« Matrone Et Domina : Tullia, Une Patricienne Hypersexuelle Dans La Rome Impériale » (6) : Le Banquet
AVERTISSEMENTS
Cette histoire est construite sur lhypersexualité de Tullia et contient ment des scènes de sexe, quelquefois très « hard » (ce chapitre fait, de ce point de vue, exception). Au fur et à mesure de la rédaction des chapitres, jai voulu également si les personnages dans le contexte et les murs de la Rome impériale. Je remercie donc les lecteurs et lectrices qui ne viennent pas ici que pour les passages de sexe, mais qui partagent et apprécient ce besoin de connaissances.
Les chapitres précédents de « Matrone et Domina, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » sont parus sur HDS depuis le 6 août 2021.
Le chapitre Ier contient les références bibliographiques sur lesquels sont construits ces récits historiques fictifs.
Pour la bonne compréhension du présent chapitre, il est plus particulièrement recommandé de lire :
Jean-Noël Castorio : « Messaline, la putain impériale » (Payot, 2015)
« Histoire des libertines (5) : Messaline, impératrice et putain. », un texte que jai publié le 15 septembre 2017 sur HDS
Le roman dAlfred Jarry « Messaline, roman de lancienne Rome », disponible sur ebook mais aussi sous format papier, sur Amazon.
Jacqueline Dauxois : Messaline (Pygmalion, 2002) : une biographie romancée dans la collection « Reines de légende »
Je précise que, pour les besoins de mon récit, jai fait le choix de reprendre telles quelles les descriptions des vices et des crimes de Messaline, telle quelles ressortent des ouvrages dauteurs qui écrivent bien après les faits, comme le poète Juvénal (55-128) ou encore les historiens Tacite (58-120), Suétone (70-122) et Dion Cassius (155-235). Les textes dans lesquels ces auteurs parlent de Messaline sont à charge. Même si, à lévidence, Messaline navait pas froid aux yeux, il est probable que ces écrivains aient le trait, reprenant à leur compte la haine de laristocratie sénatoriale envers le pouvoir impérial.
Les personnages évoqués dans ce récit ont existé, à part naturellement Marcus, Tullia, sa servante et amante Lucia, leunuque Parsam et labominable Lurco.
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RESUME DES CHAPITRES PRECEDENTS
Sous le règne de lempereur romain Claude, le sénateur Marcus Tullius Longus a donné à sa fille Tullia, devenue une superbe jeune femme, la meilleure éducation. Marcus ignore cependant, quinspirée par certaines lectures, Tullia est dévorée par un feu intérieur, celui dune libido encore exacerbée par sa liaison saphique avec Lucia, sa jeune servante et confidente.
Laggravation de sa situation financière a contraint Marcus à accepter comme gendre Lucius Spurius Lurco, un parvenu, vicieux, cruel et sans scrupules. Il ne cache pas sa préférence pour ses éphèbes et ses mignons. Mais il est immensément riche et il a la faveur de limpératrice Messaline.
Le lendemain du mariage, en sa présence, Lurco fait dépuceler Tullia par Adonis, son favori. Dans les bras de celui-ci, Tullia a confirmation de son hypersexualité. Comme le voulait son pervers époux, Tullia finit par tomber enceinte, suite à ses étreintes avec le beau et viril Adonis.
Avec la naissance de Caius, quil reconnait comme son fils, Lurco a obtenu ce quil voulait, un héritier. Laccouchement particulièrement douloureux a provoqué la stérilité (définitive ?) de Tullia.
Lurco a accepté de livrer Tullia à la perverse impératrice Messaline. Ensemble, ils sont bien décidés à exploiter lhypersexualité de Tullia pour provoquer sa déchéance et humilier son père.
Messaline envoie auprès de Tullia un de ses proches, leunuque Parsam. Elle nimaginait pas quils allaient tomber amoureux lun de lautre ! Parcham veut tout faire pour sauver Tullia des plans diaboliques de Messaline et Lurco, mais aussi de ses propres démons, son hypersexualité qui la pousse vers les plus grands excès.
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Immensément riche, Lucius Spurius Lurco possède une vaste Domus au pied du Palatin, siège du pouvoir impérial.
Les empereurs ont voulu avoir des résidences à la hauteur de leur pouvoir et ils les ont installées sur la colline du Palatin. Auguste fut le premier à s'être installé au Palatin, ses successeurs ont ensuite rajouté bâtiment après bâtiment pour aboutir à un ensemble de Palais Impériaux impressionnants. La partie la plus importante est la « Domus Augustana », résidence privée de lempereur, qui se situe au Sud-Est de l'ensemble. Le Nord-Est est occupé par la Domus Tiberiana, construite pour l'Empereur Tibère, le successeur dAuguste et qui avait été agrandie par Caligula dans la partie qui surplombe le Forum.
Lentrée de Lurco et de Tullia, dans le grand Tricilinium de la Domus Tiberiana, fait sensation. Le couple est accueilli par un grand silence. Pour le moment, Lucia reste en dehors de la salle. Elle sera appelée plus tard dans la soirée.
La grande salle est somptueuse. Les lits, sur lesquels les invités sallongent pour manger, comprennent des structures inclinées aux extrémités, appelées fulcra, pour mieux accueillir les oreillers. Le fulcrum des canapés de la salle à manger comporte de somptueux ornements en ivoire, bronze, cuivre, or et argent.
Dans cette grande salle, qui avait été le théâtre des orgies de Caligula et était désormais le cadre des soirées de débauche de Messaline. Il y a une trentaine dinvités, sans compter naturellement les esclaves chargés de les servir ainsi que danseuses et musiciens qui sont là pour les distraire, en attendant la seconde partie de la soirée, consacrée aux ébats sexuels.
Messaline prend alors la parole :
Mes amis, voici Tullia, la fille du sénateur Marcus Tullius Longus, celle pour laquelle vous êtes là ce soir. Sa réputation de beauté a fait que jai eu beaucoup de sollicitations. Vous êtes les privilégiés que jai choisis pour une première soirée, mais il y en aura dautres, je veux pouvoir loffrir à tous ceux qui la désirent.
Tullia frissonne devant le regard de Messaline. Elle ressent une sourde menace. Messaline trouve en effet Tullia encore plus belle quon ne lui a décrite. Et on sait le sort quelle avait réservé à celles quelle trouvait aussi belles que dangereuses, comme Livilla, Julia Drusii ou Poppée.
Messaline fait signe à Lurco, qui fait tomber le Pallium, le manteau de son épouse. En faisant cela, il exhibe la tenue de Tullia, vêtue de cette robe en mousseline, dont la transparence et le décolleté laissaient voir ses formes. Il y a dans la salle un murmure : jamais une matrone, une domina navait été aussi indécente. Même dans les peintures érotiques romaines les plus explicites, même chez les prostituées, les seins sont couverts par le strophium. Dévoiler ainsi sa poitrine est dune indécence inouïe, qui annonce la disponibilité sexuelle de la jeune patricienne.
Lun des invités de la soirée, le médecin personnel et ancien amant de Messaline, Vettius Valens, interpelle Tullia :
Je vois, belle matrone, que tu suis les enseignements du poète Tibulle (voir « Matrone et Domina, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » (1) : léducation de Tullia)
Tullia, loin de rougir, assume et répond :
Oui, noble seigneur, Tibulle soutient qu'une femme devrait porter des vêtements lâches pour qu'on puisse apercevoir ses seins quand elle s'incline au dîner. Cest ce que jai fait, sur recommandation de limpératrice.
Je vois que tu vas très bien tentendre avec Valens. Mais je veux dabord remercier mon ami Lucius Spurius Lurco.
Lurco incline la tête, en signe de remerciement et de soumission.
Merci aussi à ma fidèle Marcia, qui a parfaitement appliqué mes consignes. Cette petite na pas lapparence dune digne patricienne, mais elle apparait pour ce quelle est : une putain. Je ferai delle une lupa!
Tullia ne bronche pas sous linjure. Elle y a chez elle un mélange de peur et dexcitation, devant ces regards qui la déshabillent. Si Messaline lavait ordonné, certains se seraient déjà jetés sur elle.
Cette soirée est très spéciale. Dhabitude, je fais venir plusieurs patriciennes pour quelles soient honorées par mes invités, en présence de leurs époux. Ce soir Tullia est seule et je la pense capable de satisfaire autant de mâles. Je ne laiderai pas, même si jen ai toujours envie. Je ne veux rien perdre du spectacle et Mnester soccupera de moi ensuite. Je charge mon cher Parsam de prendre soin delle en attendant le grand moment. Place au diner, aux musiciens et aux danseuses. Puis ce sera ton tour, Tullia.
Parsam est heureux de passer le banquet aux côtés de Tullia. En lui accordant cela, Messaline, dont linstinct devinait les sentiments de leunuque pour la Patricienne, veut aussi le punir, en le contraignant à être le témoin de la soirée, à voir tous ces hommes posséder celle quil aime.
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En prenant place sur le lit, avec Parsam à ses côtés, Tullia commence par bien observer Messaline.
Ce qui la frappe est que Messaline est loin dêtre une beauté. Son visage exprime une rondeur juvénile mais il nest pas gracieux, elle a un menton en galoche, une puissante mâchoire qualourdit un double menton naissant, un cou épais, une petite bouche aux lèvres pincées, un long nez à la Cléopâtre. Tullia et Messaline sont suffisamment proches lune de lautre pour que leur regard se croisent. Le regard de Messaline exprime autant la volupté que la cruauté. Son sourire ironique semble sceller le destin de Tullia, dautant que celle-ci se refuse à baisser les yeux.
Le visage de Messaline est plein de morgue et de froideur. Derrière ce masque, comment dénoter autre chose que le tempérament de calculatrice dune femme qui utilise son corps au service dune quête effrénée de richesses et de pouvoir? Et dans cette dureté des traits, comment ne pas discerner la férocité qui guide ses actes ?
Tullia a vu dans les yeux et sur le visage de Messaline qui elle est et les sentiments de haine quelle lui porte. Elle doit cependant reconnaitre que le corps de limpératrice exprime la volupté qui gouverne sa conduite. Sur ce point et seulement sur celui-là, les deux femmes se retrouvent.
Parsam intervient :
Je ten prie, ne la provoque pas. Elle est dangereuse
« Ingis intus urit » (« le feu brûle à lintérieur ») lui répond Tullia, qui traduit ce quelle a ressenti dans lâme noire de limpératrice. La jeune patricienne se résigne à regret à abandonner son duel à distance avec Messaline
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Les convives s'allongent sur des banquettes disposées en fer à cheval autour de la table.
On mange avec les doigts, de la main droite, en limitant l'usage aux premières phalanges. Des esclaves sont là pour veiller au confort des convives et leur proposer de quoi se laver les mains. Les aliments sont prédécoupés, même quand ils sont apportés entiers devant les convives. Les restes, les déchets sont jetés au sol. Ils deviennent alors la possession des défunts dont les âmes circulent dans la maison.
La soirée, avant sa partie orgiaque, est dabord un banquet. Les banquets de Messaline étaient fastueux et, conformément à la tradition, comprenaient trois services :
Le premier, « gustatio », est une série de hors-d'uvre, en particulier des huîtres et escargots, très prisés). On servait avec celui-ci un mélange de vin et de miel, le « mulsum »
Le deuxième service, « prima mensa, » voit arriver sur la table viandes ou volailles rôties, bouillies, grillées ou en sauce, saucisses ou ragoûts. On les accompagnait de vin
Les repas s'achevaient sur un troisième service, « secunda mensa », avec assortiment de fruits, gâteaux et friandises, excitant la soif.
Ce soir-là, Messaline a choisi lun de ses proches courtisans, le consul en exercice, Lucius Vitellius Major comme « le roi de boisson », qui définit les quantités et les types de vins que les convives doivent boire.
Vitellius sait ce que veut Messaline. Le vin, ce soir, est abondant, les consignes données aux esclaves sont que les coupes ne doivent jamais être vides. Vitellius a choisi les crus les plus réputés, en provenance de Capoue, de Pompéi, de Messine et surtout le fameux vin de Falerne, vin de Campanie produit dans la région de Caserte. Le vin est servi frais. Habituellement, il est coupé avec de leau, mais, exceptionnellement, ce soir-là, il est servi pur et en abondance, Messaline tenant à ce que ses convives oublient toute inhibition.
En même temps que des bataillons desclaves saffairent à servir les convives, des musiciens divertissent les hôtes en jouant de la harpe, de la cithare, de la flûte ou de la lyre et chantent les exploits des héros mythiques.
Et enfin, pour achever de mettre en condition ses invités, Messaline fait entrer en fin de banquet de jeunes garçons et de jeunes filles qui exécutent des danses voluptueuses et chantent des poésies érotiques grecques et latines. Rien na été laissé au hasard pour que les hommes soient en rut avant que Tullia ne soit à leur disposition.
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Tullia profite de ce repas interminable et de la présence de Parsam à ses côtés pour que celui-ci lui présente les invités de Messaline
Il y a ici des amants et anciens amants de Messaline, et sans doute de futurs amants pour lesquels tu sers dappât.
A la table de Messaline, se trouvent trois hommes : outre Lurco, le mari de Tullia, il y en a deux autres dont Parsam exposa lhistoire à la jeune patricienne :
Le consul Lucius Vitellius Major, « roi de boisson » de la soirée, est âgé de 57 ans. Personnage de première importance dans la vie politique romaine, il fut l'un des plus influents sénateurs sous les empereurs Caligula et Claude, ce qui lui permit d'avoir l'honneur extraordinaire d'être gouverneur de Syrie et trois fois consul. Il avait assuré sa carrière en étant un courtisan servile de tous les empereurs depuis Tibère. Il passe pour très proche de Claude, comme de Messaline. Il est le père dAulus Vitellius, qui sera empereur en 69. Vitellius et Longus, le père de Tullia, lun et lautre sénateurs, se détestent cordialement et naturellement Vitellius se réjouit dassister à la déchéance de la fille de son collègue.
Regarde le comportement de ce porc de Vitellius !
Tullia voit ce que lhistorien Suétone décrira comme le comportement de Vitellius lors de ces soirées : Vitellius « sollicita de Messaline, comme la privauté le plus précieuse, la permission de la déchausser et, lui ayant dérobé son brodequin droit, il affecta de le porter constamment entre sa toge et ses tuniques, en le baisant de temps en temps. »
Et qui est lautre homme, à gauche de Messaline, qui ne cesse de lembrasser et de la caresser ? Messaline ne se gêne pas pour le caresser sous sa tunique !
Cest Mnester, un célèbre acteur pantomine qui fait tourner toutes les têtes, hommes et femmes. Lempereur Caligula était tombé fou amoureux de lui. Lors de spectacles, représentations, ou jeux du cirque Caligula navait pas peur de lembrasser ou de le caresser devant tout le monde.
Il a survécu au tyran, je vois !
A la mort de Caligula, Mnester est resté dans les bonnes grâces du pouvoir. Il a aussi été lamant de cette fameuse Poppée et cest en partie à cause de cela que Messaline haïssait celle-ci et voulait sa mort. Sais-tu que Mnester a dabord refusé les avances de Messaline ?
Comment est-elle parvenue à ses fins ?
Messaline le voulait absolument, ayant appris que Mnester était aussi bien pourvu que Priape lui-même. Mnester refuse. Messaline va alors demander à son mari, lEmpereur Claude de lui donner lordre de coucher avec sa propre femme !
Vraiment ?
Plus précisément, elle a demandé à Claude dordonner à Mnester de « faire tout ce que sa femme lui ordonne ».
Elle la donc contraint ?
Quand Messaline veut quelque chose ou quelquun, rien ne larrête. Elle a fait de Mnester son amant par les menaces, mais aussi par les coups. Elle le domine et la fait fouetter. Mnester a aussi une autre caractéristique : Messaline en est très entichée. Messaline use et de Mnester et pour pouvoir ladmirer à satiété, elle a même fait couler une statue en bronze de son amant. Et surtout, il est le seul avec qui elle a une relation prolongée. Dhabitude, elle a une relation dune nuit, puis elle ne revoit plus son amant, préférant en quelque sorte la nouveauté.
Cest fascinant ! Cest un monstre, mais quelle femme ! Parle-moi des autres amants de Messaline
Je ne te parlerai que de ceux qui sont là ce soir, parce que les énumérer tous est impossible. Elle partage encore quelquefois le lit de Claude et il se dit dans Rome quelle partage aussi celui de tous ses favoris. Parmi ceux qui ont bénéficié de ses faveurs, il y a des sénateurs, des hauts fonctionnaires, des chevaliers, des gladiateurs.
Montre-moi ceux qui sont ici ce soir.
En face, il y a Vettius Valens, lun des plus célèbres médecins de lempire, au service de César Claude. Il est immensément riche et de plus célèbre par ses talents oratoires. Médecin personnel de Messaline, puis son amant. Cest avec lui que tu as échangé tout à lheure au sujet du poète Tiburce. Il te dévore des yeux depuis le début de la soirée.
Je suis certaine, à la façon dont il me regarde, quil parle de moi. Cest un bel homme. Qui sont ses voisins de table ?
Ce sont des politiciens. Il y a des sénateurs, venus pour toi mais aussi désireux dhumilier ton père, leur collègue. Parmi ceux qui parlent avec Vettius, il y a Plautius Lateranus, neveu du général Aulius Plautius, le conquérant de la Bretagne. Il y a aussi les sénateurs Saufellus Trogus et Juncus Virgilianus
Bel homme ce Juncus Virgilianus !
Il y a aussi un ancien consul, Publius Suillius Rufus, fils de sénateur, mais il est surtout réputé pour sa bisexualité.
Il doit bien sentendre avec ce chien de Lurco !
Le groupe de lautre côté, ce sont de simples chevaliers : Titius Proculus, Pompéius Urbicus, Sextus Traulus Montanius, qui ne sut plaire à Messaline quune seule nuit !
Et qui est ce colosse qui me dévore des yeux ?
Un ancien gladiateur, Sabinus, dorigine thrace. Il a été un proche de Caligula, qui lavait placé à la tête de sa garde personnelle. Claude lavait renvoyé dans larène, il fut rappelé par Messaline pour en faire son amant.
Parsam eut alors un rictus de dégoût. Devant le regard étonné de Tullia, il sexpliqua :
Je vois deux personnes qui nont aucune honte à être présent, en tant quamants de Messaline et pourtant ! Je vois ici Publius Cornelius Lentulus Scipio, le second mari de Poppeia Sabina, sénateur et consul sous Tibère. En devenant lamant de Messaline, il sest vengé des adultères de Poppée.
Je comprends ce que tu ressens. Et son voisin ?
Cest encore pire. Furius, le fils de Scribonianus, le légat de Dalmatie, qui sétait révolté contre Claude en 42. Il a été épargné, à la demande de Messaline, qui la mis dans son lit.
Et ce groupe de quatre hommes ?
Tullia, malgré son éducation, a été tenue à lécart de la vie politique, tant par son père que par son époux. Elle ignore quil sagit des quatre affranchis de Claude, les hommes les plus puissants de lempire, qui gouvernent au nom de lempereur. Messaline les a mis dans sa poche, ou plutôt dans son lit !
Il y a dabord Gaius Iulius Polybius, Polybe, le secrétaire de Claude César. Avant l'accession de l'empereur au pouvoir, il assistait Claude dans ses travaux littéraires, juridiques et historiques, Polybe est devenu lun des principaux responsables des services administratifs impériaux. Il se dit que ses relations avec Messaline se sont beaucoup dégradées (quelques temps après, en 47, Messaline obtint la disgrâce de Polybe et son exécution, affirmant ainsi son pouvoir sur les affranchis. Ceux-ci se vengeraient par la suite)
Jai vu son voisin en grande conversation avec Messaline tout à lheure.
Il sagit de Tiberius Claudius Narcissus, Narcisse, ancien esclave de Claude et son homme de confiance. Il est praepositus ab epistulis (responsable de la correspondance) et lui aussi immensément riche. Il a conspiré avec Messaline, pour faire exécuter plusieurs de ses adversaires et récemment il a contribué au terrible sort dAsiaticus.
Celui-ci cest Caius Julius Callistus, Calliste, qui était un affranchi de Caligula, Sa fille Nymphidia aurait eu une liaison avec Caligula. Inquiet des fantaisies meurtrières de Caligula et craignant pour sa survie, il a trempé dans son assassinat en 41. Il se fait bien voir de Claude, en prétendant n'avoir pas exécuté les ordres de l'empoisonner formulés par Caligula. Il exerce une influence considérable sur Claude
Et le dernier ?
Cest Marcus Antonius Pallas. Pallas était à lorigine un esclave dAntonia la Jeune, fille de Marc Antoine, nièce de lempereur Auguste. À la mort dAntonia en 37, il est passé au service de son fils Claude, qui la affranchi. Pallas est secrétaire aux finances de la maison impériale (a rationibus). Il est reconnu pour son efficacité et il est comme lun des hommes les plus riches de Rome. On dit quil est aussi lamant dAgrippine, la nièce de lempereur.
Tu ne mas pas parlé de ce beau vieillard, qui mobserve dun air triste.
Cest le doyen du sénat et Préfet de Rome depuis cinq ans, Lucius Volusius Saturninus. Il a plus de 80 ans. Sa fortune, acquise sans prévarication, est estimée à plus de 300 millions de sesterces. Sa réputation est sans tâche, il a de grands biens légitimement acquis et a réussi à traverser tant de règnes cruels traversés sans disgrâce. Il sapproche, on dirait quil veut te parler
Je me souviens maintenant, mon père ladmire beaucoup.
Saturnius, malgré son grand âge, en impose. Il se tient bien droit et est plein de dignité. Messaline elle-même navait jamais osé sen prendre à lui.
Je te salue, Domina. Je ne suis pas ici pour les mêmes raisons que les autres. Je suis ici parce quun père me la demandé.
Tullia est morte de honte face au regard de Saturnius. Elle baisse les yeux.
Je te salue, noble Saturnius. Que vas-tu dire à mon père ? Je veux quil sache que ce que je vais faire est dans ma nature et que je ne peux le contrôler.
Ton père et moi sommes des stoïciens et pensons quon peut toujours maîtriser ses pulsions.
Alors tu me condamnes ?
Qui suis-je pour juger ? Je dirai à Longus que, contrairement à limpératrice, il ny a en toi ni cruauté, ni mal. Tu te laisses gouverner par tes sens. Je lui rappellerai quil na quun et quil ne peut la condamner. Que tu laimes et que jespère quil ait la grandeur de te pardonner.
Tullia est bouleversée. Saturnius était sa conscience qui la rappelait à ses devoirs. Mais elle na ni la force ni lenvie de lécouter.
Ce fut Messaline qui mit fin à ce moment douloureux :
Lucius Volusius, par respect pour toi et suite à ta grande insistance, je tai autorisé à être présent ce soir. Jai voulu que tu puisses dire à Longus qui est vraiment sa fille. Mais tu as promis de ne pas intervenir. Laisse faire ce qui doit être !
Avec une grande dignité, Saturnius, après sêtre incliné devant limpératrice, séloigne pour laisser Tullia accomplir son destin. Il est convaincu que la jeune femme na en commun avec Messaline que le dérèglement de ses sens, mais que son cur est pur. Il se demande quels mots il pourrait trouver pour apaiser la douleur de Marcus, son ami à qui il ne saurait mentir, et plaider le pardon pour Tullia.
Il est temps, mes amis, de passer à ce que pourquoi vous êtes venus. Cette femme est à vous, jusquau bout de la nuit, vous pourrez en faire tout ce quil vous plaira. Faites entrer sa petite esclave, elle pourra faire patienter ceux qui vont honorer sa maîtresse. Je sais que beaucoup dentre vous aimeraient être le premier à la prendre. Il me fallait donc arbitrer et mon choix sest porté sur Juncus Virgilianus. A toi lhonneur, Virgilianus ! Elle est à toi. Baise-la !
La plupart des convives félicitèrent Virgilianus, qui intriguait depuis des jours pour obtenir cette faveur. Quelques voix exprimèrent leur déception de ne pas avoir été choisis.
Pas dimpatience, mes amis. Nous avons tout notre temps. Je le répète, chacun pourra disposer de cette catin. Virgilianus va préparer le terrain et vous montrer létendue des talents de patricienne, qui na rien à envier aux putains de Suburre.
Alors que les serviteurs font entrer Lucia, nue, dans la salle, le Sénateur Juncus Virgilianus quitte les convives avec qui il avait passé la soirée et se dirige vers Tullia.
Il reste un des proches de Messaline, un de ses premiers amants, même si désormais le favori est Mnester. Il est un homme nouveau, de basse extraction et Messaline a obtenu de Claude sa nomination au Sénat. Par ses nominations dhommes nouveaux ou encore de Gallo-Romains, Claude est en train de changer la physionomie des Pères Conscrits. Ces nominations heurtent les Vieux Romains comme Saturnius et Marcus. Le premier sen accommode et, en retour, a tous les honneurs. Marcus, lui, na pas su se taire et déteste le régime et la dynastie julio-claudienne. Pour Virgilianus, baiser la fille de Marcus est une revanche. Et cette femme le faisait bander depuis quelle était entrée dans la salle.
Messaline na pas choisi Virgilianus au hasard. Le quadragénaire est un bel homme, aux muscles saillants. Par expérience, Messaline sait que Virgilianus est endurant et performant. Sans hésiter, cest donc lui quelle a choisi pour débuter la seconde partie de soirée. De son côté, Tullia a remarqué ses regards appuyés depuis le début de la soirée. Elle est attirée par ce mâle, elle a une envie irrésistible de baiser. La nuit sera longue.
A suivre : (7) : la soirée de Tullia
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