Laquelle 3

LAQUELLE 3


Je vais interrompre la conversation du couple récent d'Alfred et de Margot pour une dernière danse avec Margot. Un conseil sera peut-être utile. Je me permets de lui rappeler l’existence d’une pilule du lendemain à utiliser au cas où elle aurait à regretter un rapport sexuel finalement regrettable. Paupières plissées, elle saisit l’allusion, me remercie du renseignement, dépose un baiser sur ma joue. Nous ne terminons pas la danse. Qu’elle aille s’occuper d’Alfred. Je les salue. Je peux m’en aller. Maman, quand je rentrerai à la maison, de son lit demandera:

- C’est toi, Nicolas?

Je ne suis pas au bout de mes surprises. Contre un arbre du parking adossée, une blonde attend l’assaut de René. Ils ne me voient pas, je les observe un moment. Par la force des circonstances je deviens voyeur malgré moi! Mais est-ce que cela me déplaît vraiment? Je pourrais détourner mon regard ou fermer les yeux. Or j'observe:

René travaille des mains, s’agenouille et fourre son groin dans l’entrecuisse de la fille. Elle ne crie pas, est plus que consentante et ouvre au maximum l'angle de ses cuisses. Le porc s’y attarde longuement, arrache des cris de plaisir, mais se garde de montrer ou de brandir son attirail. Sa brutale étreinte de Margot a laissé des traces sur son sexe et l'a fatigué. Lors d'une fellation odeurs et saveurs trahiraient la relation à peine passée. Il redoute aussi d’échouer dans une tentative de pénétration en raison du manque de vigueur d'un pénis trop sollicité. Il fait de son mieux pour assouvir cette proie à moindres frais, il la fait jouir en préliminaires interminables, quitte à rester à genoux sur le macadam mouillé. Tout le monde le sait: les hommes se soulagent au pied des arbres quand les prend une envie pressante. Son pantalon s'en souviendra: Les laveries ne sont pas faites pour les chiens!

La fille qui se trémousse sous les caresses de René ce n'est pas Jenna.

Mais où est donc Jenna? Sans doute danse-t-elle avec le deuxième homme du quatuor.

La blonde est-elle satisfaite ? Le mode d’emploi lui convient-il? L'homme se redresse. Je les vois embarquer dans un coupé sport, rouge cette fois. René serait-il loueur de voitures ou employé dans ce type de société de location de véhicules?

Quelques jours plus tard.
C’est devenu une tradition: ce vendredi Jenna m’aborde dans le couloir.

- Mais ce sera avec plaisir. ..Alfred n’est pas disponible?… Quoi, il t’a envoyée sur les roses…; Oh! Le malappris! Il refuse de tetransporter pour te livrer à d'autres, dis que tu l'as pris pou un con. A-t-il absolument tort?

Elle devrait entendre que j'ai pensé comme Alfred lorsqu'elle m'a utilisé et abusé de ma naïveté la première fois! Bon prince je me prête au jeu : ce ne sera pas gratuit.

- Je te prends où, à quelle heure? …

Par principe je la fais plier:

- Non, ça ne va pas. Je préférerais une heure plus tôt… Ca ira comme ça? Sois ponctuelle, je n’attendrai pas plus de cinq minutes. A demain.

Elle n’a vraiment honte de rien. Quand cessera-t-elle de me prendre pour un ballot? Je vais lui réserver un chien de ma chienne. Je sais dans quel sex-shop je vais trouver ce qu’il me faut.
Sous les nappes, certaines tables de la salle de bal sont des tables de jardin métalliques avec des pieds à volutes en fer forgé, rene d’anneaux.
Je vais féliciter Alfred pour son courage. Il a l’intention d’aller compléter sa formation en danse et tendresse avec Margot. Je lui annonce mon plan. Il en rit et me promet d’arriver assez tôt, il ne manquera le spectacle pour rien au monde.

Premiers sur le parking, je me permets de faire à Jenna, ma passagère, des reproches sur sa désinvolture. Elle nous a traités, Alfred et moi comme des nigauds mais nous ne lui permettrons plus de nous planter seuls pour rejoindre un René incapable d’aller la chercher mais toujours prêt à la serrer de près ou à vouloir la tripoter à l'ombre.


L'allusion est claire. Elle prend un air contrit, mais m’assure qu’elle s’occupera nécessairement de moi puisque René ne se présentera pas avant vingt-et-une heures trente. Ils ont pris rendez-vous ! Appelle-moi "boy". Cette fille est inconsciente, je vais la ramener sur terre.

Un orage s’abat sur la région. Les grosses gouttes de pluie tambourinent sur la tôlede l'auto.Je ne cache plus ma rancoeur:

- Je serai un bouche-trou à 21heures et des minutes ? Quand ton René se pointera, à l'heure de votre rendez-vous, je redeviendrai transparent, inutile ? Tu te moques de moi? Tiens, voilà Alfred. Grâce à ton indélicatesse, il a fait une belle rencontre.

- Si tu veux. Mais c’est une pauvre fille facile. René s’est vanté de lui avoir fait du bien, si tu vois le topo.Enfin, c’est un vantard. Il raconte beaucoup, mais n’agit guère.

- Détrompe-toi. Ce n’est pas mon impression. René saute tout ce qui bouge. Tu dois l’avoir expérimenté comme Margot, j’en suis sûr.

Touché, coulé ! Elle vire au rouge. Comme toujours, l’acte n’a pas d’importance. Être vu est plus gênant. Elle peut se poser des questions, même si elle a su arrêter presque à temps la tentative de copulation. Le doigt de René a dû l'émouvoir. Je coupe court, j'ai autre chose en tête.

- Bon, entrons.

Je loue deux tables éloignées l’une de l’autre. Alfred, Margot, Jenna et moi en occuperons une, au début. A mon bras droit, discrètement, je fixe une poignée de menottes. Je demande l’heure à Jenna, elle tend son bras gauche et se retrouve prisonnière de l’autre poignée. Une chaîne nous unit. Je l'avertis:

- Nous sommes liés pour tout le bal. Ca te déplaît ?

Nul n'est besoin de réponse, il suffit de voir sa tête pour être renseigné. Je tiens une vengeance qu'elle n'a pas su prévenir:

- Tu m’as fait poireauter une fois, pas deux. C’est fort déplaisant de se sentir ignoré pendant que tu te frottes contre René qui te fait danser; demande l’avis d’Alfred, il confirmera.
Si je le souhaite tu vas tenir tes promesses que tu le veuilles ou non. Est-ce si terrible? Si tu ne veux pas m’apprendre à danser, nous resterons assis. Tu pourras me raconter les exploits sexuels de René contre les murs ou dans son inconfortable coupé sport de location. La prochaine fois recommande lui une berline à vitres teintées, on verra moins les fesses de ses victimes.

- Mais qu’est-ce que tu racontes? Quand aurais-tu vu mes fesses?

- Ma voiture stationnait près de la sienne il y a deux semaines, j'ai vu ton héros donner du plaisir à une danseuse que j'ai failli confondre avec toi. Samedi dernier sa fille a dû te contenter d’une masturbation et d’une léchouille puisqu’il s’était épuisé avec qui tu sais. Ne me raconte pas qu'il ne t'a pas traitée comme les autres filles qu'il baise hors de cette salle.

- Mais tu m’espionnes, c’est honteux, espèce de vicieux. Par bonheur, tu te trompes, René est bon danseur, mais il ne m"a pas sautée comme tu le crois. Il s'en prend à d'autres?

- J’ai une voiture magique, il suffit que j’y prenne place pour voir ton cher René en action, avec toi ou une quelconque proie, occupé à lutiner ou pénétrer la nana de façon acrobatique dehors, contr un mur ou contre un arbre. Suis-je coupable ou condamnable de ne pas baisser les paupières?

Les deux amoureux ne suivent pas notre conversation. Margot ne lâche pas son Alfred chéri. Le monde peut s’écrouler, ils n’en sauront rien. Toujours aussi discrètement, pendant la bouderie de ma prisonnière, je dégage mon poignet et attache la menotte dans un anneau sous la table.

- Que fais-tu? Ah! Non. Pas ça. Je te jure que j’irai danser toute la nuit avec toi... Si tu ne me détaches pas, René te cassera la figure.

La promesse est suivie de la menace. Grand classique qui devrait me jeter à ses pieds.Je me lève et vais attendre à l’entrée l’arrivée de Jeanne, Denise et Françoise. Nous irons à l’autre bout de la salle, à la deuxième table réservée.
Qu’elle est belle ma petite Jeanne. Elle me saute au cou, dépose un gentil baiser sur mes joues. Jenna se penche pour constater avec rage mon occupation nouvelle. De la piste je lui adresse des signes amicaux au passage. Elle a examiné l’extrémité des menottes sous la table. Seule la clé la délivrera. La clé est dans ma poche. Par le détail je raconte à Jeanne ma vengeance. Elle me trouve cruel. A sa prière je promets de libérer Jenna à minuit, pas plus tard, après le départ des trois cousines.


" Zorro...René est arrivé, hé, hé. Sans s’presser hé, hé. Le grand René, le beau René, sans son cheval et sans son lasso." Il a trouvé Jenna seule, affligée, en larmes mais effrayée par les moqueries que déclencheraient des appels au secours et donc beaucoup plus discrète que prévu. Il a écouté, a inspecté le piège, s’est relevé désolé et furieux et il m’a cherché du regard.

Il m’aborde, m’ordonne de libérer ma collègue ou je devrai aller régler ça entre hommes à l’extérieur. Nous sortons sous la pluie. Je n’utilise mes prises de judo qu’en cas de défense. Une fois René s’écrase sur le dos, prend son temps pour se relever lourd de l’eau de pluie ramassée. Il charge comme un taureau, heurte mon pied et pique du nez dans une flaque d’eau et de boue. Je l’aide à se relever et lui conseille d’aller se changer. Les curieux, sur le perron applaudissent le vainqueur, sans pitié pour le prétentieux trempé et sale.

Seule Jenna est déçue de me voir revenir intact. Elle se penche, se demande où est son défenseur. Peut-être reviendra-t-il. Jeanne ne tient plus de joie. Sur la piste elle ose l’inattendu. Levée sur la pointe des pieds, elle plaque ses lèvres sur les miennes. Un gentil baiser, bien chaste, lèvres serrées, annonciateur de futures douceurs.

- Tu sais, j’ai eu peur. J’ai regardé, tu ne l’as même pas touché. Avait-il trop bu?

- La fureur fait perdre l’équilibre. Il faut savoir rester calme. Il s’est emmêlé les pieds. J’ai eu de la chance.

La chance ne me quitte pas. Je suis un héros par chance, je mérite un baiser plus audacieux, lèvres entrouvertes, humides d’admiration juvénile pour mon calme olympien. Oui, mais si elle continue à m’embrasser comme ça, mon calme va s’évaporer. C'est si bon, je me laisse faire, je suis heureux.

Les gens heureux n’ont pas d’histoire. Minuit approche, rendez-vous est pris sur la polaire, à la même heure. Jeanne me remet une carte de visite au nom de ses parents. Si je passe chez eux, ils lui accorderont peut-être l’autorisation de rester plus tard, rassurés par mon allure de jeune homme convenable. Les deux cousines insistent également, mettent en avant des qualités qu'elles me font découvrir. Je verrai. Elles s’en vont joyeuses, oubliant Jenna à sa table attachée. Je les raccompagne, puis je reviens à ma première table.

- Ce n’est pas drôle de rester assise. As-tu compris l’affront et l’ennui? Que faisons-nous maintenant?

La réponse me déçoit:

- Où est René ? Que lui as-tu fait ? Tu lui as fait mal ?

- Il a glissé dans l’eau et s’est couvert de boue. Il n'était plus présentable. Il a préféré partir se changer, je ne sais pas s’il reviendra. A trois heures, si tu le souhaites je te déposerai, devant chez toi ou devant chez lui.

- D’habitude c’est lui qui revient et l’autre n’est pas beau à voir. S’il a glissé tu as eu de la chance.

C’est étrange, l’une a vu, l’autre non. Pour elles deux j’ai "eu de la chance".

- Merci pour le piège. Tu profites de ma voiture et tu souhaites me voir rossé par ton copain. Tu mérites de rester encore attachée.

- Oh! Non, je t’en supplie, toute la salle me regarde, j’ai l’air bête, seule, abandonnée. Délivre-moi. Si tu veux, tu t’attaches à moi et nous irons danser ensemble, comme promis.

Je sors une deuxième paire de menottes de ma poche: un bracelet pour moi, un pour elle. Je peux libérer la table et reprendre la première paire en poche. Je rêvais d’attacher René en face de Jenna. Tant pis, je n’aurai pas cette satisfaction cette nuit.
à suivre

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