L'Appétit D'Une Lectrice
Je reçois souvent, via mon éditeur, des lettres dadmiratrices. Il faut dire quaprès trois best-sellers, à trente-cinq ans, jarrive enfin à vivre de mon art. Je suis devenu, grâce à mes livres et aux médias, ce quon appelle, un personnage public. Ce jour-là, alors que je mapprêtais à donner une interview pour un célèbre magazine, et que je terminais à toute allure un café crème dans mon bistrot préféré, un jeune homme, casqué, fit irruption dans le bar et me demanda si jétais bien monsieur X. Je répondis par laffirmative. Comme je mapprêtais à devoir signer un énième autographe, je plongeai dans ma sacoche dordinateur pour extirper un stylo. Le temps que je relève la tête, le jeune homme avait pris son envol. Je le vis qui enfourchait un scooter et disparaître dans la jungle urbaine. Je me demandais à quoi tout ceci rimait, quand je remarquai une enveloppe posée sur la table
La lettre contenait une photo. Un très beau corps de femme, en porte-jarretelles allongé sur un lit, la tête floutée, dans une pose suggestive avec au dos, un simple mot :
Si vous voulez en savoir plus, écrivez-moi
, suivi dune adresse mail.
Toute la journée jai beaucoup hésité. Jétais tiraillé entre lenvie furieuse daller plus loin et lintuition que le plaisir à prendre serait aussi profond que les pièges à éviter.
Ce soir-là, alors que ma femme était couchée, joptai pour une petite prise de risque. Jimaginai un premier pas sans conséquence. Jenvoyai donc un simple « Qui êtes-vous ? » avant de me remettre au travail.
Je pensais que la réponse arriverait le lendemain et que jallais pouvoir me concentrer sur un article, que je devais écrire de toute urgence.
Trente minutes plus tard, alors que javais réussi à chasser cette maudite photo de ma tête, je reçus un mail qui me disait :
Je suis aussi une voix, dailleurs, si vous voulez continuer, allez vous rassasier au restaurant Jean de la Fontaine.
Le mail était accompagné dune pièce jointe. Je louvris. Cétait une bande sonore. Dabord, je nentendis rien, puis peu à peu, je distinguais une respiration, des bruits de succion, le souffle se fit de plus en plus net, jusquà se transformer en effluves de souffre. Cétait si joli à entendre que mes mains enserrèrent mon sexe, jétais tendu à lextrême. Il y avait de la poésie, de la mélodie et le diable en personnes dans ces rires, ces râles et cette intimité. On discernait clairement, des doigts, qui surnageaient dans un plaisir brut. Mon inconnue coulait littéralement et joyeusement, ne cachant rien de son plaisir, et je me branlais à son rythme jusquà ce cri. Un cri du cur et dabandon
Je travaillai alors une bonne partie de la nuit et jalternais de temps en temps avec une petite pause musicale
Le lendemain, surexcité, après avoir pris une douche pour me laver de mes péchés nocturnes, jallai prendre mon petit déjeuner dans létablissement quelle mavait indiqué. Je demandais sil y avait un colis pour monsieur X et le garçon, qui mattendait depuis la veille, alla le chercher derrière le comptoir. Jétais dhumeur joyeuse et je commandai une coupe de champagne. Puis jallai tranquillement minstaller en terrasse au soleil
Je posai le paquet sur la table, et jallumai une cigarette. Jétais fiévreux. Jessayais dimaginer ce que le carton pouvait bien contenir. Au poids, il était presque vide, cétait donc un tout petit objet
Ny tenant plus, je le déballai et trouvais enveloppé dans du papier bulle, un porte-clefs lumineux auquel était accrochée une petite clef, sans doute celle dun cadenas ainsi quune feuille de papier blanche pliée en quatre. Lécriture était belle et arrondie :
Ce soir, tu devrais proposer à ta femme daller au restaurant « lAntre dOrphée » ! Prends bien soin de ce porte-clefs, cest la clef du bonheur
Je serai moi aussi accompagnée
Tu ne me remarqueras pas sauf si tu suis la lumière
Décidément, je ne comprenais rien.
Jenvoyai donc un texto à ma meilleure moitié qui accepta avec plaisir linvitation. Jallai lui acheter un collier en or blanc pour apaiser ma conscience et je passais tout le reste de la journée à négocier avec mon éditeur les droits de mon premier roman pour une adaptation cinématographique.
À 19 heures, je rentrai à la maison et impatient, jenfilai mon plus beau costume. Le restaurant était très chic. Trois étoiles au Michelin. On nous servit dabord un amuse-bouche et jessayais désespérément de deviner qui pouvait être la licencieuse inconnue qui mavait tant gâté. Jespérais que ce nétait pas cette blonde qui narrêtait pas de me reluquer, elle ne me plaisait pas du tout. Était-ce la brune du bar accompagnée dun homme qui avait lâge dêtre son père ? Peut-être bien. Finalement non
Jessayais tant bien que mal de me dédoubler pour découvrir cette femme sans que la mienne ne découvre mon jeu.
Dun coup, un serveur portant un cocktail enflammé chanta joyeux anniversaire et se dirigea vers une table perdue sur notre gauche. Je distinguai mal la fille et jessayai de voir si cétait elle
Bingo, elle me regardait elle aussi. À moins que ce ne soit le serveur. Je décidai daller aux toilettes pour en avoir le cur net. Quand je passai devant elle, elle me fixa elle aussi. Suivre la lumière cétait plutôt bien trouvé. Elle était jolie, sans être belle au sens strict, mais elle avec quelque chose de sexuel dans le regard qui mexcitait.
Je me mouillai le visage, remontai les escaliers, lançant un sourire à ma belle inconnue, sourire quelle me renvoya, et me rendis compte que ma femme était en train de discuter avec Charles, le mari de sa supérieure hiérarchique
Je lui lançai éberlué :
Que fais-tu là ?
Je posais la même question à ta femme. Lara minvite au restaurant, je lattends. On fête sa promotion, on lui a annoncé aujourdhui quelle était officiellement passée directrice commerciale !
Merveilleux, viens tasseoir avec nous !
Mais non on ne va pas vous déranger
Mais pas du tout, tu rigoles !
Je comptais sur cette intrusion inespérée pour me sentir plus libre déchanger avec mon inconnue des regards cachés et complices.
Tout dun coup, jeus un flash. Et si cétait Lara ?
Charles sinstalla juste devant moi, si bien que ny voyant déjà plus clair, je ny voyais plus rien du tout. Jessayais tout en lui faisant la conversation de me remémorer chaque scène pour trouver des indices quand sa femme fit son apparition.
Elle était divine comme à son habitude. Elle portait une robe longue, décolletée, fendue sur le côté, laissant apparaître ses longues jambes et des seins qui semblaient flotter aux quatre vents
Elle parut ouvertement surprise de nous voir, ce qui calma mes doutes, mais tout de même. Lara était un fantasme ambulant.
Je fus assurément déçu quand elle nous expliqua quelle avait appris la bonne nouvelle à 14 heures et que cétait leur patron qui leur offrait le repas pour fêter sa promotion et la remercier des bons chiffres obtenus cette année.
Bientôt, je vis aussi passer mon inconnue qui me lança un regard appuyé et qui partait. Le couple allait sans doute dîner ailleurs. Jétais donc maintenant persuadé que cétait elle et je me re-concentrais alors sur ma notre quatuor
Je me mis alors à triturer machinalement dans ma poche le porte-clefs, pensant au plaisir quil promettait et au mail que jallais sans doute recevoir tard dans la nuit, je vis plusieurs fois Lara sursauter et me sourire alors que jappuyais par intermittence sur linterrupteur de la diode.
Son mari lui demanda si ça allait.
Je venais de comprendre
Je réessayais, en maintenant mes doigts sur le bouton, ce qui la fit se cambrer sensuellement et se maintenir dans cette position. Elle se mit à rire. Je reconnus la mélodie immédiatement. Et son rire me fit tellement bander que je faillis éjaculer dans mon caleçon.
Une suite ?
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