Laure Et Aurelie 5

Tout au fond du camping, dans un coin, à l'abri d'une haie de thuyas, à l'emplacement choisi minutieusement et réservé par Laure, les occupants de la première voiture ont commencé à dresser deux tentes.

- Tu verras, mon lieutenant bien aimé, c'est un havre de tranquillité, éloigné de la foule, à l'abri des indiscrets. Qu'est-ce que tu penses de mon choix ? Tu sais dresser une tente ? Dis-moi, tu m’as vraiment étonnée par ton audace, dans la voiture. En voilà des manières ! Après ma conduite de ce matin, je n’ai pas osé te remettre en place devant Gilles et sa copine de peur de te fâcher encore. Tu attaques toujours aussi franchement, au niveau du siège, l ’intimité des filles qui conduisent ? Émilie a eu peur d’aller au fossé.

- Il faut tenir compte de l’ambiance dans l’auto. Te ranges-tu parmi « les filles » ? Pour moi tu es l’exception et je me suis senti obligé de démontrer devant tes deux amis que tu n‘étais pas n‘importe quelle fille. Émilie a protesté, mais sans conviction, pour nous titiller, alors qu‘elle faisait pire dans notre dos. Mais je n’ai pas eu l’impression de t’incommoder beaucoup. Au contraire, ta façon de refermer l’étau de tes cuisses sur ma main et par deux fois, m’a paru être un encouragement à insister malgré les réflexions de ta copine. Me suis-je trompé ?

- Voilà la pire explication que j’ai entendue. Tu insinueras bientôt que j’ai tes doigts fouineurs à monter à l’assaut de mon minou et a franchir le bord de ma petite culotte. Tu as profité de l‘impossibilité où j‘étais d‘empêcher l‘agression pour parfumer ton index !

- Une agression, est-ce ce que tu ressentais ? J’ai cru que je ne faisais rien d’exceptionnel tant tu gardais la maîtrise de ton volant alors que je découvrais tes parties cachées.

- Avais-je une autre solution ? Tu aurais préféré que j'ouvre les jambes au lieu de bloquer ta main avant de la laisser me pénétrer?

- Tu aurais pu arrêter le véhicule, faire une halte et me rappeler discrètement tes règles de conduite au lieu de me serrer comme un prisonnier pris au piège de ta culotte.

Ou de tes muscles.

- Quel culot ! Dis tout de suite que je suis une fille facile , que j’ai l’habitude de me faire caresser la chatte quand je conduis. Allez, ose.

- Je ne parle pas de ce que je ne connais pas. Pourtant l’idée m’a effleuré. Pardon, je plaisante mais nous allons nous fâcher pour de bon. Quant à mon index, j’éviterai de le laver et quand tu t’éloigneras ton odeur me restera.

- Oh ! Que tu es chou et vicieux. Non, mon indignation est feinte et j’avoue que j’ai adoré ta façon de me pardonner en trempant tes doigts dans mon bénitier. Je te prie de recommencer dès que l’occasion se présentera. Il ne faudra pas t'arrêter sur le seuil. Je t’aime. Bisou!
Viens, je te présente aux quatre autres. Voici Sylvestre et Marc, les jumeaux: je les confonds toujours. La blonde c'est Marie, l'autre c'est Léa. Qui est avec qui ? Je crois que les filles se trompent également parfois de partenaire, c'est à mourir de rire !

- Où est passé ton chéri ? demande le jumeau à mèche blonde sur la tempe droite.

En voilà un qui cherche Raymond. J'ai l'oeil et je ne passerai pas vingt-quatre heures à me tromper sur l'identité des frères.. L'autre, Sylvestre, a une petite cicatrice sur la lèvre supérieure. La chef de l'expédition reprend les commandes :

- Sylvestre tu as les papiers, tu as tout réglé à l'intendance ?

Sylvestre s'avance,

- Oui, ma Laure chérie,tout est en ordre.

C'est donc Marc qui a posé la question restée sans réponse. Il s'obstine, innocent ou sarcastique, pas ment délicat pour moi:

- Sois le bienvenu. Tu es le remplaçant de Raymond ? Il va falloir nous aider. C'est lui qui montait les tentes d'habitude. Je te présente ma copine, Marie. Je sais, c'est difficile pour beaucoup. Écoute, c'est tout simple: Marie est blonde, une vraie blonde, tu pourras vérifier et moi, Marc, j'ai une mèche blonde. Méfie-toi, parce qu'il arrive que Sylvestre se teigne une mèche de la même couleur.
Marie s'est déjà laissé prendre au piège. Ce n'est pas grave car ce qui lui appartient m'appartient et vice versa. En général les filles trouvent ça génial. Sylvestre fréquente Léa, quand elle ne se réfugie pas chez moi. C'est chouette hein.

Tout le monde s'esclaffe. Je suis tombé dans une bande d'échangistes. Ce n'est que pour vingt-quatre heures. Marie s'avance et me fait une bouche, Léa l'imite, mais après avoir reposé la lancinante question à sa façon:

- Alors tu remplaces Raymond dans la tente de Laure ? Bienvenue, les amis de mes amis sont mes amis. Je t'embrasse et je me tiens à ton entière disposition pendant ton séjour parmi nous. Ne sois pas timide .Quand Laure reprendra Raymond, viens me voir: tu me bottes !

Laure feint de n'avoir rien entendu, absorbée apparemment par la lecture des documents, Émilie fait des signes désespérés pour arrêter les questions embarrassantes et Gilles invite tout le monde à venir décharger notre véhicule.

A mon bras droit Léa me demande si je suis capitaine ou colonel, en se tordant, car derrière elle Marc lui tapote les fesses avec une brindille. Sylvestre a pris le bras de Laure attardée. Ça discute ferme; plusieurs fois, j'entends « Raymond ». Émilie vient se frotter sur ma gauche. Gilles, en tête, a passé son bras sur les épaules de Marie, laisse retomber sa main sur un sein le plus naturellement du monde au moment où il nous demande de nous presser. Marc s'est déporté et Émilie supporte en riant la brindille qui soulève l'arrière de sa jupe.

- Hé, le nouveau, regarde quel beau cul elle a. Une pure merveille. Comment tu t'appelles ? Adrien ? … c'est original et rare, je n'en connais pas d'autre. Alors, tu regardes. Émilie avance plus vite, il ne peut rien voir.

- Tu m'embêtes.

Il l'att, la sépare de mon bras et traîne. Lui aussi veut savoir et de nouveau j'entends « Raymond » à plusieurs reprises. Léa ne voudrait pas être la seule à oublier l'absent.
Elle s'empare de la place vacante et m'informe :

- Ce Raymond, un dieu au plumard. Il a une queue, je ne te dis pas. Et il s’en sert divinement. Il m'a fait jouir comme une folle . Marie te dira la même chose, Émilie aussi. Mais Laure pourra t'en parler mieux que nous. J’ai les oreilles pleines de ses miaulements quand elle jouit. Les derniers temps, ça allait moins bien entre eux, parce que le boucher, le père de Laure, avait menacé de tailler les oreilles de son amant. C'est marrant, non ? Je ne comprends pas, hier encore ils se…? Enfin , tu ne veux pas un dessin, tu comprends ? Tu sais pourquoi il n'est pas venu ? C'est à cause de toi ? Ah ! Je suis indiscrète ?

- Non, continue, tu m'intéresses. Tout ce qui touche à Laure m'intéresse.

- Pour toucher Laure, Raymond peut dire qu'il l'a touchée. On n'a rien contre toi, tu sais. Simplement tu es moins rigolo que lui. Mais, si tu as envie de "me toucher", comme Raymond sait le faire, je ne dirai pas non. Et j'ai observé Émilie : Attention elle ne te quitte pas des yeux. Tu plais. J’espère qu’il y a du solide dans ce bel uniforme et que tu tiens le « garde-à-vous »? Hi hi !

- Allez la pipelette, rends moi mon homme. Adrien, que t'a-t-elle raconté ? Des bêtises, tout sûr. Ne crois pas tout ce qu'ils peuvent te dire, ils ou elles font le même coup pour chaque nouveau ou chaque nouvelle. C'est leur « bizutage».

J'ai connu un bizutage à mon entrée en prépa, un autre à l'arrivée à l'école des officiers de réserve. C'était du pipi de chat à côté de ce que je viens de subir. J'ai le moral dans les chaussettes, une seule envie: foutre le camp au plus vite et ne plus jamais revenir.

- Tu en fais une tête. Tu n'es pas heureux d'être avec moi ? Cette idiote t'a parlé de Raymond ? Je vais lui mettre des claques.

- Pourquoi à elle plus qu'à tous les autres ? Je n'entends que ce prénom : tu en parlais avec Sylvestre, Gilles avec Marie, Marc avec Émilie.
C'est le grand sujet de conversation. Si tu m'en parlais, je pourrais avoir l'air moins idiot ?

- Bien, nous en parlerons quand nous serons installés. D'accord ? Au boulot. Tu peux porter ce sac ? Je prends celui-ci et on retourne à notre place. On va tourner notre entrée vers les leurs mais on s'approchera le plus possible de la haie. Je veux préserver notre intimité si tu es d’accord. Les copains et copines ne sont pas toujours discrets et aiment partager leurs plaisirs. Il faudrait parfois des boules quies.

Nous déballons, rangeons les piquets de sol, les deux petits mâts articulés, les cordes. Nous ne sommes pas les premiers occupants , l'emplacement a été entouré d'une butte dans le haut et, sur les côtés, une rigole dirigera l'eau dans la pente en cas de pluie. Laure et moi sommes synchronisés. Nous pouvons aller chercher les tapis de sol et les sacs de couchage? Plutôt, le sac de couchage pour deux personnes, grâce à un croisement des fermetures. Encore un indice. Raymond a pu partager la couche et"toucher". Ce soir je le remplacerai.

- Je te conseille de te changer de tenue. Ils vont continuer le bizutage et ton uniforme pourrait souffrir. Tu le plies soigneusement, tu l'emballes et nous le cachons dans le coffre de ma voiture avec ton képi. Ce sont encore des gosses qui aiment se déguiser. Tu enfiles ce survêt. Ici il vaut mieux porter une tenue décontractée. Excuse-moi de rire, mais je n'ai pas trouvé moins large. Viens, embrasse-moi et promets-moi de ne pas te fâcher s'ils en profitent pour se moquer de toi. Les garçons surtout, ils sont un peu jaloux parce que les filles te font les yeux doux. Émilie te trouve si beau. Je t'arrache les yeux si tu lui fais la cour.

- Première bonne nouvelle. Tu es jalouse, donc tu m’aimes ! Si tu savais comme ils m'ont fait peur. Embrasse-moi encore. C'est vrai que tu étais trop gênée pour m'embrasser quand je suis arrivé ce matin ?

- Mais non, qui t'a dit ça ? Je t'ai embrassé.

- Tu demanderas à Aurélie, j'ai eu droit à deux petits bisous de politesse, comme une vague connaissance.

- Tu as vu que j'étais ennuyée, énervée. Viens plus près, je veux me faire pardonner.

Debout contre la 309, indifférents aux passants qui en ont vu d'autres, serrés l'un contre l'autre, nous échangeons un baiser magique, elle me rend courage et énergie, le moral remonte, au passage réveille le dau en berne. Laure le sent, me complimente et promet de me rendre bonheur et joie de vivre avant la nuit.

Les jumeaux sont toujours empêtrés dans les piquets, leurs tentes ne veulent pas connaître la verticale. Heureusement Gilles vole à leur secours. Au lieu de se faire réformer, ils auraient dû faire leur service militaire, ils y auraient acquis un minimum de rigueur et sauraient se débrouiller pour des tâches aussi élémentaires. Je ne suis pas Raymond, qu'ils apprennent à se démerder. Alors s'ils me trouvent des airs de clown dans mon accoutrement, je ne m'en soucie guère.

- Tu as bien travaillé. Enfin un amour qui n'est pas manchot. Bande de bons à rien. Et tâchez de nous laisser en paix. Bizutage terminé. Nous allons nous promener seuls au bord du lac.

- OOOOOOOOOOOOOOhhhhhhhhhhhhhh, font les six autres.

En amoureux, main dans la main, dans le calme nous pouvons enfin nous expliquer entre deux baisers.

- Tu m'aimes un peu ? C'est sûr ? Plus?

- Si je n'étais pas un peu amoureux de toi, je serais en Allemagne. Là-bas aussi il y a de belles filles !

- Tu es venu pour moi seulement ? Tu voulais me parler, m'expliquer. Je t'écouterai, il faut tirer les choses au clair. J’ai hâte de savoir.

- Tiens ! Tu n’as pas compris ? Tu veux l’entendre :   « Laure je t’aime, je veux t’épouser un jour, à la fin de mes études »

- Merci de le dire. Moi aussi je t’aime et je veux t’épouser.
Je t'ai promis de te parler de Raymond. Je commence. J'ai 21 ans, tu le sais, je suis tombée folle amoureuse de toi. Mais j'avais déjà été amoureuse avant. Chaque fois j'ai été sincère et trois fois je me suis engagée à fond. Quand j'aime, c'est avec tout mon coeur et tout mon corps. Deux fois des garçons qui prétendaient m'aimer m'ont utilisée pour s'amuser. Nous étions jeunes, j'étais naïve, je croyais au grand amour. Ils m'ont laissé tomber.

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