Lulu 7 Fin
-Quand on a un contrat ici, on ne sévade pas, on bosse, on gagne son argent. Richard ta vendue à Pablo. Ton maître te procure du travail contre un bon salaire. Enfonce toi ça dans le crâne.
Cétait la punition réservée aux fugitives. Malgré lhabitude prise de rapports prolongés et fréquents, je finis par mévanouir tellement ces brutes me malmenaient, chacun des quatre se nichant dans un orifice, ou me pinçant, me caressant rudement en attendant son tour. Je sais ce quest une tournante, cétait pire parce quils voulaient me faire mal pour me punir. Un seau deau froide me ranima. Ils mappliquèrent une terrible fessée, évitant de marquer mon visage. Je passai dun genou à lautre. Mon bourreau madministrait les coups avec vice: il frappait mon sexe, mon cul, mes cuisses.
Quand une main se lassait, lexécutant me poussait chez le suivant et les claques sur ma croupe résonnaient plus fort. Certains pinçaient sadiquement mes « nichons de salope », les giflaient, chatouillaient la plante de mes pieds. Ils mintroduisirent dans le vagin le goulot dune bouteille de champagne. Je criais de douleur, ils sen fichaient. Je mévanouis pour la deuxième fois. Je revins à moi dans le noir, nue, grelottant de froid, la peau couverte de sperme. Je pleurais longuement, mendormis la faim au ventre, toute endolorie, incapable de localiser la source de ma douleur.
Lampoule du plafonnier salluma. Je vis avec terreur la même escouade précéder Pablo. Celui-ci tenait en laisse un gros chien dattaque à la mâchoire carrée et baveuse qui tirait sur son lien pour se jeter sur moi.
- La prochaine fois cest mon chien qui te sautera si tu tavises encore de rompre ton contrat. Bon les gars, elle est à vous. Elle ne doit pas manquer de sexe. Aujourdhui nourrissez la de sperme, elle naura pas dautre repas.
La menace du chien suffit à me couper lenvie de fuir.
Pablo me lança une vieille couverture sale, puante, trouée et partit.
Ils avaient « une putain » gratuite à salir et à humilier, à baiser et à faire souffrir. Cétait gratuit et sans risques. La peur du molosse la réduirait au silence. Ils en profitèrent pour se livrer à des essais dictés par leurs fantasmes. Forcer mes fesses, me sodomiser longuement dans toutes les positions, me faire mal, me pousser à demander un répit ou à supplier était leur jeu préféré.
La bouche pleine, un pieu enfoncé jusquà la garde dans le derrière où il frétillait je sentais une troisième queue entrer dans mon vagin et aller heurter celle qui grouillait dans mon intestin. Le quatrième plaçait sa massue dans ma main serrée dans la sienne et javais intérêt à le masturber vigoureusement si je voulais échapper aux pincements ou aux gifles. Le plus sadique marrachait un à un des poils. Ce supplice chinois était après le chien ce dont javais le plus peur.
Pablo réapparut, me demanda si javais bien compris la leçon. Je pourrais reprendre ma place au peep show, après une bonne toilette et un bon repas. Il moffrit une cigarette au goût étrange, mobserva, me mit une cagoule sur la figure et me ramena dans ma chambre où mattendait la brave Ingrid. Un dernier avertissement conclut la rencontre.
-En cas de récidive tu verras que ta punition a été légère, je tenfermerai dans une chambre où une file de clients défileront pour leur plaisir, gratuitement.
Malgré mon désespoir, je me suis remise à jouer des scènes damour sur lit tournant. Les curieux, les touristes, les privés damour, les hommes en mal de sexe, les maris insatisfaits passaient discrètement la porte, payaient, entraient en cabine, se rinçaient lil, réclamaient des fantaisies extravagantes, étalaient leurs fantasmes et maculaient la moquette et les sièges de leurs humeurs. Jétais anesthésiée, quasi indifférente à ces regards, quasi insensible aux invasions de ma chatte, et souvent, en souvenir de la cave, javalais sans plaisir le jus de corps dhomme.
Les acteurs eux-mêmes bénéficiaient de mon indulgence inutile. Il nétait plus question de cabaret. Selon Pablo, je navais pas ma place sur une scène, jétais beaucoup trop vieille, javais épaissi à cause de la mal bouffe, il fallait des filles de dix-huit ans, minces, souples, jolies et fraîches. Javais raté le coche, il ne repasserait plus. Mon sexe lui-même nétait plus de première qualité, à trop lutiliser je navais pas su lui garder la grâce dun bijou tout neuf. Les encouragements du début au fil du temps tournaient vinaigre et les critiques acerbes remplaçaient les flatteries. Pour oublier je fumais les cigarettes spéciales. Pablo men fournissait régulièrement. Ça me permettait de rêver et de mévader en rêve.
Je tavais abandonné depuis six mois. Je regrettais amèrement la vie heureuse à tes côtés. Les souvenirs des moments de tendresse étaient ma seule consolation mais aussi la source de mes pires moments de désespoir. Javais sottement tout cassé. Tu ne pourrais plus pardonner. Qui pourrait encore vouloir de moi? Jétais un déchet.
Le pire restait à venir. Pablo jugea que javais besoin de vacances, memmena en Espagne, prit un ferry. Fatiguée du voyage jouvris les yeux dans un port. A Tanger, il me livra à un nouveau patron, je fus mise à labattage dans un bordel. A la place de mes collègues de scène des shows parisiens, pendant des heures défilaient des clients auxquels on accordait quelques minutes pour se jeter sur les filles dans des box séparés par des toiles. Jentendais les souffles saccadés des hommes pressés de soulager leurs couilles en quelques minutes. Je navais pas le temps de mapitoyer sur le sort des autres filles ni même sur le mien.
Je mallongeais en slip et soutien-gorge. Le premier client de la journée avait attendu louverture et prenait parfois le temps denlever ma culotte, rarement la protection des seins: je prétendais que les tétons étaient réservés à mon maître. Certains pour ne pas perdre quelques secondes se contentaient de repousser le tissu sur le côté, avant douvrir ma moule pour y fourrer leur envie congestionnée. Les plus rapides me prenaient, pénétraient entièrement et se lançaient en une course débridée de peur de devoir me quitter sans avoir éjaculé.
Parfois le type avait tellement fantasmé avant dentrer dans la cellule qui venait de se libérer, quil crachait dès lentrée de la vulve. Mais il y avait aussi parfois le « peineux »: il entrait après un examen méticuleux de mon bas ventre, voulait voir « comment cest fait », sextasiait, demandait que je lui dégage le passage, entrait et se mettait en mouvement, il suait, soufflait, leau coulait de son front dans mes yeux, mais il restait bloqué, ça ne voulait pas venir et je devais lachever à la main sinon il serait parti avec sa charge dans le fusil.
Lun sortait, un autre prenait sa place. Au bout de quelques heures, je nétais plus capable de les dénombrer. Une queue me quittait, la suivante entrait presque aussitôt et reprenait la cavalcade à peine interrompue.
Peu de filles, beaucoup damateurs, le gérant faisait fortune, nous procurait le gîte et le couvert, accordait une faible participation aux bénéfices. La « femme libérée » était en réalité devenue une esclave sexuelle du plus bas niveau et travaillait à la chaîne. En raison de lépidémie de sida le port du préservatif était heureusement obligatoire. Mais le frottement de la protection se révélait souvent irritant et je dépensais une grande partie de mes gains en achat de baumes adoucissants et de crèmes lubrifiantes. Pour éviter les escarres, je me couchais sur le flanc ou sur le ventre.
Certains entraient, se couchaient comme moi sur le côté, soulevaient ma jambe, passaient la main pour trouver la faille et menvoyaient leur missile par derrière, le temps de lâcher la purée, sessuyaient la bistouquette, disaient merci et au revoir et navaient pas vu ma figure. Sur le ventre cétait plus exposé et je me méfiais de ceux qui recherchaient un conduit plus serré et qui mauraient volontiers prise par le derrière en faisant semblant de se tromper avant de rectifier le tir et de cibler mon vagin. Les adorateurs de la rose ne négligent aucune occasion dy plonger leur tête chercheuse et sa suite jusquaux deux boules. Mais je ne tenais pas à attr des hémorroïdes externes comme certaines malheureuses putains trop gentilles du bordel.
Or je remarquai un fidèle, il réussissait à me rendre visite une fois par semaine et me traitait avec des égards dont javais perdu lhabitude. Il fallait sacrifier à Éros avec lui, il devait graisser la patte aux gardiens, mais il finit par me demander un rendez-vous. Il lobtint sur un billet que je glissais dans sa main pendant quil me besognait avec délicatesse. Ce matin là je faisais des courses. Je ne risquais pas de fuir, je navais plus aucun papier, ni carte didentité ni passeport. Le récit de ma vie le bouleversa, il proposa de maider à mévader.
Au point où jen étais, je voulus courir cette dernière chance. Je mis ma valise en réparation. La semaine suivante je la repris, trouvai le camion de Gérard. Il my cacha, passa la douane en blaguant avec les douaniers comme dhabitude, et me déposa à Séville où il devait livrer avant de retourner de lautre côté du détroit. Cest un des rares gars bien parmi mes clients.
Il y a donc huit jours jai commencé à faire du stop. Les camionneurs espagnols sarrêtent volontiers. Mais ils ont le sang chaud. Dans quatre cabines différentes jai dû accorder lusage de mes charmes à des hommes mariés que loccasion transformait en amants temporaires. Quelques mots dans leur langue suivis de gestes universels faciles à interpréter, caresse des hanches et de la poitrine puis la main entre les cuisses, je cédais par nécessité. Un seul me fit descendre après mavoir immolée sur sa couchette et mavoir piqué ma dernière culotte en souvenir de son exploit.
Les autres me témoignèrent de la reconnaissance. Lhabitude des hordes récentes ma fait supporter comme une bénédiction la relation gentille et unique qui récompensait celui qui voulait bien me transporter. Je leur ai fait plaisir, sans éprouver moi-même une quelconque satisfaction à leur contact. Mon sexe est mort désormais davoir trop servi, usé avant lheure, complètement déformé et insensible. Jai simulé un plaisir que je ne connaîtrai plus jamais. Lun deux, célibataire de notre âge, ma proposé le mariage! Je lui ai raconté quaprès avoir été volée pendant mes vacances au Maroc, je rejoignais mon mari en France.
Partie sans but précis, mue par le mal du pays, je venais de parler de toi. Lidée de te rendre visite mest venue alors. Après une étape dans les Pyrénées, jai répété à un transporteur espagnol qui se rendait en Allemagne, la même histoire. Cétait encore un brave type. Il ne ma rien demandé, ma laissé dormir sans me toucher, ma payé un repas et a fait un détour pour me laisser à proximité hier soir. Jai dormi dans un fossé.
A mon arrivée, tu étais au travail. Je suis allée chez Simone, elle accepte de me reprendre au début du mois prochain, à la place de Ginette partie avec Richard, à la conquête des cabarets de Paris. Devant toi se tient une loque, moralement et physiquement humiliée et détruite. Avant de men aller je te demande pardon pour le mal que je tai fait.
On sonne, jouvre. Claude vient malerter. On a vu en ville une personne qui pourrait être ma femme Lulu. Une sorte de fantôme vieilli avant lâge, toute dépenaillée et traînant une vieille valise. Mon frère me met en garde contre le possible retour de linfidèle. On ne part pas plus de dix mois sans donner de nouvelles quand on est une honnête femme. Et si je lavais écouté à lépoque, je laurais fichue à la porte. La seule chose à faire quand on est raisonnable.
-Surtout ne te laisse pas embobiner. Enfin elle ne te fera plus honte en allant sexhiber nue sur une scène: Richard a été arrêté pour proxénétisme et une fermeture administrative frappe « la lune bleue »
Sa vieille valise à la main, Lulu nous rejoint. Elle sen va :,
- Ton frère a raison, Je dois assumer mes bêtises. Jai eu tort de venir me saluer. Pardon
Jai demandé à Claude de me laisser régler mes problèmes. Jai retenu Lulu. Un miracle sest produit. Nous avons fait lamour et Lulu à joui. Elle pleure de bonheur dans mes bras. Et ça, cest formidable.
Nous allons nous reconstruire
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