjà célèbre abribus juste à coté de la brasserie
le temps darrêt est court, il ny a pas grand monde qui descend et une seule personne qui monte
pas de Jérém en vue
javance de quelques arrêts, je descends et je reprends la même ligne en sens inverse
on approche à nouveau du fameux abribus
Et cette fois ci, la chance semble plus favorable à mes projets
le voilà le beau brun, je le vois de dos et de loin, il est en train de rentrer avec un plateau, son torse est habillé dun tissu blanc, je crois que cest une chemise
miaaaam
je veux voir ça de plus près, de beaucoup plus près
jai même envie de le lui arracher
hélas, le bus est de lautre coté de la chaussée, ainsi jai du mal à saisir les détails, et ma curiosité en est bien attisée
Un autre aller en bus, et ce coup-ci cest le bon
voilà quun ensemble déléments, un ralentissement dû à un feu rouge, combiné avec le fait que dans ce sens de la ligne le bus se trouve à nouveau du bon coté de la chaussée, me permet de détailler le beau serveur
oui, mon beau serveur, avec ses cheveux bruns sculptés dans un brushing de mec, avec cette chemise blanche, une chemise bien ajustée, les manches retroussées à hauteur des biceps, un bout du tatouage qui dépasse, le reste je le devine
deux boutons ouverts sur son cou à la peau mate et entouré par cette chaînette de mec si sexy qui se balade en dessous de sa pomme dAdam
jarrive même à distinguer son grain de beauté si mignon au creux de son cou
Et je ne peux pas non plus me taire au sujet de son pantalon noir plutôt class et plutôt moulant son joli cul, et davoir enfin une mention spéciale pour ses baskets bleues
ça fait bizarre et ça fait mal de le voir si loin de moi, ce mec avec qui jai couché tant de fois et avec qui je ne coucherai plus, ce mec qui samedi dernier, au lieu de me dire adieu avec une dernière bonne baise, sest payé un plan à quatre avec son meilleur pote
ça fait mal et ça me donne envie de hurler de voir deux filles assises à une table de la terrasse en train de le brancher
Jérém qui rigole avec elles, qui les allume par sa simple présence, les nanas qui minaudent
cest révoltant
je ten conjure
lâche laffaire, Jérém, tu ne vois donc pas que ce ne sont que des pétasses ?!?!?! pardon les filles, je sais que je ne suis pas objectif
mais quand vous branchez mon Jérém, vous êtes toutes des pétasses !!!
Le bus repart, me laissant frustré et contrarié par cette image de Jérém en train de flirter avec deux pou
avec deux clientes, admettons
ce nest pas raisonnable de reprendre le bus une fois de plus pour le mater encore
non, ce nest pas raisonnable mais est-ce pour autant une bonne raison dy renoncer ?
je ne crois pas
un quart dheure plus tard me revoilà dans le Magicobus 46, après avoir fait un joli détour pour le prendre dans le sens qui me permet dapprocher le beau brun au plus près
Et rebelote
même scénario que tout à lheure
ralentissement de la circulation, le bus qui sarrête pas loin de la terrasse
les secondes passent et le bus ne bouge pas
ça klaxonne dans la rue, mais rien navance
mon beau brun est toujours en terrasse avec sa chemise blanche aux manches retroussées qui lui va comme un gant et qui lui donne un coté « mec bosseur, fonceur » et « mec tout court »
il est juste à se damner
Il est plus près de la chaussée que tout à lheure, alors je peux capter encore plus de détails
et cette chemise blanche, mon dieu cette chemise blanche
naaaan, mais ça cest juste
pas possible
ça devrait être interdit dêtre aussi sexy
cette nouvelle tenue me fait bouillir
mon regard plonge dans ce col outrageusement ouvert jusquà laisser non seulement deviner mais carrément montrer lentrée de la douce vallée qui sépare ses pectoraux, cette vallée sur laquelle sa chaînette de mec se pose comme un chemin sinueux, un chemin du bonheur en quelque sorte
Oui, il est là, en train de papoter, car à cette heure là il ny a pas grand monde en terrasse
et cette fois ci ce sont deux mecs qui semblent le brancher
mon beau brun sourit, charmeur
mais foutez lui la paix, vous aussi, les deux pouffiaux !!! Vous nêtes pas quand même en train de le brancher sur un plan à trois
ah, non, hein, non, pas ça, bas le pattes, bas les pattes !
là je ne bous plus
je suis proche de lexplosion
je sens monter en moi une envie irrépréhensible de descendre du bus et aller me manifester, pour crier « hein, je suis là, jexiste »
non, je ne me sens pas capable daller lui faire une scène, mais je me sens tout de même capable de minstaller à une table et de lappeler pour ma commande pour casser ce petit jeu à trois
Certes, je nai aucun droit de le faire, au fond je ne sais même pas sils sont vraiment en train de le draguer, et surtout qui suis-je pour lui pour lui faire une quelconque morale ? Mais lenvie est pourtant bel et bien là
labribus nest pas loin
ça me démange vraiment de descendre et de me pointer à sa terrasse pour voir sa réaction
je suis en train de chercher lappoint de courage qui me manque pour me lancer dans mon projet, lorsque les événements tranchent pour moi une fois encore, coupant court à mon hésitation
le bus avance
cest parti
mais pas pour longtemps
il navance que de quelques mètres et il sarrête pile à hauteur de la terrasse
je ne suis quà quelques mètres du beau brun et à un moment jai limpression de le voir tourner légèrement la tête vers le bus
et le pire cest que jai même limpression que son regard accuse comme un soubresaut
je me demande sil a pu me capter
non, pas ça, pitié
instinctivement, je recule mon torse et je me cale derrière le montant du bus
le cur qui tape à mille à lheure, ça va de soi
Un instant plus tard le bus repart, avance de quelque mètres pour sarrêter à labribus
et ce nest que lorsquil repart, après un arrêt qui me parait interminable, que je me sens enfin soulagé
évidemment, le courage pour descendre à labribus et daller faire un esclandre silencieux en terrasse sest évaporé au contact de la puissance à peine effleurée du regard et de la présence du beau brun
mon cur fait des bonds tellement puissants dans ma poitrine que jai limpression de le voir apparaître par intermittence et en relief, comme dans un dessin animé
Le bus avance et mon cur nen finit plus de taper dans ma poitrine
je suis assis mais je sens que rien que le fait davoir eu si peur de me faire gauler, jai du mal à respirer, jen ai les jambes en coton
ce sont des jambes en coton qui, je le sens, ne vont plus le quitter jusquau lendemain soir
ça y est, je viens tout juste de lapercevoir, sans me retrouver en sa présence
je nai pas entendu sa voix, ni senti son parfum, ni vraiment croisé son regard ou son sourire
et je suis déjà dans cet état là
Jappréhende la soirée du lendemain
mes derniers messages à Stéphane sont restés sans réponse
je me sens seul, abandonné à moi-même
jai besoin de lui, jai besoin « quon me tienne la main » pour ne pas faire de bêtises
plus le temps passe, plus la soirée du bac approche, et moins je me sens assuré sur mes jambes
où est-elle passée ma force, ma résolution, ma détermination, le vent de mutinerie, mon esprit « rebel heart » de dimanche soir ? Est-il tout simplement disparu pour laisser place à cette angoisse, à cette faiblesse retrouvée ?
De plus, voilà que, depuis la veille, le vent dautan souffle sans discontinuer
et maintenant je sais que lorsquil se lève et quil souffle si puissant, cest quil veut mannoncer des choses
des choses puissantes, quelles soient bonnes ou mauvaises
Et toujours les mêmes questions qui tournent en rond dans ma tête
ce sont pile les mêmes interrogations que celles du lundi lorsque javais imaginé le croiser à laffichage des résultats du bac
oui, les mêmes questions, mais en plus puissantes
car lundi jaurais pu lignorer, repartir juste après avoir vu mes résultats
mais là je suis censé passer une longue soirée au même endroit que lui
des endroits confinés, la Bodega dabord, lEsmé ensuite
Est-ce quil va être là, dabord ? Quelle attitude va-t-il avoir vis-à-vis de moi ? Va-t-il venir me parler comme si tout était normal ? Il en est bien capable, ce nest pas le culot qui létouffe
non, ce mec na pas froid aux yeux
son approche va-t-elle être une sorte de nouvelle humiliation pour mon amour propre, son attitude de samedi dernier va-t-elle rester une fois de plus impunie devant mon incapacité à faire entendre ma voix ? Vais-je ressentir une fois de plus la frustration de me laisser faire, de me sentir piétiné sans savoir réagir ? Est-ce quil va essayer de me rattr pour que je lui vide les couilles une fois de plus ? Ou alors, tout simplement, va-t-il me monter rien dautre que de lindifférence ?
Oui, tout un tas de questions légitimes, des questions qui clignotent de plus en plus fort dans mon esprit monopolisant toute mon attention et tout mon être et se résumant à une seule et unique interrogation, celle de départ : comment retrouver Jérém après samedi dernier ?
Une idée lumineuse se manifeste soudainement à la surface de mon esprit pour tenter de répondre à cette épineuse question : peut-être en retrouvant Thibault dabord
Je repense aux mots dElodie
«
si tu veux avoir une chance de garder un peu plus longtemps ton con de brun, tas tout intérêt à saisir la main que Thibault est en train de te tendre
»
Jai un grief contre lui, mais je sais que ma cousine a raison. Certes, je lui en veux pour avoir pris part à ce putain de plan à quatre, mais au fond, elle a raison, ce nest rien que la normalité pour des garçons de leur âge
des garçons qui ne font que profiter à juste titre de la vie, de leur jeunesse
certes, il a vu Jérém à poil en train de baiser, mais après tout,ce nest pas comme sil avait baisé avec lui
jaurais tellement voulu pouvoir assister à cette scène
deux bogoss en train de jouir côte à côte
Laisse tomber, Nico, tu te fais du mal
Oui, je pense quil serait bon de rencontrer Thibault avant de revoir Jérém
peut-être quen discutant avec lui, ça mapaiserait
peut être quil saurait trouver les bons mots pour soulager langoisse qui me secoue de fond en comble
Je descends du bus à larrêt du Pont Neuf et je me mets à marcher en direction de la gare Matabiau
je réalise que jai la moitié de la ville à traverser, et que je pourrais prendre un autre bus
mais je préfère marcher
il est encore tôt, je vais arriver juste à temps pour le croiser à la sortie de son taf
jai besoin dun peu dactivité physique pour trouver le courage dapprocher le beau mécano
non pas que jappréhende particulièrement de provoquer une rencontre avec Thibault, même si cest en forçant un peu le destin
le mec est mille fois plus accessible que Jérém, et je sais que je nai pas à craindre de lui de réactions hostiles, je sais quil va bien maccueillir et que je vais avoir droit à un beau sourire
ce que je me demande en revanche, cest sil ne va pas éprouver un certain malaise vis-à-vis de moi après ce qui sest passé le week-end dernier
surtout si, comme le dit Elodie et comme je le conçois aussi, il a deviné pour moi et Jérém, et quil simagine mes sentiments pour lui
et ma jalousie qui va avec
Mais par-dessus tout je me demande aussi si je vais pouvoir tenir bon, ne pas me montrer blessé
lui cest pareil
comment vais-je le retrouver après ce qui sest passé samedi dernier ? Vais-je avoir la force de faire comme si de rien nétait, comme si le fait quil se soit envoyé en lair avec son pote et deux nanas ne me dérange pas alors que ça me met hors de moi ? Vais-je lui en parler pour avoir des explications ? Dailleurs, de quel droit lui demanderais-je des explications, encore moins à lui quà Jérém, alors que cette partie de jambes en lair nà, à bien y réfléchir, rien de reprochable? Vais-je lui parler ouvertement de ce que je ressens pour Jérém
comme le suggère Elodie ? Vais-je trouver en lui un allié dans ma quête du « Graal », le cur de Jérém ? Vais-je au contraire me faire rire au nez ? Vais-je trouve un allié ou un adversaire, au cas où il aurait lui aussi des vues sur le beau brun, ce que ma cousine semble suggérer, ce qui parait somme toute assez réaliste, car je sais par expérience que dans ce genre dintuition, elle se trompe très rarement
Le Pont Neuf, le lycée que je ne fréquenterai plus, les Jacobins, la Place du Capitole, la rue du Taur que jadore pour son allure dendroit plongé dans un autre temps ; jarrive à St Sernin, mon église toulousaine préférée avec St Etienne. Je traverse le boulevard de Strasbourg, la place Jeanne dArc et je file droit dans la rue pour mapprocher du garage où bosse Thibault
Je connais à peu près ses horaires depuis que je lai croisé une semaine et demi plus tôt rue dAlsace-Lorraine à la fin de la journée boutiques avec Elodie
pourvu quil ne termine pas plus tôt le vendredi
cest 17 heures et pour me donner le plus de chances de ne pas le rater, je rode dans les rues adjacentes
Il y aurait plein de façons de le rencontrer plutôt que de le pister, genre passer un coup de fil, envoyer un sms
oui, jai son 06
mais je ne veux pas donner limpression de provoquer cette rencontre, dans ma tête jai envie à que ça ressemble plutôt à un coup du hasard, même si à un hasard un peu , car ma présence à cette heure là dans ce quartier là, ressemble quand même à une intention de le croiser
mais quimporte, le coup de fil ou le sms ne figurent pas dans la liste des options possibles
car il faut bien ladmette, quelque part mon amour propre soppose à mon projet daller à son encontre, mon amour propre demeure blessé
Javance dans la rue sur le trottoir opposé jusquà que la devanture du garage ne me soit à portée de vue
je suis encore à plusieurs centaines de mètres et je vois que les portes sont toujours ouvertes, que ça bouge à lintérieur
je ne veux pas stationner dans la rue, genre « mec qui attend », alors je fais des petites incursions dans les rues voisines
les minutes passent et toujours pas de Thibault à lhorizon
17h30
toujours pas de Thibault
mais il bosse jusquà quelle heure un vendredi soir ? Là je commence à ne plus avoir didée pour moccuper
je dois avoir lair dun rôdeur
les gens vont commencer à me remarquer et à me trouver chélou
17h47
voilà
cest à cette heure précise que le beau mécano déboule dans la rue en saluant quelquun à lintérieur avec un geste du bras et laissant traîner un beau sourire sur son visage
si cest pas beau dessayer dimaginer la vie et les petits bonheurs quotidiens dun beau garçon
la petite blague ou la situation, le mot, la complicité qui ont provoqué ce beau sourire
Le jeune mécano avance sur le trottoir den face
je suis assez loin, genre une petite cinquantaine de mètres, loin mais assez près pour remarquer quavec un simple marcel gris sur un short noir, Thibault est tout simplement sexy
Javance, il avance, je le regarde, il regarde droit devant lui ; javance encore, lui aussi, pas après pas on approche lun de lautre, je le regarde, je ne peux détourner le regard de cette putain de silhouette de bogoss qui avance vers moi dun pas décidé, cette silhouette pas très grande, mais carrée, le torse bien droit, le regard portant loin
au fur et à mesure quil approche, je me rends compte que son marcel gris nest plus tout jeune, que son short noir est plutôt quelconque, que ses baskets sont des vieilles godasses
pourtant
malgré tout, il faut admettre le mec est incroyablement sexy
plus que ça
avec son vieux marcel et sa démarche de mec droit autant dans le physique que dans lesprit, il est
bah, oui, même avec un vieux marcel
il est classe
Cest vraiment le pouvoir de ce genre de mecs : ils sont classes et ils sont sexy quoiquils portent, et il le sont, je dirais, presque dautant plus lorsquils portent des fringues « de base » ou même des fringues « nases, ayant vécu », ce qui fait comme ressortir leur cote sexy inné, inconscient, un coté « mec nature » qui trace droit sur son chemin, droit dans ses baskets et qui ne se la raconte pas
Et puis, il faut bien ladmettre, il est bien plus agréable de voir un beau mec dans un marcel quelconque quun mec quelconque dans un très beau marcel
Il avance toujours, direction la ligne de bus qui va le conduire chez lui à lapart des Minimes
je le regarde toujours et lui il regarde droit devant lui
on dirait un petit militaire, la démarche assurée
je commence à me dire quil regarde tellement droit devant lui quil ne va pas me repérer
et puis, à force de le regarder, je finis par rentrer en collision avec une dame que je nai pas vue arriver sur mon trottoir mais en sens inverse
je faillis la faire tomber, je la ratt, je mexcuse, la dame sexcuse à son tour, elle repart, pressée
Ce petit accident sans conséquences a pour résultat de générer un peu de mouvement de mon coté, ce qui est suffisant pour que le beau mécano tourne la tête et quil me capte
et là, lorsquil me voit, il sarrête net, il me lance son beau sourire, un sourire tellement gentil et charmant que je faillis tomber, sans que personne ne me bouscule
oui, tomber dans les pommes
On nest plus quà une dizaine de mètres lun de lautre
et lorsque le bogoss entame la manuvre de traverser la rue pour venir me rejoindre, je mefforce de lui sourire à mon tour
je le regarde avancer droit vers moi et je suis saisi par cette beauté profondément masculine qui dégage de sa personne
et mon dieu que ses épaules dénudées sont un appel sensuel incroyable
sa chute dépaule est magnifique
son cou puissant est dun beauté spectaculaire, puissant et harmonieux à la fois
et que dire de ce putain de torse en V que je devine et dont dautres t-shirts dans dautres occasions, des t-shirts autrement ajustés, mont déjà dit tellement mais tellement mais tellement de bien
Oui, dans ses fringues que jimagine passées vite fait le matin après la douche, il est classe et
vraiment, vraiment beau mec
un petit mec de 19 ans, mais tellement mec
un mec qui respire la droiture et la gentillesse
et cest bien ça à mes yeux, ce quon est en droit dappeler
la « classe »
« Salut toi
» me lance-t-il sur un ton presque enjoué, lorsquil met le pied sur le trottoir.
« Salut » je lui réponds pendant quil me serre la main avec sa prise puissante de mec
et lorsquil balance un nouveau sourire qui donne tout leur éclat à ses yeux vert marron magnifiques, je suis conquis et je sais déjà que jai perdu tous mes moyens
je sais que je ne saurais plus lui reprocher quoi que ce soit
je suis vraiment trop sensible au charme masculin
et en loccurrence, cest bien ainsi, car je nai pas à lui reprocher quoi que ce soit
jai surtout besoin de lapprivoiser et den faire un pote, et un allié
Cest la puissance de son corps en contact avec le mien. Ses abdos et ses pecs contre mon dos. Ses jambes contre les miennes. Son bassin contre mon séant. Cest la chaleur de sa peau contre mes reins, mes épaules. Cest la prise ferme de ses mains sur mes fesses. Sa façon de les écarter pour offrir à sa queue laccès à mon intimité, à ce petit abricot qui lui fait tant envie. Jadore savoir quil a envie de samuser avec mon corps. De samuser en moi. Savoir que dans sa tête il ny a que son plaisir qui compte. Et que mon cul est le bon endroit pour jouir.
Cest la raideur de sa queue qui senfonce en moi, ferme, lente, précise, déterminée. Un mouvement assuré. Sans appel. Une évidence. Ce sont ses couilles qui effleurent ma raie. Les parois de mon ti trou écartées par lassaut inattendu de ce manche délicieux qui glisse dans un passage encore lubrifié par une jouissance précédente.
Sa queue senfonce en moi. Et jémerge rapidement du sommeil. Après un instant de surprise, je réalise ce qui est en train de se passer
et la surprise laisse rapidement place à lexcitation
je vais me faire prendre, encore
je vais me faire sauter une fois de plus par ce beau mâle qui a pourtant déjà joui un bon nombre de fois cette nuit, et qui a pourtant encore de la ressource dans ses bijoux de mec
sacré mec, réaffirmant par sa puissance sexuelle sa position de mâle dominant après quelle ait été ouvertement défiée
Cest en dégustant cette palette, ce feu dartifice de sensations érotiques que je suis arraché de mon sommeil pour être propulsé dans une nouvelle dimension de sensualité.
Quelques bruits remontent de la rue, un début de lumière filtre du store baissé, mais la chambre demeure dans la pénombre
je suis sur le ventre
position propice
et tentante apparemment
il est allongé sur mon dos
Je dormais, il sest réveillé, il a eu envie de baiser
il a vu mes dunes, ignoré mes infortunes
il ne sest pas posé de questions
le mâle me pénètre suivant le seul chemin de son envie
il avait envie et il sest enfoncé en moi, son trou à bite
moi, docile, à sa complète disposition, réveillé par le poids de son corps, par le passage de sa queue
je suis sa chose
son vide couilles
Men plaindre ? Non, je ne men plaindrai pas, je ne men plaindrai plus
jadore baiser avec lui
vraiment jadore
plus que tout au monde
être sa chose, satisfaire ses envies de mâle
pourvu quil ait longtemps envie de me faire ce cadeau
jouir en moi, sur moi, devant moi
me laisser goûter à son jus brûlant, à cette liqueur dhomme qui moffre la plus étourdissante des ivresses
me laisser le voir nu
me laisser toucher à sa queue, à sa peau, à son corps musclé
me laisser le sentir sur moi, écrasé par son poids et par sa puissance virile
me faire cette faveur ultime, me laisser le faire jouir
me laisser le voir jouir
Jai décidé que je prendrai du bon temps avec lui tant que je pourrai
que je ne lui demanderai rien de plus, que je le laisserai me baiser autant quil voudra
de toute façon il ny a que cela qui nous lie
la baise
alors je nai que cette solution pour le côtoyer, de tenter de lapprivoiser
accepter de nêtre que son jouet sexuel
lui rendre mon cul et ma bouche indispensables
lui offrir des orgasmes de dingue, des orgasmes quil ne trouvera nulle part ailleurs
En attendant
en attendant quil se rende compte un jour que je suis autre chose quune somme de trous
en attendant quil soit touché par mes sentiments et non pas agacé
je ne sais pas si cela arrivera
tout ce que je sais cest que je ne veux pas renoncer à une seule baise avec lui, à une seule goutte de son sperme, tant quil voudra de moi
Sa queue calée en moi, immobile, envahissante, débordante, écartant les parois de mon intimité.
Et là, dans cette pénétration perpétrée dans mon sommeil, le mâle franchit une nouvelle étape dans son emprise sur moi
cest comme sil considérait quil a tout droit sur moi, quil peut me prendre, mutiliser pour son plaisir, quand il le veut, comme il le veut
et cest le cas, ça la toujours été, et ça le sera toujours, inutile de résister
non, je ne me sens pas humilié par son attitude
jadore me sentir soumis à lui, jadore voir, sentir la vibration de son attitude de mâle dominant
Je jouis de me sentir pris dans le noir, en silence, pendant la nuit
je jouis de lidée de mêtre réveillé en le sentant sur moi, en moi, au fond de moi
Ses coups de reins commencent, sa queue glisse en moi
il va me baiser
je sais qu'il est épuisé et quil va lui falloir du temps, beaucoup de temps, des coups de reins bien puissants pour jouir une nouvelle fois
je sais que je vais prendre cher, que mon ti trou va sentir passer sa fougue masculine
mais je jouis déjà de cette longue domination qui sannonce
je jouis du souvenir que cette dernière sauterie va laisser entre mes fesses
je sais que lorsque j du passage de sa queue dans mon fondement, je vais men souvenir pour des jours entiers, des jours où jaurais souvent limpression quil soit encore en moi
alors je veux r
je veux sentir sa domination et son plaisir de mec maccompagner le plus longtemps possible
jai envie de me faire défoncer
Je ne vais pas pouvoir le regarder pendant quil prend son pied, alors je vais en profiter pour me concentrer sur sa queue qui coulisse en moi, sur sa respiration, sur son attitude de mâle dans la recherche de son plaisir exclusif
je vais me concentrer sur les parfums, les odeurs qui dégagent de sa peau
je vais me focaliser sur le glissement de son manche en moi, sur la prise puissante de ses mains sur mes épaules donnant plus dentrain à ses coups de reins
Je vais me concentrer sur les petites variations dans le rythme de sa saillie, je vais savourer et jouir de sa domination
je vais jouir de sa queue qui me martèle en profondeur, de ses couilles qui, tour à tour, percutent et caressent mes fesses
je vais jouir de sentir son plaisir monter, dattendre sa jouissance
je vais guetter le changement de souffle et de cadence de ses va et viens qui annoncent son orgasme
je vais guetter son râle qui marque la délivrance de cette puissance sexuelle, de cette énergie fécondante qui va sortir de ses couilles et remplir mon ti cul
Je jouis sous ses coups de bassin de plus en plus amples, rapides, je jouis de cette rage masculine datteindre lorgasme, de se répandre en moi
pendant quil me défonce, ma queue frotte sur sa couette
jen jouis tellement que je finis par lâcher mon jus sur ses draps sans que ni lui ni moi nous ne fassions quoi que ce soit pour
Je jouis un instant avant dentendre les petits grognements, et le changement dallure de ses coups de bassin qui annoncent lexplosion de son plaisir
Jai joui, mais je nai pas fini de jouir
je jouis encore de le sentir sextirper de moi dès son plaisir accompli, mon trou béant, humide, brûlant, déjà en manque de cette puissance masculine à linstant même où elle se retire
jai envie de toi, mec, jai toujours et encore envie de toi
Une queue capable de faire jouir deux mecs à la fois
si ce nest pas un sacré mâle, ça
Joyeuse année 2016 à vous tous.
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