Une Opportunité 6
Une opportunité
Je suis devant ma porte de garage, jattends le retour de Patricia. Son bus est passé, elle tarde. Sont-ils restés sur un coin de parking pour discuter ou pour compléter leurs jeux de touche pipi ? Je rumine ces pensées noires. La question première, c'est "que faire?"Puis je me demande.
- Patricia m'aime-t-elle encore? Cela vaut-il la peine de continuer à partager sa vie? Je suis la cinquième roue du carrosse, à ses yeux un type sans importance, moins intéressant que le revenant qui lui offre des perspectives nouvelles. Tout me porte à croire que notre couple est fichu
Elle ignore que je sais tout que j'ai été témoin de sa chute. Que faire? La quitter ou attendre qu'elle s'en aille d'elle-même,sans moi avec Claude ou avec un des étalons qu'elle va côtoyer dans les studios? L'un de ces héros du web la trouvera à son goût. Ils feront connaissance nus sur un plateau, accompliront les gestes de l'amour. L'homme la prendra, elle jouira etcetera. Il aura des qualités spéciales dans un cadre envoûtant et elle en tombera amoureuse. Quoi qu'elle fasse je suis décidé à la rupture après le constat d'adultère.
Que faire, que dire? La bousculer, l'agresser avec des reproches justifiés ou attendre d'y voir plus clair ? Désormais j'ai un but, je cherche la meilleure méthode pour l'atteindre avec le moins de casse. Il est possible, bien que peu probable, que cette vie si attrayante aujourd'hui ne lui plaise pas longtemps. Elle se débrouillera avec le magot gagné à se prosti sur écran.
Une limousine pesante la dépose devant la maison. Elle embrasse longuement le conducteur, lui fait un signe de la main, lui dit: « à demain Claude» et sétonne de me trouver devant elle.
- Mon chéri, où vas-tu ? Tu venais à ma rencontre. Excuse-moi, je n'ai pas pu te prévenir. Un client a proposé de me ramener en voiture? Ca ne m'était jamais arrivé, je n'ai pas voulu refuser.
- Oui. C'est un client que tu connais bien?
- Même pas. C'est un habitué du magasin sans plus.
- Ah ! Je ne sais pas pourquoi j'ai cru que c'était un ami ou un familier.
- Laisse tomber. Tu ne vas pas me faire un plat parce que ce bonhomme m'a transportée. Enfin deviendrais-tu jaloux ?
- Il y a de quoi. Depuis quand les caissières ramenées à la maison par un client aimable embrassent-elles le bravr homme avant de descendre de voiture. C'est la règle du magasin?
- Oh ! Non. Quelle histoire pour un petit bisou. C'était pour le remercier, sans arrière pensée.
- Un petit bisou ? Un peu plus long que ceux que je reçois et si j'ai bien vu, plutôt sur la bouche que sur la joue.
- Tu exagères ! Tu as décidé de te moquer de moi. Ce type je ne le reverrai plus pendant des semaines.
- Bizarre, ne lui as-tu pas dit "A demain, Claude" ?
- Je savais bien que j'aurais dû refuser son offre et prendre le bus. J'ai dit "à demain" comme j'aurais pu dire "à bientôt". Tu verras demain que je ne monterai pas dans sa voiture. Cela te va comme ça ? Tu finis de bouder et de me faire la gueule pour rien ?
- Non. Tu te fais ramener en voiture, tu fais du lèche-museau à un presque inconnu et tu lui donnes rendez-vous à demain, devant moi et tu l'appelles par son prénom. Plus étonnant encore, il t'a fallu plus de temps en voiture que si tu avais attendu le bus et avais parcouru les derniers pas de la station à ici.
- Ca m'étonnerait!
- Pourquoi ton bus est-il passé il y a au moins dix minutes ? A la fin explique-moi ce que vous avez fait dans cette voiture. C'est un lieu pratique pour un rendez-vous amoureux.
- Ton interrogatoire est lourd. Tu m'insultes avec tes soupçons.
- Voilà ! Je m'inquiète d'un ensemble de faits étranges et tu me trouves lourd. Je serais lourd si j'exigeais sur le champ un examen vaginal.
Se faire houspiller pour si peu, après la partie de cul de laprès-midi beaucoup plus grave doit lui sembler dérisoire. Elle a lair gêné, ne propose pas de se faire examiner au risque de montrer qu'elle mouille encore après certains attouchements dont Claude n'a pas dû se priver dans l'auto. Elle se lance dans une explication préparée de toute évidence à mon intention
- Bon écoute moi. Je ne voulais pas t'alerter inutilement avant d'avoir du solide à te déclarer. Tu m'obliges à parler alors que ce que je peux te révéler n'est encore qu'un projet à l'étude. Ce Claude est lagent dune association daide aux personnes dépendantes. Il est chargé de recruter du personnel. Il m'a rendu visite et ma retardé cet après-midi en me présentant ce type demploi. Alors il ma emmenée au travail et vient de me ramener gentiment.
- Mautoriserais-tu à organiser du transport de personnel féminin? Etrange. Et pourquoi « à demain », ce sera une habitude? Tu as trouvé mieux que moi ? Dis-le et adieu!
- Le gros jaloux. Mais cest pas vrai! Que vas-tu imaginer? Viens embrasse-moi, tu es mon unique amour. Tu le sais depuis longtemps. Te décideras-tu un jour à me demander ma main, si le mariage peut te rassurer.
- Cocu marié ou avant mariage c'est tout pareil. Le mariage nest pas dactualité. Jattends dêtre dans mon appartement ou dans ma maison pour officialiser ma vie en couple. Dailleurs, nous en sommes daccord.
- Cocu ? Mais qu'est-ce que tu racontes. Au contraire, réjouis-toi, je vais taider à réaliser plus vite ton rêve. Ce type me propose de faire des ménages, le soir chez des personnes âgées. Comme je suis disponible le jeudi, le vendredi et le samedi après-midi, jai pensé que je pourrais faire chaque semaine une vingtaine dheures.
Elle ment, s'enferre dans ses mensonges.
- Vingt heures ? Tu crois, cest beaucoup. Est-ce que ça te plairait?
- Oui, cest un travail passionnant, de faire le souper, de tenir le ménage, de faire la lecture ou déteindre la télévision, de mettre au lit des personnes seules et fatiguées par lâge. Cest comme une vocation, je me sens la fibre. Les candidates sont si rares .
- Cest du bénévolat?
- Non, cest un vrai travail rémunéré. Le seul inconvénient cest lheure souvent tardive.
- Je pensais que les petites vieilles se couchaient tôt, comme les poules.
- Je pourrai en voir plus en répartissant dans le temps, selon les habitudes de chacune.
- Je sens mal cette proposition. Tu naurais pas plutôt envie daller voir des garçons? Peut-être es-tu lassée de moi. Ce type avec sa grosse voiture te plairait? Tu as des démangeaisons quand tu le vois?, Tes vieilles dames auraient-elle des moustaches ?
- Ce nest pas gentil. Je suis prête à me fatiguer pour te venir en aide, parce que jai hâte de tépouser et tu maccuses de vouloir te tromper. Réfléchis, je pourrais gagner presque deux cents euros par semaine, fois 48 semaines, cela ne ferait pas loin de 10000 euros par an, surtout si je prends du service certains dimanches ou jours de fête.
Ces arguments venus d'une autre, ou si je n'avais pas entendu les échanges entre Patricia et Claude, me raviraient. Je contre:
- Au détriment de ta santé. Tous les corps ne sont pas légers à porter, tu vas te casser le dos, te fragiliser les reins, peut-être attr toutes sortes de maladies au contact de personnes victimes de fléaux. Tu vas connaître des situations nouvelles difficiles à supporter, tu devras te plier aux exigences les plus inattendues, car la nature humaine est inventive, vivre des émotions trop fortes. Cest un investissement physique, sentimental très lourd. Tu risques de te lasser ou de succomber sous le poids des charges.
Que ce soit le travail avec d'improbables dames ou des parties de cul avec de vigoureux étalons, mon petit discours s'applique.
- Je suis jeune, pleine de fougue. Jai de la vigueur à revendre, le changement ne me fait pas peur et je saurai me soumettre aux éventuelles exigences des demandeurs. Je crois être assez souple de caractère et capable de faire nimporte quoi pour satisfaire les petites fantaisies de gens malheureux.
Je ne peux pas mempêcher de penser aux demandes perverses des internautes, aux fantaisies sexuelles de ses partenaires devant les caméras, aux ruses et exigences de cet ami Claude dapparence froide, mais à lappétit sexuel débordant. Notre couple ny survivra pas. Joffre une dernière résistance.
- Quelle force garderas-tu pour moi ? Je ne te verrai plus le soir, je me coucherai seul. Cest une perspective qui ne menchante pas. Cest lannonce de la fin de notre vie de couple.
- Tu es vraiment pessimiste. Tu ne manqueras jamais damour et daffection, je te le promets. Nous continuerons au même rythme, peut-être plus en début de semaine, un peu moins en fin. Laisse-moi au moins tenter laventure, si elle ne me convient pas, jarrêterai.
- Je ne suis pas pour, mais je ne compte pas mopposer à ce fort désir de prendre en charge toute la misère des hommes. Tu décides pour toi, comme ne grande. Quant à notre maison, au prix monstrueux que tu veux payer, je préfère y renoncer. Jamais je n'entreprendrai la construction ou l'achat d'une maison au détriment de ta santé, ni au sacrifice de notre vie de couple. Puisque tu y tiens tellement, fais à ta tête, c'est ton choix, uniquement ton choix. Ne viens pas te plaindre de la difficulté, des horaires, des courbatures et de la fatigue. Envisage aussi de vivre en liberté absolue sans moi puisque mon avis compte si peu.
- Tu es en colère parce que Claude m'a ramenée. Tu bâtis un roman avec un "à demain"
- Hélas, je te vois t'éloigner de moi. Ca me fait mal.Je t'aimais tant.
- Tu es un amour. Viens toucher ta récompense. Je passe à la douche et je te rejoins au lit. Ca va être ta fête.
Comme par hasard elle a besoin d'une deuxième douche. Elle en avait pris une avec Claude avant d'aller au travail. Au retour dans la chambre elle montre un peu d'inquiétude.
- As-tu réfléchi pendant que e me lavais. Ne te réjouis-tu toujours pas de mon projet ?
- Je ne me réjouis pas dune mauvaise nouvelle. Le sacrifice que tu timposes, est hors de proportion avec le but initial. Lidée des petits plaisirs escomptés et des grandes souffrances à venir mafflige, me coupe envie et appétit. Non, il est inutile de me faire du charme. Il faut que je me réhabitue au célibat, ça me déprime. Je ne tiendrai pas le coup. Il me faut une femme présente. Or toi tu projettes de délaisser la maison.
- Rabat-joie. Tant pis pour toi. Bonne nuit quand même. La nuit porte conseil, demain tu auras peut-être changé davis.
- Et si tu décidais de continuer à être la femme dont jai besoin au lieu de te transformer en courant dair ? Demain je n'aurai pas plus envie de te perdre que ce soir.
Il faut croire que la journée dhier a été éprouvante. Entre la gymnastique amoureuse avec Claude et mes protestations et menaces de rupture Patricia a été malmenée. Elle a trouvé le sommeil assez tard. Contrairement à lhabitude, mon lever na pas provoqué son réveil . Elle dort à poings fermés. Exceptionnellement je prends seul mon petit déjeuner. Cest le premier effet tangible du passage de Claude, la première fissure visible après la consommation de l'adultère
Jen prévois dautres. Qui vivra verra. Je suis fataliste. Pat a mis le pied sur une planche savonnée. A vingt cinq ans on est responsable de ses actes et de ses décisions. Elle a constaté mon désaccord, ma contrariété. Je lui ai parlé du prix « monstrueux » à payer. Elle na pas relevé le mot. Ce matin je fais un faux départ, j'éloigne ma voiture et regagne mon bureau sur la pointe des pieds.
" Ademain", je le sais, c'est le rendez-vous pour la signature des contrats d'embauche. Je veux savoir si Patricia se contentera d'apparaître en petite tenue ou même nue ou si elle veut s'exposer en train de forniquer. La nuit lui aurait porté conseil et elle limiterait son activité à des prestations avouables?
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