La Hase Et Le Rapace - 3
Il na pas dû beaucoup dormir, lhomme, vu la façon dont il traîne sa carcasse jusquà son domicile. De fait, à peine arrivé, il sécroule sur son lit.
Que fait Evelyne pendant ce temps ? Elle dort aussi. Mais son sommeil est agité, rempli de rêves érotiques, de désirs, de fantasmes. Elle séveille, épuisée de plaisirs oniriques. Se rendort, la main entre les cuisses. Se réveille à nouveau
Elle en veut encore et encore alors que lui dort dun sommeil de brute. Pourtant, elle refuse de lappeler malgré la petite voix, dans sa tête qui lui susurre de le faire. Elle voudrait quil vienne de lui-même ou quil linvite à le rejoindre. Elle nest pas amoureuse, non. Mais ce mec la baisée comme elle ne la pas été depuis longtemps, en faisant attention à elle, à son plaisir, à ses désirs, à ses orgasmes. Elle se souvient du moment où il lui a demandé de ne pas bouger, de fermer les yeux et de se concentrer sur ce quelle allait ressentir. Elle se souvient de ces instants où rien ne sest passé, où elle a fait le vide. Et puis les mains. Les doigts de lhomme qui la parcourent, qui la cajolent et qui, enfin, la fouillent. Elle se souvient du pouce de lhomme sur son clitoris. Ecrasé, malaxé par ce pouce, son petit bouton la fait gémir. Des doigts lont pénétrée et elle a crié. Elle sest tordue, tétanisée, sous leffet de ces caresses violentes. Quand elle a joui, la cyprine a jaillie entre les doigts de lhomme. Alors oui, elle en veut encore mais elle ne veut pas quémander.
A son réveil lhomme et frais et dispo. Il est seize heures, il a encore le temps de faire les courses et de linviter à dîner. Le repas sera plus frustre que celui de la veille, sa cuisine est basique et ses connaissances en matière de décoration culinaire inexistantes. Mais il ne cherche pas à rivaliser. Il a juste envie de la revoir et de baiser avec elle jusquà ce que petites morts sensuivent. Le dîner, ce nest quun prétexte. Dailleurs, quand il lappelle, il prend bien soin de préciser : « viens nue sous ton manteau.
Elle nobéira pas. Non mais pour qui il se prend ? Nue sous mon manteau, pas question. Mais elle ne shabille pas beaucoup : un body string bleu marine, des bas de la même couleur, celle de ses yeux. Et le tour est joué. Elle est dailleurs certaine que sa tenue émoustillera lhomme, bien plus que la nudité. Elle est prête à le parier et se promet de lui offrir un gage si, par extraordinaire, elle se trompe.
A lévidence il est déçu. Mais il se tait. Il lui montre un fauteuil et linvite à sasseoir tandis quil sert une généreuse rasade de whisky irlandais à la jeune-femme. Elle sen saisit et y trempe les lèvres. Elle a honte. Elle ressemble à une pute au salon dun bordel. Voilà ce quelle se dit. Nue, au moins, il laurait prise : à la spontanéité dont elle avait fait preuve la veille aurait répondu celle de lhomme aujourdhui. Pourquoi fallait-il donc quelle nen fasse quà sa tête ? Ce quil lui demandait nétait pas si difficile. Le sentiment dobéir, de se soumettre ? Pauvre crétine quelle est. Que croit-elle ? Que ce genre de chose se demande avec des fioritures, des « sil vous plaît » et des « mercis » ? Sest-elle sentie humiliée par la demande de lhomme ? Pas vraiment
Et si elle y réfléchit bien, pas du tout. Dune certaine façon, cétait même plutôt flatteur. Cela voulait dire quil aime son corps, quil le désire pour ce quil est, quil voulait quelle comprenne la sauvagerie, la pureté de leur relation. Même sil ne sagit que de sexe. Cest maintenant quelle se sent humiliée. Mais pas par lui. Par elle-même. Parce que son refus a rendu lhomme distant, poli, presque courtois et que cest de sa faute à elle. Alors elle se lève, elle va vers lui pour faire amende honorable, elle se love dans ses bras, pose la tête sur son épaule. Lui ne parle pas. Dune main légère il lui caresse les cheveux. Ainsi, il la console, lui dit quil ne lui en veut pas. Elle se libère, recule dun pas et commence à retirer ses frusques quelle ne veut plus porter, quelle ne veut plus voir.
- Le dîner
dit-il en séloignant.
Elle reste là, agenouillée, idiote, humiliée par son refus. Alors elle se lève, saisit son trench-coat et sen va.
Il faisait froid dehors en ce premier jour de novembre. Elle se glisse sous la couette avec délice. Mais rien ne la réchauffe. Elle tente, en vain, de sendormir mais après avoir fait la crêpe au moins cent fois, elle se résigne. Elle allume la télé. Elle regarde défiler les images sans les comprendre. Elle est frustrée et elle déteste ça. Jamais un homme ne lui a résisté. Jamais un homme ne la traitée comme ça. Il faut dire que cest une croqueuse qui drague, se fait baiser et, jette. Même avec Frédéric qui vient passer chez elle ses jours de permission, elle a été très claire : « je baise quand je veux et avec qui je veux, même si tu es là ! ». Et le jeune-homme a accepté le deal.
Parce quil est jeune, Frédéric.
Insidieusement, elle porte la main à son sexe. Elle se caresse. Sous ses doigts, les petites lèvres de sa chatte souvrent. Elle y glisse un ongle. La dureté de la kératine laboure ses chairs frêles. Elle pense à la bite longue et raide de Frédéric quand elle senfonce dans son vagin. Son doigt tente de la simuler. Elle agite son doigt, lenfonce au plus profond, le renforce dun autre mais rien ny fait. Son pouce écrase son clito. Sans ménagement. Elle fait rouler la panse charnu du doigt sur son bouton comme la fait
elle prend conscience que cest lhomme qui lui a appris ça. Sa chatte sassèche aussitôt. Elle ne veut pas penser à lhomme. Elle veut penser à Frédéric, à son gros vit quelle tente denfourner dans sa bouche sans y parvenir totalement. Mais cest peine perdue. Le charme est rompu. Elle se concentre sur la télé et puis finit par sendormir, épuisée dimages ineptes.
Lhomme non plus ne dort pas. Il rumine. Il voudrait bien ne pas penser à cette soirée ratée mais cest plus fort que lui. Autour de son fauteuil, cest le quatrième livre quil jette sans avoir pu rentrer dans lhistoire. Il est trop occupé de sa propre bêtise pour pouvoir sen extraire. Pourquoi réagit-il toujours ainsi ? Pourquoi se retranche-t-il du monde à la moindre contrariété ? Elle nest pas venue comme il le désirait
Et après ? Il lui suffisait de la déshabiller ou de lui dire de le faire et tout ce serait bien passé. Au lieu de ça, il sest renfermé et la laissé partir. Ce ne sont pourtant pas les occasions qui ont manquées, de rattr le coup : quand elle est venue dans ses bras avant et après sêtre dévêtue, quand elle sest agenouillée
A chaque fois, il pouvait faire ce quil fallait pour la garder. Mais il na pas bougé. Sil voulait la punir, Mordious, il navait quà la fesser.
Sur ce constat, il verse dans la bouteille le contenu du verre quil ne boira pas et sen va se coucher. Heureusement pour moi, se dit-il, rien, jamais, ne mempêche de dormir. Et demain est un autre jour.
Elle a mal (mâle ?) dormi. Mais elle sen fiche. Une pointe danti cerne, un coup de blush et personne ny verra que du feu. Elle sest vêtue dune robe courte à la jupe évasée. Elle la choisie jaune soleil, afin quon ne voit quelle. Elle veut rendre les femmes jalouses et les hommes libidineux. Des bas ? Elle réfléchit : « vais-je mettre des bas ? Si oui, de quelle couleur ? En tout cas, pas de dessous, ni culotte ni soutien-gorge
» Elle opte pour des noirs. Elle sait quelle en fait trop, que la différence de teinte entre la robe et les bas va la désigner comme allumeuse, comme salope. Elle sen fiche, cest exactement ce quelle veut. Certains, peut-être, la prendront pour une pute. Elle sévaluera à laune de leurs propositions puis leur rira au nez. Cette idée qui hier lhumiliait aujourdhui, lexcite. Elle ne sait pas pourquoi
Ou plutôt, ne le sait que trop bien mais elle refuse dy penser.
Elle teinte ses lèvres, juste avant de sortir, dun gloss cramoisi. Elle ouvre sa porte
- Déshabille-toi !
Lhomme entre. Il ne la bouscule pas, il se faufile. Un instant interdite, elle fait demi-tour. Il se retourne et se répète :
- Déshabille-toi !
Elle ne résiste pas. Sa robe tombe, ses bas suivent. Elle est nue.
- Ta chambre
Elle lui montre le chemin. Il a commencé à quitter ses fringues et continue en la suivant. Arrivés dans la chambre, il la bascule sur le lit, la retourne et la prend en levrette. Il senfonce en elle, violemment et commence à la pistonner. Elle, entend à travers les coups de boutoir, les mots quil ne dit pas. « Chienne ! Salope ! Tu étais déjà prête à te faire mettre par un autre
par des autres
Combien ? Deux, trois ?... »
Cest bien ce quelle voulait. Trois queues pour remplacer la sienne, pour oublier la sienne. Et ses mains, et ses doigts, et sa langue, et sa bouche
La cadence de lhomme ralentit. Ce nest pas par fatigue. Elle le sait.
Elle ferme les yeux. Elle fait le vide. Elle sent son corps. Son esprit se concentre sur sa chatte, sur la bite qui la pistonne à lallure dun escargot. Elle sent les parois de son sexe souvrir devant le gland de lhomme et se refermer sur sa hampe. Elle sent le désarroi de son vagin quand il recule et sa plénitude quand il entre. Elle sent les petites étincelles que déclenche, au fond de son ventre, chacun des passages de la queue.
Elle sent, aussi, les bouffées de plaisir qui montent de ses fesses malmenées par les claques quassène lhomme. Elle sent, toujours, les décharges électriques quil provoque quand il pince ses seins. Elle sent, surtout, son souffle qui se coupe quand il écrase entre ses doigts, son clitoris. Elle sent, enfin, tous ses poils qui se dressent quand, dun ongle rageur, il descend la ligne de sa colonne vertébrale pour atterrir dans sa raie.
Elle attend, désespérément quun pouce épouse son anus. Elle sagite. Elle le quémande. Écartant ses fesses à deux mains. Mais, bien quil ballade sur les parois de son derrière, quelques phalanges caressantes, il évite soigneusement da saventurer vers la minuscule ouverture.
Elle geint quil est un salaud, quelle veut quil envahisse son cul ! Mais la frustration est si forte, elle fût si longtemps contenue, quelle se transforme en plaisir emportant la femme dans lorgasme.
Il la laisse se retrouver sans cesser de la ramoner. Et, quand il estime quelle est prête, il la redresse. Le dos collé contre son torse, il la maintient en pinçant ses tétons.
- Jen ai pas fini avec toi, murmure-t-il. Maintenant, je vais tenculer
La jeune-femme ressent un manque désagréable quand le sexe de lhomme labandonne. Mais elle a hâte, tellement hâte de le sentir plus haut dans son anatomie, quelle balaie ce manque comme une poussière malvenue.
Lhomme transperce les défenses dEvelyne. La jeune-femme voudrait aspirer ce vit jusquaux tréfonds delle-même. Lhomme bien sûr, len empêche. Il plante son gland dans lanneau sans en passer la porte et simmobilise. Il serait plus juste de dire que, sans sinvestir plus avant, il imprime à son fer de lance, un léger mouvement tournant, une sorte doscillation.
Bien quil la sodomise pour la troisième fois, jamais il ne lavais prise ainsi. Il sétait, jusqualors, contenté de la ramoner comme tous les hommes savent le faire. Il surprend la jeune-femme par son comportement. Mais il lenchante aussi. Jamais au grand jamais, personne navait pris soin de son anus de cette façon à la fois délicate et perverse. Le gland, qui distend son anneau lui fait un mal que la lente rotation amenuise, transforme peu à peu en ondes bienfaisantes. Sa respiration, bloquée par la douloureuse surprise, séchappe désormais en soupirs généreux. Elle sait quelle va jouir, le cul bercé par limperceptible mouvement de lhomme. Elle voudrait quil en fasse autant. Juste là, à lentrée de son cul. Cette simple pensée libère son orgasme
Elle jouit dautant plus fort quelle freine, se retient. Ses bras cèdent. Sa tête désormais repose sur loreiller. Elle y étouffe son cri. Un cri long, bon, rond comme son anus comblé. Un cri qui vide ses poumons et la met au bord de l. Un cri de bonheur dont elle veut garder un souvenir égoïste. Un cri dont elle ne parlera quà elle-même, la nuit, très tard, une main glissée entre ses cuisses
Une caresse sur sa joue la ramène au présent. Lhomme présente son chibre. Il est gonflé, son gland est violacé. Il est plus large aussi et plus long que dans le souvenir dEvelyne. Elle gobe lengin, se met à le sucer avec application.
Une question la surprend tandis quelle fait danser sa langue tout autour de la queue : « sil me baise la bouche, saura-t-il me faire jouir ? »
Elle sait bien que personne ne peut jouir ainsi. Prendre du plaisir, oui. Mais, pas jouir ainsi. A moins que dune main, légère, on ne travaille le petit bouton rose, à lentrée de sa faille.
La main légère, elle se pose sur ses cheveux. Elles sont même deux, qui la pousse à engloutir le membre. Comme si il avait entendu ses pensées, lhomme lui ramone la bouche. Il la baise et elle le laisse faire. Elle creuse sa langue pour épouser la tige qui coulisse dessus, elle prépare sa gorge à le recevoir. Elle se sent poupée entre les mains qui emprisonnent son crâne. Elle simagine nue, prisonnière, enchaînée, à la mercie de lhomme. Et ça la fait mouiller. Le petit bourgeon quelle a entre les cuisses lagace et la picote.
Il a interrompu ses va et vient. Elle lève les yeux, il la regarde. Ses lèvres forment une phrase quil ne prononce pas :
- Tu es belle !
Trois mots, trois coups de fouet qui laiguillonne et lui donne envie de le faire jouir là, maintenant, dans sa bouche. Mais lui na quune envie, cest la contrarier. Lair de rien, cest bien une punition quil lui inflige : elle aura du plaisir sans pouvoir en donner
Quel meilleur moyen pour gâcher une fête
Lhomme plonge entre les cuisses de la jeune-femme. Elle ne proteste pas. De la langue il savoure les chairs fragiles et tendres des grandes et des petites lèvres. Elles sont gorgées de désir, il sen régale. A petits coups précis, il lape le nectar.
Il na pas encore goûté la jeune-femme. Pas de cette façon en tout cas. Il attendait une occasion, celle-ci lui semble opportune. Il la lèche avec application et beaucoup de plaisir, tentant de la surprendre par des caresses reptiliennes. Le parfum de la femme a un goût de framboise et cela le rend langoureux. Sa langue effleure, caresse, survole sans jamais sattarder. Il se sert de ses lèvres mais jamais de ses dents, donnant à ses bisous une douceur horripilante. Puis quand vient le temps du baiser, il sy livre avec toute la fougue dont il est capable et embrasse le sexe comme on embrasse une bouche. Sa langue pénètre fouille et danse au rythme que le plaisir donne au bassin dEvelyne. Des mains, il bloque comme il peut les cuisses de la femme qui se referment en spasmes sur sa tête. Cest alors, seulement, quil sattaque au bourgeon. Le corps dEvelyne tente déchapper à cette nouvelle caresse, elle nen peut plus. Mais lui, la force à supporter. Il emprisonne la taille dEvelyne entre ses bras, attire les fesses de la femme contre son cou et son sexe contre sa bouche. Il la dévore. Des dents, il pince et mord le clitoris, des lèvres, il laspire vers sa langue qui le titille et lescagasse.
Dans le corps de la femme, les orgasmes senchaînent à une cadence telle quelle ne sait plus où elle est. Elle sait juste quil faut que ça cesse, que le plaisir devient et la jouissance devient douleur. En vain, elle essaye darrêter lhomme, car dans la position quil lui impose, elle ne dispose que de peu de moyens. Et puis, il est parti dans un monde où rien ne latteint. Sauf, peut-être, les coups de talons quelle assène à son dos.
Il a fallu beaucoup defforts à Evelyne pour quelle parvienne à ses fins. Mais lhomme sest enfin arrêté. Il est hébété, à peine conscient de lendroit où il est, de ce quil a fait. La jeune-femme se libère de son emprise. Doucement, elle le prend dans ses bras et lui parle :
- Tu allais me rendre folle, tu sais. Je nen pouvais plus
trop de plaisir, trop de jouissance
Cétait devenu une . Cétait bon et terrible à la fois mais
Il fallait que ça sarrête.
Lhomme la regarde et lui sourit. Il nest ni fier ni gêné, juste lui-même.
- Ouais, ça marrive de temps en temps
Je deviens fou. Dhabitude, cest quand jai trop bu. Là ? Je sais pas ce qui ma pris
Il vaut mieux que je parte, je crois.
Désolé de tavoir foutu la trouille
Elle regarde lhomme se rhabiller sans réagir. Elle na pas vraiment envie quil sen aille mais elle est bien trop fatiguée pour le retenir. Après la séance quelle vient de subir, elle na quune envie : dormir.
Lhomme marche à grands pas rageurs. Il sinsulte copieusement de sêtre laissé emporter. Il se fait des promesses, suspendues à lunique condition quil la revoit. Mais à quoi bon ? Jamais elle ne sera assez dingue pour avoir envie dune nouvelle rencontre. Il sen veut davoir tout gâché. Il avait trouvé la partenaire rêvée, aussi passionnée de cul quil lest lui-même. Pourquoi a-t-il fallu quil aille trop loin ? Une fois de plus
Au moins, cette fois, il a évité le sempiternel discours :
- Tu vas trop loin, je ne suis pas prête (ou pas faite, ou pas capable
, cest selon) pour taccompagner dans ton délire. Jai
Je suis
Et bla-bla et bla-bla
Toutes les femmes qui ont croisées sa route lon quitté pour la même raison. Il leur fait peur. Non pas quil les contraigne ou quil les violente. Il sest toujours arrêté quand elles lont exigé. Mais il les entraîne sur une pente quelles craignent de ne pouvoir remonter, vers le côté sombre delles-mêmes quelles préfèrent ignorer, nier. Il les comprend et il sen veut dêtre aussi égoïste. Pour Evelyne, il sen veut dautant plus que, pour une fois, il avait affaire à une femme libérée du carcan moral. Il na pas su voir ses limites physiques et cela, pour lui, cest impardonnable. « Ça devenait une
» La petite phrase tourne dans sa tête comme un reproche mais également comme un remord. Il voulait la frustrer du droit de donner du plaisir. Il voulait se frustrer du droit den prendre. Cétait une punition à double tranchant, équitable et méritée. Mais encore une fois, il na pas su sarrêter avant que tombe le couperet de la nécessité.
Il se souvient de cette jeune-fille, dix ans auparavant, qui lui était soumise. Ils venaient de baiser, dans la rue, sous les yeux dun spectateur dont quil ne perçut la présence que trop tard. Il donna lordre à Bénédicte daller soulager le bonhomme. Elle le regarda à la fois surprise et blessée, dit le mot et partit. Ils ne se revirent jamais plus. Elle le quitta au téléphone, très tôt, le lendemain. Toutes neurent pas son courage. La plupart fuit sans se retourner. Mais il savait ce quelles pensaient. La belle Evelyne ne ferait pas exception à la règle
La nuit est encore noire, elle se réveille. Quimporte ! La cafetière est à sa place et sa tête toujours sur ses épaules. Donc, tout va bien. Elle regarde couler le café, perdue dans ses pensées. Son corps recèle encore les stigmates du plaisir que lui a donné lhomme : ses cuisses lui font mal, son ventre aussi. Tant de contractions, tant de spasmes, ne peuvent que laisser des traces. Elle est percluse mais heureuse : elle a trouvé son alter ego, un homme capable de laffranchir des limites et de les lui faire dépasser. Elle a hâte de le revoir mais elle pense quil lui faudra attendre que son corps retrouve ses capacités. A cette idée, elle sourit. Cest affaire de deux ou trois jours et, elle retrouvera sa bouche, sa langue qui sait si bien lui donner du plaisir. Dun geste, elle balaye ces pensées. Pas dexcès surtout pas dexcès. Ce genre didée la mène toujours à se caresser et elle ne le veut surtout pas. Son clitoris aura bien des compensations sil sait patienter.
Elle se verse une tasse de café et y trempe les lèvres. Limage delle-même avalant la semence de lhomme lui revient en mémoire. Elle secoue la tête. Chacun de mes gestes va-t-il me rappeler ce type se demande-t-elle agacée. Si cest le cas, lattente va être plus dure que je croyais. Il va falloir que je fasse quelque chose
Mais quoi ? Elle se refuse à « se refaire une bouche », expression quelle emploie quand elle se fait un mec pour oublier le précédent. Dailleurs, elle en serait bien incapable, son corps est démantibulé.
Elle décide quelle appellera sa copine Florence. Florence, cest une solution bien pratique quand elle a besoin de ne pas penser. Florence est une pie qui jacasse sans arrêt sur les sujets les moins passionnants qui soient et qui a le gros avantage de ne jamais linterroger sur ce quelle nomme, en riant, ses « turpitudes ». Florence, cest son amie denfance, elles ont le même âge, à une semaine près et se connaissent depuis la maternelle. Florence est sans doute la seule à ne lavoir jamais jugée tout en lui disant à quel point elle désapprouve parfois (souvent) sa conduite. Décidément, oui. Florence est le médicament idéal pour soigner sa maladie toute neuve. Elle va lui proposer un petit week-end entre fille
Elle lappela le lundi matin mais il ne répondit pas. Elle recommença vers midi puis vers treize heures. Enfin, il décrocha.
- Tu aurais pu me rappeler lui dit-elle tout à trac.
- Je suis au boulot, je ne réponds quaux urgences.
Prends ça dans le nez ma vieille, pour lui, tu nes pas une urgence. Il est toujours aussi goujat, cest rassurant
Telles furent les pensées de la belle tandis quelle disait :
- Je voudrais quon se voie
- Si cest pour parler de lautre jour, pas la peine, je sais déjà ce que tu veux me dire.
- Je ne veux pas quon parle
jai adoré ce que tu mas fait lautre jour
Au bout du fil, cest le silence. Lhomme nest pas sûr davoir bien entendu. Il est à deux doigts de se faire répéter quand il entend :
- Viens quand tu veux ! mais viens vite, jai envie
Et puis il y a un clic. La belle a raccroché.
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