Mister Hyde - 7
7-
Frédérique passa lintégralité de ses journées à soccuper de Franck. Le bout-de-chou accaparait son temps et ses pensées et cétait parfait comme ça. Quand il dormait, elle saffairait dans la maison, dès quil se réveillait, elle le nourrissait et sortait pour le promener. Labsence de son père ne semblait pas trop le marquer bien que, de temps en temps, des pleurs inextinguibles lui signifiaient quelle nétait pas celui quil espérait. Elle réussissait cependant à calmer sa tristesse par ses mamours et ses câlins. Les gazouillis de son calmaient alors le pincement au cur quelle ressentait.
Le lundi soir, seule dans son loft, elle en vint à regretter de navoir pas la télé. Au moins, il y aurait eu du bruit, un substitut de présence. Mais, Frédéric, par webcam interposée lui fit oublier cette idée. Il exigea quelle se mette nue et quelle se caressât pour lui. Il dirigeait et elle exécutait. Elle découvrit un plaisir nouveau.
Le lendemain, un peu après dix heures, il lui envoya un texto : « Allume skype sur ton tèl. » Aussitôt demandé, aussitôt fait. Elle répondit à son appel.
- Montre-moi le plug ! lui commanda-t-il.
Elle se plia à son exigence en glissant le portable sous sa jupe. Il raccrocha. Le soir, il lappela vers vingt-deux heures sans sexcuser de sa goujaterie du matin. Il voulut tout savoir de son fils : ce quil avait mangé, combien dheures il avait dormi dans la journée, sil navait pas trop pleuré
Mais il neut pas un mot pour elle. Il en fut de même les deux jours suivant mais le jeudi, après les questions rituelles sur la santé de Franck, le ton changea.
- Demain, à quinze heures, tu mettras le plug. Je veux que ton cul soit ouvert pour mon arrivée. Une jupe, un T-shirt. Aucun dessous. Si je change davis, tu recevras un texto. Je pense arriver vers vingt heures. Jaurai une faim de loup. Maintenant, tourne-toi ! Montre-moi ton cul et ta chatte je veux voir si tu mouilles et si tu es ouverte.
Il ne fut pas déçu. Le ton de sa voix, les ordres quil donnait excitèrent Frédérique autant que sils avaient été dans la même pièce.
- Cest bien ! dit la voix dans le haut-parleur. Tu mouilles comme une petite salope. Ce soir, tu pourras te toucher tant que tu veux. Mais attention, je te veux en forme demain
Et la voix disparut sans un mot dau revoir.
***
Enfin arriva vendredi. Mais les heures ne passaient pas, elles sétiraient comme de la guimauve. Frédérique nen pouvait plus dattendre. Pour comble de bonheur, Franck dormit comme un sonneur jusquà onze heures passées et refusa obstinément de faire sa sieste. A quinze heures, il pleurait toujours. Que devait-elle faire ? Soccuper de son bout-de-chou ou labandonner trois minutes le temps dobéir à son Maître ?
Bonne mère ? Bonne soumise ? Elle opta pour la maternité. Dix minutes de plus ou de moins, qui saurait quelle navait pas obéi à lheure dite si elle ne le révélait pas. Pour son malheur, Franck ne cessa de pleurer que vers cinq heures. Pffut ! Oublié le plug
A larrivée de Frédéric, rien nétait prêt. Ni le dîner, ni elle. Cerise sur le gâteau, Franck gazouillait dans son lit. Le jeune homme se précipita à son chevet sans la moindre attention pour sa femelle. Dépitée, elle senferma dans la cuisine dans lespoir de rattr son retard. Sur le plan culinaire, au moins, elle réussit.
***
Le petit Franck sendormit dans les bras de son père. Avec délicatesse, Frédéric le posa dans son lit. Il resta quelques minutes à veiller sur le sommeil de l puis, certain quil ne se réveillerait pas, le père quitta son fils. Frédérique était dans la cuisine et Frédéric devait la voir, lui parler. Il descendit les quelques marches en étouffant ses pas. Il se devait dêtre discret pour le bien-être de son fils, pas pour surprendre Frédérique. Le résultat fut égal, elle sursauta quand il entra dans la cuisine.
- Il dort ? demanda-t-elle.
Elle était mère. Et cétait justement à cette facette de Frédérique quil voulait sadresser.
- Il dort. Mais il était nerveux. Que sest-il passé aujourdhui ?
- Il tattendait
Elle lui avait répondu comme dune mère à un père. Nul autre lien nexistait entre eux à cet instant. Ils étaient tous les deux inquiets pour leur ; deux parents, angoissés pour leur progéniture.
Frédéric enlaça Frédérique. Il voulait juste la rassurer.
- Tout va bien maintenant, il dort. Je tai apporté un de ces kits à la con pour que tu puisses le surveiller sans avoir le nez dessus. Ce nest pas bon quil dorme trop près de toi. Tu as aussi le droit de vivre
« Docteur Jec est de retour » pensa-t-elle. « Cest certain, jai le droit de vivre. Mais ma vie est avec Mr Hyde
» Et celui quelle appelait de ses vux survint sans attendre.
- On ne pourra jamais baiser avec Franck à moins de trois mètres. Il faut pouvoir léloigner et le surveiller en même temps.
Il glissa sa main sous la jupe et découvrit labsence du plug.
- Je comprends, dit-il en enfonçant un doigt dans lanus de la fille. Tu étais inquiète, cest normal. Pas de punition. Mais je vais quand même tenculer.
Il lobligea à se pencher sur le plan de travail et dun mouvement brusque, il la prit. En un instant, elle eut le cul en feu. Oooh ! Bon Dieu ! elle nétait pas prête à un tel assaut. Il la lima sans ménagement. Son cul ne se détendait pas, elle avait mal. Mais il sen moquait et continua à la bourrer. Puis il sarracha delle. Elle cria ! De douleur. Dun geste tournant du poignet, il la pivota et la jeta à terre. Les jets de sperme atteignirent sa gorge, son menton, ses yeux, son front. Le foutre inondait son visage. Il lavait possédée et, pour la première fois elle navait pas joui.
***
Franck pleurait dans les bras de son père. Il était impuissant à le calmer et Frédérique ne se réveillait pas.
Il embrassa son fils qui cessa de pleurer.
***
Frédérique ouvrit les yeux dans le silence. Quelle heure pouvait-il être ? Tôt, sans doute. Et puis elle remarqua le berceau vide. Dun bond elle fut debout. Elle chercha Franck dans tous les recoins de la pièce et finit par se souvenir de la présence de son père. Instantanément, elle pensa quils étaient partis, que Frédéric nétait venu que pour lui voler son . Elle cria, angoissée à lidée quil leût enlevé. Mais Frédéric répondit.
- Tout va bien ! Il est avec moi. Descends !
Elle les trouva à la cuisine. Lui, assis devant un bol de café, tenant le petit sur son bras. Elle sourit, soulagée. Elle chancela sous la brutalité du calme qui revenait.
- Pas de croissant. Il était un peu tôt pour sortir et de toute façon, je ne sais pas où tu as foutu la poussette.
Son ton était serein et il feint dignorer son malaise. Mais une trace dans ses yeux exprimait la contrariété. Il lui tendit l.
- Il a mangé et ça fait deux heures quil ronronne. Occupe-toi de lui, je vais chercher le petit dèj.
***
Elle resta seule un bon quart dheure. Franck sétait endormi aussitôt allongé et elle était redescendue dans la cuisine munie du précieux appareil qui lui permettait de surveiller son fils à distance. Le thé était prêt quand Frédéric revint.
- Je suis déçu, dit-il, que tu sois incapable dêtre à la fois mère et femelle.
Elle était prise au dépourvu et ne sut comment réagir. Dun regard il laida, et elle sagenouilla.
- Que tu omettes de mobéir parce que tu es inquiète, je le comprends et je lexcuse. Que tu manques de confiance en moi au point de croire que je vais enlever notre , ça, cest impardonnable. Je suis le père de ton fils et, à ce titre, je ne peux pas vous faire de mal. Je suis aussi ton maître et, à ce titre, je dois te protéger. Dans un cas comme dans lautre, il est impensable que je soustraie Franck à lamour de sa mère. Mais, comme cest ce que tu sembles souhaiter, je ferais dès lundi une demande officielle de droit de visite. Tu peux vaquer. A partir de cet instant, tu ne me dois plus rien et tu nes plus à moi.
Se retournant, il attrapa la cafetière et sen servit un bol dans lequel il trempa une brioche décapitée. Frédérique, elle, ne bougea pas. La femelle était anéantie et la mère aux abois. La femelle prit le dessus et implora :
- Maître, sil vous plaît
Il continua de petit-déjeuner.
- Maître, je vous en prie
Il fit la sourde oreille.
Il était en colère et, comme à chaque fois quil laissait sa colère sexprimer, il avait prononcé des phrases définitives. Les mots avaient dépassé sa pensée et lavaient entraîné dans une diatribe dune mauvaise foi dégueulasse. Il avait prêté à Frédérique des intentions quelle navait jamais eu. Il lavait répudiée à laide de mensonges assenés comme des vérités et pour couronner le tout, il avait brûlé ses vaisseaux, rendant impossible tout retour en arrière. Pourtant, il avait la certitude que rien nétait terminé. Frédérique était toujours là à attendre un geste de sa part. Un geste. Mais lequel ? Elle navait pas réitéré sa prière, elle sétait contenté de rester silencieuse à le regarder. Fière, bien quagenouillée elle lui lançait un regard bleu étrangement serein. Passé le premier choc, elle avait estimé quil fallait faire preuve de patience en attendant que retombe la colère. Elle connaissait son homme et, bien quelle ne leût jamais vu dans des dispositions aussi extrêmes, elle savait que sa raison reprendrait le dessus, bientôt, très vite. Leurs regards se croisèrent, cest lui qui détourna les yeux.
- Je suis un sale con !
Ce nétait pas une excuse, juste une constatation qui nappelait aucun pardon. Elle eut un sourire.
- Je sais, Maître ! fut sa réponse.
Un silence sinstalla. Pas un silence gêné ou glacial. Un silence de circonstance permettant à chacun de retrouver son rôle. Cest elle qui le brisa en se levant et en venant se lover dans les bras de son homme. Elle lavait quitté puis découvert, elle était tombée amoureuse de ce nouveau lui, il nétait pas question de le perdre.
- Je suis toujours votre salope !
Les bras de Frédéric se refermèrent sur elle. La tempête sétait éloignée.
***
Pour quelle obscure raison Frédéric se lança-t-il dans la lecture du bail ? Sans doute parce que le dossier traînait sur lappui de la fenêtre où il sétait assis et que cétait une occupation comme une autre.
Ils sétaient engueulés, ils avaient fait lamour, ils avaient pouponné en chur autour de Franck, ils étaient allés au square comme une famille modèle
Et maintenant que Franck dormait, ils étaient séparés. Elle faisait le dîner et lui ne faisait rien. Il se plongea donc dans la lecture du bail pour tromper son ennui
ou éviter de ressasser tous ses désirs.
Il découvrit que le garage attenant au loft faisait partie du lot loué par Frédérique. Sans doute lignorait-elle puisque la voiture dormait dehors. Il conserva linformation par devers lui en attendant de visiter les lieux. Peut-être que ce garage pourrait avoir une toute autre utilité que dy parquer une automobile
Frédérique apparut, il rangea le bail. Elle était porteuse dune méga salade contenant tous les ingrédients dun repas complet. Il lui sut gré davoir cuisiné froid, la chaleur de la journée en serait tempérée. Il désigna la table basse déjà dressée. Elle posa le saladier, il lui montra son sac. Elle le lui apporta, il en tira un boîte plate et rectangulaire quil lui tendit. En louvrant, la jeune-femme sut tout de suite ce quelle avait à faire.
La boîte contenait une nuisette arachnéenne dun bleu qui rappelait ses yeux, accompagnée dun string coordonné tout aussi transparent. Frédérique séloigna, se cacha, pour les enfiler. Elle voulait apparaître dans toute la splendeur de cette parure sans quil la vît auparavant sen revêtir. Leffet quelle provoqua fut au-delà de toute espérance : elle se sentit émue, désirable, excitée ; lui, était incontestablement fasciné et conquis.
Elle sagenouilla face à lui, selon le plan de table quil avait réglé. Elle était quasiment nue, vulnérable et pourtant, elle était forte. Sa tenue lui donnait un pouvoir qui le tétanisait, le subjuguait à un tel point quelle se sentit, un court instant, maîtresse du jeu.
Cétait sans compter sur la formidable capacité dabstraction de Frédéric.
- Il y a deux ou trois choses que je dois te dire
La voix de Frédéric était tendue, comme si elle lui servait à autre chose quà prononcer des mots. Et, de fait, cétait bien le cas. Il en usait comme dune corde de rappel pour sortir du gouffre de la contemplation où la tenue de Frédérique lavait plongé. Il avait besoin de parler, dêtre dur pour rester dans son rôle.
- Tout dabord, il faut que tu saches que je ninterférerai jamais dans ton rôle de mère. Ce sera sans doute le seul domaine de ta vie que je ne contrôlerai pas. Il pourra nous arriver den discuter mais nous le ferons en tant que parents. Envisager toute autre possibilité serait contraire à mon éthique.
Dans le même ordre didée, saches que je ne ferai jamais rien pour te prendre Franck. Ce serait lui faire du mal et jen suis incapable. Tu mas blessé, ce matin en pensant que je pouvais agir ainsi et cest insupportable. Maintenant, je considère ce débat comme clos. Fais-en de même.
Pour le reste, je suis ton Maître ! Tu es à moi comme le serait une chienne, une chèvre ou tout animal domestique. A ce titre, je ne tolérerai aucune désobéissance et je serai seul juge de tes excuses ou de tes explications. Si je décide de te punir, ce sera sans appel. Tu devras te soumettre à mon verdict. La fellation que jai exigée de toi la semaine dernière, ce nétait pas seulement une pipe, cétait un acte dobédience. Te commander davaler mon sperme, cétait te faire comprendre que pas une parcelle de ton corps néchappe à ma possession. Cela scellait entre nous un contrat tacite qui ne te laisse quun seul droit : celui de tout arrêter !
Le choix de ce que tu manges, de ce que tu portes, le fait que tu aies du plaisir ou non, jen suis seul juge. Cette liste nest pas exhaustive, tu nas plus aucune liberté sans accord explicite de ma part. Il va sans dire que sorties ou visites chez ta mère sont à mettre dans le même sac
Il pourra arriver que je te laisse une certaine latitude pour un temps limité et sur tel ou tel point
Ne considère jamais que cest un acquis définitif. Ce ne sera pas le cas !
As-tu bien tout compris ?
La réponse de Frédérique ne se fit pas attendre. Il exigea quelle résume ses paroles pour en avoir la certitude. Satisfait, il reprit :
- Je vais conserver un double des clés, ainsi, je pourrais venir si lenvie men prend. Après tout, Paris nest quà trois heures de route. Quand cela se produira, je tenverrai mes consignes par texto en tindiquant mon heure darrivée. Jattends de toi que tu sois toujours disponible pour moi. Cela signifie que tu devras me faire connaître ton emploi du temps journalier par courriel ou texto selon le cas.
- Oui Maître ! répondit-elle à la question quil navait pas posée.
Elle était tellement bouleversée quelle ne prit pas garde et parla sans y penser. Un excès de zèle que Frédéric rangea dans un petit coin de sa mémoire.
- Tu peux dîner maintenant mais, comme ça ne serait pas drôle sans un petit challenge, tu vas le faire sans les mains, en prenant soin de ne pas tâcher ta nuisette
***
Frédérique narrivait pas à réfléchir. Manger comme il le lui avait ordonné et sans tâcher ses affaires savérant bien plus compliqué que prévu. La concentration dont elle devait faire preuve occupait la quasi-totalité de ses capacités méningées. Le peu qui restait disponible sattachait à calmer sa colère et son indignation. Rapidement, son visage fut barbouillé de cette saleté de sauce vinaigrette vendue toute faite. Elle se trouva bien punie de sa fainéantise : faire une vinaigrette, ce nest pourtant pas sorcier
Parfois elle levait les yeux vers son Maître. Il avait lair dapprécier le dîner et cala lui donnait du courage pour arriver victorieuse au bout de ce challenge idiot. Elle mit un certain temps, mais elle finit par gagner le pari. Autant son visage était sale, autant sa nuisette était immaculée. Elle regarda Frédéric, fière delle-même. Il lui sourit.
- Vas te débarbouiller dit-il.
Dans son empressement à obéir, elle se leva, une goutte tomba
- Ah ! Je crois que tu as perdu
Elle senfuit vers la salle de bains persuadée quà son retour, la sanction tomberait.
Elle tomba effectivement, sous une forme inattendue. Une leçon de morale.
- Tu dois être concentrée et le rester à chaque instant. Il ne suffit pas de penser que tu as achevé une tâche pour quelle le soit vraiment. Cest moi et moi seul qui décide du début et de la fin des
Il hésitata quelques instants et finit par lâcher le mot.
-
Compétitions que je timpose. Compétition. Cest le bon terme parce quà chaque fois, tu devras te battre pour la remporter. Te battre contre toi-même, dabord et contre les éléments adverses ensuite. Ce que je tai fait faire ce soir en est lexacte démonstration. Tu as dabord dû lutter contre ton refus viscéral dêtre traitée et de te comporter comme un animal. Ensuite il ta fallu te confronter à la vinaigrette qui, comme tu as pu le constater est un ennemi tenace et pervers. Heureusement pour toi, tu connais tous les trucs de grand-mère pour détacher les vêtements. Au bout du compte, je suis assez fier de ton parcours. Tu as su te maîtriser, obéir docilement et réparer ta bévue. Ce nest pas si mal comme résultat.
Maintenant, passe un peignoir et vient tasseoir à côté de moi, jaimerai que nous parlions de Franck.
***
La discussion dura à peine plus dune demi-heure, durant laquelle Frédérique défendit becs et ongles sa position, pour finir par se ranger à lavis paternel. Franck dormirait dans la chambre du bas, quel que soit le jour de la semaine. Ne lexiler en-bas que pour la venue de son père serait bien plus perturbant pour lui que de sy retrouver chaque soir. Lutilité des interphones nen serait que plus entière.
Quand ils furent enfin daccord, chacun réintégra son rôle.
***
En agissant comme il le fit, Frédéric ne laissa pas à Frédérique le loisir de comprendre que, tous les discours quil lui avait servis, nétaient en fait destinés quà lui-même. En parlant comme il lavait fait, il réussit à se convaincre du bien-fondé de ses actions. La jeune femme ne fut quun prétexte, une femme de paille, pour atteindre son véritable public, lui. Ainsi, il put continuer à agir. Pas un instant Frédérique ne soupçonna le manque dassurance de son maître. Il suffisait pourtant dadditionner un et un pour découvrir que cela faisait deux. Par chance, pour Frédéric, elle se concentra sur ce quelle avait personnellement vécu : on ne se méfie jamais assez de son égocentrisme
***
« Je suis une bête » se disait-elle. « Une bête et une idiote ! Jamais je naurais dû accepter de me conduire comme un animal ! Comme une chèvre
cest de chèvre quil ma traitée ! Cest comme une chèvre que jai broutée ma salade
» Déjà, elle ne supportait plus ce cercle vicieux qui la baladait entre la honte et le désir. Pourtant, elle en avait besoin, son corps le lui criait et, à chaque fois, son esprit abdiquait. Cétait insupportable et délicieux. Chaque humiliation lui apportait tant de promesses, tant de satisfaction. Tout à lheure, il lui avait dit être fier delle. Quelle plus grande récompense pouvait-elle espérer ? Tout cela tournait dans sa tête et lenivrait. Cétait
comme le martinet martelant sa chatte jusquà la faire jouir : une petite douleur pour un immense plaisir.
Elle allait exprimer son désir quand elle prit conscience de son regard sur elle. Ses yeux riboulaient de tendresse mais ses lèvres étaient habillées de ce sourire narquois qui la giflait si fort. Elle se tut. Elle se fit docile. Implorant mentalement son Dieu de lui ordonner quelque chose, nimporte quoi.
Mais il resta muet. « Le silence, lui avait-il expliqué il y a fort longtemps, est larme la plus imparable qui soit. Le silence, cest une bête féroce qui vous laisse impuissant. Il est le soleil dIcare. Il vous fait fondre à tout jamais. Une seule solution, fuir. Partir ! Vite ! Loin ! Et revenir tard ! Si jamais on revient
Il tue lespoir. Sans rémission possible. »
Frédérique ne partit pas. Elle attendit. Patiente. Elle retourna contre son maître larme quil sétait choisi. De guerre lasse il aboya :
- Au lit !
Ils ne se touchèrent pas de toute la nuit.
***
La journée du dimanche passa comme celle du samedi, les engueulades en moins. Frédéric attendit impatiemment le soir, Frédéric se montra moins nerveux. Quand Franck fut couché, ils se firent livrer une pizza. En attendant, il se servit un whisky, Frédérique se dénuda. Cest dans la tenue dEve quelle alla ouvrir au livreur.
Ensuite ? Ils dînèrent. Frédéric interrogea la femme sur le ressenti de sa nudité face à un inconnu. Elle lui livra toutes ses sensations.
- Ce que jai éprouvé ? De lamusement, pour sa gêne. Il était rouge comme une pivoine et cétait vraiment drôle. Ensuite, jai eu du désir. Pas pour lui spécialement, juste pour linconnu, pour un inconnu. Jai payé, pris la pizza, fermé la porte
Et je me suis rendu compte que ce nétait pas ça. Javais du désir, oui. Mais pas pour linconnu. Javais du désir pour deux hommes. Vous en haut, lui en bas. Vous qui avez droit de me prendre quand et comme bon vous semble, lui qui aurait pu profiter de loccasion qui lui était offerte. Et moi ! Entre vous deux. Prise devant et derrière en même temps. Voilà exactement ce que jai ressenti.
Frédéric vint sasseoir sur la table basse, juste à côté delle. Tendrement, il prit son menton entre son pouce et son index replié et leva le visage de la jeune femme jusquà ce que leurs yeux se croisent.
- Ainsi, tu as envie dêtre prise par deux hommes
Formulé de la sorte, Frédérique se rendit compte du cynisme de son fantasme, cétait comme dire à son Maître quil était impuissant à la combler. Or, pas une seconde elle navait songé à cet aspect des choses. « Lattention toujours en éveil », elle avait manqué à cette règle. Frédéric allait la punir, cétait certain
- Je sais que ce nest pas très confortable mais vas tallonger sur la table. Il y a un bandeau et un bâillon, passe les avant de tinstaller. Jai deux petites choses à préparer que je veux que tu ignores.
Frédérique sinterrogea sur la sauce à laquelle elle allait être mangée mais elle obéit sans attendre. Le mystère lexcitait. Pendant ce temps, son maître saffairait, il fouillait dans son sac. Puis elle lentendit marcher, descendre les marches, remonter quelques instants plus tard
Que manigançait-il ? Elle nen avait pas la moindre idée. Elle perçut un bruit de roulement, celui dobjets quon pose. La crainte qui montait en elle allait de pair avec lexcitation qui la taraudait. Elle trouva cela délicieux.
- Retourne-toi ! dit-il
Elle sinstalla sur le dos. Ses seins, quelle avait comprimés en sallongeant sur le ventre, pointèrent jusquà lui faire mal. Ils en rajoutèrent quand Frédéric lia sa cheville au pied de la table.
Elle fut bientôt écartelée. La main de Frédéric se promena sur elle, apaisant ses craintes, augmentant son désir. Et puis ce fut la voix de son Maître qui vînt couler dans son oreille des mots suaves et prometteurs. Elle se laissa bercer par la musique de ses paroles. Enfin, elle perçut un chuintement puis le silence. Une odeur quelle ne définit pas chatouilla ses narines. Cétait chaud et ça sentait bon. Elle nen savait pas plus. De plus belle, elle huma. Une saveur dagrume
de lorange se dit-elle. Un dessert, sans doute : un quartier dorange flambé au Cointreau
Elle neut pas le temps de sinterroger sur la présence du bâillon. Un liquide chaud, presque brûlant coula sur son sein pour sy figer dans la seconde. De la cire ! Il faisait fondre une bougie et répandait la paraffine bouillante sur sa poitrine. Elle aurait bien poussé un cri mais le bâillon len empêcha. Prisonnière, aveugle et muette, elle neut dautre choix que de se laisser envahir par les sensations de cette nouvelle . Cétait ardent mais doux aussi. Elle ne sexpliquait pas que ces deux opposés se rejoignent pour simbriquer en elle comme sources de plaisir. Cétait pourtant le cas. Les rigoles qui suivaient les courbes de son corps déclenchaient ses frissons. Les frissons accéléraient les battements de son cur. Et son cur semballait en des désirs torrides. Ses yeux ouverts sous le bandeau dévoraient les étoiles. Elle était chaude, son sexe sirriguait à un puits inconnu. Elle devint fontaine.
Mais un point, puis un autre, comme des gouttes de pluie, rafraîchirent son ventre. Du canyon séparant sa poitrine se déversa un torrent de montagne rapide et glacial pour former un lac dans son nombril. Un lac qui, vite, déborda, pour glisser sur ses hanches et bientôt sous ses fesses. Ses fesses, où moururent, à linstant, les ultimes vestiges des micros icebergs.
Frissons chauds. Frissons froids. Tout était mélangé mais rien navait tiédi. Lesprit de Frédérique était tourneboulé, son corps écartelé était comme possédé. La symbiose parfaite de tous les opposés.
Quand elle sentit les mains craqueler les collines, quand elle sentit la bouche avaler leau du lac, elle explosa. Comme ces vieux volcans dont la pluie a figé la lave mais qui bouillent en dedans, de leur feu millénaire.
La bouche, fraîche encore, grimpa le col et puis, alla se perdre dans une autre vallée, plus basse, plus secrète
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