44.2 Jérém. Stéphane. Thibault. Variations Sur Un Même Thème.

« Je ne te demande rien, tu sais… tu le sais que j'adore coucher avec toi... mais quand tu ne veux pas, surtout quand tu vas voir ailleurs et que tu le fais sous mes yeux... alors là, ne me demande surtout pas de t'attendre...
Je le vois s’énerver… touché une fois encore, j’ai l’impression que le navire a perdu le contrôle de sa trajectoire, qu’il dérive ; alors, comme un animal excité par le sang et par la peur de l’adversaire blessé je continue, impitoyablement, cherchant l’angle de tir parfait pour mener le coup de grâce…
Insatiable dans ma vengeance, limite cruel, profitant pour la première fois d’une position de force vis-à-vis de mon con de beau brun, je décide de tenter un piège, une feinte… de faire durer mon « plaisir »… je vais l’obliger à sortir à découvert pour mieux le frapper… mon but est de le terrasser comme lui il m’a terrassé tant de fois…
« De toute façon, à t’entendre, il n’y a aucun mec qui pourrait être bien pour moi… le mec de la piscine non plus ce n’était pas un mec pour moi… mais ce n’est pas comme si tu avais ton mot à dire, Jérém… »
« T'as baisé avec le pd de la piscine? ».
Le piège a marché. Les dernières défenses du cuirassé Jérém ont sauté, le navire est à découvert, et ma puissance de feu le tient dans le cœur de cible ; il n’y a qu’a tirer pour couler l’objectif... cible inratable…
Je n’en ai pas assez… je deviens cruel… j’ai vraiment envie de savourer ma vengeance…
« Le pd a un nom… il s'appelle Stéphane… » j’assène froidement.
Ça le met encore plus en rogne. Je le vois et je m’en réjouis. Je sais qu’il attend ma réponse à sa question et je sais aussi que, quoi que je dise, soit il ne va pas me croire, soit il va me détester… alors j’hésite... mais pas quant à ma volonté d’asséner le coup de grâce, ça je n’y renoncerai pas…
Là où j’hésite, c’est surtout sur le type de munition à choisir… la plus douloureuse, celle qui consiste à lui dire que je n'ai pas baisé avec Stéphane, mais que j'ai fait l'amour avec lui, et ce pour la première fois de ma vie, lors d’un après midi de rêve.

.. ou alors choisir un arme plus propre mais tout aussi efficace… juste admettre qu’il s’est passé un truc…
J'ai envie de tout lui balancer a la figure dans les moindres détails, de lui jeter à a figure ma sexualité, mon plaisir sans lui, comme lui il l’a fait si souvent et sans aucun scrupule ni respect vis-à-vis de moi… j’ai envie de lui faire mal, pour une fois que j’en ai la possibilité… oui, j’ai envie de lui faire mal tellement il m’énerve, tellement il m’exaspère avec sa jalousie hypocrite et mal placée…
Au final, dans un éclair de lucidité, je me dis que si une vengeance s'impose, un aveu partiel avec des circonstances atténuantes fera assez de dégâts dans sa fierté de mâle sans pour autant l’anéantir comme le ferait un aveu complet de toutes les sensations nouvelles que cette rencontre, que ce garçon ont su m’apporter…
« Oui... j’ai couché avec lui dimanche dernier… » je finis par admettre, calmement mais fermement ; j’ai sciemment utilisé le mot « couché », le plus neutre qui soit, pile au milieu de la gamme qui va de « faire l’amour » à « baiser » : je ne veux pas lui montrer que Stéphane m’a apporté quelque chose que lui n’a jamais su m’apporter, mais je ne veux pas non plus qu’il croit que ce garçon n’est qu’un simple coup de queue comme il semble l’affirmer à travers de son mépris…
Oui, je suis diplomate, mais avec modération, une modération qui semble par ailleurs soudainement s’absenter lorsque je crois bon ajouter, comme un pied de nez :
« … mais t’inquiète, j’ai mis une capote… ».

Plus tôt dans la semaine…

Le lendemain matin, jeudi, je me réveille aussi mal en point que je m’étais bien réveillé la veille… je sais que je n’oserai pas aller sonner à la porte de Stéphane, je ne connais même pas son emploi du temps, et je sais désormais que je n’arriverai plus à le revoir avant son départ…
J’ai du mal à ressembler mes pensées, à me sortir du coltard d’une nuit difficile, et pour arranger le tout, le portable n’a cesse de couiner… les sms autour de la soirée pleuvent et je n’ai vraiment pas envie d’y répondre… je n’ai pas les yeux en face de trous, j’ai la tête dans le q… je persiste à faire le mort… vers dix heures le tel sonne… je ne réponds pas… il sonne une deuxième fois… je ne réponds pas et je le mets en vibreur… un instant plus tard il se met à vibrer… ça m’agaaaaaaaace !!! Pourtant…
Pourtant c’est là que je commets la bêtise de répondre.
C’est Laura, une camarade de classe. Elle veut me donner les détails pour la soirée. J’ai pas envie d’aller à cette soirée, rien que d’y penser est au dessus de mes forces, surtout dans l’état zombique qui me caractérise à ce moment là… je la laisse parler un long moment, incapable d’en placer une, car même parler au téléphone est au dessus de mes forces lorsque j’ai dormi moins de 4 heures et qu’un mal de crâne carabiné me fend la tête en deux…
Ce qui m’énerve le plus dans l’histoire, c’est qu’elle parle comme si ma participation était acquise… elle n’y est pour rien, elle ne sait rien de ce qui se passe entre moi et un autre camarade de classe, mais ça m’agace… Bodega… Esmé… ces mots résonnent dans ma tête comme des déflagrations… rien que l’idée de retourner à l’Esmé après la fameuse soirée d’il y a quelques semaines, me parait définitivement hors de ma portée…
Elle me saoule, mais je n’ai pas la force de me battre, alors je finis par me laisser faire… je lui confirme ma présence, même si je vis cela comme du harcèlement… elle m’aura eu à l’usure… je n’ai pas envie de lutter, au pire je trouverai une excuse à la dernière minute ou je poserai un lapin, de toute façon personne ne va remarquer mon absence…
Je finis par me lever, mais je sais déjà, rien qu’en posant le pied sur le parquet, que ça va être une journée de merde… je suis contrarié par le rendez vous manqué de la veille, et encore plus contrarié d’avoir laissé Laura m’embarquer dans cette putain de soirée… mais par-dessus tout je suis agacé par le bordel qui remue sans cesse dans ma tête… je me traîne toute la matinée sans me décider à m’attaquer à quoi que ce soit, en attendant midi… et surtout l’heure de la sieste…
Mais rien ne va ce jour là, je rate même le petit somme de l’après midi… je me lève, je reprends un café, me revoilà en mode zombie… errant de pièce en pièce, le mal au crâne qui persiste et qui me plombe l’esprit, qui me rend incapable de réfléchir, incapable de prendre une quelconque initiative pour éviter qu’une belle journée de soleil et de vacances se retrouve gaspillée dans une morosité inéluctable…
Heureusement Internet est là… les vidéos, bien que pourries, d’une date du DW Tour passent sur l’écran de mon ordi me donnant un avant goût de ce à quoi je vais assister… « Ray of light » et « Music », ses deux derniers bébés électroniques résonnent dans ma chambre… oui, sa voix et elle seule, a le pouvoir magique de m’apaiser…
Je sens que je glisse sur une mauvaise pente… pas d’sms, son départ approche : Stéphane s’éloigne… samedi avance à grand pas, mon inquiétude avec : collision avec le beau brun inévitable… le coté obscur de la force me guette…
Je n’ai pas envie d’aller à cette soirée, mais je sais au fond que je serai incapable d’y renoncer… alors la grande question se pose… comment le retrouver après tout ce qui s’est passé samedi dernier ? oui, comment le retrouver après ce que je lui ai chuchoté à l’oreille, après lui avoir avoué dans les moindres détails toute ma soumission à sa queue, après m’être rabaissé à assumer, à verbaliser avec des mots crus, mon rôle de salope à lui ? comment le retrouver après qu’il m’ait balancé à la figure d’aller me branler tout seul aux chiottes ? après son regard provocateur, insolent et blessant pendant qu’il embrassait sa pouff…
Et surtout, comment le retrouver après l’humiliation de le voir partir avec les deux nanas et son pote Thibault, après avoir remué, bouilli à l’intérieur en imaginant la nuit qu’ils allaient passer ? après avoir imaginé son plaisir sans moi ? après avoir ressenti l’extrême jalousie de penser à Thibault en train de le mater prendre son pied, tout aussi forte que celle de l’imaginer en train de mater Thibault prendre le sien… une jalousie, celle de savoir les deux garçons nus tous proches dans le même lit, qui aurait même tendance à la faire passer au deuxième rang celle de le savoir en train de baiser les deux pouffes… je crois que c’est bien cela qui m’a fait le plus mal… le fait d’imaginer les deux coéquipiers nus dans la même pièce, leurs corps en sueur, pris dans une excitation qui pourrait leur donner des idées pour la suite… les imaginer dans le même lit après que les deux nanas soient parties… pour peu qu’Elodie ait raison au sujet des sentiments que Thibault éprouverait pour Jérém… et pour peu que Jérém boive un verre de trop, queutard comme il l’est dans ces moments là…
Arrête donc Nico, tu te fais du mal…
Maintenant que je réalise que je vais le voir samedi, tout remonte en moi, et la colère avant tout, beaucoup, beaucoup de colère… alors, quelle attitude adopter ? L’ignorer, en me disant tout simplement que cette soirée n’est qu’un mauvais moment à passer, que de toute façon nos vies vont nous éloigner et qu’à l’avenir il n’y aura plus de raisons de nous croiser ? Oui, l’ignorer, sage stratégie, stratégie de défense… mais que faire en revanche, si je suis la cible d’une attaque délibérée… si je reçois un de ses regards charmeurs en pleine figure ? Et s’il vient me causer ?
J’appréhende vraiment la soirée de samedi… j’ai une boule au ventre et, bien que mort de fatigue, je décide d’aller marcher pour me détendre… je sors de chez moi et là surprise…
Le vent d’autan s’est à nouveau levé… il souffle de façon insistante et il semble augmenter d’intensité de minute en minute… et ça, ce n’est pas fait pour me rassurer… je n’aime pas ça… je suis inquiet… quand le vent d’autan souffle aussi fort, j’ai toujours l’impression qu’il veut m’annoncer quelque chose, mais je n’arrive pas à savoir quoi évidemment… oui, quelque chose va se passer, mais quoi, ça je ne le saurai que plus tard, bien plus tard dans la semaine…
Je marche sans but, jonglant dans la foret épaisse de mes pensées, me laissant probablement entraîner par mon (in)conscient… je suis trop fatigué, je n’arrive plus à maîtriser mes émotions, encore moins que d’habitude, ce qui n’est pas peu dire… je remonte ma ville de rue en rue, je remonte ma vie, de souvenir en souvenir… sans trop savoir comment et pourquoi, je me retrouve dans le quartier de la Halle aux Grains… Stéphane me manque, et lorsque j’aperçois l’entrée de son immeuble, me voilà à nouveau à deux doigts d’aller sonner à sa porte… j’ai besoin de le voir… il n’y a que lui qui saurait m’offrir le câlin qu’il me faut à cet instant pour me remonter le moral, pour me retrouver… j’approche du seuil, je ralentis mon pas, je jette un œil rapide dans le hall inanimé et sombre… je m’arrête… j’hésite en regardant son nom sur l’une des sonnette… ce n’est que l’espace d’un instant, je repars, je n’ai pas le courage de le faire… je me dis que de toute façon à cette heure là il doit être au taf…
Alors je trace… je parcours les petite rues, et je me retrouve à St Aubin… ça sent le danger, j’approche du feu… rue de la Colombette n’est qu’à quelques pas, l’entrée d’un autre immeuble bien connu est si proche… je suis tiraillé entre le désir de tourner au large et celui de m’engouffrer dans le Chemin de Traverse… c’est con, c’est irrationnel mais j’ai envie de passer devant cette porte que j’ai tant de fois franchie la respiration coupée, le cœur hors de la poitrine… le danger me guette… et si je le croise ?
Le temps que je me pose toutes ces question auxquelles je ne sais pas répondre, mes jambes m’ont amené toutes seules devant sa tanière… je panique, je leur ordonne de m’amener vite loin de là, elles m’obéissent… hélas, ma tête n’en fait qu’à sa tête, mon cou se relève, mes yeux accrochent cette terrasse bien connue… le cœur bondit de ma poitrine… je crois déceler un mouvement là haut…
J’ai l’impression d’avoir vu un bout de cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc disparaître à l’instant précis que mon regard s’y pose… on est en milieu d’après midi, peut être bien qu’il est en pause… en train de fumer une clope en terrasse… est-ce qu’il m’a vu avant que je n’ose lever la tête ? est-ce qu’il m’a vu et qu’il s’est retiré pour ne pas croiser mon regard ? est-ce qu’il a ressenti ma présence dans la rue comme un harcèlement ? ou alors, est-ce que j’ai rêvé tout simplement ?
Instinctivement, pour en avoir le cœur net, je relève mon regard de façon bien imprudente… je prends un risque de plus de croiser son regard… hélas, je dois admettre avec soulagement plutôt contrarié que la terrasse est vide, tristement vide…
Le cœur tapant de grands coups dans ma poitrine, je trace vite vers le Canal et je m’éloigne à grands pas du Chemin de Traverse… ce n’est qu’en arrivant à la Gare King’s Matabiau que j’arrive à me calmer un peu… je rentre dans le hall et je me perds dans la foule des voyageurs… envie de prendre un train et de partir loin, très loin de là… mais le Pourdlard Express a du retard, alors je m’approche d’un comptoir et je prends un café… je me pose sur un banc et, assis face au grand tableau des Arrivées et des Départs, regardant les gens défiler devant moi et buvant mon café, j’essaie de ranger un peu le bazar qui encombre ma tête… Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane…
Stéphane, Jérém… Stéphane, l’adorable garçon qui m’a fait découvrir ce qu’est faire l’amour… Jérém, le mâle serial insatiable qui m’a fait découvrir le plaisir de la baise avec un étalon dominant… Stéphane qui m’a montré que les câlins c’est trop bon, Jérém qui refuse toute tendresse… Stéphane qui m’a appris que j’aime jouir comme un mec… Jérém qui m’a appris à quel point c’est bon de faire jouir un mec… Stéphane que je trouve touchant, Jérém que j’ai dans la peau… Stéphane charmant et adorable, Jérém le petit con ultrasexy à gifler… Stéphane calme et posé, gentil, rassurant… Jérém impulsif et sanguin, imprévisible, parfois agressif… Stéphane attentionné, doux, Jérém dur, parfois brutal… Stéphane avec qui l’amour est partage… Jérém pour qui il n’y a que son plaisir qui compte… Stéphane sexy et adorable, fougueux et généreux… Jérém sexy et odieux, macho et égoïste… Stéphane avec qui tout parait possible, Jérém avec qui il n’y a que la baise de possible… Stéphane qui me respecte, Jérém qui fait de moi ce qu’il veut… Stéphane au regard doux et bienveillant, Jérém au regard viril et fuyant… quartier de la Halle, rue de la Colombette, Jérém la baise, Stéphane l’amour… la balade au Jardin des plantes… la baise à la piscine… le risotto… la baise au terrain de rugby… le dvd d’Aladdin… la baise dans les chiottes du lycée… me sentir bien dans des bras chauds, me sentir bien défoncé par sa queue bien chaude… la serviette verte de Stéphane… le t-shirt blanc de Jérém… les images s’enchaînent et s’accélèrent dans ma tête, ça va si vite que j’ai du mal à gérer… je me pers, j’en ai la tête qui tourne… Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane et…
Paf !
Ça bogue méchamment… tout se bloque dans ma tête, les images s’arrêtent, plus de signal, l’écran devient noir… ça dure un petit instant, le temps que je rouvre les yeux et que je termine mon café… je m’abandonne sur le dossier du banc, je respire profondément… et là, une petite voix se fraye un chemin dans ma tête… elle chuchote quelque chose… c’est un tout petit message, mais il est si dur à admettre… je secoue la tête, je tente de la faire taire… je me lève, je marche, j’arrive à la distancer un peu, mais elle me suit de près… je fais semblant de ne pas l’entendre, mais elle ne me lâche pas…
J’ai la tête comme un tambour, je suis terrassé par la fatigue… je décide de rentrer en faisant un grand détour pour éviter toutes les tentations et les rencontres inopportunes… marcher me fait du bien, j’arrive à détourner l’attention de mon esprit, de ses troubles… mon odyssée vers la maison m’amènera à l’église de St Sernin, me fera transiter sur le pont St Pierre, mon préféré avec son élégante architecture métallique ; me fera continuer vers St Cyprien, avant de rejoindre enfin le Fer à Cheval et ma maison…

Commencée avec deux branlettes au réveil, après une nuit guère meilleure que la précédente, la journée de vendredi promet d’être longue… je vis dans l’attente, je ne suis que dans l’attente… l’attente d’un sms de Stéphane qui ne vient pas, l’attente de la soirée du bac, de revoir Jérém, l’attente de savoir ce que je vais ressentir à ce moment là, l’attente de voir comment ce petit con va se comporter vis-à-vis de moi… oui, je suis dans l’attente que le temps s’écoule…
Mais l’attente la plus insoutenable, celle qui a le pouvoir d’éclipser et d’apaiser toutes les autres, est celle du concert de Madonna… oui, plus que quelques jours avant le Drowned World Tour… Drowned World, le monde englouti… quand je dis que Madonna est la bande son de ma vie… plus que quelques semaines et mon monde actuel sera englouti sous une vague de départs, de changements, de bouleversements tous azimuts… mon enfance est en train de partir loin, très loin, ma vie de jeune adulte se profile, approche à toute allure, c’est une page vide ou tout est à écrire, à remplir, avec d’autres temps, d’autres rythmes, d’autres gens, d’autres amours… excitant et terrifiant à la fois…
Mais en attendant, encore je n’arrive par à croire que je vais la voir en chair et en os… l’attente est insoutenable… j’ai besoin d’écouter la voix de Madonna mais j’ai besoin aussi de sortir de ma chambre… il fait beau et j’ai envie, j’ai besoin de me dépenser pour vider ma tête et détourner mon attention de ma montre et laisser le temps passer…
C’est ce jour là que j’achète mon premier baladeur mp3… si c’est pas le bonheur ça… de la musique qu’on amène partout, en grande quantité, en bonne qualité audio, sans avoir à se trimballer ni cd ni cassettes, dans un boîtier tout petit à qui il ne faut pas changer les piles toutes les cinq minutes… non, le mp3 ce n’est pas le bonheur… c’est carrément le pied !
Armé de mon baladeur soigneusement casé dans un brassard livré avec la bête, je vais courir le long du Canal du Midi en compagnie de Madonna… je confirme, sa voix a le pouvoir de m’apaiser, sa musique le pouvoir de me faire rêver… je cours et je marche de longues heures, je me dépense beaucoup et ça m’aide à m’aérer l’esprit…
L’exercice physique est propice à changer les idées… l’effort nous accapare, notre corps réagit en vidant notre cerveau de son énergie pour la réserver aux membres sollicités, jambes, cuisses, bras… lorsque l’on fait du sport, la tête se vide de tout ce qui l’accablait auparavant… c’est comme un redémarrage de Windows, une fois qu’on a éteint et fait repartir la machine, tout a l’air de tourner mieux pendant un moment… comme les logiciels, les idées qui étaient en conflit entre elles le sont toujours, mais puisqu’elles reviennent dans un ordre différent que celui qui les avait conduites à boguer précédemment, elles s’agencent autrement… c’est pour cela que après l’effort, on a l’impression de voir les choses autrement…
Au bout de deux heures de course et de marche je me pose sur un banc à l’ombre et j’essaie de ressembler mes idées…
Dans l’ordre… c’est vendredi après midi, et depuis mercredi soir, je n’ai eu de message de Stéphane que celui annonçant l’annulation de notre rendez vous… toujours pareil, je ne lui en veux pas, je comprends que c’est une période chargée pour lui… pourtant il me manque, et je sens que dans ce silence je dérive… par moments des images remontent à ma mémoire et j’ai l’impression de pouvoir rattr mon état d’esprit de dimanche soir, je le sens tout proche, à ma portée…
J’essaie de retrouver sa tendresse, ses sourires, l’effet de ses caresses, mes émotions, la sensation d’avoir été plongé dans une autre vie, dans une autre dimension… un autre espace-temps dans lequel j’ai découvert que je peux être désiré, que l’on peut avoir envie de me faire plaisir, que l’on peut me trouver attirant et désirable… que mon besoin de tendresse et de câlins peut être partagé… j’essaie de retrouver le sentiment puissant, incroyablement puissant, bouleversant… le sentiment que l’on pourrait m’aimer pour ce que je suis… ses mots avant de nous quitter résonnent dans ma tête comme la plus belle des mélodies.

« …tu as le droit d’être heureux… tu as le droit d’aimer et tu as le droit de te sentir aimé… Nico, tu es un très beau cadeau... prends confiance en toi… tu vas y arriver, tu vas la trouver ta place… pour peu que tu croies en toi… il faut que tu croies que tu as le droit d'être heureux, avant que les autres puissent te reconnaître ce droit… sois toi même, ne laisse pas les autres choisir pour toi… tu es un bon gars, même trop bon, trop gentil, fais attention que cela ne te joue pas de tours… fais attention aux gens que tu vas rencontrer, surtout dans le milieu, car il n’y a pas que des gentils… la mauvaise herbe nique souvent ce qui est trop bien cultivé…
… fais gaffe à ne pas te perdre, même pas par amour… veille toujours à rester toi-même… à tout donner mais à ne pas tout accepter par amour… et si un jour tu as besoin de quelqu’un pour parler, je serais toujours là pour toi… toujours… ».
C’est bien touchant, et ça fait vraiment chaud au cœur, ça donne carrément des ailes que d’entendre cela à ce moment de la vie… à 18 ans, cet age durant laquelle on se cherche et on cherche l’amour… oui, ça fait un bien fou qu’un mec de 26 ans nous prenne par la main, nous guide, nous apprenne, nous rassure, nous dise de ne pas avoir peur, nous montre qu’on a droit au bonheur, le droit d’être soi même, qu’il nous tende une main en cas de besoin… c’est beau, plus que beau, comme une révélation…
Pourtant, au fur et à mesure que le samedi approche, je repense de plus en plus souvent à Jérém… je sais qu’il ne faudrait pas, que je suis en train de trahir les belles promesses de dimanche soir, les promesses d’une nouvelle vie, la promesse de retrouver ma liberté et de reprendre ma vie en main, et par-dessous tout c’est moi-même que je suis en train de trahir…
J’ai beau me dire qu’il ne faudrait pas que je cède à mon envie de lui céder… qu’il faut que je garde en moi le feu sacré que j’ai ressenti quand j’étais dans les bras de Stéphane… qu’il ne faut pas que je laisse échapper trop loin de moi cet état de grâce, cette détermination à reprendre le contrôle de ma vie, de le reprendre des mains de… Jérém… pourtant je sens que ma volonté vacille… « l’effet Stéphane » diminue d’intensité au même rythme que « l’effet Jérém » me ratt… j’ai tellement besoin d’une piqûre de rappel, mais comme elle ne vient pas dans le délai, ma couverture vaccinale est insuffisante… ses effets vont s’éteindre…
Oui, par moments des images remontent à ma mémoire et j’ai l’impression de pouvoir rattr mon état d’esprit de dimanche soir… j’essaie de m’en saisir, j’ai besoin de le garder avec moi, de l’enfermer dans mon cœur… mais à chaque fois il s’envole, disparaît, s’éloigne…
Soudainement un souvenir lointain se présente à moi venant de nulle part… c’est un jour de mon enfance, un jour d’été, je devais avoir pas plus de 6 ou 7 ans, j’étais à la campagne chez mes grands parents… il venait de faire de l’orage et voilà que, la pluie ayant cessé, un énorme, magnifique arc-en-ciel bien lumineux venait d’apparaître… ce jour là, j’étais bien décidé à pédaler sur mon vélo, autant qu’il le faudrait, pour atteindre l’un de ses pieds… oui, je voulais aller là ou l’arc-en-ciel se pose, prend naissance… je ne sais pas pourquoi je m’étais donné cet objectif, ce que je voulais y découvrir, mais trouver le pied de l’arc-en-ciel me semblait chose intéressante… je me souviens d’avoir pédalé longtemps, encore, encore et encore, jusqu’à l’épuisement, d’avoir avancé sur les sentiers en terre battue qui sillonnaient la campagne jusqu’à une heure où mes grands parents avaient commencé à s’inquiéter pour moi… j’avançais droit vers mon but, inlassablement, mais plus je pédalais, plus j’avais l’impression que ma cible s’éloignait…
C’est un peu le sentiment que j’ai vis-à-vis de mon état d’esprit de dimanche dernier… j’essaie d’aller à sa rencontre, mais plus je m’y efforce, plus j’ai l’impression que je serre ma main pour attr un fantôme…
Si seulement Stéphane ne devait pas partir si tôt, si loin… si seulement Jérém devait partir, lui, à sa place, dans quelques jours, au lieu de rester dans mes pattes tout l’été… avec Stéphane à mon coté, je crois que mon bonheur serait vraiment à portée de main… mais Stéphane s’éloigne et Jérém est toujours là, si loin de mon cœur, mais si physiquement près…
Et force est de constater, de réaliser et d’admettre que, assis sur ce banc à l’ombre des platanes qui bordent le Canal, je me fais violence pour ne pas céder à l’envie de me rendre rue de Metz… c’est une envie qui me chatouille depuis le début de la semaine mais que j’avais réussi à anesthésier avec l’adrénaline qui alimentait mon état de grâce dans l’attente du rendez vous avec Stéphane ; une envie qui m’a cueilli de façon vive et brûlante après l’annulation de notre rendez vous ; une envie qui a explosé en moi la veille, lorsque j’étais assis dans le Hall de la Gare Matabiau, après cette image furtive cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc que j’ai cru capter rue de la Colombette… une envie qui, dès lors, est en train de me ronger de l’intérieur comme un vers de bois ; une envie qui m’a carrément harcelé depuis le réveil ce matin…
Une envie à laquelle je tente de résister du mieux que je peux… hélas, cette envie est en moi, et quoique je fasse, elle ne me quittera pas… de plus je suis fatigué, depuis le week-end dernier je ne fais que creuser mon déficit de sommeil, alors il m’est tout particulièrement difficile de m’opposer à mes démons intérieurs et aux tentations… surtout lorsque la tentation est si forte… et là, la tentation est forte, et plus que ça… il est si près de moi, je peux le rejoindre à pied en quelques minutes… alors, très difficile de résister, surtout lorsqu’on est si peu occupé que je le suis à cette période…
Je suis au bout de mes forces, mais j’emploie toute mon énergie pour soutenir ma volonté de ne pas y aller… en allant courir de longues heures durant sur le Canal, Madonna à fond dans mes oreilles, pour essayer de l’oublier… hélas, il y a bien un moment où mon énergie ne suffit plus, ma volonté ne suffit plus à faire taire mon désir de plus en plus débordant au fur et à mesure que je le malmène… non, ma volonté ne suffit plus quand, dans mon esprit, Jérém… redevient soudainement MON Jérém, mon (con) de beau brun…
Il faut que je voie mon beau brun… il me manque… putain… il me manque… oui, il faut que je le voie… cette idée s’affiche en moi comme une évidence… il faut que je le voie avant la soirée, il me faut savoir si je suis toujours assez fort et déterminé à me passer de lui… ok, je l’admets, je suis une boule de contradictions, cherchez l’erreur…
Il faut que je le voie… mais comment m’y prendre ? Y aller franco… m’installer tout seul en terrasse, lui commander une bière… même pas la peine d’y penser, je n’oserais jamais… y aller avec ma cousine, en admettant qu’elle veuille bien m’accompagner, ce qui est par ailleurs loin d’être gagné… ça non plus je n’oserais pas… juste passer dans la rue, l’air d’être là par hasard… j’aurais surtout l’air d’un con… je pense qu’à ce stade de notre « relation », rien ne va plus, surtout en l’absence de ce charmant Thibault dont la simple proximité a le pouvoir de rassurer et d’apaiser le beau brun…
Pourtant j’ai très envie de le voir, même de loin… très très envie, même… ce dont je n’ai en revanche aucune envie, c’est de me taper un numéro de pauvre type qui piste le mec par qui il s’est fait jeter et dont il est toujours fou amoureux…
Comment faire alors ? Avec la ruse.
En faisant appel à la Sainte protectrice des jeunes pd qui ont du mal à assumer leurs envies profondes, j’ai nommé la Sainte Semvat, la compagnie de bus toulousaine. Elle se présente à moi ce jour là, sous les traits du Magicobus, alias, le Bus 46. Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ? J’ai vraiment un train de retard… ou plutôt un bus…
Le temps de rentrer chez moi et de prendre une douche, j’embarque à quelques arrêts de la rue de Metz aux alentours de quatre heures… l’adrénaline monte à l’approche du déjà célèbre abribus juste à coté de la brasserie… le temps d’arrêt est court, il n’y a pas grand monde qui descend et une seule personne qui monte… pas de Jérém en vue… j’avance de quelques arrêts, je descends et je reprends la même ligne en sens inverse… on approche à nouveau du fameux abribus…
Et cette fois ci, la chance semble plus favorable à mes projets… le voilà le beau brun, je le vois de dos et de loin, il est en train de rentrer avec un plateau, son torse est habillé d’un tissu blanc, je crois que c’est une chemise… miaaaam… je veux voir ça de plus près, de beaucoup plus près… j’ai même envie de le lui arracher… hélas, le bus est de l’autre coté de la chaussée, ainsi j’ai du mal à saisir les détails, et ma curiosité en est bien attisée…
Un autre aller en bus, et ce coup-ci c’est le bon… voilà qu’un ensemble d’éléments, un ralentissement dû à un feu rouge, combiné avec le fait que dans ce sens de la ligne le bus se trouve à nouveau du bon coté de la chaussée, me permet de détailler le beau serveur… oui, mon beau serveur, avec ses cheveux bruns sculptés dans un brushing de mec, avec cette chemise blanche, une chemise bien ajustée, les manches retroussées à hauteur des biceps, un bout du tatouage qui dépasse, le reste je le devine… deux boutons ouverts sur son cou à la peau mate et entouré par cette chaînette de mec si sexy qui se balade en dessous de sa pomme d’Adam… j’arrive même à distinguer son grain de beauté si mignon au creux de son cou…
Et je ne peux pas non plus me taire au sujet de son pantalon noir plutôt class et plutôt moulant son joli cul, et d’avoir enfin une mention spéciale pour ses baskets bleues… ça fait bizarre et ça fait mal de le voir si loin de moi, ce mec avec qui j’ai couché tant de fois et avec qui je ne coucherai plus, ce mec qui samedi dernier, au lieu de me dire adieu avec une dernière bonne baise, s’est payé un plan à quatre avec son meilleur pote… ça fait mal et ça me donne envie de hurler de voir deux filles assises à une table de la terrasse en train de le brancher… Jérém qui rigole avec elles, qui les allume par sa simple présence, les nanas qui minaudent… c’est révoltant… je t’en conjure… lâche l’affaire, Jérém, tu ne vois donc pas que ce ne sont que des pétasses ?!?!?! pardon les filles, je sais que je ne suis pas objectif… mais quand vous branchez mon Jérém, vous êtes toutes des pétasses !!!
Le bus repart, me laissant frustré et contrarié par cette image de Jérém en train de flirter avec deux pou… avec deux clientes, admettons… ce n’est pas raisonnable de reprendre le bus une fois de plus pour le mater encore… non, ce n’est pas raisonnable mais est-ce pour autant une bonne raison d’y renoncer ?… je ne crois pas… un quart d’heure plus tard me revoilà dans le Magicobus 46, après avoir fait un joli détour pour le prendre dans le sens qui me permet d’approcher le beau brun au plus près…
Et rebelote… même scénario que tout à l’heure… ralentissement de la circulation, le bus qui s’arrête pas loin de la terrasse… les secondes passent et le bus ne bouge pas… ça klaxonne dans la rue, mais rien n’avance… mon beau brun est toujours en terrasse avec sa chemise blanche aux manches retroussées qui lui va comme un gant et qui lui donne un coté « mec bosseur, fonceur » et « mec tout court »… il est juste à se damner…
Il est plus près de la chaussée que tout à l’heure, alors je peux capter encore plus de détails… et cette chemise blanche, mon dieu cette chemise blanche… naaaan, mais ça c’est juste… pas possible… ça devrait être interdit d’être aussi sexy… cette nouvelle tenue me fait bouillir… mon regard plonge dans ce col outrageusement ouvert jusqu’à laisser non seulement deviner mais carrément montrer l’entrée de la douce vallée qui sépare ses pectoraux, cette vallée sur laquelle sa chaînette de mec se pose comme un chemin sinueux, un chemin du bonheur en quelque sorte…
Oui, il est là, en train de papoter, car à cette heure là il n’y a pas grand monde en terrasse… et cette fois ci ce sont deux mecs qui semblent le brancher… mon beau brun sourit, charmeur… mais foutez lui la paix, vous aussi, les deux pouffiaux !!! Vous n’êtes pas quand même en train de le brancher sur un plan à trois… ah, non, hein, non, pas ça, bas le pattes, bas les pattes !… là je ne bous plus… je suis proche de l’explosion… je sens monter en moi une envie irrépréhensible de descendre du bus et aller me manifester, pour crier « hein, je suis là, j’existe »… non, je ne me sens pas capable d’aller lui faire une scène, mais je me sens tout de même capable de m’installer à une table et de l’appeler pour ma commande pour casser ce petit jeu à trois…
Certes, je n’ai aucun droit de le faire, au fond je ne sais même pas s’ils sont vraiment en train de le draguer, et surtout qui suis-je pour lui pour lui faire une quelconque morale ? Mais l’envie est pourtant bel et bien là… l’abribus n’est pas loin… ça me démange vraiment de descendre et de me pointer à sa terrasse pour voir sa réaction… je suis en train de chercher l’appoint de courage qui me manque pour me lancer dans mon projet, lorsque les événements tranchent pour moi une fois encore, coupant court à mon hésitation… le bus avance… c’est parti… mais pas pour longtemps… il n’avance que de quelques mètres et il s’arrête pile à hauteur de la terrasse… je ne suis qu’à quelques mètres du beau brun et à un moment j’ai l’impression de le voir tourner légèrement la tête vers le bus… et le pire c’est que j’ai même l’impression que son regard accuse comme un soubresaut… je me demande s’il a pu me capter… non, pas ça, pitié… instinctivement, je recule mon torse et je me cale derrière le montant du bus… le cœur qui tape à mille à l’heure, ça va de soi…
Un instant plus tard le bus repart, avance de quelque mètres pour s’arrêter à l’abribus… et ce n’est que lorsqu’il repart, après un arrêt qui me parait interminable, que je me sens enfin soulagé… évidemment, le courage pour descendre à l’abribus et d’aller faire un esclandre silencieux en terrasse s’est évaporé au contact de la puissance à peine effleurée du regard et de la présence du beau brun… mon cœur fait des bonds tellement puissants dans ma poitrine que j’ai l’impression de le voir apparaître par intermittence et en relief, comme dans un dessin animé…
Le bus avance et mon cœur n’en finit plus de taper dans ma poitrine… je suis assis mais je sens que rien que le fait d’avoir eu si peur de me faire gauler, j’ai du mal à respirer, j’en ai les jambes en coton… ce sont des jambes en coton qui, je le sens, ne vont plus le quitter jusqu’au lendemain soir… ça y est, je viens tout juste de l’apercevoir, sans me retrouver en sa présence… je n’ai pas entendu sa voix, ni senti son parfum, ni vraiment croisé son regard ou son sourire… et je suis déjà dans cet état là…
J’appréhende la soirée du lendemain… mes derniers messages à Stéphane sont restés sans réponse… je me sens seul, abandonné à moi-même… j’ai besoin de lui, j’ai besoin « qu’on me tienne la main » pour ne pas faire de bêtises… plus le temps passe, plus la soirée du bac approche, et moins je me sens assuré sur mes jambes… où est-elle passée ma force, ma résolution, ma détermination, le vent de mutinerie, mon esprit « rebel heart » de dimanche soir ? Est-il tout simplement disparu pour laisser place à cette angoisse, à cette faiblesse retrouvée ?
De plus, voilà que, depuis la veille, le vent d’autan souffle sans discontinuer… et maintenant je sais que lorsqu’il se lève et qu’il souffle si puissant, c’est qu’il veut m’annoncer des choses… des choses puissantes, qu’elles soient bonnes ou mauvaises…
Et toujours les mêmes questions qui tournent en rond dans ma tête… ce sont pile les mêmes interrogations que celles du lundi lorsque j’avais imaginé le croiser à l’affichage des résultats du bac… oui, les mêmes questions, mais en plus puissantes… car lundi j’aurais pu l’ignorer, repartir juste après avoir vu mes résultats… mais là je suis censé passer une longue soirée au même endroit que lui… des endroits confinés, la Bodega d’abord, l’Esmé ensuite… Est-ce qu’il va être là, d’abord ? Quelle attitude va-t-il avoir vis-à-vis de moi ? Va-t-il venir me parler comme si tout était normal ? Il en est bien capable, ce n’est pas le culot qui l’étouffe… non, ce mec n’a pas froid aux yeux… son approche va-t-elle être une sorte de nouvelle humiliation pour mon amour propre, son attitude de samedi dernier va-t-elle rester une fois de plus impunie devant mon incapacité à faire entendre ma voix ? Vais-je ressentir une fois de plus la frustration de me laisser faire, de me sentir piétiné sans savoir réagir ? Est-ce qu’il va essayer de me rattr pour que je lui vide les couilles une fois de plus ? Ou alors, tout simplement, va-t-il me monter rien d’autre que de l’indifférence ?
Oui, tout un tas de questions légitimes, des questions qui clignotent de plus en plus fort dans mon esprit monopolisant toute mon attention et tout mon être et se résumant à une seule et unique interrogation, celle de départ : comment retrouver Jérém après samedi dernier ?
Une idée lumineuse se manifeste soudainement à la surface de mon esprit pour tenter de répondre à cette épineuse question : peut-être en retrouvant Thibault d’abord…
Je repense aux mots d’Elodie…
« … si tu veux avoir une chance de garder un peu plus longtemps ton con de brun, t’as tout intérêt à saisir la main que Thibault est en train de te tendre… »…
J’ai un grief contre lui, mais je sais que ma cousine a raison. Certes, je lui en veux pour avoir pris part à ce putain de plan à quatre, mais au fond, elle a raison, ce n’est rien que la normalité pour des garçons de leur âge… des garçons qui ne font que profiter à juste titre de la vie, de leur jeunesse… certes, il a vu Jérém à poil en train de baiser, mais après tout,ce n’est pas comme s’il avait baisé avec lui… j’aurais tellement voulu pouvoir assister à cette scène… deux bogoss en train de jouir côte à côte…
Laisse tomber, Nico, tu te fais du mal…
Oui, je pense qu’il serait bon de rencontrer Thibault avant de revoir Jérém… peut-être qu’en discutant avec lui, ça m’apaiserait… peut être qu’il saurait trouver les bons mots pour soulager l’angoisse qui me secoue de fond en comble…
Je descends du bus à l’arrêt du Pont Neuf et je me mets à marcher en direction de la gare Matabiau… je réalise que j’ai la moitié de la ville à traverser, et que je pourrais prendre un autre bus… mais je préfère marcher… il est encore tôt, je vais arriver juste à temps pour le croiser à la sortie de son taf… j’ai besoin d’un peu d’activité physique pour trouver le courage d’approcher le beau mécano… non pas que j’appréhende particulièrement de provoquer une rencontre avec Thibault, même si c’est en forçant un peu le destin… le mec est mille fois plus accessible que Jérém, et je sais que je n’ai pas à craindre de lui de réactions hostiles, je sais qu’il va bien m’accueillir et que je vais avoir droit à un beau sourire… ce que je me demande en revanche, c’est s’il ne va pas éprouver un certain malaise vis-à-vis de moi après ce qui s’est passé le week-end dernier… surtout si, comme le dit Elodie et comme je le conçois aussi, il a deviné pour moi et Jérém, et qu’il s’imagine mes sentiments pour lui… et ma jalousie qui va avec…
Mais par-dessus tout je me demande aussi si je vais pouvoir tenir bon, ne pas me montrer blessé… lui c’est pareil… comment vais-je le retrouver après ce qui s’est passé samedi dernier ? Vais-je avoir la force de faire comme si de rien n’était, comme si le fait qu’il se soit envoyé en l’air avec son pote et deux nanas ne me dérange pas alors que ça me met hors de moi ? Vais-je lui en parler pour avoir des explications ? D’ailleurs, de quel droit lui demanderais-je des explications, encore moins à lui qu’à Jérém, alors que cette partie de jambes en l’air n’à, à bien y réfléchir, rien de reprochable? Vais-je lui parler ouvertement de ce que je ressens pour Jérém… comme le suggère Elodie ? Vais-je trouver en lui un allié dans ma quête du « Graal », le cœur de Jérém ? Vais-je au contraire me faire rire au nez ? Vais-je trouve un allié ou un adversaire, au cas où il aurait lui aussi des vues sur le beau brun, ce que ma cousine semble suggérer, ce qui parait somme toute assez réaliste, car je sais par expérience que dans ce genre d’intuition, elle se trompe très rarement…
Le Pont Neuf, le lycée que je ne fréquenterai plus, les Jacobins, la Place du Capitole, la rue du Taur que j’adore pour son allure d’endroit plongé dans un autre temps ; j’arrive à St Sernin, mon église toulousaine préférée avec St Etienne. Je traverse le boulevard de Strasbourg, la place Jeanne d’Arc et je file droit dans la rue pour m’approcher du garage où bosse Thibault…
Je connais à peu près ses horaires depuis que je l’ai croisé une semaine et demi plus tôt rue d’Alsace-Lorraine à la fin de la journée boutiques avec Elodie… pourvu qu’il ne termine pas plus tôt le vendredi… c’est 17 heures et pour me donner le plus de chances de ne pas le rater, je rode dans les rues adjacentes…
Il y aurait plein de façons de le rencontrer plutôt que de le pister, genre passer un coup de fil, envoyer un sms… oui, j’ai son 06… mais je ne veux pas donner l’impression de provoquer cette rencontre, dans ma tête j’ai envie à que ça ressemble plutôt à un coup du hasard, même si à un hasard un peu , car ma présence à cette heure là dans ce quartier là, ressemble quand même à une intention de le croiser… mais qu’importe, le coup de fil ou le sms ne figurent pas dans la liste des options possibles… car il faut bien l’admette, quelque part mon amour propre s’oppose à mon projet d’aller à son encontre, mon amour propre demeure blessé…
J’avance dans la rue sur le trottoir opposé jusqu’à que la devanture du garage ne me soit à portée de vue… je suis encore à plusieurs centaines de mètres et je vois que les portes sont toujours ouvertes, que ça bouge à l’intérieur… je ne veux pas stationner dans la rue, genre « mec qui attend », alors je fais des petites incursions dans les rues voisines… les minutes passent et toujours pas de Thibault à l’horizon… 17h30… toujours pas de Thibault… mais il bosse jusqu’à quelle heure un vendredi soir ? Là je commence à ne plus avoir d’idée pour m’occuper… je dois avoir l’air d’un rôdeur… les gens vont commencer à me remarquer et à me trouver chélou…
17h47… voilà… c’est à cette heure précise que le beau mécano déboule dans la rue en saluant quelqu’un à l’intérieur avec un geste du bras et laissant traîner un beau sourire sur son visage… si c’est pas beau d’essayer d’imaginer la vie et les petits bonheurs quotidiens d’un beau garçon… la petite blague ou la situation, le mot, la complicité qui ont provoqué ce beau sourire…
Le jeune mécano avance sur le trottoir d’en face… je suis assez loin, genre une petite cinquantaine de mètres, loin mais assez près pour remarquer qu’avec un simple marcel gris sur un short noir, Thibault est tout simplement sexy…
J’avance, il avance, je le regarde, il regarde droit devant lui ; j’avance encore, lui aussi, pas après pas on approche l’un de l’autre, je le regarde, je ne peux détourner le regard de cette putain de silhouette de bogoss qui avance vers moi d’un pas décidé, cette silhouette pas très grande, mais carrée, le torse bien droit, le regard portant loin… au fur et à mesure qu’il approche, je me rends compte que son marcel gris n’est plus tout jeune, que son short noir est plutôt quelconque, que ses baskets sont des vieilles godasses… pourtant… malgré tout, il faut admettre le mec est incroyablement sexy… plus que ça… avec son vieux marcel et sa démarche de mec droit autant dans le physique que dans l’esprit, il est… bah, oui, même avec un vieux marcel… il est classe…
C’est vraiment le pouvoir de ce genre de mecs : ils sont classes et ils sont sexy quoiqu’ils portent, et il le sont, je dirais, presque d’autant plus lorsqu’ils portent des fringues « de base » ou même des fringues « nases, ayant vécu », ce qui fait comme ressortir leur cote sexy inné, inconscient, un coté « mec nature » qui trace droit sur son chemin, droit dans ses baskets et qui ne se la raconte pas…
Et puis, il faut bien l’admettre, il est bien plus agréable de voir un beau mec dans un marcel quelconque qu’un mec quelconque dans un très beau marcel…
Il avance toujours, direction la ligne de bus qui va le conduire chez lui à l’apart des Minimes… je le regarde toujours et lui il regarde droit devant lui… on dirait un petit militaire, la démarche assurée… je commence à me dire qu’il regarde tellement droit devant lui qu’il ne va pas me repérer… et puis, à force de le regarder, je finis par rentrer en collision avec une dame que je n’ai pas vue arriver sur mon trottoir mais en sens inverse… je faillis la faire tomber, je la ratt, je m’excuse, la dame s’excuse à son tour, elle repart, pressée…
Ce petit accident sans conséquences a pour résultat de générer un peu de mouvement de mon coté, ce qui est suffisant pour que le beau mécano tourne la tête et qu’il me capte… et là, lorsqu’il me voit, il s’arrête net, il me lance son beau sourire, un sourire tellement gentil et charmant que je faillis tomber, sans que personne ne me bouscule… oui, tomber dans les pommes…
On n’est plus qu’à une dizaine de mètres l’un de l’autre… et lorsque le bogoss entame la manœuvre de traverser la rue pour venir me rejoindre, je m’efforce de lui sourire à mon tour… je le regarde avancer droit vers moi et je suis saisi par cette beauté profondément masculine qui dégage de sa personne…
et mon dieu que ses épaules dénudées sont un appel sensuel incroyable… sa chute d’épaule est magnifique… son cou puissant est d’un beauté spectaculaire, puissant et harmonieux à la fois… et que dire de ce putain de torse en V que je devine et dont d’autres t-shirts dans d’autres occasions, des t-shirts autrement ajustés, m’ont déjà dit tellement mais tellement mais tellement de bien…
Oui, dans ses fringues que j’imagine passées vite fait le matin après la douche, il est classe et… vraiment, vraiment beau mec… un petit mec de 19 ans, mais tellement mec… un mec qui respire la droiture et la gentillesse… et c’est bien ça à mes yeux, ce qu’on est en droit d’appeler… la « classe »…
« Salut toi… » me lance-t-il sur un ton presque enjoué, lorsqu’il met le pied sur le trottoir.
« Salut » je lui réponds pendant qu’il me serre la main avec sa prise puissante de mec… et lorsqu’il balance un nouveau sourire qui donne tout leur éclat à ses yeux vert marron magnifiques, je suis conquis et je sais déjà que j’ai perdu tous mes moyens… je sais que je ne saurais plus lui reprocher quoi que ce soit… je suis vraiment trop sensible au charme masculin… et en l’occurrence, c’est bien ainsi, car je n’ai pas à lui reprocher quoi que ce soit… j’ai surtout besoin de l’apprivoiser et d’en faire un pote, et un allié…

C’est la puissance de son corps en contact avec le mien. Ses abdos et ses pecs contre mon dos. Ses jambes contre les miennes. Son bassin contre mon séant. C’est la chaleur de sa peau contre mes reins, mes épaules. C’est la prise ferme de ses mains sur mes fesses. Sa façon de les écarter pour offrir à sa queue l’accès à mon intimité, à ce petit abricot qui lui fait tant envie. J’adore savoir qu’il a envie de s’amuser avec mon corps. De s’amuser en moi. Savoir que dans sa tête il n’y a que son plaisir qui compte. Et que mon cul est le bon endroit pour jouir.
C’est la raideur de sa queue qui s’enfonce en moi, ferme, lente, précise, déterminée. Un mouvement assuré. Sans appel. Une évidence. Ce sont ses couilles qui effleurent ma raie. Les parois de mon ti trou écartées par l’assaut inattendu de ce manche délicieux qui glisse dans un passage encore lubrifié par une jouissance précédente.
Sa queue s’enfonce en moi. Et j’émerge rapidement du sommeil. Après un instant de surprise, je réalise ce qui est en train de se passer… et la surprise laisse rapidement place à l’excitation… je vais me faire prendre, encore… je vais me faire sauter une fois de plus par ce beau mâle qui a pourtant déjà joui un bon nombre de fois cette nuit, et qui a pourtant encore de la ressource dans ses bijoux de mec… sacré mec, réaffirmant par sa puissance sexuelle sa position de mâle dominant après qu’elle ait été ouvertement défiée…
C’est en dégustant cette palette, ce feu d’artifice de sensations érotiques que je suis arraché de mon sommeil pour être propulsé dans une nouvelle dimension de sensualité.
Quelques bruits remontent de la rue, un début de lumière filtre du store baissé, mais la chambre demeure dans la pénombre… je suis sur le ventre … position propice… et tentante apparemment… il est allongé sur mon dos…
Je dormais, il s’est réveillé, il a eu envie de baiser… il a vu mes dunes, ignoré mes infortunes… il ne s’est pas posé de questions… le mâle me pénètre suivant le seul chemin de son envie… il avait envie et il s’est enfoncé en moi, son trou à bite… moi, docile, à sa complète disposition, réveillé par le poids de son corps, par le passage de sa queue… je suis sa chose… son vide couilles…
M’en plaindre ? Non, je ne m’en plaindrai pas, je ne m’en plaindrai plus… j’adore baiser avec lui… vraiment j’adore… plus que tout au monde… être sa chose, satisfaire ses envies de mâle… pourvu qu’il ait longtemps envie de me faire ce cadeau… jouir en moi, sur moi, devant moi… me laisser goûter à son jus brûlant, à cette liqueur d’homme qui m’offre la plus étourdissante des ivresses… me laisser le voir nu… me laisser toucher à sa queue, à sa peau, à son corps musclé… me laisser le sentir sur moi, écrasé par son poids et par sa puissance virile… me faire cette faveur ultime, me laisser le faire jouir… me laisser le voir jouir…
J’ai décidé que je prendrai du bon temps avec lui tant que je pourrai… que je ne lui demanderai rien de plus, que je le laisserai me baiser autant qu’il voudra… de toute façon il n’y a que cela qui nous lie… la baise… alors je n’ai que cette solution pour le côtoyer, de tenter de l’apprivoiser… accepter de n’être que son jouet sexuel… lui rendre mon cul et ma bouche indispensables… lui offrir des orgasmes de dingue, des orgasmes qu’il ne trouvera nulle part ailleurs…
En attendant… en attendant qu’il se rende compte un jour que je suis autre chose qu’une somme de trous… en attendant qu’il soit touché par mes sentiments et non pas agacé… je ne sais pas si cela arrivera… tout ce que je sais c’est que je ne veux pas renoncer à une seule baise avec lui, à une seule goutte de son sperme, tant qu’il voudra de moi…
Sa queue calée en moi, immobile, envahissante, débordante, écartant les parois de mon intimité.
Et là, dans cette pénétration perpétrée dans mon sommeil, le mâle franchit une nouvelle étape dans son emprise sur moi… c’est comme s’il considérait qu’il a tout droit sur moi, qu’il peut me prendre, m’utiliser pour son plaisir, quand il le veut, comme il le veut… et c’est le cas, ça l’a toujours été, et ça le sera toujours, inutile de résister… non, je ne me sens pas humilié par son attitude… j’adore me sentir soumis à lui, j’adore voir, sentir la vibration de son attitude de mâle dominant…
Je jouis de me sentir pris dans le noir, en silence, pendant la nuit… je jouis de l’idée de m’être réveillé en le sentant sur moi, en moi, au fond de moi…
Ses coups de reins commencent, sa queue glisse en moi… il va me baiser… je sais qu'il est épuisé et qu’il va lui falloir du temps, beaucoup de temps, des coups de reins bien puissants pour jouir une nouvelle fois… je sais que je vais prendre cher, que mon ti trou va sentir passer sa fougue masculine… mais je jouis déjà de cette longue domination qui s’annonce… je jouis du souvenir que cette dernière sauterie va laisser entre mes fesses… je sais que lorsque j’ du passage de sa queue dans mon fondement, je vais m’en souvenir pour des jours entiers, des jours où j’aurais souvent l’impression qu’il soit encore en moi… alors je veux r… je veux sentir sa domination et son plaisir de mec m’accompagner le plus longtemps possible… j’ai envie de me faire défoncer…
Je ne vais pas pouvoir le regarder pendant qu’il prend son pied, alors je vais en profiter pour me concentrer sur sa queue qui coulisse en moi, sur sa respiration, sur son attitude de mâle dans la recherche de son plaisir exclusif… je vais me concentrer sur les parfums, les odeurs qui dégagent de sa peau… je vais me focaliser sur le glissement de son manche en moi, sur la prise puissante de ses mains sur mes épaules donnant plus d’entrain à ses coups de reins…
Je vais me concentrer sur les petites variations dans le rythme de sa saillie, je vais savourer et jouir de sa domination… je vais jouir de sa queue qui me martèle en profondeur, de ses couilles qui, tour à tour, percutent et caressent mes fesses… je vais jouir de sentir son plaisir monter, d’attendre sa jouissance… je vais guetter le changement de souffle et de cadence de ses va et viens qui annoncent son orgasme… je vais guetter son râle qui marque la délivrance de cette puissance sexuelle, de cette énergie fécondante qui va sortir de ses couilles et remplir mon ti cul…
Je jouis sous ses coups de bassin de plus en plus amples, rapides, je jouis de cette rage masculine d’atteindre l’orgasme, de se répandre en moi… pendant qu’il me défonce, ma queue frotte sur sa couette… j’en jouis tellement que je finis par lâcher mon jus sur ses draps sans que ni lui ni moi nous ne fassions quoi que ce soit pour…
Je jouis un instant avant d’entendre les petits grognements, et le changement d’allure de ses coups de bassin qui annoncent l’explosion de son plaisir…
J’ai joui, mais je n’ai pas fini de jouir… je jouis encore de le sentir s’extirper de moi dès son plaisir accompli, mon trou béant, humide, brûlant, déjà en manque de cette puissance masculine à l’instant même où elle se retire… j’ai envie de toi, mec, j’ai toujours et encore envie de toi…
Une queue capable de faire jouir deux mecs à la fois… si ce n’est pas un sacré mâle, ça…

Joyeuse année 2016 à vous tous.

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