L'Écrivain

Cela faisait une éternité que Roland L. n’était pas revenu dans sa ville natale. Enfin, dix ans pour être précis, mais elle ne lui avait pas manqué ; il n’en avait pas gardé beaucoup de bons souvenirs. Il y avait grandi avec des parents qui se faisaient la guerre en permanence, et qui voulaient en plus, sauver la planète. Quand son éternel ado de père avait quitté sa mère pour une gamine, lui passait son bac. À cette époque, Roland était un grand bonhomme de 1,85 m, 100kg, habillé comme l’as de pique, avec d’horribles lunettes. Une sorte de vieil Harry Potter en surpoids.

Aujourd’hui il avait bien changé. Heureusement, à la séparation, sa mère l’avait emmené avec elle ; ils avaient quitté la ville. Débarrassée de son boulet de mari, elle avait bien réussi dans la vie ; et son fils en avait profité. Son père, en revanche, avait sombré dans l’alcool et était décédé deux ans plus tôt. Il n’avait même pas assisté à son enterrement.

Roland était arrivé en ville jeudi, par le TGV. Un taxi l’avait conduit au Château du Lac, le meilleur et plus exclusif hôtel de la cité. Il ne savait toujours pas pourquoi, il avait accepté de venir à cette réunion d’anciens élèves. Le soir même était prévu un apéro « rencontre » et samedi, ce serait la grande fête.

Le soir, il s’habilla de façon informelle, préférant le confort, mais ne sacrifiant pas l’élégance. L’apéro se tenait dans un restaurant réservé pour l’occasion. Il se présenta au couple qui attendait derrière une table, qui vérifia son inscription et lui donna un bon pour la fête de samedi. Un verre à la main, il tourna autour des groupes en pleine conversation, sans reconnaître personne. Ce n’était pas étonnant, il y avait quatre classes parallèles, et avec les conjoints cela faisait beaucoup de monde. Après une décennie, il ne fallait pas s’attendre à mieux.

Il pensait repartir quand il la vit. Elle était assise seule à une table haute. Une beauté brune, qui se tenait très droite, une attitude hiératique tel un sphinx.

Un air de défi brulait dans ses yeux ; personne ne l’approchait, mais tout le monde la regardait, plus ou moins du coin de l’œil. Cela l’intriguait, en plus, son visage lui disait quelque chose, alors il s’approcha pour demander s’il pouvait prendre un siège à sa table.

- Je ne coucherai pas avec vous, ne vous faites pas d’illusions !

La remarque le prit par surprise. C’était tellement inattendu, qu’il ne savait pas s’il devait rire à une bonne blague ou s’enfuir. Il opta pour la contre-attaque.

- Attendez au moins que je vous offre un verre d’eau. Après nous pourrons passer aux confidences intimes. Votre couleur préférée par exemple.

Ce fut elle, qui fut surprise à son tour. Roland s’installa, posa son verre sur la table et passa au tutoiement.

- Bonjour, moi c’est Roland, si je suis venu à ta table, c’est que ton visage me disait quelque chose.

- Très drôle, tu te souviens de mon visage, et de rien d’autre ? Tu es sûr ?

- J’ai l’impression… d’avoir raté quelques chapitres et de m’être perdu dans l’histoire. Je me demandais simplement si tu étais dans ma classe. J’avais déménagé à la fin des examens, et après dix ans je ne reconnais plus personne.

Elle le jaugea du regard, pendant un moment. Comme si elle cherchait à savoir s’il se moquait d’elle ou s’il était sérieux.

- Je suis Béatrice, Béa.

- Béa, Béa… oui je me rappelle, tu étais une des abeilles qui tournait autour de la reine et de sa cour.

- J’étais plutôt l’idiote, qui essayait de se faire accepter par le groupe de filles cool.

- Je me rappelle que nous n’étions pas dans la même classe, mais nous avions des cours en commun.

- C’est drôle, je n’ai aucun souvenir de toi.

- Je m’en doute. Imagine-moi avec 25 kg de plus et des lunettes.

- Oui, ça y est, nous avions EPS ensemble, tu étais le gros l…

- Ne t’arrête pas en si bon chemin.
Tu allais dire gros lard. C’est fou ce qu’une bonne hygiène de vie et un peu d’exercice peuvent faire.

Elle était gênée d’avoir parlé sans réfléchir. Lui se marrait intérieurement, au moins elle n’était plus crispée, comme au début. De toute façon, elle avait raison, à l’époque il se dirigeait droit vers l’obésité.

Ils continuèrent à discuter toute la soirée. C’était très agréable de la voir sourire et se décontracter. Elle était belle quand il l’avait vue seule à la table, mais maintenant que son visage s’illuminait, elle était superbe. Il se sentait à l’aise avec elle et c’était réciproque apparemment. Elle lui apprit qu’elle était bibliothécaire, et lui, confia travailler pour une maison d’édition ; ils avaient l’amour des livres en commun. Le moment le plus étrange fut quand, au détour de la conversation, elle le cita.

- … « va chercher le bonheur, ne l’attends pas, et quand tu le trouveras, accroche-toi à lui de toutes tes forces ».

- Euh… d’où tu sors ça ?

- Je cite un des personnages de mon auteur favori : Eler. Il écrit un mélange de fantastique et de thriller, c’est génial. J’ai découvert par hasard le premier tome, et depuis, je me jette dessus dès leur publication. Il y en a trois jusqu’à maintenant, le quatrième est prévu dans quelques mois. L’attente va être longue encore.

Dire que Roland était sur le cul, serait faible. Il ne lui avait pas menti, techniquement parlant, mais il n’avait pas tout dit. Il travaillait bien pour une maison d’édition, mais il était auteur. Il avait piqué l’idée à Hergé, et Roland L. était devenu Eler. Il avait connu la consécration avec son troisième livre et depuis, tous les tomes avaient été réédités et traduits dans une vingtaine de langues. Il était même en négociation avec un studio hollywoodien, pour un film. Afin de préserver son intimité, il s’était caché derrière son pseudo, comme Banksy.

À la fin de la soirée, ils furent parmi les derniers à partir.
Il insista pour l’inviter à dîner le lendemain. Elle se fit tirer l’oreille, mais accepta finalement et ils partirent, chacun de son côté. À peine arrivé à son hôtel, il appela David, son agent. Celui-ci lui promit de s’occuper de sa demande, le lendemain sans faute, mais il avait une mauvaise nouvelle. Un stagiaire chez l’éditeur, avait révélé son identité. La presse n’allait pas tarder à lui tomber dessus. David lui conseilla de prendre les devants et de révéler son identité. Ils tombèrent d’accord ; son agent allait organiser cela samedi, au JT de 20h, un direct en duplex. Béa n’avait pas quitté, une minute, ses pensées, c’était dingue, ça ne lui était jamais arrivé.

Il l’avait raccompagnée et elle l’avait invité boire un dernier verre. Elle était habillée avec une tenue moulante qui ne cachait rien de son anatomie. Quand ils s’assirent sur le canapé, elle se colla à lui. Son visage était proche du sien et ses lèvres appelaient irrésistiblement les siennes. Il sentait son pouls qui battait la chamade, pour gorger de sang son entrejambe, qui devenait douloureuse. Il se pencha et prit ses lèvres, il mit sa main sur la hanche et remonta jusqu’à un sein, qu’il caressa. Elle ne portait pas de soutien-gorge et il sentait son téton, tout dur entre ses doigts. Elle se pencha sur lui, ouvrit son pantalon, baissa son boxer et englouti sa virilité enfin libérée, avec laquelle est joua un moment.

- Apparemment je te fais de l’effet.

Elle se releva, se pourlécha les lèvres et remonta sa robe moulante sur ses hanches. Il réalisa alors qu’elle ne portait rien dessous. Elle avait un adorable triangle de poils bouclés, bien délimité. Elle s’assit sur lui à califourchon et s’empala sur son sexe, dur comme l’acier. Elle montait et descendait à un rythme endiablé, gémissant et montrant les signes d’un orgasme proche. Il sentait…

- BIP, BIP, BIP, BIP

Il se réveilla en sursaut, avec une énorme frustration et bandant comme un âne.
C’était un rêve érotique, mais tellement réel, qu’il sentait encore son sexe engloutir le sien. Même adolescent, il n’avait jamais rêvé aussi intensément. Aucune femme ne lui avait fait cet effet ; il n’en revenait pas. Il avait la tête à l’envers et son érection ne faiblissait pas.

Il se doucha et petit déjeuna dans la chambre. Béa était toujours dans sa tête, il ne pensait qu’à elle. Il n’avait pas envie de sortir, et à midi, Il fit également appel au room service. Roland n’arrivait pas à décrocher de son rêve. Vers 15h, le concierge le contacta, car un coursier l’attendait à la réception, avec un colis à remettre en main propre. Il le réceptionna et passa le reste de l’après-midi, à tourner en rond en attendant l’heure du rendez-vous.

Il arriva au restaurant, une demi-heure en avance, trop fébrile pour attendre plus longtemps. Quand il vit le maître d’hôtel la guider vers sa table, il reçut un choc. Oh purée, il était amoureux, il venait de le réaliser. Ils ne s’étaient vu qu’une soirée et n’avaient même pas couché ensemble. Pourtant, il ne souhaitait rien d’autre, que la prendre dans ses bras, la serrer contre lui, lui caresser le visage, faire son bonheur et passer son temps à la contempler. Il se leva pour l’accueillir et lui fit la bise, se retenant de lui sauter dessus.

Il ne se rappela même pas ce qu’il avait mangé, peu importait. Sa présence le subjuguait et son odeur l’enivrait. Il détaillait son visage parfait, la courbure de ses lèvres quand elle souriait, son joli petit nez et ses yeux sombres, au regard brillant d’intelligence. Il était tellement concentré, qu’elle dût se répéter plusieurs fois. Elle se demanda s’il avait la lumière à tous les étages, le pauvre.

À la fin du repas, il lui remit un cadeau ; ce qui la mit dans l’embarras, n’ayant rien prévu pour lui. Il la rassura, en lui disant cela lui faisait encore plus plaisir à lui. Elle le remercia et après avoir douté un moment, elle se lança.

- Nous pourrions aller ensemble demain à la soirée des anciens élèves. Je serais ravie d’y aller avec toi, après cette charmante soirée. Tu pourrais passer me prendre vers 19h.

- Je suis désolé, mais ça ne va pas être possible.

- Je te prie de m’excuser, je me suis montrée malpolie et sans-gêne en m’imposant ainsi. Tu as probablement déjà une cavalière.

- Non, non pas du tout. Tu as devancé ma propre demande de t’accompagner. C’est seulement que demain, j’ai une réunion de travail à 20h et que je ne pourrais pas passer te prendre, avant 21h. Mais je compte bien y aller avec toi.

- Je ne veux pas t’obliger à quoi que ce soit.

- Si, si, oblige-moi, je t’en prie. Cependant, j’ai une requête particulière, qui pourrait te sembler farfelue. Je te demande de n’ouvrir ton cadeau, que demain en regardant le JT de 20h.

Elle fut surprise par l’incongruité de la chose, mais accepta de bon gré. Après, elle lui communiqua son adresse pour le lendemain, mais voulut rentrer seule. Il rentra en sifflotant tout guilleret, même pas déçu de ne pas avoir été invité, à boire un dernier verre.

Il avait la tête enfouie entre ses jambes écartées, il était au paradis et jouait de sa langue et de ses lèvres, pendant qu’il activait ses doigts. Elle gémissait sans arrêt, en lui agrippant les cheveux, jusqu’à ce qu’elle se cambre en criant son plaisir. Elle se mit à quatre pattes et réclama une levrette. Il s’approcha et caressa ses lèvres intimes avec son sexe, puis la pénétra avec délice. Il commença…

- BIP, BIP, BIP, BIP

- Bordel de merde ! Réveille-matin à la con !

Cela faisait deux fois que son rêve était interrompu au meilleur moment. Cet appareil le haïssait, il n’y avait pas d’autre explication.

Après une promenade en ville, il traina à l’hôtel en bouquinant, ses pensées revenant sans cesse vers Béa. Il ne se rappelait même plus ce qu’il avait lu. En milieu d’après-midi, l’équipe de la télé débarqua et s’installa dans une des salles de conférence de l’hôtel. Il s’y rendit lui aussi à 19h pour le maquillage et les consignes.

Le JT commença et son interview fut annoncée. Le monde ne tournant pas rond, le présentateur ne revint vers lui que 20 minutes plus tard. Il répondit aux questions, parla de ses livres, confirma la parution du prochain tome, dans deux mois et expliqua le pourquoi de son identité secrète : avoir une vie tranquille, tout simplement. Jusqu’à cette indiscrétion, qui avait tout fichu par terre.

Une fois terminé, il se précipita dans sa chambre, enleva les couches de maquillage, se doucha, s’habilla et fila chercher Béa. Elle l’attendait déjà en bas de chez elle. Il s’approcha pour la saluer, heureux de la voir, et se prit une claque qui lui dévissa la tête.

- Espèce de salaud, tu t’es bien foutu de moi. Ça t’a fait marrer de me faire tourner en bourrique ? Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?

- Aïe… ça fait mal, tu frappes fort… jeudi on venait de se rencontrer, je n’allais pas prétendre que j’étais ton auteur préféré. J’aurais eu l’air de vouloir te mettre dans mon lit. D’ailleurs quelle preuve avais-je ?

- Mais hier tu savais, non ?

- Mon agent m’a prévenu jeudi soir, que mon identité avait été percée à jour, quand je l’ai appelé pour ton cadeau. Hier je t’ai offert le quatrième tome, en pensant que ce serait une bonne surprise, que tu l’ouvres aujourd’hui, en regardant le JT. Je ne pensais pas que tu étais aussi susceptible… et que tu cognais aussi fort.

Elle était vraiment mal et regrettait de l’avoir frappé. Elle avait pensé qu’il voulait se moquer d’elle, et comprenait maintenant, que cette surprise partait d’une bonne intention. Qu’elle était conne, elle n’avait pas l’habitude qu’on ait de telles attentions à son égard. Elle était morte de honte et sûre qu’il allait partir, la laissant plantée sur le trottoir. Elle le méritait.

- Je suis désolée, je suis trop impulsive. Je regrette amèrement mon geste et te prie de me pardonner.

- Aïe, excuses acceptées. Je ferai attention à l’avenir et préparerai le terrain en amont.

Elle fut touchée par son commentaire, laissant entendre de futures surprises. Ce type lui plaisait de plus en plus. Il l’avait charmée, et en dehors du fait que c’était son auteur favori, il était adorable et beau comme un dieu. Peut-être que… mais non, il fallait se méfier. Depuis dix ans et l’incident, les hommes voulaient juste la baiser et elle n’avait connu que des désillusions.

La fête battait son plein quand ils arrivèrent. Roland ne la lâchait pas d’une semelle et était aux petits soins pour elle. Ils parlèrent, rirent, dansèrent et burent, isolés dans leur bulle. Elle le quitta un moment pour aller se repoudrer le nez, comme le fait toute dame bien éduquée. Dix minutes plus tard, inquiet de ne pas la voir revenir, il se dirigea à son tour vers les toilettes. Elle était là, acculée par trois types, dont l’un lui montrait son smartphone, et par trois pétasses. Roland les reconnus et les mauvais souvenirs affluèrent. C’était les connards qui lui avaient pourri ses années de lycée et les trois salopes qui se moquaient de lui, à la moindre occasion.

Il se faufila entre les danseurs et se rapprocha. En arrivant, il vit que Béa pleurait. Son sang ne fit qu’un tour et il la rejoignit en bousculant tout le monde.

- Ça va Béa ? Qu’est-ce qu’il t’arrive ?

- Et connard, laisse la salope revoir ses exploits.

Roland se retourna et regarda le gars qui avait parlé. Il vit sur le téléphone une très jeune Béa, dansant nue au milieu d’une foule qui l’encourageait et l’applaudissait. Une bouteille à la main, elle se caressait les lèvres intimes et s’enfonçait le goulot dans le vagin. Béa profita de ce moment de flottement, pour s’enfuir vers la sortie. Fou de rage, Roland frappa la main qui tenait le téléphone ; celui-ci s’envola et alla se fracasser au milieu des danseurs. Il se précipita derrière Béa et la rejoignit quand elle appelait un taxi. Elle était en larmes et refusait de lui parler.

- Et connard, t’as bousillé mon téléphone, tu vas me le rembourser ou je te pète la gueule.

Super ! Ducon 1, 2 et 3 étaient aussi sortis, accompagnés de connasse 1, 2 et 3.

- La prochaine fois que tu emmerdes Béa, je ne fracasse pas ton téléphone, je te le fourre dans le cul, à sec et bien profond.

- Je vais te défoncer la tronche pour t’apprendre à vivre.

Sûrs de leur force, l’effet meute aidant, les trois débiles s’approchèrent de lui. Roland adopta la défense classique en boxe et le gars au smartphone fit de même. Il s’approcha en ricanant, entouré par ses potes… et se mangea un mocassin en cuir italien. Au moins deux dents volèrent et le type fut propulsé en arrière, sur deux des connasses, qu’il entraina dans sa chute. Roland bougea très vite et réduisit à néant les possibilités de reproduction du copain No1, avant de lui exploser le nez. Le copain No2 se retrouva avec la mâchoire fracturée et des dents cassées et branlantes. L’exercice qui avait aidé Roland à maigrir, c’était dans sa rue qu’il l’avait trouvé : une académie d’arts martiaux. Full-contact et kick-boxing, il avait adoré et adorait toujours d’ailleurs.

Roland se retourna juste à temps, pour voir Béa monter dans un taxi, en le regardant interloquée. Dans un réflexe désespéré, il courut derrière elle jusqu’à l’avenue, où il perdit le taxi de vue. Il en appela un à son tour. Les cinq minutes d’attente, lui parurent une éternité. Heureusement qu’il connaissait l’adresse de Béa, et le chauffeur voyant son impatience, fit la course en un temps record.

Arrivé au bas de l’immeuble, il s’y précipita et commença à monter les escaliers. Il s’arrêta brusquement, réfléchit et descendit regarder les boîtes aux lettres. Il ne connaissait pas son nom de famille, mais heureusement c’était un petit immeuble. Par élimination, il ne resta qu’un nom avec « B. » comme prénom. Cette fois, il monta les marches 3 par 3 jusqu’au deuxième, où il n’y avait que deux portes. Si jamais il avait eu un doute, quelqu’un pleurait derrière une des portes. Il sonna et frappa, inquiet et angoissé par les pleurs de Béa.

- Béa, je t’en supplie ouvre moi, je suis venu t’aider, discuter… faire ce que tu veux, tant que ça peut t’aider.

Il recommença à sonner, et soudain la porte se déverrouilla. Il la poussa doucement et entra. C’était un petit appartement dont l’entrée donnait directement sur le salon. Il ferma derrière lui et alla rejoindre Béa, qui venait de s’asseoir sur le canapé. Elle avait les yeux rouges et gonflés. Il la prit dans ses bras et la serra contre lui, il voulait faire disparaître toute cette douleur.

- Pourquoi ces salauds s’en sont pris à toi ?

- Tu… tu as vu la vidéo ?

- Un bref extrait, sur le téléphone de l’autre connard.

- Alors tu m’as vue ?

- Oui.

- Nue ?

- Oui.

- La bouteille ?

- Oui.

- Je pensais que tu l’avais déjà vue, comme tout le monde dans cette ville. Ma réputation est celle d’une salope. Toutes mes aventures avec des hommes se sont soldées par des échecs. Ils veulent juste se taper la grosse salope de la vidéo.

- Comme c’est arrivé, cette histoire ?

- Il y a dix ans, j’étais invitée à l’after, après la grande fête de fin du bac. J’étais tellement heureuse d’être enfin acceptée. Quelle conne j’étais. On m’a entourée de plein d’attention, on m’offrait sans cesse à boire et moi enchantée, j’en profitais. Puis j’ai perdu le fil et je me suis réveillée à l’hôpital. Heureusement pour moi, la police était intervenue pour tapage nocturne et m’avait trouvée en train de danser, nue et incohérente. Ils m’ont embarquée direction l’hôpital, où le médecin a trouvé, qu’en plus d’une alcoolémie au plafond, j’avais du GHB dans le sang. Il y a eu une enquête, mais personne n’avait rien vu. Peu après, la vidéo est apparue, via les réseaux sociaux et ma réputation était faite. J’ai cependant échappé au pire, car j’ai appris plus tard, qu’un gang bang était prévu pour moi ce soir-là.

- Je comprends mieux ton agressivité, lors de notre première rencontre. Je suis désolé qu’ils t’aient fait du mal.

- Ce soir, je voulais montrer à tous que je n’avais ni honte, ni peur. Que j’avais surmonté tout ça. J’ai trop présumé de mes forces.

- J’aurais tellement voulu être là pour toi, il y a dix ans, que tu n’aies jamais à souffrir.

Béa réalisa soudain que l’homme qui la berçait tendrement, en lui caressant les cheveux, n’avait pas hésité à affronter, et à mettre KO, trois adversaires pour elle. Elle se sentait bien dans ses bras, en sécurité et cela ne lui était plus arrivé depuis l’enfance. Elle l’enlaça à son tour, se blottit contre sa poitrine et ne tarda pas à s’endormir.

Elle se réveilla le lendemain dans sa chambre, seule dans son lit. On lui avait enlevé les chaussures, mais elle était toujours habillée. Elle se leva et retourna dans le salon. Roland était là, affalé sur le canapé, dormant du sommeil du juste. Elle regarda avec tendresse son héros, son chevalier servant, son prince charmant. Elle l’avait senti venir, mais se méfiait trop des hommes pour y croire. Elle était amoureuse, super amoureuse, archi amoureuse. Maintenant, c’était à elle de lui faire un cadeau surprise. Elle se doucha et revint nue dans le salon.

Roland dormait toujours, quand elle s’agenouilla. Elle défit son pantalon, baissa le boxer et sortit un splendide spécimen qui avait à peine entamé son érection matinale. Elle le masturba, le lécha et le suça avec un grand plaisir. Roland gémit, remua et ouvrit les yeux. Béa le regardait en l’engloutissant tout entier. La sensation fut telle, qu’il ne put retenir son plaisir. Il voulut se retirer, mais Béa le retint dans sa bouche pendant qu’il jouissait, avalant ses longs jets de sperme. Elle se releva et lui tendit la main.

- Viens, nous serons mieux dans la chambre.

Roland se leva, la suivit et heurta la table basse. Il se figea soudain en plein mouvement, il venait de réaliser. Inquiète elle le regarda s’immobiliser.

- Qu’est-ce qu’il y a ? Tu as mal ? J’ai fait quelque chose ?

- Ce n’est pas un rêve cette fois ? C’est réel n’est-ce pas ?

- Oui c’est… cette fois c’est réel ? Que veux-tu dire ?

- Je… je rêve de toi depuis notre première rencontre.

- Comment ça tu rêves de moi ?

Roland rougit comme un collégien pris en faute. Béa amusée, comprit le genre de rêves qu’il avait fait et décida de le taquiner.

- De quoi rêvais-tu exactement ?

Il rougit encore plus, si c’était possible, et sa gêne était palpable. Son héros, désarçonné, ressemblait à un perdu. Elle décida de mettre fin à son calvaire.

- Viens, on va voir si la réalité est meilleure que les rêves.

Ils firent l’amour passionnément. Quand sexe et sentiments vont de pair ; on ne cherche que le bonheur de l’autre et le plaisir en est décuplé. Ils ne se lassaient pas d’explorer leurs corps, dans les moindres recoins, et avaient du mal à croire, ce qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Enfin il put réaliser ce qu’il avait rêvé et bien plus. Il aimait plus que tout enfouir sa tête entre ses jambes et la lécher, l’embrasser, la caresser et la sentir jouir dans sa bouche. Après ça, Béa se mit à quatre pattes et lui réclama une levrette, comme dans le rêve. Roland s’appliqua à lui donner encore du plaisir et elle eut un autre orgasme. À ce moment, elle se retourna, prit son sexe dans sa main, le sortit et l’appuya contre son anus.

- Sois doux, c’est la première fois, je suis vierge par là.

Roland la pénétra, lentement, centimètre par centimètre, mais ce fut elle qui poussa son bassin en arrière et s’empala entièrement sur lui. La sensation fut incroyable et il ne tint pas longtemps avant de jouir. Exténués, mais comblés et heureux, ils somnolèrent un moment, puis prirent une douche ensemble, qui valut à Roland une nouvelle fellation. Ayant sauté le petit-déjeuner, ils passèrent directement au repas. Cependant, il y avait quelque chose qui taraudait Roland.

- Béa, je dois bientôt m’en aller.

Il la vit se raidir, son visage se figer et son regard devenir plus dur.

- Je comprends, tu as à faire, et peut-être une famille ou une femme quelque part. Ce n’est pas grave, je garderai un bon souvenir.

- Non, non à part ma mère, je n’ai personne. Je crois que tu ne m’as pas compris. Je dois partir à Los Angeles, pour collaborer à l’écriture d’un scénario, basé sur mon premier livre.

- Je comprends, tu vas partir longtemps ?

- Au moins deux mois, peut-être plus.

- Tu… tu reviendras par ici après ?

- Je… c’est… c’est ça le problème. Je ne veux plus me séparer de toi, mais je ne veux pas bouleverser ta vie. Je souhaiterais que tu m’accompagnes, mais je ne sais pas si tu veux, ou peux, tout quitter ici.

- C’est… inattendu, mais rien ne me retient ici ; mes parents sont décédés. Seule ma fierté, de ne pas céder face à tous ces cons, m’a retenue. Je n’ai rien que mon travail.

- Je t’aime, comme un fou. Tu peux parler de coup de foudre. Je n’y croyais pas, jusqu’à ce que je te rencontre, mais c’est comme ça.

- Je… je suis aussi amoureuse de toi, alors oui, je pars avec toi. Je ne perds rien en partant et moi aussi je veux rester avec toi. Je vais démissionner, résilier mon bail et voir quoi faire de mes meubles.

Il la prit dans ses bras et l’embrassa partout où il pouvait. Ils se souriaient, plongés dans une totale béatitude.

- Tu fais de moi le plus heureux des hommes. Je sors un moment, je serai de retour dans 2 heures environ.

- Tu vas où ?

- Chercher une bague de fiançailles, bien sûr. Tu es classique, un diamant ? Ou tu as une préférence pour une autre pierre précieuse ?

- …

Comments:

No comments!

Please sign up or log in to post a comment!