Clotaire Et Pierre - Huitième Épisode
Pierre avait assez mauvaise mine. Quand le réveil sonna pour lui rappeler que fut venue lheure de se lever, il était résolument tenté de jeter celui-ci contre le mur. En fait, sil était crevé, cest parce quil était sorti avec quelques amis ; certes, cétait un vendredi soir, il ny avait pas cours le lendemain
Mais cette petite sortie entre amis ne lui a pas fait que du bien. Aussitôt réveillé par lalarme sonore, il se surpassa pour la couper avant de jeter sa tête contre son oreiller, lesprit encore très brouillé, nayant finalement quune seule envie : retrouver le sommeil
Et comme le destin semblait vouloir sacharner à tout prix, un autre son devait lextraire de sa somnolence : son portable, posé sur sa table de nuit, vibrait deux fois de suite. De piètre humeur, et chacun peut le comprendre, il prit sèchement (et cest un euphémisme) son téléphone
pour lire un SMS provenant de sa banque qui devait lui indiquer le montant de son compte en banque. On en rirait presque.
Une fois le téléphone posé avec un certain fracas qui devait mettre en évidence son humeur de chien, Pierre sallongea de nouveau, se couvrant la tête par son oreiller, encore mal en point car sujet à un soudain mal de crâne.
Il faut croire que cela ne suffisait pas : moins de deux minutes plus tard, la sonnerie retentit dans son petit studio. Cette fois, cen était trop. Pierre nétait pas vraiment croyant, mais il en venait à se demander si le Bon Dieu navait pas une dent contre lui ce matin !
Avec une vitesse uniquement due à sa rage, il enfila rapidement un caleçon avant, le pas marqué, de se diriger vers la porte pour lancer, la voix sourde :
- Quoi ? Quest-ce quil y a ? Quest-ce que cest ?, gronda t-il.
- Cest pour la livraison dun colis, monsieur. Ça semble important
, répondit le malheureux derrière la porte.
- Mais enfin
Vus avez vu lheure quil est, bon sang ?! Il est
(Regardant la pendule située au-dessus de la porte dentrée indiquant quil était 11 heures) Oui, bon, je nai rien dit.
Il navait même pas le temps douvrir complètement la porte que soudain ses lèvres furent saisies par dautres et fatigué tel quil était, il mit quelques secondes à se rendre compte que ce baiser fougueux ne pouvait être que luvre dun seul homme : le sien, Clotaire de Linrac. Celui-ci lia sa langue à celui qui, encore bien fatigué, venait de lui ouvrir la porte. Comme sil semblait saisi par un immense désir, Clotaire laissait ses mains parcourir le corps de son amant encore tout chaud puisquil sortait du lit. Bientôt, ayant retrouvé tous ses esprits
et sa vigueur à en croire la bosse qui se formait au niveau de son caleçon, Pierre se laissait complètement aller, caressant les cheveux de son mec tout en savourant, en se mordant les lèvres, les petites provocations de celui-ci comme les suçons dans le cou ou les légers mouvements de langue près de son oreille. Après cette appétissante entrée en matière, Pierre séloigna légèrement pour admirer son petit ami, qui était plus classe que jamais ; il avait remarqué que quelque chose avait changé chez lui
- Eh bien dis donc, quel accueil ! Tout à lheure, jai bien cru que tu allais sortir avec un croc de boucher pour me le dédier, plaisanta Clotaire à propos de la mauvaise humeur initiale de son hôte.
- Excuse-moi, je suis vraiment désolé mais je suis sorti hier soir, je suis rentré plein comme un tonneau et, depuis le réveil, jaccumule maux de tête et de ventre
La totale, quoi !
- Oui, javais cru comprendre que tu nétais pas frais comme un gardon !
- Dis-moi
Tu
Tu tes coupé les cheveux ?
- Ah, tas remarqué ? Oui, légèrement, mais javoue que je naime pas trop, je regrette presque dy être allé maintenant
- Eh bien pas moi ! Car je trouve que tes deux fois plus canon comme ça ! Franchement, tes superbe avec cette coupe
- Dois-je comprendre que je ne létais pas avant ? sourit Clotaire.
- Idiot
Tu sais bien ce que je veux dire par là !
Puis Pierre, rapprochant ses lèvres de loreille de son amant :
- Javais très, très envie de toi auparavant, mais maintenant que tu as cette coupe qui te va à ravir, je tavoue que je frémis dexcitation
- Prouve-moi quelle te plaît et que je nai pas à la regretter
- Tu sais, je naime pas beaucoup baiser au saut du lit, je trouve ça brut et assez sauvage, mais dis-toi que si je ne te trouvais pas plus canon que dordinaire, je taurais demandé dattendre la fin de ma douche pour ouvrir les hostilités
- Eh ben
- Seulement là, cest moi qui vais les ouvrir, mon grand
Sans crier gare, Pierre, qui navait rien de conserver de son humeur matinale, sétait accroupi pour enlever la ceinture qui serrait le pantalon de son homme avant denlever celui-ci dun trait pour prendre en bouche cette queue qui soffrait à lui.
- Je tai déjà dit que tu suçais divinement bien ?
- Oui, je crois, répondit Pierre entre deux fellations, mais je ne pense pas que ce soit nécessaire que tu me le dises : tes petits gémissements font mon bonheur
- Ne te prive pas, en tout cas ; tu fais ça bien mieux quune fille, je te lassure !
- Ah
Tu veux faire des comparaisons ?
- Non
Allez, continue ! Tu perds ton temps et en plus, tu me fais perdre le mien alors que tu pourrais le consacrer à me sucer comme tu le fais.
Pierre nen disait rien, mais la domination telle quelle de Clotaire dans leurs ébats lui avait beaucoup manqué. Il y avait en Clotaire de la domination et, en même temps, cela navait rien à voir avec tout le cinéma que lon pouvait voir en regardant un film porno. Cétait, ici, quelque chose de presque chic : un amant dominateur qui cependant ne prenait pas son compagnon pour un docile esclave sexuel
Il y avait de lautorité, mais cétait quelque chose dappréciable et de terriblement excitant. Cest dailleurs ainsi que tous les deux sétaient envoyés en lair pour la première fois, rappelons-nous
En fin de compte, la cadence qui était la leur à cet instant ne sapparentait pas à de la routine, mais plutôt à quelque chose de régulier qui ne leur était en rien lassant.
- Arrête, sinon je vais jouir maintenant et je préfère attendre un peu
Je veux que le feu dartifice commence au bon moment, provoqua Clotaire en passant sa main sous le menton de Pierre encore accroupi dont on pouvait lire dans les yeux quil refusait que cela sarrête là ; lun comme lautre voulait aller bien plus loin
- Tu veux me prendre où ? Sous la douche, sur mon lit, sur le bureau ?
- Cette question est-elle fondamentalement essentielle ?
- Je sais pas trop, répliqua Pierre en se levant pour couvrir le visage de Clotaire par des petits baisers amoureux
Je dis ça pour que ce ne soit pas une tannée pour toi de me baiser
- Euh
Je ne pense pas que baiser avec un aussi bon coup que toi soit une tannée
, répondit, non sans une certaine ironie Clotaire qui faisait de même en caressant de ses lèvres les joues de son amant.
- Certes, mais javais besoin de te lentendre dire, mon beau petit mâle en rut
- Tu sais que jai une petite surprise pour toi ?
- Une surprise ? Vraiment ? Tu sais que jadore ça, moi les surprises ?
- Je me doute
Mais elle ne viendra quaprès
- Quaprès quoi ?
- Quaprès que je taurais baisé comme jamais, répondit assez martialement linvité de Pierre qui fit retourner celui-ci de sorte à ce que son fessier lui soit présenté.
Avec tout le savoir-faire qui était le sien, Clotaire, qui venait dôter sa veste et son tee-shirt, saccroupissait à son tour pour caresser, de ses doigts fins, le trou de son compagnon dont il savait quil appréciait particulièrement ses préliminaires, au point de sen mordre les lèvres pour que ses gémissements ne soient pas trop aigus
Après ces jeux de doigt, Clotaire finissait par laisser sa langue parcourir les fesses de son homme jusquà atteindre son trou pour lhumidifier, de sorte à faciliter le coït qui sannonçait. Pour ne pas défaillir, Pierre sappuyait sur la petite commode qui jouxtait son bureau. Il nen pouvait déjà plus dattendre que son merveilleux amant ne le prenne ; il avait très envie de le sentir en lui, ce qui peut paraître un peu déconcertant quand on sait quil y a encore cinq bonnes minutes, il était si crevé quil aurait certainement tué celui qui avait osé le réveiller. Cela étant, être réveillé pour vivre une telle situation na rien de si désagréable, au contraire : comment ne pas rêver dune pareille matinée ?
Pour lencourager, Pierre dirigea sa main vers larrière pour effleurer, avec elle, la tête de Clotaire afin de lui faire comprendre quil commençait réellement à prendre son pied de cette manière. Celui-ci ne put que sen réjouir ; après avoir vérifié, par lun de ses doigts, que la zone était suffisamment humide, il se contentait dindiquer à Pierre, par sa main, le préservatif posé sur le bureau pour que celui-ci lui tende ; ny tenant plus, pressé dêtre pris avec fougue par son invité, il ne mit pas longtemps à se saisir de la protection pour la filer à Clotaire qui, dun seul geste, parvint à lenfiler pour commencer à pénétrer son mec.
- Cela fait cinq jours que je veux visiter ton cul, cela ma trop manqué, souffla Clotaire dans loreille de Pierre.
- Tu peux pas savoir à quel point mon cul te réclamait, plaisantait Pierre de son côté, trop côté de recevoir en lui cette longue queue qui, jusquà présent, na jamais manqué de le satisfaire pleinement.
- Jespère que ton attente aura valu le coup
- Cesse de discuter ; contente-toi de me prendre comme tu sais si bien le faire !
Sur ces mots qui avaient valeur dinjonction, Clotaire commençait une série de va-et-vient suffisamment réguliers pour arracher à Pierre des premiers gémissements. Mais ce nétait quun début ; somme toute, il ny avait là rien dexceptionnel. Cependant, la cadence allait bientôt samplifier de sorte que les mouvements de bassin de Clotaire contre le derrière de Pierre allaient être accompagnés de bruits semblables à des claquements ; bientôt, pour le plaisir absolu de Pierre qui ne cessait den redemander, Clotaire se laisser fesser son amant pour lui faire comprendre quil était enivré par le bonheur de diriger leurs ébats.
- Tu aimes quand je te baise comme ça ?
- Oui, putain
Tu le sais bien que jadore quand tu me remplis mon trou
- Oui, je le sais
Je sais que tu ne vis que pour ça.
- Je ne te le fais pas dire. Baise-moi encore, ne tarrête pas
Encore ! Plus fort !
Leur dialogue était constamment coupé par des gémissements, des soupirs, des respirations perturbées, des démonstrations deffort physique
Quand ils faisaient lamour, plus rien navait dimportance : Clotaire adorait introduire son sexe dans le cul de son partenaire, qui trouvait son plaisir en recevant cette longue queue entre ses fesses dans un rythme effréné. Par le passé, Pierre avait déjà connu quelques aventures ; mais pour autant, aucun de ses précédents amants navait lenvergure, lallure et, finalement, lardeur de Clotaire, dont il savait quil était, et de loin, le meilleur compagnon de luxure quil avait fréquenté jusquà présent. Quand il se donnait à lui, Pierre ne pensait plus à rien : le loyer à payer, les études chiantes à mourir, les courses à faire, la famille à contacter
Tout cela nétait plus que chose tout à fait mineure ; il était entièrement dévoué au plaisir de Clotaire, dont il voulait être également le meilleur amant, ce que Clotaire pensait sincèrement ; il adorait senvoyer en lair avec Pierre, pas seulement parce que cest un bon coup, mais aussi parce quil le laissait dominer le jeu, ce qui ne faisait que lexciter plus intensément que jamais.
Après avoir beaucoup donné, Clotaire ralentissait le rythme pour sextraire de Clotaire, la queue encore raide ; bien quun peu éprouvé par cette première série de coups de rein, il avait encore envie de profiter du cul de son hôte, qui se retournait vers lui pour lembrasser avec passion, déjà motivé pour poursuivre leurs rapports intimes.
- Tes le meilleur amant que je nai jamais eu, confia Pierre, assez essoufflé, en enlaçant son compagnon qui le rit à son tour dans ses bras.
- Je pourrais dire la même chose de toi, répondit sereinement Clotaire tout en caressant le dos puis les fesses de son condisciple. Tu veux que lon saccorde une petite pause ?
- Sûrement pas ! Jen veux encore, je trouve que tu peux faire davantage
- Jespère que tu ne comptes pas me mettre au défi.
- Cest pourtant mon ambition
- Au moins, tu ne devras pas dire que je ne tai pas mis en garde.
Sur ces mots, Clotaire sétais assis sur la chaise qui jouxtait le bureau de Pierre, entrainant celui-ci pour le positionner au-dessus de sa queue, encore bandée. Autant ce fut jusquà présent plutôt sauvage, autant cette fois-ci les choses reprenaient avec davantage de tendresse, puisque les deux amants se consacraient à léchange dun baiser fleuve et passionné, liant leurs lèvres tout en caressant leurs joues respectives.
- Tu sais que cela ne me déplaît pas quand tu es aussi tendre ?, se plaisait à demander Pierre.
- Oh
Et tu me préfères en « mec attendrissant » ou en « mâle dominateur » ?, suggéra Clotaire, le regard appuyé.
- Je suis obligé de choisir ?
- Non
Mais au moins je saurais où vont tes préférences.
- Franchement, je ne tiens pas à ce que tu le saches ; cest un peu ma part de mystère, je trouve ça assez attirant
- OK
Parce que moi, je lavoue, je suis assez grisé par le côté « dominateur ».
- Mais tu nes pas dégoûté quand il sagit de faire preuve de tendresse, nest-ce pas ?
- Oui
Ce nest pas faux.
Et reprenant le cours de leurs rapports, les deux amants séchangèrent un long baiser tout en laissant leurs mains parcourir leurs corps aussi chauds que ne létait leur désir. Assis face contre celle de Clotaire, Pierre, par une manuvre assez subtile, parvint à placer son cul sur la queue de son mec ; il eut cependant plus de mal que dordinaire à faire entrer celle-ci car, il fallait ladmettre, Clotaire était doté quune queue assez impressionnante. Cela étant, et après un petit exercice manuel qui nécessita patience, celui-ci parvenait à insérer sa queue dans le cul de Pierre, tout en offrant un baiser tendre à celui-ci. La cadence était moins rapide, moins tendue. Il sagissait plus, cette fois-ci, dune sorte de communion amoureuse, leur but nétant plus de se faire du bien mais juste de sabandonner dans les bras lun de lautre. Quand tout à coup
- Je crois que je vais jouir
- Je vais me décaler, je veux que tu jouisses sur mon cul
- Cest comme tu veux, mon gaillard !
Et comme promis, Clotaire se laissait aller sur les fesses de son partenaire, qui recueillaient à présent le précieux liquide séminal de son amoureux. Le dominant du couple, épuisé, se redressait pour embrasser celui qui venait de lui faire débuter la journée de la meilleure manière qui soit
- Tu ne mavais pas parlé dune surprise tout à lheure ? rappela Pierre, encore aux anges après cette délicieuse partie de jambes en lair.
- Si
Et jai toutes les raisons de croire que vas être comblé !, répondit Clotaire, le ton enjoué.
- Mon Dieu, quest-ce que cest ? Un voyage en amoureux ? Un week-end avec toi ?
- Mieux, mon garçon ! Bien mieux que cela !
- Tu sas que je bouille dimpatience, là ? Crache donc un peu le morceau, que diable !
- Jai enfin terminé notre exposé !
-
- Avoue que cest génial, non ?
- Super
, lâcha le jeune homme blasé.
- Je me doutais que tallais sauter au plafond
Du coup, je te lai apporté, tu vas me dire ce que tu en penses.
Sur ces mots, Clotaire se détourna de Pierre pour fouiller dans sa sacoche ; dune serviette de couleur grise, il sortit un lot qui semblait comporter une dizaine de feuilles quil tendit à Pierre. Force est de constater quil avait tenu parole : lexposé était terminé. Et quel exposé ! Treize feuilles, trois grandes parties et trois sous-parties, une introduction parfaitement claire et soigneusement rédigée, des références précises, des points de comparaison plus que pertinents
Avec un tel travail, les deux jeunes hommes ne pouvaient pas que sen sortir honorablement : ils pouvaient carrément solliciter une récompense. Pierre nen revenait pas
Plus il feuilletait les feuilles, plus il se rendait compte à quel point son partenaire avait réellement bossé. Quand il levait enfin les yeux des feuilles, il se rendait compte que son partenaire sétait déjà rhabillé
- Franchement, je
- Je te remercie mon amour pour ta contribution tout à fait exceptionnelle qui méritera récompense exceptionnelle une fois la note obtenue !
- Tu menlèves les mots de la bouche, là !
- Je sais, je sais, jai ce talent
Bon, blague à part, quest-ce que tu en penses ?
- Ce que jen pense ? Mais jen suis scié ! Et le pire, cest que de mon côté, je nai proprement rien glandé
- Ne dis pas ça, ste plaît. Ce nest pas ment flagrant, mais tu mas beaucoup aidé, sans quoi, de toute manière, je taurais laissé sur le bord du chemin.
- Même alors que je te satisfais au pieu ?
- Je ne suis pas du genre à mélanger le boulot, et la vie privée, tu devrais le savoir
Ils séchangèrent de nouveau un tendre baiser puis Pierre fit vite denfiler un caleçon pour préparer deux cafés, que tous les deux burent rapidement. Puis lun et lautre quittèrent le studio de Pierre pour sortir à lextérieur, dautant que, bien quil faisait frais, le soleil était au rendez-vous. Côte-à-côte, les deux amoureux discutaient, refaisaient le monde, évoquaient leurs cours respectifs
Tout en marchant, Pierre avait remarqué que son compagnon semblait désormais plus distant. Ce qui lintriguait, évidemment.
- Quelque chose ne va pas ?
- Hein ? Pourquoi me demandes-tu cela ?
- Je ne sais pas trop
A vrai dire, jai limpression que tu es soucieux
Clotaire semblait sapprêter à prendre la parole pour parler de cela mais se ravisa soudainement, regardant par terre et réfutant que quelque chose le tracassait.
- Je suis juste un peu fatigué, ces temps-ci
- Ah ?
- En même temps, je dois bien avouer quà te baiser comme je lai fait tout à lheure, tu ne me rends pas la vie facile, lâcha Clotaire, en souriant à son cher et tendre, qui lui donnait en retour le même sourire amoureux, presque adolescent.
- Tu veux quon fasse quoi du coup ?
- Je ne sais pas
Peut-être pourrions-nous aller au ciné ?
- Pourquoi pas
Mais je ne sais pas sil y a grand-chose, par contre !
- Moi non plus mais on sen fiche. Au pire, nous verrons bien ce quil en est
Tant que je suis avec toi.
Le sourire quaccordait Clotaire à son accompagnateur après ce mot tendre était tellement craquant quil pouvait faire fondre un iceberg. Pierre aurait tout donné pour lembrasser mais se faisait violence pour ne pas le faire ; il savait Clotaire assez réticent à lidée dassurer leur couple. Alors, il évitait, préférant savourer le moment à sa manière. Il se plaisait à les imaginer amoureux, se tenant la main dans la ville, sans craindre les réactions aux alentours, se moquant éperdument de ce que pouvait bien penser tel ou tel ; un monde dans lequel assumer son amour pour une personne du même sexe, sans quil ny ait volonté de provocation, sans quil ny ait de vulgarité
Il enrageait que cela ne pouvait se faire aussi facilement.
- Tu penses quun jour, nous naurons pas à nous cacher ?, demanda t-il subitement à Clotaire.
Les deux jeunes hommes sarrêtèrent à quelques pas de la prochaine salle de cinéma ; ils séchangèrent un regard assez surpris, lun étant étonné de cette question tandis que lautre se demandait pourquoi, dans un pareil instant de bonheur, il en venait à cela.
- Disons que
Je crois que la société doit shabi. Ce nest pas si facile
Le mariage pour tous vient de passer, mais je crois quil faut encore laisser aux gens un temps dadaptation.
- Pourtant, nous, les gays, on ne demande pas vraiment autre chose que vivre comme tout le monde
- Tu sais, je ne me considère pas comme gay ; je suis ouvert à ce que mon cur désire. Pour linstant, je suis très heureux avec toi et je nai pas envie daimer quelquun dautre mais pour en revenir à cela, je me dis que la communauté gay elle-même peut, parfois, ne pas nous faciliter la vie
- Tu veux dire quoi par là ?
- Reconnais que, parfois, la provocation, la revendication, tout cela ne nous aide pas
Je ne suis pas contre lidée de me marier à un homme et je rêve, comme beaucoup de gens, davoir des s. Mais, par exemple, la PMA et tout cela
Je crois vraiment quon navait pas besoin dévoquer dès maintenant ce sujet car la société, déjà très divisée sur la question des droits homosexuels, navait sans doute pas besoin de ça.
- Ben dis donc
Tu nes pas un sacré militant, toi !
- Je suis très amoureux de toi et je suis heureux dêtre à tes côtés quand cela arrive ; mais ne compte pas sur moi pour participer à la Marche des fiertés
A la fin de ce dialogue impromptu, Pierre ne put sempêcher dassumer sa surprise, que Clotaire cherchait à atténuer en ponctuant son argumentation par un sourire assez gêné ; peut-être que lui-même sattendait à avoir ce genre de conversation avec son amoureux, mais Clotaire a pour lui dêtre quelquun dhonnête et droit ; jamais il napprouverait quelque chose quil nestimerait pas et Pierre sen doutait. Mais cela, somme toute, avait une importance assez relative
Lessentiel pour lui, cétait davoir entendu, de la bouche de Clotaire, que celui-ci laimait de tout son cur et que le militantisme gay ne devait rien changer à cela.
Tous les deux entrèrent dans le cinéma, situé dans un grand centre commercial ; sur leur chemin se trouvait Caroline, lamie de Pierre, que le couple ne pouvait éviter ; autant Pierre semblait content de la trouver, autant Clotaire semblait déjà mal à laise, comme sil préférerait que cette rencontre nait pas lieu pour que lon puisse soupçonner son aventure avec Pierre. Mais il ne put faire demi-tour car, non seulement, cela pourrait attirer les soupçons, mais en plus, fausser compagnie nest pas son genre.
- Eh ! Salut, vous deux ! Quallez-vous voir comme film ?, demanda la jeune femme à ladresse des deux garçons.
- On ne sait trop rien
On vient voir ce quil y a, en fait, répondit Pierre qui ne soupçonnait pas le malaise ambiant chez Clotaire.
- OK
Si vous aimez Polanski, il y a « La Vénus à la fourrure », mais sinon, je ne suis pas sûre que le reste vous attire.
- Tu sais quoi ? On va regarder nous-mêmes, sourit Pierre.
- Ça marche, pensait conclure le jeune homme.
- Eh bien, bonne séance, les amoureux !
Immédiatement, Clotaire se figea littéralement pour changer radicalement daspect ; il avait à présent le visage rouge, rouge de ce qui devait être une immense colère liée à lincompréhension de la situation. Cela na pas manqué détonner Caroline et son ami qui, cependant, venait de saisir la gravité du moment.
- Je peux savoir de qui tu tiens cette information ?, demanda Clotaire dun ton si glacial quil en fut presque saisissant deffroi.
- Heu
Eh ben
De
Je le tiens dAmandine, en fait
Elle
, balbutia Caroline avec toutes les peines du monde.
- « Elle » quoi ?! Tu veux un coup de main pour la suite de ta phrase ?, enrageait déjà le jeune homme qui nen revenait pas de cette confrontation.
- Elle ma dit quelle savait
pour vous deux. Que Pierre lui avait dit lui-même.
Le visage encore marqué par la colère, Clotaire tourna sa tête vers celle de Pierre, qui ne savait pas où se mettre.
- Tu peux mexpliquer, je te prie ?
Pierre ne voulait quune chose : mourir ou disparaître sous terre tant il était gagné par la honte, tel un ramenant une bien mauvaise note à lun de ses parents ; le climat fut si délétère que Caroline, sur la pointe des pieds, recula légèrement pour les laisser seul à seul.
- Je
Je ne sais pas quoi te dire
Je suis désolé, je
- Je croyais que nous étions daccord pour garder cela secret mais visiblement, jétais le seul ayant ce point de vue.
- Non, écoute-moi
Je suis vraiment désolé
Pardonne-moi, je ten prie
- Pour linstant, je pense quil vaut mieux séparer nos chemins. Cela vaudra mieux ; autant pour toi que pour moi.
- Non, reste avec moi
Pitié, vraiment ! Je ferais tout pour que tu me pardonnes.
- Pas la peine de remuer ciel et terre pour me convaincre, vraiment.
Clotaire se détourna de Pierre pour gagner la sortie du centre commercial avant de rentrer chez lui. Puis il sarrêta pour faire demi-tour. Il savança vers Pierre qui, tout heureux, pensait quil allait vers lui pour accepter ses excuses. Il allait déchanter
- Pour ce qui est de lexposé, je técrirai via Facebook.
Et le jeune homme avait pris le même chemin pour regagner son domicile. Pierre ne pouvait le voir, mais à cet instant, Clotaire, submergé par lémotion, se reprenait sèchement pour dissimuler ses larmes ; il se sentait trahi par Pierre et ne tolérait pas de voir lexistence de leur aventure déjà connue. Il était bel et bien pressé de rentrer chez lui pour oublier tout cela, ou au moins tenter. Sinon pour pouvoir pleurer sans que cela ne puisse être vu par un quelconque public.
Quant à Pierre, il était désespéré. Il venait de prendre conscience que son amour venait de lui échapper. Il aurait volontiers tout donné pour trouver la force de le rattr afin de le convaincre de ses regrets, mais cest comme si une force naturelle avait suffisamment de poids pour len empêcher. Lui ne pouvait cacher ses larmes ; il venait dassister, impuissant, à la destruction de son couple. Il était désormais persuadé que Clotaire ne lui pardonnerait jamais cette confidence maladroite et que plus jamais il ne voudrait le voir. Il sortit de sa poche un mouchoir visiblement usagé pour sécher, il est vrai maladroitement, les larmes qui parcouraient ses joues pour les rendre humides et chaudes. Le cur aussi lourd quune enclume, la démarche laborieuse, il sen allait prendre le chemin de son studio. Puis il sarrêta au parc avoisinant. Sasseyant sur un banc, il vit un jeune couple sembrassant avec la passion que seul lamour pouvait susciter. Limage le terrassait tellement quil se mit à pleurer réellement. Pour la première fois, il comprenait que lamour avait également le pouvoir de conduire à la souffrance la plus absolue.
[A suivre
]
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